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"Il (Yossef) reconduisit ses frères lorsqu’ils partirent et il leur dit : Ne vous disputez pas (al tirguézou - אַל תִּרְגְּזוּ) durant le voyage" (Vayigach 45,24)

=> De quelle "dispute" s’agissait-il?

-> Rachi rapporte 3 explications (dont les deux premières tirées de la guémara Taanit 10b) :
1°/ ["aiguiser" les paroles] : "Ne vous engagez pas dans des discussions Halakhiques de peur que vous n’excitiez contre vous le chemin" [de peur que dans votre distraction (ou excitation – voir Maharcha), vous ne vous égariez en chemin - Rachi sur la guémara].

2°/ ["se précipiter"] : "Ne faites pas de grands pas, et arrivez en ville avant le soleil".

3°/ ["se quereller"] (au nom du midrach) : "Comme ils étaient remplis de honte, Yossef craignait qu’ils ne se querellent en route pour l’avoir vendu : tu nous disais du mal de lui et tu nous l’as fait prendre en haine".

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=> A propos de la seconde explication, une question se pose : Pourquoi Yaakov n’avait-il pas fait cette recommandation à ses fils?

-> Nos Sages disent : "Faire de grands pas cause une baisse de la vue, ce qui se rectifie pas le vin du Kiddouch" (guémara Bérakhot 43b).
Lorsqu’ils descendirent en Egypte, Yaakov ne leur recommanda pas d’éviter de marcher à grand pas car ils savaient eux-mêmes que leur vue baisserait et qu’ils ne pouvaient pas boire le vin du Kiddouch pour y remédier étant donné qu’ils ne buvaient pas de vin depuis la vente de Yossef (voir Rachi sur Mikets 43,34).
A présent qu’ils avaient retrouvé Yossef et qu’il leur était permis de boire du vin, Yossef dut les mettre en garde de ne pas faire de grands pas (pour éviter une trop grande précipitation) car ils pouvaient compter sur le vin de Kiddouch pour remédier à l’affaiblissement de leur vue. [Komets haMin’ha]

-> De son côté, le 'Hanoukat haTorah l'explication suivante :
Nos Sages enseignent que Yaackv fut puni d'être privé de son fils Yossef pendant 22 ans, pour s'être séparé de son père Its'hak pendant 22 ans quand il est parti chez Lavan. Seulement, avant d'aller chez Lavan, il resta 14 ans étudier la Torah dans la Yechiva de Ever. Mais il ne fut pas puni pour ces 14 ans où il se sépara de son père. On apprend de là que l'étude de la Torah prime sur le respect des parents.
Mais tant que Yaakov n'avait pas encore retrouvé Yossef, il ne savait pas s'il allait être puni pour les 14 ans d'étude, ou pas. Ainsi, quand il envoya ses enfants en Egypte, il n'avait pas besoin de les prévenir de ne pas étudier en chemin, car comme ils étaient chargés d'une mission par leur père, ils n'allaient naturellement pas retarder cette mitsva par de l'étude. Pourquoi?

Parce qu'ils ils ne savaient pas encore si l'étude primait sur le respect des parents. Du fait de ce doute, ils devraient adopter la rigueur et ne pas étudier au détriment du respect de leur père. Mais quand Yossef se révéla à eux et les renvoya chez leur père, il s'avéra alors que la séparation dura 22 ans et que Yaakov ne fut pas puni pour les 14 ans d'étude.
Ainsi, il ressortait à présent que l'étude prime sur le respect des parents. Aussi, ses frères risquaient maintenant de se mettre à étudier en route, au détriment du respect de leur père de lui transmettre le message de Yossef. Ainsi, Yossef trouva bon à présent de les avertir de ne pas étudier sur la route.

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-> Le midrach [Béréchit Rabba 94,2] cite une autre explication :
"Ne vous arrêtez pas d’étudier la Torah" = Yossef attira leur attention et leur dit : "Bien que vous soyez pressés de rentrer chez vous pour accomplir la mitsva d’honorer votre père, ne cessez pas d’étudier la Torah, car : ‘L’étude de la Torah est plus grande que l’honneur rendu aux parents’ (voir guémara Méguila 16b). [Méor Haomer].

Il n’y a pas de contradiction entre l’enseignement de la guémara (la première explication rapportée par Rachi) et celui du midrach. La guémara affirme que Yossef ne leur a interdit d’étudier la Halakha que de manière approfondie (le pilpoul), ne leur empêchant pas d’étudier les connaissances générales de la Loi (léGuirsa), comme semble l’interpréter le midrach.
Ainsi, la guémara n’a pas trouvé nécessaire d’enseigner qu’il faille étudier la Torah en chemin, du fait qu’il soit clairement indiqué dans le verset : "Et tu en parleras (les paroles de Torah), dans ta maison, et quand tu marcheras en chemin" (Vaét'hanan 6,7). Elle est venue plutôt nous apprendre que Yossef exigea de ses frères qu’ils ne s’approfondissent pas dans l’étude de la Halakha.
Le midrach, quant à lui, souligne la nécessité d’étudier de la Torah en chemin afin de "protéger et sauver" (voir guémara Sotah 21a) des dangers des routes.

-> Tossefot (sur notre guémara Taanit 10b) suggère une autre lecture du midrach, à savoir : "Ne cessez pas de discuter en matière d’Halakha (bidvar halakha)".
Cette autre interprétation de l’expression "al tirGuézou" (אַל תִּרְגְּזוּ) suggère que Yossef les exhorta à s’affairer dans l’étude approfondie de la Halakha, contredisant du coup les propos de la guémara ainsi que la première lecture du midrache.
Pour saisir le commentaire du Tossefot, on peut expliquer que la faculté qu’a l’étude de la Torah de protéger en chemin ou dans toute autre situation dangereuse, réside dans la capacité qu’a l’homme à s’attacher et s’unir à elle (le monde n’ayant pas d’emprise sur la Torah dont l’existence est antérieure à la Création).
Or il est clair que l’étude approfondie comme celle de la Halakha favorise une union parfaite entre l’homme et la Torah, lui assurant ainsi une authentique protection contre les dangers de ce monde.
Ainsi, Yossef exhorta-t-il ses frères à ne pas cessez l’étude approfondie de la Halakha, afin de bénéficier d’une protection totale sur le chemin les conduisant vers leur père en Erets Israël.
[rabbi de Loubavitch - Likouté Si'hot]

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