Pâtisserie spirituelle depuis 5771 - b'h
 

Questions/Réponses – Paracha Vayigach

+ Questions/Réponses - Paracha Vayigach :

1°/ "Il adviendra, lorsqu'il verra que le jeune homme n'est pas là [Binyamin], et tes serviteurs auront fait descendre la vieillesse de ton serviteur notre père avec affliction dans la tombe" (Vayigach 44,31)

=> Pourquoi est-ce que Yéhouda évoque à Yossef, uniquement la douleur de leur père Yaakov, et nullement celle des 10 enfants qu'avait Binyamin à cette époque?

Rabbi Mendel de Kotzk enseigne qu'on peut dériver de là que l'amour d'un père pour chacun de ses 12 enfants est plus grand, que le cumul de l'amour de chacun des 10 enfants pour leur père.

Le rav Dessler écrit que les sentiments d'amour envers une autre personne, proviennent de tout ce que l'on a pu faire bénévolement pour elle.
Comme tout parent peut l'affirmer, élever un enfant représente une opportunité de pouvoir constamment donner de soi-même. C'est pourquoi, les sentiments d'amour générés n'ont pas d'équivalents, comme Yéhouda l'explique à Yossef.

<----------------------------->

2°/ Comment comprendre une apparente contradiction entre les 2 versets suivants :

-> "[Pharaon dit à Yossef : ] Si tu sais qu'il y a parmi eux des hommes vaillants, nomme-les intendants surs les troupeaux qui m'appartiennent." (v.47,6)

-> "[Yossef dit à ses frères : ] Vous demeuriez dans la province de Gochen, car tout berger de moutons est une abomination pour les Égyptiens" (v.46,34)
Rachi commente Gochèn : c’est une région de pâturage. Lorsque vous lui direz que vous n’êtes pas experts à un autre travail, il vous éloignera de lui et vous y fera demeurer.
Le mouton est pour eux une divinité.

-> Le Ibn Ezra écrit que les troupeaux de Pharaon n'étaient pas constitués de moutons, mais de chevaux et d'ânes.

-> Le Maskil léDavid affirme que les égyptiens possédaient certainement des moutons, et comme preuve, on peut voir qu'ils donnaient à Yossef des moutons en échange de nourriture (v.47,17), et lors de la 5e plaie (la peste) Moché avertit Pharaon que les moutons des égyptiens seraient touchés (Chémot 9,3).

Ainsi, il est d'avis que les égyptiens avaient de la haine uniquement envers ceux qui élevaient des moutons dans le but de les égorger et de les manger, mais ils respectaient ceux qui prenaient soin d'eux pour les engraisser.

En effet, tous les égyptiens avaient pour divinité les moutons, et ils détestaient les bergers.
Cependant, Pharaon se voyant lui-même comme un dieu, il n'avait pas besoin d’idolâtrer les moutons, et il avait donc son propre troupeau.

-> Le Mochav Zékénim (46,34) explique que les égyptiens avaient interdit la présence de moutons parmi eux, mais loin d'eux ils étaient permis, et c'est pour cela que Yossef conseilla à ses frères qu'en se déclarant berger, ils auront l'assurance de vivre séparément à Goshén.

=> On peut comprendre leur haine envers ceux qui mangent leur divinité : les moutons, mais pourquoi également envers les bergers qui prennent soin d'eux?

-> Selon le Sifté 'Hakhamim, c'est parce que les bergers sont constamment autour des moutons, devenant ainsi témoins de tous leurs actes, et donc du fait qu'ils font les mêmes activités que les autres créatures.
Les bergers réalisent donc clairement qu'ils ne sont en rien des divinités et qu'ils ne possèdent aucun pouvoir particulier.

=> En raison de leur conscience de la véritable nature des dieux qu'ils idolâtraient, les égyptiens avaient de la haine pour les bergers.
[ce qui est parfait pour maintenir une distance entre les juifs et les égyptiens]

-> Le Ibn Ezra écrit qu'en étant fréquemment présent avec les moutons, les bergers buvaient de leur lait.
Les égyptiens voyaient cela comme une attitude insultante et dégradante envers leurs divinités, et c'est pour cela qu'ils les détestaient.

<----------------------------->

3°/ Quelles bénédictions Yaakov a-t-il récité lorsqu'il a retrouvé Yossef en Egypte?

-> La guémara (Béra'hot 58b) enseigne qu'une personne qui rencontre un ami, après ne pas l'avoir vu pendant une période d'au moins 12 mois, doit réciter la bénédiction : barou'h mé'hayé amétim (Beni est celui qui fait revivre les morts).
Le Chou'han Arou'h (Ora'h 'Haïm 225,1) ajoute que cette bénédiction n'est à dire que si cette personne nous est extrêmement précieuse à nos yeux, et que le fait de la retrouver nous procure de la joie.

Le Na'halat Avraham écrit que Yaakov et Yossef ont récité cette bénédiction en se revoyant pour la 1ere fois depuis 22 ans.

-> Le Shibolé haLékét ajoute que lorsque Yaakov est arrivé en Egypte, et que tous ses enfants ont été de nouveau réunis, il a également récité la bénédiction : barou'h ata Hachem mékabets nid'hé amo Israël (Béni Tu es Hachem qui réuni les exilés du peuple d'Israël).

<----------------------------->

4°/ "Yossef leur dit : Ne vous agitez pas en chemin" (Vayigach 45,24).

Une des explications de Rachi est : Ne marchez pas à grandes enjambées.
En effet, la guémara (Taanit 10b) enseigne qu'en faisant ainsi, cela entraîne à une personne de perdre 1/500e de sa vue.

=> Pourquoi une personne ne devient-elle pas totalement aveugle après avoir fait 500 grandes enjambées?

-> Les Tossefot (Taanit 10b) écrivent que la 1ere enjambée retire un 1/500e de la vision d 'une personne, et la 2e enjambée lui en retire moins : 1/500e de ce qu'il reste.
Ainsi, puisque chaque nouvelle enjambée retire de moins en moins, même un nombre important ne rend pas totalement aveugle.

=> Pourquoi est-ce que c'est particulièrement la 1ere enjambée qui retire le plus de vision?

-> Les Tossefot répondent que : "tous les débuts sont difficiles", signifiant qu'il est plus dur de commencer.

Par ailleurs, ils suggèrent que seule la 1ere enjambée entraîne véritablement des dommages, car ensuite une personne est de plus en plus habituée à faire des enjambées.

<----->

-> b'h, un beau dvar Torah indirectement lié : Le Shabbath rend la vue : https://todahm.com/2015/02/16/le-shabbath-rend-la-vue

<--->

-> b'h, d'autres explications sur ce verset (v.45,24) : http://todahm.com/2020/11/02/38180

<----------------------------->

5°/ "Fils de Acher : Yimna, Yichva, Yichvi, Béria et leur sœur Séra'h" (Vayigach 46,17)

-> Le Baal haTourim (Dévarim 33,24 - citant le Pirké déRabbi Eliézer 38) écrit que lorsque les frères ont vendu Yossef en tant qu'esclave, ils ont émis une interdiction entraînant qu'aucune personne ne pouvait rapporter ce qui s'y été déroulé.
[certains commentateurs disent que Hachem et Its'hak ont également été associés à ce serment de ne rien révéler]

Le Targoum Yonathan ben Ouziel (Béréchit 46,17) écrit que la vérité à propos du destin de Yossef a été révélée de façon prophétique à Séra'h fille de Acher, qui a alors rapporté à Yaakov que Yossef était encore en vie en Egypte.
Lorsque les frères de Yossef ont entendu que Séra'h connaissait leur secret, ils ont supposé qu'elle avait dû l'apprendre de son père Acher, et ils ont décidé de l'excommunier pour avoir violer l'interdiction.
Par la suite, Moché rabbénou a été au courant de la véritable source d'information de Séra'h, et à la fin de sa vie, il a pu modifier son excommunication.

La guémara (Moéd Katan 15b) enseigne qu'un excommunié ne peut pas avoir de relation conjugale. C'est pourquoi Moché a béni Acher d'avoir des enfants (barou'h mibanim Acher).

De plus, puisque ses frères avaient pris de la distance avec lui, Moché l'a béni : "qu'il soit agréable à ses frères".
[idem sur le fait de porter des chaussures, car selon le Yoré Déa (334,2), un excommunié n'a pas le droit d'en porter]

-> Selon le Pirké déRabbi Eliézer, c'est Séra'h qui a été choisie pour annoncer la bonne nouvelle que Yossef était vivant. Elle le fit en jouant de la harpe et en chantant délicatement cette annonce à Yaakov.
Ce dernier a alors béni sa petite-fille de lui avoir apporté la consolation, lui promettant qu'elle mériterait pour cela la longévité ; elle a effectivement vécu de longs siècles et finalement, elle est entrée vivante au gan Eden.

Par exemple, Rabbénou Ephraïm, rapporte qu'on moment de la sortie d'Egypte, Moché va s’adresser à Séra’h, fille d’Acher, seule descendante directe des tribus restant encore en vie.
Elle lui apprendra que les égyptiens ont scellé les restes de Yossef au fond du Nil, espérant que sa présence apportera la bénédiction.
[Grâce à cela, Moché pourra récupérer les ossements!]

[Séra'h jouira d'une vie extrêmement longue, puisqu'on cite son nom dans les chroniques de l'histoire (Divré haYamim), plus de 690 ans plus tard, au temps du roi David. ]

-> Le Pérouch Yonathan (v.46,17) dit que Naftali est arrivé le 1er auprès de Yaakov et lui a appris que Yossef était vivant. Il ne l'a pas cru et c'est seulement après la douce mélodie de Séra'h que Yaakov a permis à la vérité d'entrer dans son cœur et a admis que Yossef était vivant.

-> Si Hachem avait accordé l'inspiration Divin à Yaakov pendant ces 22 années, ses prières auraient été exaucées et la situation de Yossef lui aurait été révélée.
D'après le Binyan Yéhochoua (sur Avot déRabbi Nathan 30,4), c'est uniquement après que l'inspiration Divine lui ait été rendue que Yaakov a [pleinement] cru que Yossef était en vie, la présence Divine elle-même l'en ayant informé.
[il se peut que Séra'h a réveillé la joie en Yaakov, permettant alors à la Présence Divine de revenir sur lui, et d'ainsi lui assurer la certitude que son fils Yossef était vivant.]

<----------------------------->

-> Le saviez-vous?

Binyamin est arrivé à un niveau attribué à personne d'autre dans l'histoire juive.
En effet, c'est le seul à faire partie des 2 listes suivantes :
- Selon la guémara (Shabbath 55a ; Baba Batra 17a), il y a uniquement 4 personnes dans l’histoire du monde qui sont mortes sans n’avoir jamais fait de faute.
Il s’agit de : Binyamin (le fils de Yaakov), Amran (le père de Moché), Yshaï (le père du roi David) et Kilav (le fils du roi David). Selon certains, on peut y ajouter : Lévy et Yéhochoua.
Rachi explique : "Cela signifie qu'il n'avait pas mérité de mourir (puisque sans faute personnelle), mais le décret avait été prononcé pour toute la descendance d'Adam à la suite du conseil du serpent".
- Nos Sages (guémara Baba Batra 17a) le comptent parmi les 7 personnes qui n'ont pas été la proie des vers après la mort (il y a : Avraham, Its'hak, Yaakov, Moché, Aharon et Myriam. Certains ajoutent le roi David).

"Je suis Yossef ; mon père vit-il encore? (aod avi 'haï - הַעוֹד אָבִי חָי)
Ses frères ne purent lui répondre, car ils avaient été frappés de stupeur devant lui.
Yossef dit : ... Je suis Yossef votre frère" (Vayigach 45,3-4)

-> Pourquoi est-ce que Yossef a commencé par dire : "Je suis Yossef", et ensuite : "Je suis Yossef votre frère"?

Au départ Yossef ne savait pas si ses frères regrettaient de l’avoir vendu, et il ne pouvait donc pas les considérer véritablement comme ses frères s’ils ont toujours de mauvais projets à son égard.
Mais quand il vit qu’en entendant ses propos ils furent bouleversés et eurent honte, il en déduisit qu’ils regrettaient leur acte et en avaient profondément honte.

Nos Sages (guémara Béra'hot 12b) enseignent que toute personne qui fait une faute et qui en a ensuite honte, sa faute lui est pardonnée.

S'il en est ainsi, ses frères n'ont plus la faute de l'avoir vendu, et de fait cela explique pourquoi Yossef les appelle alors : "Je suis Yossef votre frère".
A présent que la haine est terminée et qu’ils regrettent de l’avoir vendu, la fraternité peut être rétablie.

[Ktav Sofer]

<--------------------------------->

-> Yossef disait à ses frères : "Je suis Yossef", signifiant : Je suis toujours le tsadik connu comme Yossef. Non seulement je n'ai pas perdu mon nom Yossef, mais "encore" (aod - הַעוֹד) : la lettre ה était עוד, c'est-à-dire ajoutée à mon nom [Je suis maintenant connu comme : יהוסף].

Ainsi : "mon père est encore en vie", car si Yossef avait fauté, il aurait entraîné un défaut spirituel également Yaakov.
En effet, le Zohar déclare : Yaakov représente le corps, et Yossef représente la brit, et ils sont les 2 considérés comme un.
Puisque Yossef n'a pas fauté : "mon père est encore en vie" = Yaakov est encore en vie et sans défaut [du fait de son fils].

[Ben Ich 'Haï]

<------>

-> Rabbi Schechter enseigne que le mot : "père" (אָבִי) a une guématria de 13, comme le mot : "un" (אחד).

Yossef exprime à ses frères que ce qu'ils ont pu faire est derrière eux.
Il leur témoigne de l'amour, et le fait qu'il ressent leur chagrin.
Ainsi, le verset peut se lire : "Est-ce que notre unité (a'hdout) vit-elle encore?"

-> Le Ben Ich 'Haï fait remarquer que le mot : "un" (אחד) d'une valeur de 13, fait allusion au fait que les 2 enfants de Yossef : Ménaché et Efraïm, vont chacun être à la tête d'une tribu, comme les autres frères de Yossef.
=> Ainsi, les 13 tribus vont former une seule unité (אחד) : le peuple juif.
["Est-ce que notre unité (de 13 tribus) vit-elle encore?"]

"Vous direz : "tes serviteurs sont des bergers …" Car tout berger est une répugnance pour l’Egypte" (Vayigach 46,34)

En général, les gens aiment bien plaire devant les autorités et avoir une certaine importance devant le monde extérieur. Pour cela, ils s’efforcent de dire des choses qui trouveront grâce à leurs yeux.

Cependant, Yossef n’a pas agi ainsi, puisque c'est parce qu’il savait que l’Egypte répugne les bergers, qu’il a dit que ses frères sont des bergers.
Il a justement dit ce qui n’allait pas favoriser leur intégration, et ce pour ne pas que se crée de proximité entre les égyptiens et sa famille.

['Hidouché Harim]

<--------->

-> b'h, pour approfondir ce sujet : https://todahm.com/2018/02/20/6023

"Et Yossef ne put se contenir en présence de tous ceux qui se tenaient devant lui ; il s'écria : "Faites sortir tout le monde de devant moi!" Et personne ne resta auprès de lui lorsque Yossef se fit connaître à ses frères" (Vayigach 45,1)

-> Selon Rachi : Il ne pouvait accepter que les Égyptiens se tiennent là et qu’ils assistent à l’humiliation de ses frères au moment où il s’en ferait reconnaître.

-> Le midrach rapporte qu'une fois que Yossef a congédié tout le monde, ne laissant avec lui que ses frères, ces derniers ont décidé de le tuer, n'ayant pas réalisé que c'était leur frère.
L'ange Gavriel est alors intervenu et les a tous éparpillés aux 4 coins du palais, afin qu'ils ne puissent faire aucun mal à Yossef.

-> Le Yichma'h Moché poursuit en expliquant que nous pouvons établir que l'ange Gavriel est toujours resté aux côtés de Yossef.

En effet, par exemple :
-> 1°/ Lorsque Pharaon l'a nommé vice-roi, ses serviteurs ont alors argumenté qu'il n'était pas convenable qu'un serviteur reçoive une position si élevée, et qu'il ne parlait pas plusieurs langues.

=> L'ange Gavriel est immédiatement apparu, et il a enseigné à Yossef 70 langues.

[La guémara (Sotah 36b) relate cela, en disant qu'il y avait une loi en Egypte imposant de savoir parler 70 langues pour prétendre à la royauté.
Suite à l'intervention de l'ange Gavriel, Yossef maîtrisait une langue de plus que Pharaon : le lachon hakodech.
Il a essayé de la lui apprendre, mais Pharaon ne retenait rien du tout, entraînant que ce dernier l'a fait juré de ne pas révéler publiquement sa faiblesse.

De nombreuses années plus tard, lorsque Yossef a voulu faire sortir le cercueil de Yaakov pour l'enterrer en Israël, il avait peur que Pharaon refuse cela, car la venue de Yaakov avait amené beaucoup de bénédictions au pays (ex: fin de la famine, Nil en était béni).
C'est pourquoi, il a dit à Pharaon : "Mon père m'a fait juré de le sortir d'Egypte afin de l'enterrer en terre de Canaan".
Pharaon a répondu : "Demande aux Sages d'annuler ton vœux!"
Yossef lui a alors dit : "Dans ce cas, je vais demander aux Sages d'annuler le vœux que je t'ai fait : à savoir de ne pas révéler que tu ne parles par le lachon haKodech."

Pharaon n'avait alors d'autre choix que d'accepter la demande de Yossef : aller enterrer son père en Israël.]

<----->

-> 2°/ Lorsque Yaakov a demandé à Yossef d'aller retrouver ses frères pour prendre de leurs nouvelles, il est écrit qu'en arrivant à Chékhem, lieu où devait normalement se trouver ses frères, il y trouva à la place : un homme (Vayéchev 37,15).
Le Targoum Yonathan (ainsi que Rachi) explique que cet homme était l'ange Gavriel, qui avait pris un aspect humain.
[Rachi tire cela de : "et “l’homme” Gavriel." (véa'Ich Gavriel - Daniel 9,21)]

Selon le Ramban, D. a délégué cet ange pour qu'il conduise Yossef auprès de ses frères, afin que la prophétie faite à Avraham s'accomplisse.

=> Le Yichma'h Moché conclut que l'ange Gavriel était toujours au côté de Yossef, le protégeant de tout mal.

Lorsque Yossef a fait partir tout le monde, même l'ange Gavriel n'est plus resté à ses côtés comme d'habitude, puisqu'il était occupé à éparpiller les frères de Yossef dans toutes les directions pour pas qu'ils le tuent.

Littéralement le verset est : "vélo amad ich imo", et il peut se comprendre : exceptionnellement, l'ange Gavriel (ha'Ich) ne se tenait pas à côté de lui à ce moment, puisque occuper à disperser les frères.

<----------------------------------------->

-> Selon le midrach (Zouta, Eikha 1,23), dans le futur Hachem viendra apaiser le peuple juif, qui lui demandera alors : "Avec quoi seront-nous consolés? Tu n'as pas agi avec nous comme Yossef l'a fait.
En effet, Yossef ne s'est pas vengé de ses frères, et il a même eu de la pitié pour eux, bien qu'ils l'aient traité d'une mauvaise façon."

[nous demandons de même à Hachem de nous traiter avec beaucoup de pitié, même si nous avons beaucoup fauté envers Lui!]

<----------------------------------------->

+ Cette nuit-là, l'Ange Gavriel vint apprendre à Yossef les 70 langues.
Yossef ne réussit pas à tout apprendre (en une nuit) ; l'Ange ajouta alors au nom de Yossef une des lettres (le ה) du Nom Divin (et il connut les 70 langues) ...
Le lendemain, Yossef répondit dans toutes les (70) langues que Pharaon lui parlait.
Yossef parla dans la langue sainte (l'hébreu) à Pharaon ; ce dernier ne comprenait pas ce qu'il lui disait et demanda : "Quelle langue parles-tu?"
Yossef répondit : "l'hébreu".
Pharaon demanda : "Enseigne-moi cette langue".
Yossef essaya en vain. Pharaon fit jurer à Yossef de ne révéler à personne son ignorance de l'hébreu.
[guémara Sota 36b]

<--->

=> L'Ange Gavriel changea le nom de יוסף en יהוסף et Yossef put ainsi retenir les 70 langues apprises. Pourquoi cela?

-> Dans la guémara (Sota 36b), rabbi Chimon dit que Yossef a mérité l'adjonction de la lettre ה du Nom Divin à son nom, pour avoir sanctifié Hachem en secret en refusant les séductions de l'épouse de son maître Potifar.
Cette adjonction sera effectuée plus tard par l'Ange Gavriel au moment où Yossef devra connaître les 70 langues pour être nommé roi, selon l'usage en Egypte.
Si Yossef avait fauté avec l'épouse de Potifar, il n'aurait jamais pu assimiler les 70 langues.
Mais depuis que l'Ange Gavriel a ajouté à son nom la lettre ה, en témoignage pour avoir sanctifié Hachem par sa retenue, le cœur de Yossef s'est ouvert, et ainsi il a pu apprendre les 70 langues afin d'être nommé roi, en récompense pour avoir maîtrisé son yétser ara.
[Iyoun Yaakov]

-> Chacune des 70 nations est représentée dans le Ciel par un prince (sar) qui dirige sa nation et la langue parlée par cette nation.
C'est pourquoi, chacun de ces princes, jaloux de Yossef, est intervenu cette nuit-là pour faire oublier à Yossef la langue apprise, afin qu'il ne puisse pas être nommé vice-roi par Pharaon.
Alors, l'Ange Gavriel intervint en ajoutant au début du nom de Yossef la lettre ה qui avait le pouvoir d'empêcher les princes de faire oublier chacun leur langue apprise.
[Ben Ich 'Haï]

<---->

=> Qu'en est-il de la langue sainte (hébreu)?

-> L'hébreu ne fait pas partie des 70 langues des nations du monde ; d'ailleurs, Israël n'est pas gouverné par un prince (sar) dans le Ciel, comme les 70 autres nations.
Nous pouvons également déduire cela de par le fait qu'à la fête de Souccot, le peuple d'Israël offre 70 taureaux au total en faveur des 70 nations, et le sacrifice spécifique à Israël est offert en plus.
[Tossefot Santz]

-> Si Pharaon tenait à apprendre la langue sainte, ce n'est pas pour apprendre une 70e langue, sans la connaissance de laquelle il ne serait pas digne de régner, car la langue sainte n'est pas inclus dans les 70 langues.
La seule raison qui a poussé Pharaon à apprendre l'hébreu est la honte, le déshonneur, qu'il ressentait de voir que Yossef, le vice-roi, connaissait les 70 langues et l'hébreu, donc une langue de plus que le roi lui-même qui ne connaissait pas l'hébreu.
[Maharcha]

"D. parla à Israël dans les visions de la nuit et Il dit : Yaakov, Yaakov" (Vayigach 46,2)

-> Rachi commente : D. en l'appelant 2 fois par son nom, lui témoigne Son amour.

-> Bien que Hachem ne soit jamais apparu de nuit à Avraham ni à Its'hak, Il apparaît, dans cette paracha et dans celle de Vayétsé, à Yaakov dans une vision nocturne parce que celui-ci est sur le point de quitter la terre d'Israël pour un très long exil.

Ainsi, D. se révèle pour lui faire comprendre que même au cœur de la nuit, dans les ténèbres de l'exil, la présence divine ne l'abandonnera pas.

C'est également pour cette raison que Yaakov a institué la prière du soir, Arvit, montrant ainsi à ses enfants que dans l'exil ou la nuit, Celui qui s'est révélé à lui la nuit, les protégera dans l'exil et les ténèbres.

[le Méchekh 'Hokhma]

<----->

-> Au moment où Yaakov s'apprête à descendre dans ce pays de grande impureté, et que va commencer à peser l'obscurité de l'exil, il était nécessaire qu’Hachem soit encore plus proche de Yaakov et de ses enfants pour les protéger de l’impureté.

C'est pourquoi, Hachem se révéla à lui dans la nuit, allusion à l’obscurité de l’Egypte, et c’est alors qu’Il l’appela : "Yaakov Yaakov", ce qui exprime une affection particulière, puisque désormais, il était encore plus nécessaire d’avoir la Proximité Divine.

[Pirké Aharon]

D'ailleurs, il est écrit ensuite : "[D. a dit : ] Moi-même Je descendrai avec toi en Egypte, et Moi Je t’en ferai sûrement aussi remonter." (Vayigach 46,4)

<----->

+ "Toutes les personnes (kol hanéfech) de la maison de Yaakov arrivée en Egypte : 70." (Vayigach 46,27)

-> Selon une des explications, pour arriver à ce compte total de 70 personnes, on doit y ajouter la présence divine, elle-même, qui est venue compléter le tout.
En effet, D. s'est joint à eux, si l'on peut s'exprimer ainsi, pour tenir la promesse fait à Yaakov : "Je descendrai avec toi" (v.46,4).

-> Une autre explication est que la 70e personne est Yo'hévét, la sœur de Lévi, qui naquit dans l'enceinte de la capitale égyptienne. Elle fut conçue en Canaan, et sa mère était dans son 9e mois lorsqu'ils descendirent en Egypte.
Certains disent que la naissance de Yo'hévét intervint alors qu'ils approchaient de la capitale égyptienne, d'autres affirment qu'elle naquit le jour de leur arrivée en Egypte....
[...]
La Torah fait ce décompte afin de nous faire comprendre l'immense bonté de Hachem à notre égard.
Dans la Haggada de Pessa'h nous récitons le verset : "Avec 70 personnes, nos pères descendirent en Egypte, mais maintenant D. nous a fait aussi nombreux que les étoiles dans le ciel" (Ekev 10,22).
[Méam Loez - Vayigach 46,26-27]

[le miracle est prodigieux : après 210 ans d'exil et d'esclavage, la nation juive passe de 70 âmes (lors de leur descente en Egypte) à 600 000 hommes d'âge moyen parmi une population de plusieurs millions de personnes.]

<--->

-> selon une opinion, Dina avait un fils et il est inclus dans ce compte sans que la Torah ne précise son nom.
-> certains commentateurs sont d'avis que Yaakov est compris dans ce nombre bien que la Torah parle de 70 membres de la famille de Yaakov sans mentionner son nom.
-> Pour d'autres, le nombre de 70 est arrondi à la dizaine supérieure et ne représente pas un compte parfaitement exact.
[rabbi Yossef Deutsch]

<----->

=> L'obscurité de l'exil ne signifie pas que Hachem s'est éloigné de nous, au contraire il est plus présent que jamais à nos côtés, afin de nous aider et nous soutenir.

De même à un niveau personnel, lors des moments obscures, difficiles de notre vie, il faut avoir conscience que D. est davantage présent proche de nous.
[à l'image d'un père qui laisse son fils apprendre à marcher (nécessaire à son évolution), qui partage sa douleur de le voir tomber et qui se tient tout près pour le relever! ]

<----->

-> "D. parla à Israël dans les visions de la nuit et Il dit : Yaakov, Yaakov" (Vayigach 46,2)

-> Le Ben Ich 'Haï commente :
Quand Hachem s’adresse a Yaakov au moment de descendre en Égypte pour voir son fils Yossef. Le verset cite le nom Israël mais l’appelle : Yaakov, Yaakov.
A la différence d’Avraham et de Sarah, Yaakov, même en ayant change de nom pour Israël, conserve aussi son ancien nom. Et au moment de descendre en Égypte dans une terre impure ou Yaakov s’inquiète pour sa descendance, Hachem choisit de l’appeler Yaakov deux fois. Car 2 fois la valeur numérique de "Yaakov" équivaut à 3 fois "Goy Gadol" pour assurer a Yaakov que même en Égypte Yaakov va donner naissance à 3 grands peuples : les Cohanim, les Levi'im et les Israelim.

"Israël se mit en route avec tout ce qu'il avait, et arriva à Béer Chéva ; il offrit des sacrifices au D. de son père Its'hak" (Vayigach 46,1)

-> Nos Sages enseignent que Yaakov aurait dû descendre en Egypte avec des chaînes, pour commencer l’exil d’Egypte. Mais, finalement Hachem a eu pitié et Il a envoyé Yossef en préalable, et Yaakov descendit pour le rejoindre.
[midrach Béréchit rabba 86,1 ; guémara Shabbath 89]
Que cela signifie-t-il?

En réalité, pour en venir à vivre en Egypte, Yaakov devait "descendre" (moralement) progressivement, niveau après niveau, à l’image d’une chaîne (d’un enchaînement), jusqu’à pouvoir en venir à vivre en Egypte, pays extrêmement bas.

Cependant, Hachem a ordonné les événements de sorte que par la venue préalable de Yossef en Egypte, celui-ci a préparé spirituellement ce pays pour que Yaakov puisse y venir tel qu’il était, sans aucune descente morale.

['Hidouché haRim]

<--------------------->

+ "il offrit des sacrifices au D. de son père Its'hak"

Pourquoi Yaakov a-t-il mentionné à propos des sacrifices le D. de Its'hak, plutôt que de dire "au D. de ses ancêtres"?

-> Its'hak est le seul Patriarche qui n’est pas descendu en Egypte, et c'est pourquoi, le mérite de la terre d’Israël l'accompagnait.
Yaakov présenta ici le mérite de Its'hak, qui ne descendit jamais en Egypte, pour que ce mérite le conduise à vite remonter de l’Egypte et à ne pas s’y éterniser.

[Kédouchat Lévi]

<----->

-> Yaakov savait qu’il allait être puni pour ne pas avoir honoré son père pendant les 22 ans qu’il s’était absenté et qu’il était chez Lavan. A présent, quand 22 ans étaient passés depuis la disparition de Yossef, et qu’il s’apprêtait à retrouver son fils, Yaakov sut que désormais la punition venait de s’achever.

En effet, il souffrit 22 ans de l’absence de son fils, pour les 22 ans où il n’avait pas pu respecter ses parents. Alors, il se réjouit d’avoir fini de payer cette faille et remercia Hachem car à présent il était finalement nettoyé de cette faute.
C’est ainsi que pour remercier Hachem, il offrit des sacrifices : "au D. de son père Its'hak", car la punition pour ne pas avoir honoré son père pendant ces 22 ans, venait de s’achever.

[Zéved Tov]

<----->

-> Rachi commente : On est tenu d’honorer son père plus que son grand-père. C’est pourquoi le texte rattache ici son acte à Its'hak, et non à Avraham.

-> Le Maharcham enseigne :
Avraham a obtenu sa croyance en Hachem par le biais d'une recherche philosophique, tandis que Its'hak a reçu une croyance claire et totale en D. depuis sa naissance.
Afin de pouvoir survivre à la dureté de l'Egypte, les juifs auront besoin de la croyance claire de Its'hak, et c'est pour cela qu'il est mentionné ici en même temps que le Nom de Hachem.

De même, à Roch Hachana, nous rappelons la Akédat Its'hak, car il a étendu son cou d'une foi parfaite en son père, persuadé qu'il avait reçu la mitsva de se faire égorger.

"Yéhouda s'approcha (vayigach) de lui [Yossef]" (Vayigach 44,18)

-> Selon le midrach (Béréchit rabba 93,7), lorsque Yéhouda s'est approché de Yossef afin d'essayer de libérer Binyamin, il est devenu en colère et a crié si fort, que son cri pouvait s'entendre à une distance de 400 parsot (environ 1800 km!), jusqu'à ce que 'Houchim ben Dan, qui était sourd, ait pu l'entendre.

A quel point son cri était fort?

Il était si puissant qu'il a été entendu à travers toute l'Egypte, et a entraîné la chute des dents de chaque personne qui l'a entendu.
C'est alors que 'Houchim est venu de Canaan, et il s'est joint aux cris de Yéhouda.

-> Le Avnei Azel explique que Binyamin, dans son état de captivité et de séparation de son père (Yaakov), symbolise les jeunes juifs arrachés à leur papa Hachem, à leur judaïsme.

La majorité des gens ne font rien en réponse à cela, mais il y a quelques rares "Yéhouda", qui ressentent une responsabilité personnelle envers cette situation, et ils crient.
Leurs cris réveillent alors les " 'Houchim", ces gens qui étaient au préalable "sourds" à cette situation difficile de l'assimilation des juifs, et ils se joignent alors aux "Yéhouda" pour crier.

=> b"h, que nous puissions faire partie de cette élite du peuple juif, qui ne reste pas insensible au fait que d'autres frères vivent une vie selon les standards non-juifs.

En criant par amour de voir nos frères perdre leur surdité au judaïsme, nous leur permettons de revenir parmi nous.

[ Au-delà des actions concrètes qui peuvent être menées, lorsque Hachem voit que nous crions en prières de tout notre cœur, afin que nos frères qui se sont éloignés puissent nous rejoindre autour de la Torah, Il va tout faire pour que la famille des juifs se retrouve au complet, très très bientôt b"h

Il est inenvisageable que nous ne soyons pas tous présents et le plus méritants, lors de la venue très très prochaine du machia'h!! ]

<---->

-> "Les fils de Dan furent 'Houchim (חשים)" (Vayigach 46,23)
Bien que Dan n'eut qu'un seul enfant, le verset parle au pluriel "les fils de Dan", du fait de son importance particulière. En effet, le Machia'h Ben David sera, de par sa mère, descendant de 'Houchim fils de Dan.
C'est aussi pour cela que le nom חשים ('Houchim) est écrit sans la lettre Vav, de sorte qu'il compose les lettres du mot משיח (Machia'h).
Car la mère du Machia'h sera une de ses descendantes. C'est aussi pour cela que deux tribus sont comparées au lion, la tribu de Yéhouda et celle de Dan. Car ces 2 tribus sont en lien, le père du Machia'h descendra de Yéhouda et sa mère de Dan.
[Kanfé Yona]

<---------------------------------------->

-> Selon le Yalkout Réouvéni, la voix des 2 frères était tellement élevée que l'intégralité des villes de Pitom et de Ramsès a été détruite.
C'est la raison pour laquelle, par la suite, les égyptiens ont insisté pour que les juifs soient responsables de leur reconstruction.

<--->

-> "Que ton serviteur parle aux oreilles de mon maître" (Vayigach 44,18)
Yehouda demanda à Yossef le droit de pouvoir parler directement à ses oreilles, sans passer par l'interprète. Mais cela est étonnant, car Yéhouda parlait l'hébreu et ne connaissant pas la véritable identité du vice-roi, il ne savait pas qu'il comprenait l'hébreu. Comment veut-il parler à un homme une langue qu'il est censé ne pas connaître ?
La langue du coeur est comprise par tout le monde, en toute langue, et n'a pas besoin d'interprètes ni de traducteurs. De même, Yehouda voulait s'adresser directement à Yossef, sans interprète, il voulait lui parler avec
son coeur et ainsi le sensibiliser encore bien plus, même si l'homme face à lui ne comprendrait aucun mot de son discours.

"Mon fils est encore vivant, je vais aller le voir avant de mourir" (Vayigach 45,28)

Toutes les actions d’une personne laissent une trace sur leur visage.

Le Alchikh Hakadoch rapporte que Yaakov détenait la sagesse de lire dans les visages.

C'est pourquoi il voulait voir Yossef pour examiner son visage, et vérifier s’il était toujours vivant spirituellement parlant (si c'était un tsadik), malgré avoir passé 22 ans dans la grande impureté de l'Egypte.

"Je suis Yossef ; mon père vit-il encore?
Ses frères ne purent lui répondre, car ils avaient été frappés de stupeur devant lui" (Vayigach 45,3)

-> "Si déjà les remontrances d'un être humain (Yossef, leur jeune frère) ont eu un tel effet de stupeur, à plus forte raison les remontrances d'Hachem sur nos actions terrestres (auront un tel effet)"
[guémara 'Haguiga 4b]

Le Maharcha ajoute : notre jugement individuel dans le Ciel ne portera pas seulement sur nos paroles et nos actes, mais aussi sur ce que chacun aurait pu faire avec ses qualités et ses potentialités, et qu'il n'a pas réalisé.

-> "Rabbi Chimon ben El'azar dit : 'Malheur à nous au jour du jugement, malheur à nous au jour des remontrances ... Si déjà les grands frères n'ont pas su répondre à leur frère cadet, tant ils étaient éberlués devant lui, à plus forte raison quand D. viendra réprimander chacun de nous selon ses actions."
[midrach Yalkout Chimoni Béréchit 152]

-> Rabbi 'Haïm Chmoulévitch (Si'ha 23) enseigne :
Les frères de Yossef, qui jusqu'à ce jour ont toujours considéré être dans leur bon droit en agissant ainsi envers leur jeune frère, prennent brusquement conscience de leur erreur de jugement et d'évaluation, et pris de stupeur, ils ne peuvent plus répondre de leur acte.

Toutes les bonnes raisons qu'ils avaient pour justifier leur comportement envers Yossef ne résistent pas devant ces vérités.

La décision de tuer Yossef, transformée en une vente, avait pour but l'annulation de la réalisation de ses rêves, mais non seulement cela n'a pas pu empêcher son ascension à la royauté, mais de plus, c'est ce geste qui a permis l'accélération et la réalisation de ses rêves.

Les moyens mis oeuvre pour atteindre un résultat donné sont entre les mains de l'homme, mais le résultat de cette action ne dépend que de Hachem.

Nous serons jugés sur nos efforts et sur les moyens utilisés pour atteindre un but, et non sur le résultat.

Par ailleurs, même si une finalité nous semble noble, cela ne doit pas justifier l'utilisation de moyens "impropres" (ex: ici faire souffrir Yaakov pendant 22 ans!).

<------------->

-> Au moment où Yossef a dit : "Je suis Yossef", le plan de D. est apparu aux frères dans toute sa limpidité et aucune question ne s'est plus posée.
C'est ainsi qu'il en sera, plus tard, lorsque D. Se révélera et annoncera : "Je suis Hachem!"
Tous les yeux (juifs et non-juifs) s'ouvriront et l'on comprendra toutes les péripéties qui ont jalonné le cours de l'histoire.
[le 'Hafets 'Haïm]

<------------->

-> "Lorsque les frères rencontrèrent Yossef, ils reconnurent les traits de son visage, et ils comprirent que c'était le visage de leur frère Yossef. Toutefois, ils ne pouvaient admettre que Yossef était devenu roi.
Il était pour eux absolument impossible qu'un esclave atteigne le trône. Ainsi, ont-ils supposé qu'il s'agissait là d'un homme égyptien qui ressemblait à Yossef, mais il ne pouvait nullement s'agir de leur frère".
[midrach Ohr 'Hadach]

<--------------------------------------------------------->

-> "Une personne voit tous les défauts, à l'exception des siens" [Négaïm 2,5]

-> "Se trouve-t-il un seul individu, dans cette génération, qui soit apte à faire des remontrances? Il voit la paille dans l’œil du voisin, et ne voit pas la poutre dans le sien!" [le Sifri sur la guémara Arakhin 16b]

<--------------------------------------------------------->

+ Abba Kohen Bardela (midrach Béréchit Rabba 93,10), discerne un élément de réprimande dans l’annonce faite par Yossef :
"Malheur à nous au jour du Jugement! Malheur à nous au jour de la Réprimande!
Si les frères n’ont pas su supporter sa réprimande, lui qui était le plus jeune, à plus forte raison quand D. viendra réprimander chacun selon ce qu’il est."

Selon le Beit haLévi, cela signifie que chacun d'entre nous devra faire face :
-> à un jour de jugement : nous serons tenus pour responsable des fautes que nous avons commises durant notre vie ;

-> et à un jour de remontrances : en plus du prix à payer pour nos fautes, on nous montrera l’hypocrisie de chacune des excuses que nous avons pu avoir.
Un remontrance (to'ha'ha) est le fait de rendre apparent la sottise d'agir d'une telle façon, et pourquoi il faut absolument changer.

D'abord on nous exposera nos fautes. Sur ce, nous voudrons nous expliquer et ramener plein de bonnes raisons pour les justifier.
C'est pour cela qu'immédiatement, suite à cela, il va y avoir des remontrances, où toutes nos justifications vont voler en éclat, et seul le 100% vérité va rester.

C'est alors que le jugement peut se tenir, sans interruption, jusqu'à ce que justice soit faite.

<--------------->

-> "D. viendra réprimander chacun selon ce qu’il est" (midrach Béréchit Rabba 93,10)

Nous serons jugés en fonction du vrai nous-même.

Nous ferons face à toutes nos contradictions internes sur nos valeurs.
Par exemple, nous justifierons le fait de n'avoir pas pu aller à la synagogue le matin. On nous montrera alors la vidéo de toutes les fois où nous avons pu nous lever tôt lorsqu'il s'agissait de nos occupations personnelles.

Nous affirmerons ne pas avoir pu donner davantage à la tsédaka car nous ne le pouvions pas, mais est-ce que nous tenions le même langage pour nos dépenses personnelles non vitales?

Le jugement ne portera pas sur ce que nous ne pouvions pas faire, mais sur ce qui était dans nos possibilités, et que nous n'avons pas fait, préférant le justifier par des excuses malhonnêtes.

Nous verrons alors ce que nous aurions pu devenir, ce que nous aurions pu obtenir par nos prières, et nous verrons de façon apparente à quel point nos excuses étaient vides de vérité, donc inexistantes.

Nos Sages affirment d'ailleurs que le plus douloureux n'est pas la punition pour nos fautes, mais ce choc face à la vérité, ce sentiment horrible d'être plein de regrets : "Comment ai-je pu croire à ces justifications si minables, et avoir aussi peu fait de ma vie!"

[nous risquons d'être des criminels, car nous avons tué la personne magnifique que nous pouvions être!]

=> Essayons d'être honnête et sincère avec nous même, et ne pas hésiter à bénéficier du regard d'autrui, afin d'avoir une remontrance finale qui soit la moins amère possible.

<-------------------->

-> Le Beit haLévi explique que Yossef savait que s'il faisait directement une remontrance à ses frères pour l'avoir vendu, ils pouvaient facilement se justifier en disant : "Yossef, nous avons fait exactement ce qu'il fallait faire. Nous avons réuni un beit din et jugé que tu devais mourir".

Puisqu'ils considéraient que Yossef méritait son sort, une approche frontale n'aurait pas fonctionné.

Ainsi, Yossef a élaboré un plan pour Binyamin, le rendant coupable d'un crime entraînant son emprisonnement.
Au début de la paracha, dans son plaidoyer pour Binyamin, Yéhouda, qui représentait ses autres frères, fait appel à de la compassion pour Yaakov, leur vieux père, qui risque d'en mourir en apprenant cela (cf.Vayigach 44,31).

Yaakov s'est alors tourné vers ses frères, et a demandé : "Je suis Yossef ; mon père vit-il encore?"
Cela était un message clair : "Vous affirmez que la perte de son fils chéri va tuer votre père, mais alors comment avez-vous pu me vendre en esclavage? N'avez-vous pas réalisé que cela aussi pouvez 'tuer' notre père?"

Face à leur contradiction interne : "Ses frères ne purent lui répondre, car ils avaient été frappés de stupeur devant lui".

<--------------------------------------------------------->

+ On a pu voir, b"h, 2 midarchim ayant un contenu similaire, mais se terminant de façon légèrement différente :

-> "A plus forte raison quand D. viendra réprimander chacun de nous selon ses actions" (léfi maasaï)"
[midrach Yalkout Chimoni Béréchit 152]

-> "A plus forte raison quand D. viendra réprimander chacun de nous selon ce qu’il est (léfi ma chéou)"
[midrach Béréchit Rabba 93,10]

Selon le rav Acher Weiss, on retrouve cette distinction dans notre paracha :
-> selon vos actions : "Je suis Yossef votre frère, que vous avez vendu en Egypte" (Vayigach 45,4)

C'est une remontrance sur les actions qu'ils ont pu faire : le jeter dans le puits, le vendre en tant qu'esclave, tremper sa tunique dans le sang et prétendre qu'il a été tué.

-> selon ce que vous êtes : "Je suis Yossef! Est-ce que mon père est toujours vivant?" (Vayigach 45,3)

C'est une remontrance sur ce qu'ils sont, sur leur trait de caractère.
Yossef utilise : "MON père", et non : "NOTRE père", comme une subtile allusion au fait qu'ils ont pu agir sans cœur, en oubliant ce qu'il pourrait ressentir pour la perte de son fils.

Ses frères l'ont vu pendant 22 ans dans un deuil inconsolable, est-ce qu'ils ont tout mis en oeuvre pour le retrouver et le rendre à leur père?

Cela a été la remontrance la plus douloureuse.

=> Nous nous devons de faire attention, non seulement à nos actions, mais également à notre attitude, notre état d'esprit, car nous aurons des comptes à rendre là-dessus.

<--------------------------------------------------------->

-> Après une longue discussion avec Yéhouda, Yossef finit par se dévoiler à ses frères. Alors, il leur dit : "Je suis Yosseph". La Torah relate qu'en entendant ces mots, "ses frères ne purent lui répondre, car ils étaient perturbés devant lui".
En apparence, on aurait tendance à expliquer qu'ils furent perturbés de par la peur que Yossef ne se venge. Mais, nos Sages expliquent qu'en réalité, ils furent perturbés par la honte. Les frères reçurent les propos de Yossef comme une profonde réprimande et remise en cause, et en ressentirent une grande honte.
Et nos Sages de conclure que cette réprimande était à l'image de la réprimande qu'Hachem adressera à l'humanité dans les temps futurs.
=> Cependant, on peut s'interroger sur tout cela. D'une part, en quoi les mots : "Je suis Yossef" constituent-ils une réprimande, alors qu'en apparence, par ces termes Yossef ne fait que se dévoiler à ses frères? Et d'autre part, quel lien y a-t-il entre ce passage et la réprimande qu'Hachem adressera au monde dans les temps futurs?

En fait, il faut savoir au préalable que le comportement et le mode de vie de Yossef se distinguaient de ceux de ses frères.
- Les autres tribus s'isolaient pour servir Hachem. Pour eux, on ne peut s'élever spirituellement qu'en s'éloignant du monde matériel et profane. Il est nécessaire d'adopter un comportement visiblement pieux, en recul avec le monde.
- Mais Yossef voyait les choses différemment. Il optait plutôt quant à lui pour cacher sa piété sous une apparence de superficialité. Il adoptait des habitudes profanes, soignait sa coiffure et son vestimentaire, et dissimulait sa sainteté.
C'est d'ailleurs cette attitude qui suscita l'intérêt de la femme de Potifar, qui le trouvait beau et séduisant, jusqu'à vouloir l'attirer à elle. Et même quand il devint vice-roi de l'Egypte, Yossef poursuivit cette manière d'être. Il était mêlé aux affaires politiques et économiques du pays.
Extérieurement, on ne pouvait distinguer sa grandeur. Mais, au fond de lui, dans ses pensées et dans son cœur, il était pleinement attaché à Hachem.
Il utilisait un revêtement profane pour y envelopper une redoutable sainteté et une très grande proximité avec Hachem.
Si pour ses frères, le monde matériel était à éloigner, ne pouvant servir de moyen pour servir le Créateur. Pour Yossef, la matérialité est un vecteur de sainteté. Il se servait du profane pour l'emplir discrètement de sainteté.
Ce monde n'était pas à écarter.

Ainsi, ne remarquant que l'apparence superficielle et profane de Yossef, ses frères ne sont pas parvenus à saisir sa grandeur et sa sainteté.
Pour eux, Yossef s'était éloigné du droit chemin et menait une vie ancrée dans le matériel. Rien de bien ne sortirait de lui. Ils finirent aussi par s'en débarrasser.
La profonde sainteté que dissimulait Yossef, ils ne la remarquèrent pas ni ne la distinguèrent.
Mais quand Yossef finit par se dévoiler à ses frères, alors qu'auparavant sa sainteté était constamment cachée et il ne l'avait encore jamais mise à jour, mais à ce moment là, il la laissa se dévoiler. La lumière intense de sa sainteté éclata au grand jour.
C'est dans cet état de grande élévation qu'il formula les mots : "Je suis Yossef!"
Et enfin, pour la première fois, ses frères se trouvèrent face à la grandeur si puissante de Yossef. Enfin, ils comprirent qu'au delà de son apparence d'homme simple et profane, se cachait un être redoutable en sainteté.
Et là, ils furent perturbés "devant lui", ou littéralement : "de sa face" (mipanav - מפניו) = c'est qu'en voyant l'éclat qui rayonnait de son visage, ils en furent perturbés. A cet instant, ils comprirent qu'ils s'étaient grandement trompés à son sujet, et qu'ils avaient en réalité affaire à un homme saint. Ils ressentirent une grande honte de cette erreur. C'était pour eux une vraie réprimande.

=> Dans les temps futurs aussi, Hachem se dévoilera dans le monde matériel et proclamera : "Je suis Hachem".
Alors, on comprendra que ce monde, que l'on a utilisé pour son profit et parfois même pour se laisser aller à des fautes, qu'il était en réalité empli de la Lumière Divine qui s'y cachait.
Et alors, on ressentira aussi une grande honte, d'avoir utilisé un monde empli de Divinité, pour transgresser la Volonté Divine, ce qui constitue une offense au sacré.
Cette réprimande future sera bien à l'image de celle de Yossef.

[d'après le rav Mikaël Mouyal]

"Il [Yossef] donna à tous, individuellement, des habits de rechange ; mais à Binyamin, il donna 300 pièces d'argent et 5 habits de rechange" (Vayigach 45,22)

-> Yossef a donné 2 tenues vestimentaires à chacun des 10 frères (Ibn Ezra), afin qu'ils s'habillent avec la distinction convenant aux frères du vice-roi (Rabbi Avraham ben haRambam), et ils remplacèrent les vêtements qu'ils avaient déchiré dans leur détresse (cf. Mikets 44,13).

Mais il a fait un cadeau beaucoup plus généreux à Binyamin, qui était son seul vrai frère (les 2 ayant la même mère).

-> La guémara (Méguila 16b) demande comment Yossef, lui-même victime de la jalousie, a pu agir d'une façon susceptible d'éveiller un tel sentiment (5 vêtements à Binyamin, et 2 aux autres).

Selon Rabbi Binyamin bar Yéfét, Yossef a donné à Binyamin une allusion au fait que Mordé'haï, lui-même descendant de Binyamin, parcourra les rues de Suze vêtu des 5 habits royaux.
[En effet, il est écrit :
- "Mordé'haï, fils de Yaïr, fils de Sim'i, fils de Kich, de la tribu de Binyamin" (Méguilat Esther 2,5) ;
- "Mordé'haï sortit de chez le roi en costume royal (1), bleu d'azur (2) et blanc (3), avec une grande couronne d'or (4) et un manteau de byssus (5) ..."]

[Le Tsor haMor dit que les 300 pièces d'argent représentent les 300 dignitaires amalécites que Mordé'haï, descendant de Binyamin, mettra à mort.
La Pessikta Zouta fait remarquer que le nom : "Mordé'haï" (מָרְדֳּכַי) a une guématria de 274, et si on lui rajoute le 26 du Nom Divin, alors cela donne 300.]

-> Selon le Gaon de Vilna (Shénot Eliyahou), puisque ces 5 vêtements sont uniquement une allusion à des événements futurs, il est probable que leur valeur globale avait la même valeur que les 2 habits qui ont été donnés aux autres frères.

Dans notre verset, pour les frères le mot habit ('halifot) s'écrit : "חֲלִפוֹת", tandis que pour Binyamin, il s'écrit sans le vav : "חֲלִפֹת", afin de suggérer que chacun des habits qu'il a reçu, n'était pas particulièrement de valeur.

=> Les tribus n'avaient aucune raison d'en être jalouses.

<------------------------>

-> b"h, Nous venons d'expliquer la différence en ce qui concerne les vêtements, mais qu'en est-il des pièces d'argent?

Nous allons voir ci-après la réponse de Rabbi Méïr Yé'hiel haLévi (l'Ostrovtzer Rebbe)

Les 12 enfants de Yaakov servaient chacun leur tour leur père, tandis que les autres étaient dehors avec les troupeaux (cf. Rachi sur Vayéchev 37,29 : Réouven n'avait pas assisté à la vente [de Yossef], car c'était son tour, ce jour-là, d'aller servir son père).

Cette rotation quotidienne n'était valable que durant 300 journées de l'année, les autres jours (Shabbath, les Yom Tov) étant des moments où ils étaient tous à la maison, et durant lesquels ils s'occupaient tous ensemble des besoins de leur père.

Si nous divisons ces 300 jours de l'année par les 12 enfants, nous pouvons noter que chacun s'occupait individuellement de Yaakov pendant 25 jours (300/12).

Lorsque Yossef a été vendu, il manquait alors 1/12e de la main-d'oeuvre, les autres frères devant prendre sur eux les jours qu'il faisait auparavant.

Yossef a été absent pendant 22 années, ce qui représente : 550 jours (22*25) durant lesquels il n'a pas fait son tour auprès de son père.
Les 11 autres frères se sont partagés ces jours, soit 50 jours chacun (550/11).

Ainsi, d'une certaine façon, Yaakov devait à chacun de ses frères 50 jours de travail.

Cependant, il pouvait leur répondre : "C'est de votre faute! Vous m'avez vendu, m'empêchant ainsi de servir mon père. Je ne vous dois rien!"

La seule personne avec laquelle il était véritablement endetté, est Binyamin, qui n'a pas été impliqué dans la vente de Yossef (puisqu'étant à la maison en train de servir son père).
C'est pourquoi, Yossef lui devait 50 jours de travail injustifié.

Le midrach (Béréchit Rabba 61,7) dit qu'un travailleur en moyenne reçoit un salaire de 1 dinar par jour.

Un dinar est l'équivalent de 6 pièces d'argent.
Yossef a payé Binyamin pour ses 50 jours, à un prix de 6 pièces d'argent.
=> Il lui a donné 300 pièces d'argent (50*6).

[Les autres frères n'ont aucune raison d'en être jaloux.]

<--->

-> Le 'Hida rapporte au nom du Rokéa'h ce que le 'Hizkouni explique également.
Nos Sages (guémara Guittin 44a) ont dit : dans le cas d'un serviteur qui est vendu à un non-juif, le maître a l'obligation de venir le racheter jusqu'à 10 fois son prix.
Nous voyons dans la Torah (Michpatim 21,32) que le prix d'un simple serviteur s'élève à 30 sicles. Or, puisque les frères de Yossef l'avaient vendu à des non-juifs, il incombait à chacun d'entre eux de le racheter, selon la loi, jusqu'à 10 fois son prix, c'est-à-dire 300 sicles d'argent.
Mais lorsque Yossef leur a accordé son pardon, chacun des frères a donc gagné une somme de 300 pièces d'argent.
Quant à Binyamin, il n'avait pas participé à la vente, et c'est pourquoi Yosef lui a réellement fait présent de 300 pièces d'argent, sans éveiller de jalousie.

<--->

-> Le don de cette somme par Yossef vient compenser les 3 façons dont il avait calomnié ses frères.
[cf. Rachi Vayéchev 37,2 : Il s’agit du fait : qu’ils mangeaient de la viande arrachée à des animaux vivants, qu’ils humiliaient les fils des servantes en les traitant de serviteurs, qu’ils étaient soupçonnés d’actes de débauche.]
Or, la pénalité pour une calomnie est une amende de 100 sélas (Ki Tétsé 22,19).
Il donna l'argent à Binyamin car celui-ci n'avait pas participé à la vente.
[Méam Loez - Vayigach 45,22]

<--->

-> Les 300 pièces d'argent ne constituent pas un don préférentiel, mais comme pour les 5 vêtements, une allusion à son descendant Mordé'haï.
En effet, Tossefot signale dans la guémara (Méguila 13b) que : hakéssef (l'argent - הכסף) que voulait remettre Haman au roi A'hachvéroch a la même guématria que : haéts (la potence - העץ), soit : 165.
Or, la potence préparée par Haman pour y pendre Mordé'haï avait une hauteur de 50 amot, soit 300 téfa'him (50*6, car 1 ama = 6 téfa'him, qui vaut environ : 50cm).
Ainsi, les 300 pièces d'argent remises à Binyamin n'étaient qu'une allusion symbolique au fait que son descendant Mordé'haï, prévu pour être pendu sur une hauteur de 300 téfa'hïm, sortira finalement d'auprès du roi avec 5 vêtements royaux.
[Korban Torah]

<--->

-> La somme de 300 pièces d'argent n'est pas un don marquant une préférence de Yossef envers son frère Binyamin, mais une indemnité de honte due à Binyamin pour l'avoir humilié en l'accusant faussement d'avoir volé la coupe en argent de Yossef.
Ce don ne devait donc pas éveiller la jalousie des 10 frères.
[Iyoun Yaakov]

<--->

-> "A tout le monde il donna des habits et à Binyamin, il donna 300 pièces d'argent et 5 habits"
La guémara explique que Yossef donna un habit à chacun de ses frères, sauf à Binyamin à qui il en donna 5, pour faire allusion à Morde'haï qui descendra de lui et qui sortira devant le roi avec 5 vêtements royaux.
Mais cela n'explique pas que les 5 vêtements. Ainsi, comment expliquer les 300 pièces d'argent supplémentaires?

En fait, chaque vêtement que Yossef donna à chaque frère avait une valeur de 300 pièces d'argent. C'est pourquoi, il donna à Binyamin 300 pièces, en contrepartie de l'habit qui lui revenait de droit, au même titre que ses autres frères. Seulement, à Binyamin il ajouta encore 5 habits et c'est à leur propos que la guémara explique qu'ils faisaient allusion aux 5 habits royaux de Morde'haï.
D'autre part, il donna l'habit revenant à Binyamin sous forme d'argent et non sous forme d'habit, car alors il aurait dû lui donner 6 habits, le sien et les 5 faisant allusion à Morde'haï. Or, s'il lui en avait donné 6, cela aurait altéré l'allusion aux 5 habits de Morde'haï.
[Taama Dikra]

<--->

-> Selon le Ben Ich 'Haï, si Yossef a donné à Binyamin 5 vêtements, donc 4 vêtements de plus qu'à chacun de ses autres frères, c'est pour faire une allusion à Binyamin selon laquelle les 4 emplacements de la Chékhina en Israël (Chilo, Nov, Guib'one, Yérouchalaïm) seront tous localisés dans son territoire, dans le futur.

-> Selon le midrach (Béréchit rabba 54,5), c'est parce que Hachem n'a pas apprécié qu'Abraham ait contracté une alliance (brit) avec le roi des Philistins et lui a offert 7 agneaux, qu'à 7 reprises les Tabernacles (Michkan) des enfants d'Abraham seront détruits tout au long de l'histoire :
1) le Ohel Mo'ed du désert, 2) le Tabernacle de Guilgal, 3) le Tabernacle de Chilo, 4) le Tabernacle de Nov, 5) le Tabernacle de Guib'one, 6) le premier Temple de Yérouchalaïm et 7) le second Temple de Yérouchalaïm (Jérusalem).

<------------------------------------------------->

-> En apparence, les cadeaux supplémentaires à Binyamin semblent un acte imprudent.

Le Pardès Yossef dit qu'une raison à cet acte est : en procédant ainsi, Yossef donne à ses frères l'occasion de se défaire du passé.

Le Rambam (Hilkhot Téchouva 2,1) enseigne qu'une téchouva complète a lieu, lorsque l'on se retrouve dans les mêmes conditions que la fois où nous avions fauté, et que cette fois-ci, nous arrivons à surmonter la faute.

Il va de soi qu'une personne ne doit pas d'elle-même recréer des circonstances dans l'espoir d'atteindre une téchouva totale, car il est interdit de se mettre dans une situation de danger spirituel.

Rav Tsadok haCohen (Tsidkat haTsadik 73) écrit que lorsqu'une personne est prête pour ce challenge, Hachem va organiser les événements d'une telle façon lui permettant d'atteindre une téchouva totale.

Au moment, où un sentiment de "déjà vu" va se présenter, et que dans les mêmes conditions qu'auparavant on surmonte la tentation, alors on peut être certain que la téchouva est acceptée.

Rav Tsadok rapporte une guémara (Sanhedrin 25a) confirmant cela.
Il s'est avéré qu'un boucher trompait ses clients, en vendant de la viande non-cachère, comme étant cachère.
Rav Na'hman l'a exclut et renvoyé.

Suite à cela, ce boucher a laissé ses cheveux et ses ongles excessivement pousser, ce qui semblait être des signes de téchouva (repentance).
Rav Na'hman pensait a le réhabiliter, mais Rava lui a dit : "Peut-être qu'il ne fait que prétendre s'être repenti".

Rav Iddi bar Avin a eu une suggestion : "Celui qui est suspecté d'écouler de la viande non-cachère à ses clients, on ne peut pas lui faire confiance, à moins qu'il quitte ce lieu pour un endroit où il est inconnu.
Pendant qu'il sera là-bas, s'il a l'occasion de retourner un bien de grande valeur, ou bien s'il déclare une pièce de viande de valeur (chère) qui lui appartient, comme étant non cashère, alors nous serons qu'il s'est repenti"

Rav Tsadok dit que lorsqu'une personne est prête, alors elle "revit" l'épreuve dans laquelle elle a fauté, et elle a alors l'occasion de prouver que sa téchouva est complète.

Nous pouvons expliquer le comportement de Yossef, d'une façon similaire.

Ses frères se sont trompés sur lui, emportés par de la jalousie et de la haine, allant jusqu'à le vendre comme esclave.

Après la ruse afin d'amener leur plus jeune frère, et après l'incarcération potentielle de Binyamin, les frères ont pris conscience qu'ils avaient fauté, et ont alors regretté.

Mais cela n'était pas suffisant pour arriver à une téchouva totale, il fallait voir leur réaction lorsque Binyamin recevrait davantage qu'eux. Est-ce que la jalousie referait surface?

Lorsque Yossef a vu qu'ils retournaient vers leur père dans la joie, il savait alors qu'ils s'étaient véritablement repentis.

=> On comprend ainsi la nécessité de donner davantage à Binyamin, qui bien qu'en apparence semble susciter la jalousie, cela était en réalité un cadeau, un moyen de rendre leur téchouva totale.

<--->

-> "Or, vous voyez de vos yeux, comme aussi mon frère Binyamin, que c’est bien moi qui vous parle" (Vayigach 45,12)

-> Le Ben Ich 'Haï (dans ses drachot) commente :
Pourquoi Yossef n’a jamais envoyé un message a son père pour lui dire qu’il était en vie? Pourquoi fait-il toute cette mise en scène rocambolesque?

Son but caché est de créer pour ses frères une situation de parfaite téchouva.
C’est, comme le dit Rabbi Yehouda (guémara Yoma 86b), se retrouver dans la même situation avec les mêmes intervenants et les mêmes paramètres, et ne pas reproduire la faute.
Il donne ainsi la "possibilité" à ses frères de faire descendre Binyamin (qui représente Yossef étant son seul frère de la même mère et étant le fils de la vieillesse, le préféré de Yaakov) en Egypte et de l’y abandonner, comme ils l’ont fait pour lui. Et en même temps de causer ce chagrin immense qu’ils ont déjà causé à leur père.
Et c’est quand ils sortent vainqueurs de cette épreuve en ne cédant pas à Yossef. Il se dévoile alors et son pleur est la preuve qu’au plus profond de lui, il n’a jamais éprouvé de haine ni de cruauté mais uniquement une volonté d’entraîner la réparation de leur faute.
Et c’est ce qu’il dit: "Or, vous voyez de vos yeux, comme aussi mon frère Binyamin, que c’est bien moi qui vous parle."

<---------------->

+ "Il [Yossef] donna à tous, individuellement, des habits de rechange"

-> La Torah dit littéralement que Yossef donna à chacun un "habit de rechange". Il fournit à ses frères 2 tenues complètes : l'une pour le Shabbath et l'autre pour les fêtes.
['Houpat Eliyahou]

-> Yossef remit à chacun de ses frères des vêtements de rechange, car ils l'avaient dépourvu de ses vêtements avant de le jeter dans le puits (Vayéchev 37,23). Il leur offrit ces habits, neufs afin de leur montrer qu'il avait chassé de son cœur toute idée de vengeance.
Il leur remit également des vêtements neufs pour réparer le tort qu'il leur avait fait subir en les accusant du vol de la coupe. En effet, ils avaient alors déchiré leurs tuniques en entendant les accusations portées contre Binyamin (Mikets 44,13).
[Méam Loez - Vayigach 45,22]

<---------------->

+ "Il donna à tous, 5 tuniques par personne"

Le mot : 'haméch (חָמֵשׁ) est formé des initiales de : 'hodéch, moéd et Shabbath.
Pour nous insinuer qu'à ces moments-là, il faut changer de vêtement en l'honneur de ces jours.
[Yessod véChorech haAvoda]