Pâtisserie spirituelle depuis 5771 - b'h
 

Considérer le Temple comme vital à notre vie

"Voici les comptes (élé pékoudé) du Michkan, le Michkan du témoignage (haédout), établis sur l'ordre de Moché par les Lévi'im, sous la responsabilité d'Itamar, fils de Aharon haCohen" (Pékoudé 38,21)

-> Le Michkan est appelé ici : "le Michkan du témoignage", car il témoigne du fait que Hachem s'est réconcilié avec les juifs et leur a pardonné la faute du veau d'or.
La preuve en est qu'Il laissa Sa Présence reposer parmi eux.

Les nations du monde croyaient la faute du veau d'or irréparable.
Après tous les bienfaits et les miracles que Hachem avait accomplis pour les juifs, ceux-ci avaient eu l'audace de se rebeller contre Lui!
Les nations dirent : "Les juifs ont commis un délit extrêmement grave. Comment D. leur pardonnera-t-Il jamais?"
Mais elles constatèrent que Hachem leur ordonna de fabriquer le Michkan, une résidence sainte qui indiquait que Hachem désirait faire résider Sa Présence parmi les juifs.

Il est écrit : "Ils Me feront un Michkan et Je résiderai parmi eux" (Térouma 25,8).
Les nations constatèrent que la Présence était descendue sur le Michkan et elle virent le feu qui l'entourait.
Elles comprirent que Hachem s'était réconcilié avec Israël et lui avait pardonné la faute du veau d'or.
[...]

Les nations accusèrent les juifs d'avoir fabriqué le veau d'or. Hachem ordonna donc à Son peuple de commencer par apporter de l'or pour le Michkan.
Cela prouvait que l'or avec lequel le veau d'or fut fabriqué n'appartenait pas aux juifs mais au érev rav.
La Torah y fait allusion lorsqu'elle désigne le Michkan sous le nom de : "Michkan du témoignage" (Michkan haédout), car il témoignait que Hachem avait pardonné la faute du veau d'or aux juifs.

Le Michkan porte le nom de "Michkan du témoignage" pour une raison supplémentaire : il tenait lieu de témoin et d'avertissement que si les juifs fautaient à nouveau, il leur serait enlevé et détruit.
Le mot hébreu : "michkan" a la même racine que le terme "machon" : un gage.
En effet, si l'on ne rembourse pas un prêt, le gage est gardé.

"Voici les comptes du Michkan", le Michkan (Machkon) du Témoignage" = C'est comme si la Torah disait : "Voici les comptes du Michkan, le "gage" du témoignage".
Si un homme prête de l'argent en contrepartie d'un gage et que l'emprunteur ne peut s'acquitter de sa dette, le créancier garde le gage jusqu'au remboursement.
De même, lorsque les juifs fautent, Hachem envoie les nations prendre le Michkan (ou plus tard le Temple) comme gage.
Le Temple est détruit jusqu'à ce que les juifs se repentent totalement. [Yeffé Toar - Térouma]

La section commence par les mots : "Voici (élé) les comptes du Michkan".
Hachem dit aux juifs : "C'était par les mots "élé" que : 'Voici (élé) tes dieux, Israël'" (Ki Tissa 32,4).
En employant le mot : "élé", ils provoquèrent Mon courroux, c'est donc par le mot "élé" que vous vous réconcilierez avec Moi afin d'expier votre faute."

"Voici (élé) les comptes du Michkan" = les juifs reçurent à présent le pardon par le terme "élé" qui désignait leur faute.

[on apprend de là que toute faute, même la pire à l'image du veau d'or, peut être pardonnée si l'on fait une téchouva sincère et totale!]
[...]

Les juifs offrirent 13 matériaux, prouvant ainsi que Hachem est Un dans le monde
En effet, le mot hébreu voulant dire : Un ("é'had" - אחד), a une valeur numérique de 13.

<---------->

-> Lorsque la Présence Divine reposait parmi les juifs, dans le Michkan, dans le 1er et 2e Temple, la situation était semblable à une union conjugale.
Le jour où la Présence Divine pénétra dans le Michkan était comparable à un jour de noces.
[Méam Loez – Pékoudé 40,38]

-> "Voyez combien Hahem aime Israël! Il nous a donné Sa Présence et Sa couronne [faite par le peuple juif] ...
Sa couronne représente le Michkan : de même qu'un diadème est orné de nombreuses pierres précieuses aux splendides couleurs, ainsi le Michkan était décoré de laine bleu ciel, pourpre, carmin et de lin blanc.
[Méam Loez – Pékoudé 40,38]

<------------------------------------------>

+ Le Sanctuaire (michkan) est un gage (machkon) :

"Voici les comptes du Michkan", le Michkan du Témoignage" (élé pékoudé aMichkan, Michkan aEdout - אֵלֶּה פְקוּדֵי הַמִּשְׁכָּן מִשְׁכַּן הָעֵדֻת).

-> Rachi commente : Il est écrit 2 fois Sanctuaire (michkan), c’est une allusion au fait que le Sanctuaire a été pris en gage (machkon) en étant détruit 2 fois à cause des fautes des Bnei Israël.

-> Selon le Béer Moché, la destruction du Temple est considérée comme la prise d’un gage.
Le Béer Moché enseigne :
Quand on observe les lois concernant le gage, cela nous enseigne que nous avons la possibilité d’affronter la destruction et de provoquer la reconstruction du Temple.
En effet, les halakhot du gage comportent la notion que "celui à qui on doit acquiert un gage" (guémara Baba Metsia 84).
Cette acquisition signifie que le prêteur, qui est celui à qui l’on doit, a le droit de vendre le gage pour récupérer son argent, si l’emprunteur ne paye pas.
Mais malgré tout, la halakha décide également que si l’emprunteur est pauvre et n’a pas d’autre vêtement que le gage, un vêtement de jour pour la journée et un vêtement de nuit pour la nuit, l’emprunteur n’a pas le droit de le vendre, car "c’est son manteau, c’est son vêtement pour son corps, dans quoi dormirait-il?"

Ce qui caractérise le fait de prendre un "gage", et la différence entre le gage et le remboursement final, réside donc en ce que tant qu’il ne constitue pas un remboursement total mais un gage, le prêteur a le devoir de prendre en considération le fait que l’emprunteur pauvre reste démuni de tout, et dans un tel cas il doit lui rendre le gage, même si en réalité il lui appartient déjà.

Quelle en est la raison? Il a acquis le gage, alors pourquoi prendre en considération la misère de l’emprunteur?
La réponse est écrite dans la Torah : "S’il arrive qu’il crie vers Moi, Je l’entendrai, car Je suis miséricordieux".
Tossefot (guémara Roch Hachana 17b) expliquent : "Même si en toute justice le gage t’appartient car tu lui as prêté de l’argent, tu dois pourtant le lui rendre, car s’Il crie vers Moi, J’entendrai son cri, Je suis miséricordieux et Je ne peux pas voir sa détresse.

La Torah nous enseigne que lorsque le pauvre crie dans sa misère, ce n’est pas la justice qui prévaut.
Certes, la justice te permet de conserver le gage, c’est lui-même qui te l’a donné à cette fin. Mais malgré tout, on ne peut pas faire abstraction du cri de l’indigent.
Hachem est miséricordieux, c’est l’une des 13 midot. Cette mida signifie: "Je ne peux pas voir sa misère".
Pour ainsi dire, la miséricorde du Hachem ne Lui permet pas de voir la détresse de l’indigent qui crie.
C’est pourquoi "s’il crie vers Moi, Je l’écouterai, car Je suis miséricordieux!"

Le Beer Moché en conclut que si les Sages appellent la destruction du Temple un "gage", c’est une façon d’affirmer que la destruction du Temple n’est pas définitive.
Certes, il est détruit, mais si nous ressentons son absence avec une telle intensité que nous soyons comme un pauvre à qui il manque un vêtement pour se couvrir, si nous crions, si nous supplions comme un pauvre qui implore pour sa vie, la mida de Hachem implique qu’Il doit nous le rendre!

<--->

+ L'importance de voir le Temple comme un élément indispensable à notre vie au quotidien :

-> Le midrach (Tan'houma Pékoudé 2) nous dit que le mot "Michkan" est une expression de "Machkon" (une gage).
Cela est une allusion au fait que Hachem a pris le Temple (également connu comme Michkan) comme d'un gage pour les fautes des juifs.
Comme le rapporte le Méam Loez (Eikha 1,14) : "Le poids des péchés d'Israël a été placé sur le Temple.
Au lieu d'exterminer le peuple juif, Hachem a déversé Sa colère sur le bois et les pierres.
Certes, le Temple a été détruit mais le Temple spirituel existant dans le cœur de chaque juif est resté intact."

Selon la loi juive si quelqu'un nous doit de l'argent nous n'avons pas le droit de lui prendre de l'argent qui est essentiel pour sa subsistance, de même nous n'avons pas le droit de prendre ses habits dont il a besoin pour la journée, idem pour ses vêtements de nuit, ...
=> Comment Hachem a-t-il pu nous prendre le Temple comme gage pour nos fautes? N'est-ce pas quelque chose qui est constamment vital pour notre bien-être spirituel?

-> Le Toldat Adam (Pékoudé) explique :
"Si nous ressentons que le Temple est vital pour notre survie, qu'il nous est indispensable pour notre vie quotidienne, et que nous crions à Hachem des profondeurs de notre cœur, alors Hachem va certainement écouter notre cri et nous retourner le Temple à notre cœur. Il va permettre à Sa Chékhina (Présence Divine) de résider en nous et par ce biais une personne va acquérir un goût dans son service d'Hachem, doux comme le monde à Venir ...

Lorsque le peuple d'Israël se sentira ainsi et va développer une passion pour le Temple et ressentir qu'il ne peut pas vivre sans lui, alors Hachem va certainement retourner le Temple à tout le monde, ici sur terre."

-> Le Mékhilta déRabbi (Michpatim 22,22) dit explicitement qu'une personne ne doit jamais dire qu'elle n'est pas méritante de demander le Temple, car Hachem a promis : "assurément j'entendrai ce cri" (Michpatim 22,22).

<--->

+ Notre Temple intérieur (en nous) & notre Temple collectif :

=> Comment comprendre qu'au travers le temps autant de juifs, dont d'énormes tsadikim, ont crié et supplié pour la venue du machia'h au plus vite, et qu'actuellement nous sommes toujours en exil. Qu'est-il devenu de leurs prières?

-> Le rav Israël Moché Sorotskin enseigne :
A un niveau individuel, ils ont eu leurs prières qui ont été répondues, et ils ont reçu les influences du Temple, en eux.
Cela explique pourquoi nous trouvons des tsadikim à toutes les époques qui ont atteint des hauteurs inimaginables, bien au-delà des limites de la génération dans laquelle ils vivent.
Il y a eu des tsadikim avec des forces surhumaines, qui pouvaient voir d'un bout à l'autre du monde.
Ils se sont totalement branchés à leur Temple intérieur, et ainsi ils ont les influences et les ségoulot que le Temple accorde.

Cela va de pair avec l'explication du Ran dans une dracha (drouch achémini בא"ד) :
"De même que le Temple était la source de la sagesse et de la prophétie pour le monde entier, il en est de même à chaque génération pour nos Sages dont le cœur est la source des fontaines de sagesse et de prophétie pour la génération toute entière, car le Sage lui-même est le Temple (mikdach)".

Ainsi, les grandes Sages en Torah de chaque génération, qui arrivent à se connecter totalement au Temple qui est en eux, deviennent eux-mêmes un Mikdach. Ils sont alors capables de transmettre à d'autres ces énormes influences.

=> Bien que le Ran mentionne : "les Sages de chaque génération", en réalité cela s'applique à chaque juif qui peut davantage se rattacher à son Temple interne, chacun à son niveau, et ainsi profiter des apports énormes d'un tel lien à notre niveau.

-> A Yom Kippour 5560, en s'adressant à toute la communauté, le 'Hatam Sofer a cité le verset : "Nos pieds s’arrêtent dans Tes portes, ô Jérusalem" (om'dot hayou raglénou bich'arayich Yérouchalayim - Téhilim 122,2).
[ce verset fait référence à une époque avant que Jérusalem ne soit construite et habitée.]
Le 'Hatam Sofer explique que cela signifie que quelqu'un peut se tenir à Jérusalem tout en étant en exil.
Comment cela?
En se connectant spirituellement à Jérusalem. Lorsqu'une personne s'attache elle-même avec Jérusalem par son approche et ses valeurs, elle sera alors capable d'accéder aux bénéfices qu'un individu se tenant à Jérusalem peut recueillir.

=> Ainsi, absolument tout juif, peu importe ce qu'il a pu faire dans sa vie, peut en travaillant son appréciation pour le Temple, et en se focalisant et en priant pour le Temple, avoir la capacité de se forger un lien authentique et effectif avec le Temple, même en restant en exil.

[d'une certaine façon, plus une personne aspire à la construction du Temple, plus elle contribue à accélérer la construction du Temple collectif à Jérusalem, mais également elle s'attache davantage avec son Temple intérieur.
Ainsi, tout juif à son échelle peut suivre l'exemple des Sages de la génération, qui par leur aspiration et leur comportement, ont développé un magnifique Temple personnel intérieur, et alors ils bénéficient de cette influence (et par ricochet en font profiter les autres juifs).
Tout juif où qu'il soit dans le monde, peut avoir un Temple qui est pleinement reconstruit en lui, et même en exil il est comme étant à Jérusalem.
Pour une sanctification d'Hachem qui soit maximale, et pour que tout juif en bénéficie dans l'union, nous souhaitons que le Temple collectif à Jérusalem soit également reconstruit au plus vite.]

<--->

-> Il est écrit : "Ils Me feront un Mikdach (Temple/Sanctuaire), et je résiderai parmi d’eux" (Térouma 25,8)
Rabbi 'Haïm de Volozhin (Néfech ha’Haïm 1,4) explique :
Hachem n’a pas dit : "fais-moi un Michkan et Je résiderai en lui", mais "fais-moi un Mikdach (Temple) et Je résiderai en eux (dans les bné Israël)" ... car tout l'essentiel du Temple, de la résidence de la Présence Divine, du Kodech Hakodachim est centralisé autour de l’homme qui, s’il se sanctifie et s’élève par les mitsvot, deviendra lui-même un Temple (beit midrach) et Hachem sera en lui."

-> En ce sens, nos Sages (guémara Roch Hachnaa 18b) disent que : la mort d’un tsadik est aussi grave que la destruction du Temple aux yeux d’Hachem.

<--->

+ "Qu'ils Me fassent un Mikdach (Temple/Sanctuaire) et Je résiderai parmi eux" (Térouma 25,8-9)

-> Le Méam Loez (Térouma 25,8-9) nous enseigne :
La Présence Divine allait résider essentiellement à l'intérieur des juifs, et non dans le bois et le métal du Michkan.
Certes, un édifice tangible devait être construit mais sa seule fonction était de stimuler spirituellement le peuple.

Entrer dans le Michkan, le Temple ou une synagogue n'est pas suffisant en soi. Un bâtiment n'est fait que de bois et de pierre. Le principal, ce sont les personnes qui s'y trouvent et qui doivent s'imprégner de la sainteté de la Présence Divine, sanctifier leur cœur et se tenir avec crainte devant D. pour ne pas agir contrairement à Sa volonté.

Un tel édifice peut alors être appelé "un Sanctuaire", un Michkan, une congrégation sainte ou un Temple.
Ce n'est pas le bois dont il est fait qui est important mais le cœur des fidèles qui s'y rassemblent.

L'édifice physique a pour seul but de tirer ceux qui le fréquentent de leur torpeur spirituelle et de diriger leur conscience vers Hachem.
Ainsi chacun se dira : "Si je me trouve dans ce lieu saint où réside la Présence Divine, je dois me comporter avec crainte et ne pas prendre part à des conversations futiles". [Alchikh haKadoch]

Ce sont donc les personnes elles-mêmes qui constituent le "vrai" Michkan. C'est pourquoi après avoir dit : "Qu'ils me fassent un Michkan", Hachem ajouta : "ainsi ils feront".
Les hommes doivent travailler sur eux-mêmes pour faire le Michkan en purifiant leur cœur.

<--->

-> La guémara (Sotah 17a) enseigne que si un mari et une femme sont méritants, alors la présence Divine réside avec eux.

-> "Ils feront pour Moi un Sanctuaire et Je résiderai parmi eux" (Térouma 25,8)

Le Ohr ha’Haïm haKadoch déduit que la présence Divine ne réside pas uniquement dans le Michkan, mais également dans la maison de chaque juif où règne le shalom : une véritable paix et de la sérénité.
C’est ainsi que de nos jours toute maison juive peut servir individuellement de : Temple miniature (Beit Mikdach méat).

De plus, lorsqu’un couple ajoute leur "lèv" (cœur – לב – valeur : 32) à leur "bayit" (maison – בית – valeur : 412), alors il élève leur maison pour qu’elle devienne un : mikdach (Sanctuaire – מקדש – valeur : 444), où la présence Divine réside.

<--->

-> "Tout celui qui pleure pour Jérusalem méritera de partager sa joie [quand le Temple sera reconstruit], tandis que celui qui ne s'en attriste pas, n'en profitera pas."
[guémara Taanit 30b]

<------------------------------------------>

-> Le le mot "Sanctuaire" (michkan - משכן) est formé des mêmes lettres que "nimchakh" (continuité) : ceci nous enseigne qu’il incombe à chaque juif de toujours maintenir une continuité sur 3 générations et d’adhérer à la tradition de ses pères.
Chacun de nous est comparable à un Sanctuaire : de même que D. installe Sa présence dans celui-ci, de même Il réside au sein de chaque juif qui adopte une conduite adéquate et qui respecte la Torah et les mitsvot.
Puisque la Présence Divine se trouve en chaque homme, celui-ci doit se sentir responsable et poursuivre la tradition des Patriarches en accomplissant les mitsvot.
Lorsque les hommes dédaignent les commandements de Hachem et abandonnent le chemin de leurs pères, alors la Présence Divine se détache d’eux et donc du Temple, précipitant ainsi sa destruction.
[rabbi David Pinto - la voie à suivre n°666]

<--->

-> Le Pardes Yossef enseigne : La plus grande sagesse pour l’homme est de ne pas se montrer trop malin, mais de faire exactement ce que Hachem demande de lui, ni plus ni moins.
C’est ce à quoi fait allusion le verset : "ceux qui ont la sagesse du cœur parmi vous viendront faire ce que Hachem a ordonné" (Vayakel 35,10), sans rien rajouter.

"[Ainsi] fut achevé tout l'ouvrage du Michkan ... et les enfants d'Israël avaient fait selon tout ce que Hachem avait ordonné à Moché" (Pékoudé 39,32)

-> Ce verset, ne devrait-il pas tout d'abord dire ce qu'ils ont été ordonnés de faire, et ensuite que le Michkan a été achevé, et non l'inverse?

Le Alshich haKadoch (Torat Moché) répond que de nombreux aspects de la construction du Michkan étaient ignorés des juifs, Hachem devant les compléter Lui-même.
Malgré cela, D. leur donne le mérite comme s'ils l'avaient entièrement eux-mêmes.

=> Ainsi : "fut achevé tout l'ouvrage" par Hachem, et malgré cette réalité : "ils avaient fait selon tout ce que Hachem avait ordonné" = ils ont reçu le mérite pour la totalité du travail.

[=> dans la spiritualité, nous devons faire de notre mieux, et Hachem se chargera alors de compléter ce qu'il manque. Au final, Il nous créditera pour la totalité!]

<--->

-> Rachi (v.39,33) commente : "Aucun homme au monde n’aurait été capable de monter le Michkan, étant donné le poids des planches, que nul n’aurait pu dresser ...
Moché a dit à Hachem : "Comment pourrait-on le monter de la main d’un homme?"
D. lui a répondu : "Charge-t'en de ta propre main, et ce sera comme si c’est toi qui le montais!"
En fait, le Michkan s’est monté et dressé de lui-même."

-> "Notre devoir est seulement d'agir. Quant à la réalisation et à ses résultats, ils sont du ressort de Hachem.
Quand il nous incombe de faire une chose, notre rôle n'est pas de l'amener à sa réalisation, mais simplement d'agir!"
['Hafets 'Haïm]

=> Avec le Michkan, même si l'édification était humainement impossible, Moché n'en était pas pour autant dispensé d'agir. Et dès qu'il se mit à l'oeuvre, D. intervint et paracheva son action.
Bien qu'en fin de compte, le Michkan fut érigé de lui-même, le mérite en revint néanmoins à Moché précisément en vertu des efforts engagés.

<------------------->

"Vinrent tous les hommes portés par leur cœur, et tous ceux que leur esprit avait porté à la générosité" (Vayakel 35,21)

-> "portés par leur cœur" = cela désigne les personnes venues exécuter les travaux de tissage, de couture, de construction, ... nécessaire à l'édification du Michkan.

Les conditions de vie (en esclavage très difficile) en Egypte, n'avaient pas permis la formation d'artisans parmi les enfants d'Israël, personne ne les avait formés et ils n'avaient eu aucune possibilité de développer leur talent.
Malgré ce manque évident de qualification, certains d'entre eux, sentant qu'ils possédaient des aptitudes naturelles, "portés par leur cœur", ont senti le désir de se porter volontaires pour entreprendre ces diverses tâches, confiants dans le fait que D. les aiderait au mieux à accomplir Sa volonté.
[le Ramban]

-> Selon le rav Yérouh'am Lévovitz, il en est de même dans tout comportement en l'honneur d'Hachem, lorsque nous ne possédons ni les talents, ni les capacités nécessaires pour réaliser cette tâche.
En effet, si nous témoignons de notre profonde motivation et de notre envie de réussir un projet pour la gloire de Hachem, alors nous avons la certitude de recevoir les bénédictions d'une aide Divine et de la réussite, d'une façon qui dépasse nos rêves les plus fous!

-> A ce sujet, le 'Hafets 'Haïm (Vayakél 36,2) disait : "En spiritualité, il faut témoigner de son désir et de sa volonté du cœur, et alors nous aurons les capacités pour atteindre les buts spirituels."

Il donne l'exemple suivant : si quelqu'un désire dominer un traité talmudique particulier, en étant prêt à y investir les efforts nécessaires, alors Hachem va lui accorder une bénédiction du Ciel, et il aura alors les capacités dont il aura besoin pour l'acquérir.

<------>

Selon le Ohr ha'Haïm haKadoch, il y avait 2 types de donateurs :
-> les plus nobles, ceux qui étaient "portés par leur cœur" à donner au-delà de leurs moyens ;
-> et les autres, ceux que "leur esprit avait porté à la générosité", de bon cœur, dans la mesure de leurs moyens.

<------------------->

-> "Tout le travail du Michkan ... fut fini et ils firent comme Hachem ordonna à Moché, ainsi ils firent" (Pékoudé 39,32)

Le 'Hatam Sofer enseigne :
Si tout le travail du Michkan était fini, que restait-il encore à faire? De plus, le verset semble redondant : ''Ils firent... ainsi ils firent''.

En fait, une fois que tout le Michkan était constitué, il restait encore à le dresser et le mettre sur pied. Cela était essentiellement le rôle de Moché. Mais le peuple voulait malgré tout essayer eux aussi de dresser le Michkan.
Ainsi, "Tout le travail du Michkan ... fut fini", mais le peuple ne voulait pas s'en arrêter là. "Ils firent comme Hachem ordonna à Moché", à savoir ils essayèrent de toute leur force de dresser le Michkan, qui était le travail qu'Hachem ordonna à Moché. Mais malgré tous leurs efforts, il n'y arrivèrent pas.
Néanmoins, quand quelqu'un s'efforce de faire une mitsva, même s'il n'y arrive pas, Hachem lui compte comme s'il l'avait faite.
Aussi, Hachem considéra que "ainsi ils firent", comme s'ils firent cela. Mais, comme ils virent qu'ils ne réussirent pas à dresser réellement le Michkan, alors, "ils amenèrent le Michkan à Moché", pour que lui, il réussisse à le dresser.

<------------------->

-> "Tout le travail du Michkan ... fut fini, et les enfants d'Israël firent comme tout ce que Hachem ordonna à Moché" (Pékoudé 39,32)

Selon le principe qui dit que celui qui s'affaire à une mitsva est dispensé des autres mitsvot, ainsi tant que les juifs étaient occupés à fabriquer le Michkan, ils étaient dispensés du reste. Mais, quand "tout le travail du Michkan fut fini", alors ils pouvaient de nouveau s'occuper de toutes les autres mitsvot de la Torah.
Ainsi, ils "firent comme tout ce que Hachem ordonna à Moché" = c'est-à-dire qu'ils pouvaient de nouveau faire toutes les autres mitsvot qu'Hachem avait ordonnées à Moché.
[Imré Shefer]

Questions/Réponses – paracha Vayakél & Pékoudé

+ Questions/Réponses - paracha Vayakél & Pékoudé :

1°/ Sur la paracha Vayakel :
Rachi (Vayakél 35,27) rapporte que le mot : "princes" (nési'im - נְּשִׂאִם) est écrit sans les 2 "youd" qui devraient normalement y figurer (נשיאים).
Cette anomalie constitue un reproche implicite pour ces illustres personnalités, qui n'ont apporté leurs dons qu'une fois que tous les autres matériaux aient été fournis, en comblant alors la totalité du manquant à donner.
En effet, la réponse du peuple a été si généreuse qu'il ne restait presque plus rien à offrir.

C'est donc pour sanctionner leur "paresse" à apporter immédiatement leurs dons que la Torah orthographie incomplètement leur nom.
[lors de l'inauguration du Michkan, ils n'ont pas reproduit cette erreur en apportant immédiatement leur offrande]

=> Pourquoi est-ce particulièrement la disparition de la lettre "youd"?

-> Le Kli Yakar explique que les Nési'im ont fait preuve d'arrogance en se déclarant capables de fournir quoique la nation entière n'aurait pas réussie à donner.

Hachem dit : "Des yeux hautains et un cœur enflé d’orgueil, je ne puis les supporter" (Téhilim 101,5), et c'est pour cela qu'Il a retiré la lettre youd, qui est la seule lettre de Son Nom qui est présente dans leur titre de : "Prince" (Néssi'im), faisant allusion qu'Il ne réside pas avec les orgueilleux.

[de même : "L’orgueilleux repousse les pieds de la présence divine. Hachem dit à son sujet : Moi et lui, nous ne pouvons demeurer ensemble!" - guémara Sotah 4b]

-> Le 'Hidouché haRim enseigne que la 1ere faute des Nési'im était de s'être séparés de la communauté, en acceptant de donner qu'une fois que tout le monde aura déjà contribué.
=> En raison du fait qu'ils se sont séparés de la communauté juive, la lettre youd, qui symbolise : Israël (ישראל - Bné Israël = les juifs = yidden), s'est également séparé de leur titre.

<--->

-> Le rav Zev Leff répond que les Nési'im ont mal compris tout l'objectif de donner au Michkan.
Ils pensaient à tord que Hachem avait besoin de ces contributions, et qu'ils viendraient ensuite offrir ce qu'il manquait.
Mais en réalité Hachem n'avait [personnellement] absolument pas besoin de ces objets, qui n'étaient que des opportunités offertes aux donateurs de se purifier et de s'élever.

[Hachem n'a besoin de rien. Lorsqu'Il nous demande un petit quelque chose, c'est en réalité une façon de nous donner le maximum en nous retirant la honte de tout recevoir gratuitement (le "pain de la honte"!).]

Ecrit avec un youd, le titre : נשיאים connote : "ceux qui portent".
Ecrit sans le youd, les voyelles peuvent être réarrangées et former : "ceux qui sont portés".

=> Le retrait du youd met en avant le fait que bien qu'ils pensaient porter le Michkan en comblant les manques, en réalité c'étaient eux qui étaient portés par le biais du mérite de la mitsva.

<--->

-> Le Gaon de Vilna donne la réponse suivante :
Sans aucun doute, de manière consciente les nési'im avaient l'intention de faire la meilleure chose, et ils s'engageaient même à apporter une éventuelle donation très importante (on donnera le montant qu'il manquera, quelqu'il soit!).
Cependant, profondément en eux, dans leur inconscient, leur motivation était moins pure et ils espéraient que le peuple donnerait la totalité de la somme requise, les laissant alors libres de toute obligation pratique, tout en ayant fait une proposition théorique très généreuse.

Pour prouver cela la Torah a retiré un "youd" de leur nom, car le "youd" est la seule lettre qui lorsqu'elle en est absente, passe inaperçue, puisque le mot est prononcé exactement de la même façon (avec et sans).

=> De la même façon, cela indique que leur défaut était d'une nature telle que, eux-mêmes n'en avait pas conscience, bien que présent dans leurs calculs.

<--->

-> Rachi : les chefs de tribu (néssi'im) ont dit : que la communauté apporte d’abord et donne ce qu’elle veut, et ce qui manquera nous le compléterons ... or comme ils avaient montré de la paresse au début, il manque une lettre au mot nessi'im.

-> Rabbi Soloveitchik s’étonne : le fait qu’ils n’aient pas apporté était dû à un calcul et était totalement désintéressé, c’était pour pouvoir apporter ce qui manquerait.
Et il répond : la Torah nous enseigne que quand nous devons faire une mitsva, tous les calculs du monde passent en second lieu. Comme les dons pour le Michkan étaient une mitsva, ils n’avaient aucune justification à tergiverser et à ne pas amener tout de suite.

-> Rabbi Réouven Grozowski propose une autre explication : Certes, les chefs de tribu avaient bien apprécié ce qu’il fallait pour le Michkan, mais ce n’était pas cela leur tâche.
Le rôle de quelqu’un n’est pas de réparer le monde et de compléter ce qui lui manque. L’homme doit s’améliorer lui-même, et dans ce travail-là, ce qui vient en tête est le zèle dans l’exécution.
"Une mitsva qui se présente à toi, ne la laisse pas passer" = Même quand les bnei Israël ont reçu l’ordre de donner pour la construction du Michkan, le but pour chaque personne n’était pas la construction elle-même, car Hachem n’a pas besoin d’aide pour construire le Michkan. C’était seulement un moyen pour l’individu de s’améliorer en donnant sa contribution. Et comme les chefs de tribu ont montré de la paresse envers cette mitsva, ils ont échoué.

-> Le ‘Hafets 'Haïm dit : S’il manque une lettre au nom des nessi'im, quand ils se sont mal conduits, il est certain que le côté positif va être encore plus grand quand ils se sont bien conduits.
Et effectivement, dans le passage de l’inauguration de l’autel dans la parachat Nasso, la Torah parle très longuement de l’offrande de chacun des chefs, et consacre même à chacun un paragraphe différent, sans les regrouper dans le récit, bien que leurs offrandes aient été identiques.
Cela nous enseigne combien est importante et chère devant Hachem une mitsva faite avec empressement avec toute la communauté, sans que personne se sente supérieur à l’autre et sans jalousie ni compétition.
Quand les chefs de tribu n’ont pas eu l’empressement de se joindre à la communauté dans leur offrande, il a manqué une lettre à leur nom, alors que quand ils ont tous apporté leur offrande avec empressement, la Torah leur a consacré une place particulière. Non seulement il n’a rien manqué à leur nom, mais chacun d’entre eux a même eu droit à un passage entier séparé.

<--------------------->

2°/ Sur la paracha Pékoudé :
Le midrach (Tan'houma 7) enseigne que Moché a tenu une comptabilité précise de l'utilisation de tous les matériaux qui avaient été donnés pour le Michkan, car certains juifs ont demandé où est-ce que l'ensemble de leurs biens ont pu partir, et si Moché n'en avait pas pris une partie pour lui.

=> Pourquoi une comptabilité similaire n'a-elle pas été réalisée par Aharon, qui a également pu collecter un montant important d'or pour ne réaliser qu'un petit Veau d'or?
[d'ailleurs la quantité d'or donnée pour le Michkan venait en réparation de celle investie pour la faute du Veau d'or]

-> Le rav Méïr Shapiro suggère ironiquement que la nature humaine est telle, que c'est uniquement lorsque l'on donne de l'argent pour des causes charitables et dans le but de réaliser une mitsva, que l'on va être très pointilleux, suspectant ceux qui s'en occupent et leur demandant des comptes précis.

-> Le rav Zalman Sorotzkin explique qu'au fond dans le cœur de tout juif, il y a un désir ardent de toujours faire la volonté de Hachem, de faire le bien.
Ainsi, lorsque l'on donne à une cause élevée comme l'était le Michkan, nous voulons que le moindre centime de notre contribution soit utilisé pour cet objectif (j'ai envie de réaliser la mitsva au maximum!), et c'est pourquoi ils ont demandé des comptes pour s'assurer à eux-mêmes que c'était bien le cas.
[il n'y avait aucune remise en cause de l'intégrité de Moché, mais plutôt un besoin d'entendre verbalement que leurs fonds étaient tous utilisés au mieux!]

Lorsque le yétser ara parvient à tromper quelqu'un en lui faisant donner à des causes pas très cachères, comme le Veau d'or, en réalité son être intérieur pleure son erreur, et c'est pour cela qu'il ne demande aucune preuve concernant l'utilisation de son argent.
D'ailleurs secrètement, il espère que celui qui a pris son argent va en garder pour lui-même, car cela va permettre de diminuer l'ampleur de la faute.

<--------------------->

3°/ Sur la paracha Pékoudé :
En ce qui concerne le Tsist (la Plaque frontale?) du Cohen Gadol, la Torah déclare : "ils y écrieront dessus : Kodéch l'Hachem (קֹדֶשׁ לַיהוָה)" (Pékoudé 39,30).
Pourquoi était-il nécessaire d'avoir plusieurs personnes pour y inscrire seulement 2 mots?

-> Selon les Mochav Zékénim, c'est parce qu'un des 2 mots inscrits était le Nom Saint de Hachem, et qu'il était nécessaire de l'écrire en présence de 10 hommes.

D'ailleurs ces commentateurs ajoutent qu'à chaque fois qu'un scribe écrivait le Nom Divin, comme pour les téfilin, mézouzot et Séfer Torah, il devait d'abord se tremper au mikvé et ensuite l'écrire avec la présence d'un minyan.
Cependant, le rav Moché Sternbuch note que cet avis est plutôt original, dans le sens où il n'est rapporté dans aucune autre source, ou par une autorité de la loi juive.

<--------------------->

+ Bonus :

-> "Tout l’or employé à cette œuvre, aux diverses parties de l’œuvre sainte" (38,24)

Le ‘Hida (‘Homat Anakh) rapporte au nom de rabénou Vidal haTsarfati : "Nos maîtres ont dit que le monde n’était pas apte à utiliser de l’or, et que celui-ci a donc été créé uniquement parce qu’il était nécessaire à l’œuvre du Michkan (Sanctuaire)."

C’est à cela que le verset fait allusion : "Tout l’or employé (créé)", dans le monde, ne l’a été que pour "l’œuvre", pour l’œuvre du Michkan.

"Comme Hachem l'avait ordonné à Moché" (Pékoudé 40,21)

-> Le Baal haTourim fait remarquer que la Torah insiste sur le fait que chaque aspect de la construction du Michkan a été fait exactement comme Hachem l'avait demandé à Moché.
C'est ainsi que les termes : "Comme Hachem l'avait ordonné à Moché" sont utilisés à 18 reprises dans la paracha Pékoudé, en allusion aux 18 bénédictions que nous récitons dans la amida de chacune de nos 3 prières quotidiennes.

<--->

-> "Pour quelle raison est-il répété à de nombreuses reprise : "Comme Hachem le lui avait ordonné" ?

Parce que les Bné Israël, en voyant que Moché ne construirait rien avec eux, commencèrent à le soupçonner : "Se pourrait-il que D. n'ait prescrit à Moché qu'un ouvrage rudimentaire, et que ce soit lui qui nous ait entraînés dans tout ce labeur?

Hachem répondit donc : "Parce que vous avez soupçonné Moché, J'inscris Mon Nom sur tous les ouvrages que Je lui ai ordonnés."
C'est pourquoi il est écrit à chaque fois : "Comme Hachem le lui avait ordonné."
[...]
En combien de mois l'ouvrage du Michkan fut-il achevé?

Rav Chmouël bar Na'hman dit : En 3 mois, Tichri, 'Hechvan, et Kislev.
Il resta démonté pendant les mois de Tévet, Chvat et Adar, et c'est le 1er Nissan qu'on l'érigea.
[...]
Pourquoi ne fut-il pas érigé immédiatement?

Parce que Hachem voulait associer la joie du Michkan à celle du jour où Its'hak naquit.
[...]
Mais les railleurs de la génération persiflaient et se moquaient en disant : "Voilà l'oeuvre du Michkan achevée, et on ne l'érige toujours pas!"

Mais ils ignoraient les pensées et les conseils de Hachem.
C'est à ce sujet que le roi David déclara : "Qu'elles sont grandes Tes œuvres, ô Hachem, infiniment profondes Tes pensées! L'homme dépourvu de sens ne peut savoir, le sot ne peut s'en rendre compte!" (Téhilim 92,5-7)."

[midrach Tan'houma Pékoudé]

<--------->

-> Le Beit haLévi enseigne :
La construction du Michkan vient racheter la faute du Veau d’Or, et pour lui l’essentiel de cette faute consiste en ce qu’ils ont voulu servir Hachem par leur propre sagesse et leur intelligence, avec des actes dont ils n’avaient pas reçu l’ordre.
C’est pourquoi dans la construction du Michkan, à propos de chaque chose il est dit qu’elle a été faite "comme Hachem l’avait ordonné".

Bien que Bétsalel ait su unir les lettres au moyen desquelles le Ciel et la terre ont été créés, et qu’il ait connu les allusions et les secrets du travail, malgré tout son intention était de faire uniquement la volonté de Hachem, et de la façon dont Il l’avait ordonné. C’est cela qui a fait l’expiation de la faute du Veau d’Or.

<--->

-> Le Ramban (dans Nasso) explique à propos du sacrifice des chefs de tribu pour l’inauguration de l’autel : Chacun a apporté la même chose, et la Torah revient 12 fois presque exactement sur les mêmes mots.
Le Ramban explique (au nom du Midrach) que bien que ç’aient été les mêmes sacrifices, chacun des chefs de tribus avait des intentions saintes différentes, c’est pourquoi tout méritait d’être écrit ...

Pour mériter la venue de la Présence Divine [dans le Michkan], il faut que tout soit saint et destiné au Ciel de la façon la plus parfaite. Et comme Moché et les bnei Israël avaient vraiment cette intention totalement désintéressée, il convient et il importe que chaque parole et chaque acte soit écrit individuellement ("Comme Hachem l'avait ordonné à Moché").

<------>

-> "Moché les bénit" (Pékoudé 39,43)

La construction du Michkan a été remplie de la manifestation de l’amour pour Hachem, de générosité et d’une haute sagesse, qualités supérieures qui ont fait mériter aux bné Israël que la Présence Divine repose sur le Michkan.
Pourtant, Rabbi Yé’hezkel Sarna fait remarquer que dès que le travail a été terminé, et que la Torah vient complimenter les volontaires et ceux qui ont fait le travail, elle n’a pas trouvé bon d’indiquer leur haut niveau de générosité ou de sagesse, mais uniquement qu’ils ont fait ce que Hachem avait ordonné à Moché.
=> Cela nous montre que de faire "comme l’a ordonné Hachem" est une qualité très haute, supérieure à toutes les autres, alors que toutes ces autres qualités sont seulement un moyen d’arriver au but de toutes les qualités : faire la mitsva de Hachem telle qu’elle a été donnée, "comme l’a ordonné Hachem".

"Voici les comptes du Michkan, Michkan de Témoignage, qui furent établis sur l'ordre de Moché" (Pékoudé 38,21)

-> La double répétition du terme : "Michkan" symbolise l'existence de 2 Michkan : un au Ciel et un sur terre.

Le mot "Michkan" provient du mot : "Moché'h", qui signifie : "tirer de", indiquant que le Michkan d'en-bas tire sa puissance et sa sainteté du Michkan d'en-haut.
[Rabbénou Bé'hayé]

-> "Est-ce qu'il existe vraiment une Jérusalem Céleste [qui correspond à la ville de Jérusalem sur terre et à son Temple]?
Oui c'est le cas.
[...]
Hachem a dit : Je n'entrerai pas dans la Jérusalem céleste, tant que je ne retourne pas au Jérusalem terrestre [au moment de la guéoula]."
[guémara Taanit 5a]

[dans le Ciel tout est prêt pour le 3e Temple, qui n'attend plus que notre comportement pour descendre immédiatement de nouveau sur terre.]

<------------->

-> Rachi commente : La répétition du mot : "Michkan" fait allusion à sa prise en gage (machkan) [par Hachem], lors des 2 destructions [du Temple] à cause des fautes d’Israël.

-> Dans le texte nous avons : "aMichkan, Michkan aédout" (du Michkan, Michkan de Témoignage - הַמִּשְׁכָּן מִשְׁכַּן הָעֵדֻת)

Rabbénou Bé'hayé de développer :
- Michkan (משכן) = guématria de 410, qui correspond à la durée d'existence du 1er Temple ;
- aMichkan (המשכן) = guématria de 415 + 5 (selon le principe permettant d'ajouter le nombre de lettres du mot) = 420 = la durée du 2e Temple ;
- aédout (העדת) = guématria de 479 = le Michkan a été construit durant la 2e année suivant la sortie d'Egypte, et il a duré pendant 479 années jusqu'à ce que le roi Salomon bâtisse le 1er Temple.

<------------->

-> La guémara (Yoma 21b) rapporte 5 choses qui étaient présentes dans le 1er Temple, mais pas dans le 2e :
- le Aron (l'Arche) avec les Lou'hot à l'intérieur ;
- le Ner Tamid (la faculté du feu des sacrifices à se brûler constamment et surnaturellement) ;
- la présence divine n’est pas revenue ;
- la prophétie a été perdue ;
- le Ourim véToumim, le 'Hochen du Cohen Gadol avait perdu sa capacité à répondre aux questions en s’éclairant miraculeusement.

-> "élé pékoudé aMichkan (המשכן), Michkan (משכן) aédout"

Selon le 'Hatam Sofer :
- on a : המשכן = le Michkan avec la lettre "hé" (ה) au début, faisant allusion au 1er Temple qui possédait 5 choses en plus ;
- puis : משכן = c'est relatif au 2e Temple, dans lequel il manquait ces 5 éléments.

<------------->

-> Il est dit deux fois le mot Michkan (משכן) pour faire allusion que le Temple d’ici-bas correspond exactement au Temple d’en-haut, comme il est dit : "Demeure (מָכוֹן) pour Ta résidence (Léchivtékha - לשְִׁבתְךְּ) que Tu as faite, Hachem" (Béchala'h 15,17).
מָכוֹן (Demeure) peut se lire מְכוּון (Mékouvane) orienté en face de "Ta résidence לשְִׁבתְךְָּ" [Midrache Tan’houma].
[A noter que le mot המשכן désigne le Temple Céleste, l’article "Le" (הַ) indique l’importance de ce Temple. Le mot משכן désigne le Temple Terrestre ; c’est pourquoi il est appelé "Michkan de Témoignage» car il témoigne de la Présence divine dans ce Monde inférieur, dans lequel D. y est "caché") [Likouté Si'hot].

-> Nos Sages disent que le Tabernacle (Michkan) est également appelé Sanctuaire (Mikdach).
On l’appelait Mikdach parce que les Bné Israël l’ont sanctifié (Kidchou) et s’y rassemblaient pour le Service sacré, et Michkan parce que D. y a fait reposer (Hichkine) Sa Chékhina.
Il est donc dit : "Ils me construiront un Sanctuaire (Mikdach - משכן), pour que Je réside (VéChakhaneti ושְָׁכנַתְיִּ) au milieu d’eux" (Térouma 25,8) – Le Sanctuaire (Mikdache), ce sont les Bné Israël qui le font, tandis que le Tabernacle (Michkan), Hachem le fait en y faisant reposer Sa Chékhina (d’où le fait que le mot Michkan soit mentionné 2 fois dans notre verset : une fois pour désigner le Mikdach des Bné Israël et une fois pour désigner le Michkan de D.)
[Chem miChmouel]

-> A propos du verset : "Les matériaux (apportés par les Béné Israël) suffirent et par-delà (le reste), pour l’exécution de tout l’ouvrage" (Vayakel 36, 7), Rachi commente : "Les matériaux qu’on avait apportés étaient suffisants à ceux qui accomplissaient le travail pour toute la construction du Tabernacle pour le faire, et pour qu’il en reste".
Ainsi, lorsque Moché décompta-t-il les prélèvements, il s’adressa au Peuple et leur dit : "J’ai fait telle et telle chose pour le Michkan, et avec le reste [des offrandes], j’ai fait [suite à la réponse d’Hachem, lorsqu’il Lui demanda quoi faire de l’excédent) un Michkan de Témoignage [michkan aédout] (pour les Paroles inscrites sur les Tables de Témoignage – c’est-à-dire une Maison d’étude – voir le Yafé Toar sur le midrach Yalkout).
C’est le sens de notre verset : "Voici les comptes du Michkan (relatifs aux prélèvements qui ont suffi à la construction du Tabernacle), (le reste ayant servi à la construction d’un) Michkan de Témoignage (c’est-à-dire un beit haMidrach)".
Le Zohar rapporte qu’Hachem demanda à Moché de n’utiliser que les dons des tsaddikim pour la construction du Michkan. Moché accepta tout de même, les dons de tous, afin de ne faire honte à personne, cependant, Hachem fit en sorte, de façon miraculeuse, que les offrandes des tsaddikim suffisent pour le travail du Michkane.
On comprend maintenant pourquoi est-il fait allusion à la destruction du Temple dans notre verset (comme Rachi l’indique) [alors que sa construction n’a pas encore eu lieu]. En effet, il s’agit d’une consolation pour ceux dont les offrandes n’ont pas été utilisées pour les travaux du Michkan : Nos Sages enseignent [guémara Méguila 29a] : "Qu’un jour viendra où les Synagogues et les Maisons d’étude [y compris celle de Moché] (principalement construites depuis la destruction du Temple et dans lesquelles réside la Chékhina) seront établies en Erets Israël (au sein même du 3e Temple – ce qui stipule dès à présent, la joie et la consolation – Maharcha)"
[Divré Yoël]

<------------->

-> A partir de cette répétition, Rachi affirme que les Temples ont été détruits comme gage, suite aux fautes d'Israël.
Pourtant, la Torah (Ki Tétsé 24,6) interdit de prendre en gage ce qui est vital pour l'existence d'une personne.
=> Comment Hachem a-t-il pu nous reprendre les 2 Temples, qui sont notre cœur et notre âme, lieux de focalisation de toute la vie juive! Comment D. a-t-Il pu les utiliser comme gages?

Selon le rabbi Avraham Twerski, la réponse est douloureuse mais réelle : est-ce que dans notre vie quotidienne nous ressentons que nous ne pouvons pas vivre sans le Temple?

Si nous les avons perdus, c'est parce que nous ne les apprécions pas suffisamment.
Si à nos yeux, ils auraient été vitaux, véritablement indispensables à notre vie, alors Hachem n'auraient jamais pu nous les retirer.

=> Ainsi, c'est à nous de jouer, en témoignant à Hachem par nos prières, nos larmes, ... à quel point nous avons besoin du Temple, à quel point il est crucial à notre existence même.
Alors, nous avons la certitude que Hachem nous le rendra immédiatement, car halakhiquement un gage sur un objet vital est interdit!

<--->

-> Le rav Zalmeleh de Volozhin fait un commentaire similaire.

La Torah (Michpatim 22,26) enseigne que si nous prenons à l'emprunteur un objet en gage sur le montant prêté, comme un habit, il faut lui retourner avant le coucher du soleil afin qu'il puisse s'en servir.
Il est écrit (v.26-27) : "Si tu saisis, comme gage, le manteau de ton prochain, au soleil couchant tu devras le lui rendre. Car c'est là sa seule couverture, c'est le vêtement de son corps, comment abritera-t-il son sommeil? Or, s'il se plaint à moi, je l'écouterai, car je suis compatissant."

=> Il en découle que si Hachem a pu nous prendre en gage les 2 Temples, c'est qu'à nos yeux nous avons trouvé des choses pouvant se substituer aux Temples.
Puisque nous ne pleurons pas véritablement pour le retour du gage, Hachem ne nous le retourne pas!
[en effet : "s'il se plaint à moi, je l'écouterai, car je suis compatissant"]

Le rav Zalmeleh ajoute que toute personne qui est sincèrement peinée par l'absence du Temple, et qui implore Hachem de tout son cœur de le ramener, alors elle méritera en cadeau du Ciel une bénédiction identique et la même présence Divine qu'elle recevrait si le Temple existait actuellement.

<------------->

+ Pourquoi est-ce que ce sujet apparaît précisément au moment du compte des matériaux utilisés dans la construction du Michkan?

-> Le rav Chimon Greenfeld (Zahav Shéva) répond qu'une chose qui provient d'une source totalement pure, ne pourra jamais entraîner de mauvaises conséquences.

Le midrach (Chemot rabba 51,1) nous enseigne que si Moché a eu besoin de détailler l'utilisation de tous les matériaux apportés pour le Michkan, c'est parce qu'il a entendu des juifs qui ont suggéré cyniquement qu'il avait pris certaines des donations pour lui-même afin de s'enrichir.
Pour prouver que tel n'était pas le cas, il a dû justifier de la bonne utilisation de chacune des ressources reçues.

=> Le fait que l'origine de la construction du Michkan a été souillée par de fausses accusations contre Moché, a entraîné que dans le futur il pourra être repris comme "gage", et c'est pour cela que cette idée apparaît ici.

[s'il n'y avait pas eu de soupçons sur l'honnêteté de Moché, les Temples n'auraient jamais pu être détruits, puisque provenant d'une origine totalement pure!]

"Ils firent la plaque frontale, la sainte couronne, en or pur, et ils inscrivirent dessus une inscription gravée comme un sceau : "Saint pour Hachem". " (Pékoudé 39,30)

-> La guémara (Arakhin 16a et ainsi que Zéva'him 88b) dit que ce vêtement [que le Cohen gadol porte] servait de réparation aux personnes qui sont effrontées.

-> De même, le Zohar enseigne que lorsque le Cohen gadol porte la plaque frontale (le tzitz) cela va neutraliser et calmer les effrontés du monde entier.

<-------------->

-> "Yehouda ben Teima avait coutume de dire : "L’effronté est voué au Guehinam et celui qui est réservé, au Paradis. Puisse être Ta volonté, Hachem notre D. et D. de nos pères, que le Temple soit reconstruit prochainement, en nos jours et de nous accorder notre part dans Ta Torah." (Pirké Avot 5,20)

Il y a un lien entre 3 éléments : l'effronté, le Temple et la Torah.
Pourquoi cela?

Selon le Tzvi lé'Israël, l'auteur de cette michna : Yéhouda ben Teima, s'est rendu compte à quel point les effrontés causent de nombreuses souffrances à de bonnes personnes.
En réponse à cela, il va prier Hachem de ramener le Temple, car ainsi le Cohen gadol portera de nouveau la plaque frontale (le tzitz), ce qui permettra de neutraliser ces gens.

Il a également prié pour la Torah, car la guémara (Bétsa 25b) assure que la Torah a été donné aux juifs afin de neutraliser notre effronterie et notre ardeur naturelle.

<-------------->

-> L'effronterie est une faute si grave qu'elle a causé la destruction de Jérusalem.
C'est pourquoi nous prions d'acquérir la réserve, grâce à elle, le Temple sera reconstruisit.
[...]

L'effronterie cause le manque de pluie.
En effet, la gratitude constitue l'un des fondements du judaïsme. Il est évident que peu de défauts surpassent l'ingratitude.
Nous devons toujours être conscients de tous les bienfaits que Hachem nous a accordé et agir comme si D. était notre créancier.
Comme l'effronté n'est pas conscient de la miséricorde Divine et agi comme si D. lui devait quelque chose, alors D. retient le bien qu'Il aurait désiré offrir et ne donne pas la pluie.
Or, il n'est rien dont l'humanité ait plus besoin que la pluie.
[...]

Si une personne n'a pas la qualité de retenue, on peut conclure que ses ancêtres n'étaient pas présents au mont Sinaï, lors du don de la Torah.
Sa nature effrontée montre sans doute possible qu'elle faisait partie de la multitude de nations (érev rav) qui ne se trouaient pas au mont Sinaï. [Sifté Cohen]
[Méam Loez - Tétsavé 28,39]

"Les 1 775 [Shékels], il en fit des crochets pour les piliers, recouvrit leurs sommets et les enrubanna" (Pékoudé 38,28)

Il faut savoir que les lettres de la Torah revêtent une grande sainteté ; chacune d'elles recèle d'infinis mystères et sont à l'origine de nombreux mondes.

Comme le corps pour l'âme, elles sont les "habits" de ces mondes inaccessibles, et il faut donc veiller à leur sainteté lors de l'étude de la Torah et la prière.

Leurs formes figurant dans les rouleaux de la Torah se retrouvent spirituellement dans les sphères supérieures, ainsi que leurs "combinaisons" (tséroufim) et leurs valeurs numériques (guématria).

Il y a en tout 27 lettres dans l'alphabet (22+5 finales).
La valeur numérique de toutes ces lettres est égale à : 1 775.

=> Ainsi, le verset peut se comprendre : Les 1 775, c'est-à-dire les 27 lettres, le Créateur "en fit les crochets pour les piliers" des mondes supérieurs, en donnant une forme concrète à ces lettres pour les rendre accessibles, que nous puissions les comprendre, nous qui sommes des être de matière.

Source (b"h) : dvar Torah du Abir Yaakov - Rabbi Yaakov Abe’hessera - dans son Pitou'hé 'Hotam

"Une béka par tête ; un demi-shékel du shékel saint pour chaque personne qui sera comptée, depuis l'âge de 20 ans et au-dessus, pour 603 550 [personnes]." (Pékoudé 38,26)

-> Le peuple juif a été compté exactement au même nombre, lors du premier décompte en Tichri et du second décompte en Nissan, malgré les six mois qui se sont écoulés. Comment est-il possible que leur nombre n'ait pas changé au cours de ces 6 mois? Après tout, il y avait certainement des personnes qui avaient atteint l'âge de 20 ans pendant cette période.

La réponse est que seuls ceux qui ont eu 20 ans avant au début de Tichri, le début de l'année, ont été inclus dans le décompte. Puisque Tichri ne s'est pas écoulé entre les deux décomptes, toute personne qui n'était pas incluse dans le premier décompte était également exclue du second (Rachi - Ki Tissa 30,16).

Pourtant, la question demeure : Personne n'est-il mort pendant ces 6 mois?

Le décompte incluait ceux qui avaient entre 20 et 60 ans.
Dans le désert, personne ne mourait à moins de 60 ans. Nos Sages nous disent que celui qui meurt avant l'âge de 60 ans est considéré comme mort prématurément. Bien que de nombreux justes soient morts prématurément, y compris Chmouel haNavi qui est mort à l'âge de 52 ans, c'est parce que la durée de vie d'une personne est déterminée par le mazal (constellation) sous lequel elle est née, comme le rapporte la guémara (Moed Katan 28b) : "La durée de vie d'une personne ne dépend pas de la droiture, mais [plutôt] du mazal".
Cependant, le peuple juif, lorsqu'il était dans le désert, n'était pas du tout sous l'influence du mazal, et sa durée de vie était déterminée directement par la Providence divine.
En effet, la nation a connu des miracles constants dans le désert : la manne, les vêtements qui ont poussé en même temps qu'eux, le puits de Myriam, et bien d'autres choses encore. Aucune partie de leur vie n'était régie par la loi naturelle, et leur durée de vie ne faisait pas exception. En tant que tels, ils ont tous vécu une durée de vie complète, déterminée directement par la Providence divine.
[Maharal - Gour Aryé - Pékoudé 38,26]

<--->

-> En résumé :
Dans le désert, le peuple juif a vécu dans un environnement remarquable et surnaturel. Ils n'étaient pas du tout sous l'influence du mazal. Ainsi, chacun vécut au moins jusqu'à 60 ans, et personne ne mourut prématurément. Ainsi, leur nombre est resté remarquablement constant d'un décompte à l'autre, même après une période de 6 mois.

Le ayin ara

+ "Ceux-là sont les Pékoudé (comptes) du Michkan, Michkan du témoignage, qui ont été comptés sur ordre de Moché,...
Tout l'or, celui fait pour le travail, ... l'or de l'offrande balancée fut de 29 kikar et de 130 shékalim... Et l'argent (produit) du recensement de l'assemblée fut de 100 kikar et 1 775 Sh2kalim selon le shékel du Mikdach ...
[...]
Moché vit tout le travail et voici qu'ils le firent comme l'ordonna Hachem. Moché les bénit ... La nuée couvrit le Ohel moed et l'honneur d'Hachem remplit le Michkan. Et Moché ne put venir vers le Ohel Moed car la nuée résidait sur elle et l'honneur de Hachem remplissait le Michkan" (Pékoudé 38,21-28 ; 39,43 ; 40,34-35)

-> Rachi rapporte : "Ceux-là sont les comptes du Michkan" : ont été énumérés dans cette paracha les poids de toutes les offrandes pour le Michkan, en argent, en or et en cuivre et y sont énumérés tous les ustensiles servant à la avoda.

=> Nous avons donc devant nous une paracha qui traite essentiellement de calculs, de comptes, de dénombrements et qui s'achève sur la bénédiction de Moché souhaitant aux Bné Israël que la Ché'hina (présence divine) réside dans l'œuvre de leurs mains, et ce fut le cas.

-> Le Zohar hakadoch (Vayakel 225b) écrit :
"Comment est-ce possible que d'une paracha faite de comptes et de calculs, s'ensuive tant de bénédictions ; voici que la bénédiction ne réside que dans une chose comptée ou dénombrée".

En d'autres termes, notre paracha est une contradiction au célèbre principe de la guémara (Baba Métsia 42a) :
"Rabbi Itsh'aq a enseigné : la bénédiction ne se trouve que dans ce qui est caché de l'œil.
Rabbi Ichmaël enseigne dans une braïta : la bénédiction ne se trouve que dans les endroits où l'oeil n'a pas de chlita (domination/accès).
Une autre braïta [dans cette guémara] enseigne : lorsque l'homme va engranger sa récolte, qu'il dise : "Que ce soit Ta volonté Hachem que tu multiplies le fruit de mes actions" [c'est-à-dire que comme pour l'instant il n'a pas compté, Hachem peut multiplier la quantité de fruits miraculeusement] ; une fois qu'il a fini de compter cette prière deviendra une prière en vain (téfilat chav/lévatala), car la bénédiction ne peut plus se trouver dans ce tas, une fois qu'il a été compté".

-> Le Manarcha explique que le fait que la bénédiction n'existe que dans ce qui est caché de l'oeil et qui n'est pas compté est dû à l'impact du ayin ara qui empêche la bénédiction et donc la multiplication de la récolte.
Tant que l'oeil n'a pas compté, il est encore possible de prier afin qu'Hachem multiplie les fruits de nos actions.
Une fois que l'oeil, de qui que ce soit, s'est posé sur la récolte, la bénédiction ne peut plus résider.

=> Ainsi le Zohar fait remarquer que notre paracha qui parle ce comptes et de calculs ne devrait pas se conclure par les bénédictions de Moché [qui constitue la plus grande des bénédiction qui existe]. Ceci étant contradictoire d'après le principe de la guémara.
b'h, nous expliquerons cela ultérieurement dans la suite du dvar Torah.

<--->

-> Rachi, dans la paracha Michpatim écrit : "A chaque fois qu'il est écrit "VéElé" (et voici), cela vient marquer une association entre ce texte et le texte de la Torah qui précède. Lorsqu'il est écrit, par contre, "Elé" (voici) sans le Vav (et), cela vient marquer une rupture et une opposition avec ce qui a précédé".

-> Le Ohr ha'Haïm hakadoch demande :
"Sil en est ainsi, pourquoi notre paracha (Pékoudé) commence-t-elle par : "élé pékoudé haMichkan", sans le "vav" (et). Quelle est donc la rupture ou l'opposition qui est marquée par rapport aux parachiot précédentes (qui traitent des mêmes sujets).
[Il répond] : cela t'apprend que tous les comptes qui ont existé dans la Torah jusqu'alors ont empêché la bénédiction à cause du ayin ara (mauvais oeil), alors que le compte du Michkan, à l'inverse est vecteur de bénédiction car plus le compte sera grand et plus les mérites et les bénédictions seront importantes".

=> Ainsi, d'après le Ohr ha'Haïm haKadoch, l'effet du compte du Michkan est donc à l'inverse de tous les autres comptes de la Torah, ce qui explique la rupture faite au début de notre paracha : "élé pekoudé" sans le "ét".
b'h, nous développerons cela ultérieurement ci-dessous.

<--->

-> "Hachem a parlé à Moché en disant : lorsque tu compteras les Bné Israël selon leur nombre, chacun donnera une expiation pour son âme (un demi-shékel) afin de les dénombrer et ainsi il n'y aura pas de fléau lorsque tu les dénombreras.
Tous ceux qui passeront pour le dénombrement donneront : un demi-shékel, à 20 guéra par shékel, offrande pour
Hachem" (Ki Tissa 30,11-13).

-> Rachi explique : "et il n'y aura pas de fléau" : car le fait de dénombrer permet au ayin ara (mauvais œil) d'agir et cela entraine la peste ou d'autres fléaux, comme nous pouvons le voir à l'époque du roi David (d'où la nécessité de ne pas compter les Bné Israël eux-mêmes mais de ne compter que chaque demi-shékel donné pour le Michkan).

[en ce sens, la Guemara (Yoma 22) : "il est interdit de compter les Bné Israël, même pour les besoins d'une mitsva", comme par exemple pour un minyan. ]

<--->

=> Qu'est-ce que le mauvais oeil (ayin ara)?

-> Le Gaon de Vilna nous enseigne que lorsque l'on veut connaître la définition d'un principe, d'un mot ou d'un concept de la Torah, il suffit de regarder dans la Torah la manière dont ce mot est employé et d'après son contexte : expliquer l'essence du principe.
C'est dans la paracha Réé que la Torah nous parle explicitement du Ayin ara (mauvais cil).
Voici un extrait du texte (Réé 15,7-8-9):
"Lorsqu'il y aura dans ta ville un pauvre parmi tes frères ... N'affermis pas ton cœur et ne ferme pas ta main par rapport à ton frère pauvre ; ouvrir, tu ouvriras ta main et tu lui prêteras tout son besoin et ce qui lui manque. Prends garde qu'il n'y ait pas dans ton cœur une pensée hérétique en disant : l'année de la Chémita arrive et tu aurais un mauvais œil envers ton frère pauvre et tu ne lui donnerais pas (son besoin). Il appellera alors vers Hachem et Hachem te le comptera comme une faute (avéra). Donner, tu lui donneras, et tu n'auras pas un mauvais cœur en lui donnant car c'est à cause de ça qu'Hachem te bénira dons toutes tes actions et dans toutes tes entreprises".

=> Nous voyons donc que la première fois que la Torah emploie le terme "mauvais oeil" (ayin ara) cela ne concerne pas un cas de jalousie d'un homme envers un autre, car personne ne jalouse un pauvre!
Il s'agit plutôt d'un regard malveillant d'un homme qui ne veut pas aider son prochain.
La Torah nous enjoint alors, par de nombreux interdits déOraïta et par de nombreuses mitsvot assé de combler largement le besoin de notre frère pauvre avec un bon œil et avec un bon cœur.

-> Le Séfer ha'Ikarim écrit que lorsqu'Hachem nous promet la bénédiction en conséquence de cette tsédaka ce n'est pas en tant que récompense du don lui-même mais plutôt comme récompense du bon œil dont nous aurons fait preuve.
Comme il est écrit dans le verset de Michlé : "celui qui a un bon œil sera béni" (tov ayin ou yévora'h).
D'où l'intérêt d'apprendre ce qu'est le mauvais œil pour nous en éloigner le plus possible et mériter la bénédiction d'Hachem.

-> Rabbenou Yona (Chaaré Techouva 3,35) écrit :
"Dans ce passage de Réé (ci-dessus), la Torah nous interdit d'avoir un œil étroit mais au contraire Il faut donner avec un bon œil. A ce sujet, le verset : "celui qui a un bon œil sera béni", car il ne suffit pas de donner de l'argent, mais Hachem attend de nous que nous ancrions en nous la mida de générosité et de largesse".

-> Le Rambam (dans son livre des 613 Mitsvot) écrit :
"la Torah nous interdit dans ce passage d'avoir un mauvais œil envers le pauvre en lui donnant la tsédaka ; c'est-à-dire qu'il nous est interdit de considérer cet argent comme un manque pour nous. Au contraire, la tsédaka doit être considérée à nos yeux comme un mérite, un profit et une source de bénédictions dans notre argent".

-> Le Néfech Yéhoudi (Pékoudé 5779) ajoute :
Nous avons une nouvelle définition du ayin ara (mauvais œil). Il ne s'agit pas seulement d'un mauvais oeil envers le pauvre, mais plutôt de tout oeil qui est étroit.
La guémara (Pessa'him 50) enseigne d'ailleurs que celui qui dérange les autres, les énerve, ou abuse de leur patience réveille du ayin ara contre lui-même.
C'est là le principe : toute personne ou chose qui pourrait éveiller un œil étroit à son sujet, mérite d'être endommagé par ceux qui le "regardent mal".
[ la jalousie n'est donc qu'un exemple parmi tant d'autres : d'œil étroit contre l'autre ]

<--->

Le Néfech Yéhoudi (Pékoudé 5779) rapporte quelques exemples d'ayin ara dans la guémara :
- celui qui fait travailler son épouse dans une poste fatigant et mal rémunéré et la fait souffrir par-là, ne verra pas de bénédiction, à cause du ayin ara : soit le ayin ara de sa femme qui regarde son poste avec haine ou le mauvais œil des proches qui n'apprécient pas la démarche de ce mari et ne le regarde pas d'un bon œil.
- de même, le bucheron dont le métier serait de couper des bons arbres fruitiers, entraînant le mécontentement des
autres habitants de la ville n'aura pas non plus de bénédiction dans son bois, car l'œil en colère des autres citoyens endommagent sa production.
- aussi, celui qui s'arrange pour recevoir la meilleure part lorsqu'il a un partage et éveille par-là le mécontentement des autres, n'aura pas de bénédiction dans sa part.
- enfin, celui qui se fait remarquer parce qu'il possède une marchandise très voyante ou dérange les autres parce qu'elle est encombrante (du foin ou de lin) n'aura pas non plus de bénédiction dans son travail car il attire le regard des gens, voire le mécontentement. (guémara Pessanim 50)

<--->

-> Le rav Yérouh'am Lévovitz de Mir enseigne :
"La définition du Bien ne se résume pas à faire de bonnes actions ou à aider les autres, mais le Bien (Tov) en essence est ce qui est immensément grand (Gadol), béni, et à profusion. Être Bon avec les autres signifie être Grand avec eux, c'est-à-dire vouloir leur donner à l'infini sans aucune limite et sans aucun œil étroit.
C'est seulement lorsque nous touchons la dimension de grandeur et d'infini dans notre don aux autres que nous touchons à la notion de Bien ... comme nous le voyons dans la Torah lorsqu'elle nous dit : "que ton cœur ne soit pas mauvais, en donnant aux pauvres. La Torah définit donc que le "Mal" peut même se trouver chez celui qui donne la tsédaka à son prochain, si seulement il la réalise avec une certaine étroitesse ou avec une quelconque souffrance.
Le Bien n'existe donc que lorsqu'il est illimité et prodigué sans aucune étroitesse. Le Mal c'est au contraire la limite dans ce bien : l'étroitesse ou encore les empêcheurs de ce Bien".

-> Le Néféch Yéhoudi (Vayakel 5779) commente :
Nous voyons dans ces paroles que : le Mal n'est pas une entité en soi ou une force à part entière, mais c'est seulement une possibilité qu'Hachem a laissé dans le monde de limiter le Bien, de l'endommager, voire de l'empêcher totalement d'exister.
Aucune action n'est mauvaise en soi : manger peut être une mitsva comme une avéra ; tuer peut être une mitsva comme une avéra .... tout dépend du contexte de sa réalisation et de la place que nous avons laissée au Bien et à Hachem pour résider dans notre action.
Plus une action est vide de tout Bien et vide les autres de Bien, plus elle peut caractérisée comme mauvaise. Le yetser ara c'est donc le penchant pour le vide de Bien ou la destruction du Bien.

=> Ainsi, celui qui prodigue du Bien mais en laissant dans son cœur un manque de largesse ou encore qui met des limites à sa bonté ('hessed), n'est pas seulement quelqu'un qui n'est pas un grand tsaddik mais quelqu'un qui adopte un comportement qui a trait au domaine du mal, dans la mesure où le Mal n'est rien d'autre que la limite que l'on place au Bien.
On comprend mieux ce que la Torah nous dit à plusieurs reprises et notamment dans Nitsavim (30,15) : "Je place devant toi le Bien et le mal, la vie, la mort ... et tu choisiras la vie". Ce parallèle est tout à fait significatif : de même que la mort n'est rien d'autre que l'absence de vie, le mal aussi n'est rien d'autre qu'une absence de Bien, voire un manque, ou même une limite.

-> "Celui qui a un bon œil est béni" (tov ayin ou yévora'h - Michlé 22,9).
Le midrach dit : "Qui a un bon oeil? Ce verset s'applique (notamment) à Moché Rabbenou qui avait un bon œil envers tout le Klal Israel.
[Le midrach ajoute] : ne lis pas "ou yévora'h" (il est béni) mais "ou yévaré'h" ([celui qui a un bon œil] c'est lui qui bénira).
[c'est pourquoi Moché Rabénou a été choisi pour bénir le klal Israël dans la paracha Vézot habéra'ha (la dernière de la Torah)"
= c'est-à-dire qu'en plus de recevoir des bénédictions d'Hachem pour son bon œil, Hachem donne à cet homme la possibilité d'être une source de bénédictions.

-> Le rav Yérouh'am Lévovitz de Mir explique :
Hachem est Lui-même Tov, le bien à l'état pur, infiniment et absolument. Hachem a choisi que Sa Bonté et Ses bénédictions se répandent à l'infini dans le monde par l'intermédiaire de tuyaux qui seront les vecteurs de cette bénédiction pour eux-mêmes et pour le monde enter.
Qui pourra mériter d'être un tuyau des bontés d'Hachem?
Celui qui s'efforce de ressembler à Hachem dans sa qualité (mida) d'être Infiniment bon, sans aucune étroitesse et
sans aucune limite. C'est ce que dit le midrach : "celui qui a un bon œil c'est lui qui bénira'*
Le rav Yérouh'am Lévovitz ajoute que s'il n'y avait pas d'hommes Bons sur terre à l'image d'Hachem, alors les flux célestes s'arrêteraient immédiatement et le monde reviendrait au Tohou Bohou.

C'est dans cette mesure qu'Hachem a dit à Avraham : "tu seras toi-même une source de bénédictions" (véhéyé béra'ha) = car vu qu Avraham était Infiniment bon avec tout le monde, Il a mérité d'être le tuyau de la bénédiction et des bontés d'Hachem et d'avoir ainsi, entre les mains, le pouvoir de bénir.
Dans le midrach rabba (début de Vaéra), il est même enseigné que Hachem a decidé de dispenser toute sa bonté ('hessed) dans ce monde-ci par l'intermédiaire du mérite d'Avranam, comme la Torah le dit en allusion : "voici les engendrements du ciel et de la terre lorsqu'ils ont été créés" (élé toldot chamayim vaaréts béhibaréam) ; "Ne lis pas béhibaréam (בְּהִבָּרְאָם) mais plutôt : béAvraham (בְּאַבְרָהָם)" (constitué des mêmes lettres). [la bonté sera dispensée dans toute cette Création].

Le midrach (Berechit rabba 32l) enseigne que :
- celui qui s'approchait d'Avraham obtenait, seulement en le regardant, une guérison à toute maladie.
- celui qui empruntait une vache à Avraham s'enrichissait grâce à elle.
- les matelots lorsqu'ils étaient en danger au cours d'une tempête mentionnaient seulement le nom d'Avraham et cela suffisait pour qu'ils soient sauvés.
[ => C'est là un exemple magnifique de perfection dans ce domaine d'être bon à l'innfini et de devenir ainsi un vrai vecteur des bontés d'Hachem sur terre. ]

-> Dans la guémara (Béra'hot 17b) nous pouvons trouver un élément de plus pour définir le bon œil :
"(Hachem a dit) le monde entier ne se nourrit que par le mérite de 'Hanina, Mon fils, [qui est le "tuyau" de sa génération], mais lui ne mange qu'un kilo de carouble par semaine".

Le Néféch Yéhoudi (Vayakel 5779) explique :
En d'autres termes, Rabbi 'Hanina Ben Dossa nous enseigne que pour être un vrai tuyau de bénédiction il ne suffit pas de donner autour de soi, mais il faut aussi soi-même se suffire de peu. Plus nous ancrons en nous cette tendance à donner sans limite et effaçons de nous cette petitesse de vouloir toujours prendre pour nous-même, plus nous nous attachons a la mida de Tov (bonté) d'Hachem. C'est dans ces conditions que nous serons nous-mêmes vecteurs de ce bien, ne serait-ce que par notre regard.
Avraham lui aussi, dit le midrach raba, lorsqu'il servait des repas royaux à de simples bédouins, pour sa part ne mangeait rien, et même jeunait ; il avait compris que la perfection dans le Bien s'obtient lorsque l'on ressemble parfaitement à Hachem qui donne en permanence et Infiniment sans rien recevoir en échange.

-> "Celui qui possède 3 qualités est élève d'Avraham avinou : un bon oeil, un esprit humble et une âme peu désireuse ; et celui qui possède 3 défauts est élève de Bil'am : un mauvais œil, un esprit orgueilleux, et une âme désireuse" (Pirké Avot 5,19)
On pourrait croire qu'il s'agit de 3 qualités indépendantes, mais Rabbi 'Hanina ben Dossa e Avraham avinou lui-même nous enseigne l'inverse : seul celui qui est humble et qui n'est pas intéressé par les désirs matériels de ce monde peu acquérir la précieuse qualité de ayin tova (bon oeil) : secret pour véhiculer la bénédiction, et inversement : celui qui s'attache aux désirs et à la matière s'éloigne de cette "bonté infinie".
[ainsi la qualité de ayin ara est liée à un esprit orgueilleux, et à une âme désireuse! ]

<--->

-> b'h, sur la notion d'ayin tova : http://todahm.com/2023/04/13/39074

<--->

-> En se basant sur ce qu'on a pu voir précédemment, le Néféch Yéhoudi (Vayakel 5779) enseigne :
Le mauvais œil (ayin ara) c'est donc l'exact contraire de cette tendance à vouloir donner à l'infini, c'est "l'œil étroit" envers ceux qui gravitent autour de lui.
Quand bien même, un homme prodigue la tsédaka, vu qu'il est encore attaché à l'étroitesse d'esprit, au manque de compassion, et à l'égoïsme, il possède en lui des racines de mal (ra).

[Pour illustrer cela, on peut citer : ]
- Même envers notre propre personne, nous portons en nous une certaine étroitesse d'esprit ; en l'occurrence : si j'ai compté dans ma récolte 1 tonne de blé, je me dis que je ne pourrai pas vendre 2 tonnes, ni me nourrir de 2 tonnes. Cela est vrai d'après les principes de ce monde ci que nos yeux ont l'habitude de voir ; cependant, ces considérations humaines, ne tiennent pas compte de la potentielle intervention bienfaitrice d'Hachem.
Il n'en reste pas moins que puisque notre oeil a fixé ces limites, en comptant la quantité exacte que nous possédons, cela implique un certain "ayin ara" sur nous-mêmes qui empêchera la bénédiction de s'installer sur cette tonne. Tant que "nos yeux étroits" n'ont pas vu ou compté le blé, nous pouvons encore demander à Hachem qu'il multiplie notre récolte.

- la guémara (Baba Batra 2b) enseigne : "il est interdit de se tenir devant le champ de blé de son ami lorsque les épis sont beaux et à maturité. Pourquoi? Car cela aura comme effet d'endommager toute la récolte".
En d'autres termes, nous devons craindre le mal (le ra) qui est en nous-même et éviter de regarder la réussite de notre prochain, car même si nous ne sommes pas jaloux ou en colère cela entraînerait naturellement une limite de la bénédiction voire un dommage sur ses biens. Que nous le voulions ou non notre œil est (pour l'instant) étroit, et même par rapport à nos propres biens. Inversement, nous devons également être discrets de ne pas éveiller le regard des autres sur nous et surtout nous ne devons pas éveiller chez eux des sentiments de jalousie, d'envie, d'infériorité ou de désir de ce que nous possédons, car ce serait le plus grand vecteur de ayin ara.

Nous avons ici, par l'exemple de la récolte, un effet de "mauvais œil" assez subtile qui peut empêcher l'arrivée de la bénédiction de venir, même pour soi-même ; car l'œil en essence implique la limite et l'étroitesse. Cependant. l'œil peut devenir chez certain une vraie arme mortellement dangereuse.
En effet celui qui s'attache vraiment au mal (ra) devient lui aussi, inversement à Avraham avinou ou Moché rabbénou, un tuyau pour déverser le mal autour de lui et même son oeil devient endommager. Il déverse sur tout ce qu'il voit des "flux" d'étroitesse, de limites, voire de destruction qui sont l'expression de ce qu'il est intérieurement ou de ce qu'il ressent envers l'autre.

De même qu'une impureté peut rendre impurs tous les objets qui se trouvent dans la pièce (toumat ohel) ou tout ce
qu'elle touche (toumat maga), de même celui qui est mauvais (ra) entraîne des mauvais flux autrour de lui.
A ce sujet, nos Sages ont dit : "malheur à l'impie et malheur à son voisin" (oï la racha véoï lichkhéno)
sages ont dit : "Oi la racha véOï lichkhéno. Le rav Yérouh'am Lévovitz de Mir explique que le premier à
être endommagé par le Ra (mal) qui est dans un homme, c'est cet homme lui-même. Parallèlement, celui qui est Bon et devient un tuyau de bonté est également le premier à être béni.

Il est pourtant clair, dans les paroles de Nos sages, que ce n'est pas le mauvais œil qui tue mais bien la faute (avéra) qui tue, comme l'a déclaré Rabbi 'Hanina ben Dosa. En effet, la faute rend l'homme mauvais et le rapproche donc des souffrances et de la mort qui sont la conséquence naturelle du Mal qui a été réalisé (midrach raba - Ochéa).
Il n'en reste pas moins que Hachem est extrêmement patient et c'est pour cette raison que la faute ne tue pas
immédiatement sur le coup. L'entrée du Mal en nous ne fait pas les mêmes effets que le venin du boa quand bien même il est cent fois pire.
La faute attend patiemment à coté de nous, le jour où elle pourra laisser exprimer sa nocivité.

Comme l'explique le Tomer Dévorah :
"Chaque faute crée un ange destructeur. Cet ange monte devant Hachem et lui dit : voilà c'est Réouven qui ma créé. Il faut maintenant me nourrir, demande l'ange destructeur ; puis-je aller me nourrir de Réouven qui m'a crée?
Si Hachem le laissait, il descendrait immédiatement et entrainerait de grandes souffrances et destructions sur cet homme qui a fauté. Il recevrait sa punition immédiate pour sa faute jusqu'à ce que l'ange soit rassasié.
Que fait Hachem dans cette situation?

Il est "nossé avone vaFécha é'hataa = Il porte les fautes et les rebellions et erreurs [et il nourrit Lui-même les anges destructeurs, comme Il nourrit le monde entier.
Le Tomer Dévora ajoute : Hachem donne à ces anges destructeurs de Sa propre Présence Divine (Chékhina) afin de les apaiser et attend patiemment que Réouven fasse téchouva et qu'il répare lui-même toutes conséquences de ses fautes".

=> Ainsi, c'est le Mal qu'un homme porte en lui (par ses propres fautes) qui est la source de toute destruction, souffrance ou même de la mort, mais Hachem ne laisse pas ce Mal s exprimer parce qu'Il est longanime et attend de nous téchouva et réparations.
Cependant, le rav Yérouh'am Lévovitz explique que n'importe quelle intervention extérieure peut venir troubler cet équilibre. Si un homme Mauvais s'approche avec son œil mauvais et regarde son prochain qui porte du Mal en lui, Il a la possibilité de réveiller et d'attiser ce mal jusqu'à ce que l'homme perde sa protection qui lui venait de la patience d'Hachem et soit puni plus rapidement que prévu. C'est comme cela que fonctionne le ayin aya.

Cas d'école :
S'il a été décrété sur un homme à cause de différentes fautes de cruauté, ou de désir ... que sa voiture soit endommagée. Il est possible que pendant longtemps Hachem ne laisse pas l'ange de destruction intervenir et que sa voiture reste intacte en attenant patiemment la téchouva de cet homme. Cependant, si un autre homme qui est lui-même mauvais, se rapproche de cet nomme et regarde sa voiture avec un oeil mauvais, il est possible que cela attise le jugement qui existait déjà sur cette voiture et que le Din s'accomplisse plus rapidement que prévu.

-> Le rav Dessler explique que ce pouvoir [d'ayin ara] d'un juif sur un autre découle du fait que "kol Israël arévim" (tous les juifs sont dépendants et garants les uns des autres).
En d'autres termes : je suis responsable du Mal qui se trouve chez l'autre et inversement. Ainsi, le Mal qui se trouve chez l'un peut interagir avec le Mal qui se trouve chez l'autre et cela peut attiser le jugement et permettre à l'ange de destruction qui existait déjà d'intervenir plus rapidement que prévu.

Ainsi. lorsque Rav (guémara Baba Métsia 107b) nous dit : "je suis passé dans un cimetière et 99 hommes sur 100 ont été tués par le ayin ara, cela ne signifie pas que l'œil a tué qui que ce soit mais que l'œil d'un homme qui était mauvais a attisé le mal qui existait chez d'autres personnes qui étaient passibles de mort depuis bien longtemps, par exemple, et que la peine a été avancée.

[on peut rapprocher cela d'un enseignement sur : "Juge chaque personne favorablement" (Pirké Avot 1,6)
La mystique juive nous enseigne que le Satan ne peut accuser quelqu'un sans témoin et lorsque nous jugeons quelqu'un défavorablement, nous nous associons au Satan sans le savoir puisqu'il utilisera notre témoignage.
Le Baal Chem Tov écrit à ce sujet :
"Lorsque le Satan veut accuser un enfant d'Israël devant Hachem, D. le fait taire en demandant qu'il y ait 2 témoins.
Mais lorsqu'un juif interprète les actes de son ami négativement, ne serait-ce que par la pensée, il réjouit le Satan, car il a trouvé un témoin et son accusation sera acceptée.
Par cet acte, il s'associe au Satan pour accuser son ami".
(ainsi, d'une certaine façon en ayant une vision, une pensée de ayin ara sur autrui, nous donnons au Satan la possibilité de mettre en application un mauvais jugement qui était jusque là en attente sur cette personne.
Et d'une certaine façon, cela est valable quand on parle de nous-même!)]

<--->

+ Il y a différentes facettes :

-> De façon générale, lorsque nous parlons de yétser ara (le penchant vers le Mal) ou de Ra (mal) cela fait plutôt référence aux taavot (désirs du corps) qui nous attachent à la faute ; (comme la Torah nous le révèle au sujet des fils de Yéhouda : Ere et Onane, qui étaient "Ra" aux yeux d'Hachem et qui avaient fauté dans le domaine de zéra lévatala [perte de semence en vain]).
A priori cela contredit la définition précitée de ce qu'est le Mal. Quel rapport y a-t-il entre ce "mal" dont parle la Torah, et les limites de la Bonté ou l'étroitesse évoquées plus haut comme définition du Mal?
[voir les paroles du rav Lévovitz : "Le Bien n'existe donc que lorsqu'il est illimité et prodigué sans aucune étroitesse. Le Mal c'est au contraire la limite dans ce bien : l'étroitesse ou encore les empêcheurs de ce Bien" ]

Cependant il n'y a pas de contradiction, car comme nous l'avons vu plus haut, plus un homme s'attache à réaliser ses propres désirs et à combler son corps, plus il s'éloigne de la qualité d'infinie bonté et de grande générosité qu'il possède en potentiel.
En effet, dans le domaine de la matière tout ce que nous donnons à l'autre représente un manque pour nous ; tout le temps que nous consacrons à l'autre est du temps en moins pour nous. La qualité (mida) de bonté infinie ne peut donc se trouver que chez quelqu'un qui a fixé ses objectifs dans la spiritualité et qui maîtrise son penchant pour la matière.
Celui qui n'a pas compris que toutes les ambitions matérielles de ce monde sont vaines et que combler son corps ne mène à rien, ne pourra jamais atteindre le vrai Tov (bon), c'est-à-dire : à l'infini.
[plus nous avons une vision spirituelle de la vie, plus nous percevons que tous les juifs sont unis à un niveau spirituel, que nous avons tous les ressources/capacités/qualités nécessaires pour notre objectif propre de vie, que la vie est très très courte/éphémère et que l'essentiel est de se préparer pour notre mort, notre éternité à venir, ... avec des pensées similaires nous sommes capables de développer de déveloper notre ayin tov, et donc de diminuer notre tendance naturelle au ayin ara, et ainsi nous évitons d'amener des malédictions sur nous et autrui, et au contraire on fait descendre des bénédictions (tellement Hachem aime voir Ses enfants agir positivement entre eux) ]

Il est certain que l'effet naturel de l'œil d'un homme sur son prochain (ou sur ses biens) aura pour effet de limiter la bénédiction, à cause du ayin ara, car chacun personne porte en lui du mal et chaque regard porte une certaine étroitesse (même sur soi-même ou sur nos propres biens).
Mais, il n'en reste pas moins que lorsqu'à ce "regard neutre" s'ajoutent : jalousie, colère ou souffrance (que l'autre m'a fait), cela décuple l'effet du ayin ara explique le Sefer haAkéda (chaar61).
En effet, toutes ces mauvaises midot que sont : la jalousie, l'envie, la haine, la colère, le mécontentement ... ne font qu'agrandir la dimension de Mal qui existe dans l'œil de l'homme et de ce fait, cela aggrave les effets du ayin hara. D'où la grande nécessité de déraciner ces mauvaises midot et même de s'éloigner des personnes qui les possèdent.

<--->

+ L'exemple de Yossef :

-> "Ben Porat Yossef, ben porat alé yaïn" (fils de la grâce : Yossef, fils de la multitude, au-dessus de l'œil)
Le Néfech Yéhoudi (Vayakel 5779) commente :
Nous vovons que la protection contre l'œil est synonyme de bénédiction et de multiplication, car seul l'œil
étroit empêche la bénédiction d'Hachem d'agir.
Comme l'explique la guémara Béra'hot, Yosset hatsaddik, lui et tous ses descendants, sont protèges du ayin ara.
=> Quelle était la particularité de Yossef pour qu'il mérite une telle bénédiction pour sa tribu?

Il est certainement l'un des personnages de la Torah qui s'est le plus éloigné d'avoir un œil étroit, même envers ses frères qui l'ont vendu comme esclave en Egypte et ont voulu "son Mal" (pour reprendre les termes de la Torah dans vayé'hi). Yossef, à de nombreuses reprises, leur a répété : tout ce qui s'est passé ne l'a été que pour le Bien et il n'y a donc aucun regret à avoir. Il a mérité d'ailleurs d'être le vecteur de la bénédiction pour sa famille, pour toute l'Egypte et même pour le monde entier (dit le midrach), pendant les 7 années de famines.
Rachi rapporte (sur place 49,22) que Yossef doit cette bénédiction à sa qualité (mida) de Tsiniout (décence, pudeur) dans laquelle il a excellé à différentes reprises dans la Torah.
Il est certain que celui qui fuit les taavot (attraits materiels) et qui est, de plus, tsanoua pudique/ discret) par rapport au regard des autres augmente énormément la dimension de Tov qui peut exister en lui et se forge un bouclier contre le Mal extérieur et contre l'œil.
Rachi mentionne notamment son mérite de s'être placé devant sa mère lors de la rencontre avec Essav afin que ce racha ne porte pas "ses yeux" sur elle (Rachi).
Le verset suivant mentionne aussi un autre mérite de Yossef dans le domaine de la Tsniout : son abnégation pour résister au harcèlement de la femme de Potifar; grâce à cette fuite du "Ra" (Mal) (tel que la Torah le définit avec les fils de Yéhouda), il est devenu porteur du Tov et a acquis une immunité contre l'œil.
C'est donc sa perfection dans la tsiniout et dans la honte de coeur (avec ses freres) qui a permis a Yossef d'obtenir une bénédiction d'imperméabilité au aiyn ara pour lui et sa descendance et de devenir ainsi le vecteur de la bénédiction pour toute l'Egypte.

<--->

+ Les comptes du Michkan & la bénédiction (explicaiton aux questions du début) :

=> Quel est le secret du Michkan et des comptes de notre paracha (Pékoudé) pour qu'y réside la bénédiction?

-> Le Zonar (225b) écrit :
"Dans tout endroit ou réside la sainteté même s'il y a un compte, la bénédiction y réside perpétuellement.
Comme on le voit ou maasser (le dixième de son salaire donné à la tsédaka) qui bien qu'il arrive après un comte entraîne aussi la bénédiction ; à plus forte raison le michkan qui est entièrement saint (kodech) et a été réalisé par les forces de la sainteté.
Cependant, pour toutes les autres affaires du monde, la bénédiction ne peut pas résider en même temps que le compte car les forces obscures s'emparent de tout ce qui est visible, publique et compte et la bénédiction ne peut donc résider sur elles, car la bénédiction ne réside pas là où il y a le Mal ou le mauvais oeil".

-> Le Nefech haH'aim (1.4) ajoute : L'une des premières particularités du Michkan ou du Temple est qu'ils étaient le vecteur principal de tous les flux de Bonté et de bénédiction matériels comme spirituels dans le monde entier ...
Celui qui prie pour la reconstruction du Temple prie donc aussi par conséquent pour la multiplication des bénédictions dans le monde ...
C'est déjà une première raison qui explique le fait que bien que le Michkan inclut de nombreux comptes, il soit
pourtant porteur de bénédiction : car par lui se déverse la bénédiction dans le monde.

Dans un deuxième temps, comme le disent nos sages, le Michkan est éternel car il a été construit par Moché, Betsalel, Haollav, ... et tous les sages de cœur qui ont fait preuve d'une bonté infinie et d'une pureté de cœur immense qui donna au Michkan ce caractère eternel (Storno).
Le Zohar dit à ce sujet (ailleurs) : "le compte amène le ayin ara mais le compte de Moché amène la bénédiction".
Le Michkan est donc l'exception qui confirme la règle : les comptes du Michkan établis par Moché, seront source de bénédiction car ils sont réalisés avec un bon œil en particulier, ils pourront recevoir la plus grande bénédiction qui existe : la descente sur terre de la Présence Divine (Chékhina).

-> Enfin la dernière raison pour laquelle les comptes du Michkan sont paradoxalement source de brakha est donnée par le Kédouchat Levi (Pékoudé) :
"L'œil a cette particularité à l'instar de l'œil de Bilam, de séparer un élément de sa source céleste qui est sa source de vie".
[ Hachem a tout créé "yech méayin" (ex-nihilo ou encore la matiere (yech) à partir du spirituel ayin). Ainsi tout celui qui regarde un élément matériel en occultant sa racine ou en le séparant de sa source divine le coupe, par son regard, de sa source de vie. Tout celui qui se focalise sur un objet matériel en oubliant d'où il vient entraine un dommage de ayin ara. ]

Le Kédouchat Lévi poursuit : "les Bné Israël ont la possibilité d'avoir un ayin tov (un oeil source de bénédition) sur chaque chose, comme il est écrit dans Chir haChirim : "tes yeux sont une bénédiction, (même) dans le compte, (même) dans la place publique" (éné'ha bér'not bé'hechbon bachaar bat rabim).
Comment cela?
Dans la mesure où l'oeil du juif
(ben Israël) voit la Présence d'Hachem qui se trouve dans la chose qu'il regarde.
Lorsqu'un homme attache par son oeil un élément à Hachem en se rappelant d'où il vient, il renforce alors ses racines vers sa source créatrice et sa source de vie à chaque instant.

C'est cela qu'il est écrit : "voici les comptes du Michkan" dans lesquels il y aura la bénédiction et la Présence Divine (chékhina) car tous les comptes ont été faits pour pouvoir accueillir la Présence d'Hachem et relier ces éléments matériels à leur source spirituelle. Ce sont donc des comptes qui sont exceptionnellement vecteurs de bon œil et de bénédiction".

Le Néfech Yéhoudi (Vayakel 5779) ajoute :
Celui qui est la jaloux de l'autre, notamment, entraine le ayin ara car il oublie que c'est Hachem qui a décidé pour le Bien que lui possède tant et que son voisin possède plus. Celui qui a un bon œil est l'homme, à l'instar de Moché Rabenou, qui arrive à voire la présence d'Hachem partout, en attachant chaque élément à sa source de vie.
On comprend mieux pourquoi Moché Rabenou dont la force était la crainte du ciel (yirat chamayim) [selon guémara Béra'hot], a pourtant cette qualité de "bon oeil qui à priori a trait à la qualité de 'hessed (qualité inverse) : en effet, par sa grande crainte du Ciel, Moché voyait Hachem dans chaque élément, ce qui renforçait la vie en lui.
[ira (crainte) vient du mot iré : il voit ]

La guémara dans Yoma dit qu'il est interdit de compter des juifs même pour les besoins d'une mitsva (minyan). C'est parce que l'œil est tellement dangereux que, même lorsque cela est nécessaire pour une mitsva, il eut endommager et entraîner l'étroitesse en séparant chaque élément compté de sa source [première] : Hachem.
C'est pourquoi il faut toujours être prudent, discret et limiter les comptes.

Mais le Michkan est l'exception qui confirme la règle : c'est un compte pour s'attacher à Hachem, pour faire descendre la Ché'hina et lier ciel et terre. C'est le seul compte où le regard et le calcul seront donc vecteurs de bénédiction.

==> Il est certain que, quand bien même nous devons toujours être prudents dans le regard que nous posons sur les autres, il est tout de même possible pour nous de nous attacher à cet exemple du Michkan, et à cette bonne qualité de Moché : de voir Hachem partout [on peut interpréter en ce sens les paroles du roi David : j'ai mis Hachem devant moi tout le temps (chiviti Hachem lénegdi tamid)]. On pourra ainsi s'efforcer d'acquérir la largesse de coeur d'Avraham qui voulait donner à l'infini, et s'inspirer du bon oeil de Yossef de n'en vouloir à personne car tout est pour le bien. C'est ainsi que nous pourrons nous rapprocher progressivement de ces grands hommes dont l'œil était vecteur de bénédiction.

"L'Honneur d'Hachem remplit le Michkan" (Pékoudé 40,34)

-> Nos Sages enseignent que Betsalel, qui a fabriqué le Michkan, avait connaissance des Noms Divins qu'Hachem a utilisés pour créer le ciel et la terre.
Le premier verset de la paracha de Pékoudé dit : « Voici les dénombrements du Michkan, Michkan de témoignage ». En hébreu, ce verset se dit : " אלה פקודי המשכן משכן העדות ".
Rabbi Lévi Its'hak de Berditchev (Kédouchat Lévi) dit que ce verset fait allusion à ces Noms Divins que Betsalel a utilisés pour fabriquer le Michkan. Quand on prend les premières lettres des mots : " אלה פקודי המשכן ", on obtient les lettres אפה de valeur numérique numérique 86, correspondant au Nom א-ל-ה-י-ם. Les dernières lettres, הין ont la valeur numérique 65, correspondant au Nom א-ד-נ–י.
Puis, quand on prend les mots " משכן העדות ", les premières lettres forment le mot מה de valeur numérique 45, correspondant au Nom Divin écrit ainsi : יוד – הא – ואו – הא .
Enfin, les dernières lettres, נת , de valeur numérique 450, correspondent à 10 fois ce Nom Divin de valeur numérique 45. Ainsi, tous ces Noms Divins éclairaient dans le Michkan et concouraient à faire résider la Présence Divine.
Le nombre total de tous ces Noms constituait la somme de 646 (86 + 65 + 45 + 450).
D'autre part, le mot Michkan (משכן), quand chaque lettre est écrit au complet, cela donne : מם שין כף נון.
La valeur numérique de toutes ces lettres s'élève également au chiffre de 646 (40+40+300+10+50+20+80+50+6+50 = 646).
Cela est en allusion dans le verset : "L'Honneur d'Hachem remplit le Michkan". L'Honneur d'Hachem fait référence à la sainteté des Noms Divins qui ont participé à la fabrication du Michkan, dont la valeur numérique s'élève à 646.
Quand le Michkan est rempli, c'est à dire que le mot Michkan est écrit de façon complète, chaque lettre étant écrite pleinement, cela donne la même valeur numérique : 646.
Ainsi, "L'honneur d'Hachem (646) remplissait le Michkan (646)".