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Éloignement temporel et ressenti de la perte du Temple

+ Éloignement temporel et ressenti de la perte du Temple :

Dans le birkat haMazone, nous prions pour que Hachem reconstruise Jérusalem.
Le Choul'han Arou'h (Ora'h 'Haïm 180,5) statue que pendant la récitation du birkat haMazone, on doit recouvrir tous les couteaux de la table.

La michna Béroura explique que cette loi est basée sur un incident qui est arrivé un jour : une personne récitant le birkat haMazone a été remplie par tellement de souffrance en mentionnant la perte de Jérusalem, qu'elle a pris un couteau et s'est poignardée avec.

=> Pourquoi nos Sages ont décrété une loi basée sur un fait apparemment incompréhensible, qui est certainement un événement isolé, ayant que très peu de chance de se reproduire à nouveau?

Le rav 'Haïm Kanievsky de répondre :
Cet événement n'est pas incompréhensible, c'est un exemple de comment une personne doit véritablement se sentir à propos de la destruction du Temple.
Ce qui est plutôt incompréhensible, c'est le fait que nous sommes tellement indifférents à notre exil, que nous trouvons ce fait étrange!

Le midrach (Eikha rabba 2,4) donne un exemple de comment nos Sages réagissaient émotionnellement à la destruction du Temple, et comment les générations passant, la douleur s'en est trouvée amoindrie.
Lorsque Rabbi Yo'hanan, un des Amoraïm, enseignait un certain verset de la méguilat Eikha, il disait 60 faits tragiques qui ont eu lieu pendant la période de la destruction du Temple.
Cependant, Rabbi Yéhuda haNassi, un des Tanaïm, disait 24 des ces faits lorsqu'il enseignait le même verset.

Rabbi Yéhouda haNassi a vécu environ 100 ans après la destruction du Temple, et Rabbi Yo'hanan a vécu environ 200 ans après la perte du Temple.

Le midrach de remarquer :
Rabbi Yo'hanan n'en savait pas plus sur la destruction du Temple que Rabbi Yéhouda haNassi, mais comme Rabbi Yéhouda haNassi vivait plus proche de cette perte, il n'en disait que 24 sur les 60.

En effet, lorsque Rabbi Yéhouda haNassi enseignait les mots de la méguilat Eikha, il était tellement submergé par l'émotion, qu'après avoir relaté chaque fait tragique, il fondait en larmes et devait être réconforté pour pouvoir continuer.
C'est pourquoi, il n'avait pas les forces physiques pour pouvoir discuter en profondeur de la destruction du Temple, comme pouvait le faire Rabbi Yo'hanan, qui a vécu 100 années après.

=> Ce midrach montre la diminution de vécu chez nos Sages qui ont vécu respectivement 100 ans et 200 ans après la destruction du Temples.

Nous qui vivons 1949 années (en 2017) après, combien devons-nous avoir conscience que notre attitude n'est pas la norme, mais est au contraire le fruit d'un éloignement temporel de cette période.

b"h, tâchons de vivre autant que possible cette perte énorme pour tous.

-> La guémara (Taanit 30 a-b) raconte comment Rabbi Yéhouda, le fils de Rabbi Ilaï, prenait le deuil la veille du 9 Av avant que le jeûne ne commence.

On lui amenait un pain sec avec du sel, il s'asseyait entre le fourneau et le four [qui était le lieu le plus sale et répugnant de la maison] afin d'y manger son maigre repas, et il était alors aussi triste qu'un véritable endeuillé, dont le proche décédé est en face de lui.

-> La guémara (Kétoubot 62a) enseigne que :
Lorsqu'une personne émet un gémissement, cela affaiblit la moitié de son corps.
Cependant, un gémissement émit suite à une horrible nouvelle, comme la destruction du Temple, est 2 fois plus puissant, et affaiblit le corps tout entier de la personne.

La guémara de nous relater qu'un juif et un non-juif se promenaient ensemble.
Le juif était plus fort et le non-juif n'arrivait pas à le suivre.
Afin d'affaiblir le juif, il lui a rappelé la destruction du Temple.
Le juif est alors devenu plus faible et a gémi, mais il a continué à devancer le non-juif, qui lui a alors demandé : "N'as-tu pas dit qu'un gémissement affaiblit de moitié le corps d'une personne?"

Le juif de répondre : "Cela est vrai lorsqu'une personne gémit lorsqu'elle entend une nouvelle calamité. La destruction du Temple, cependant, est une calamité avec laquelle nous sommes déjà familier".

=> Nous apprenons de cette guémara, que même les non-juifs étaient au courant du fait que de rappeler la destruction du Temple entraîne immédiatement un juif à gémir de douleur, et donc à perdre de ses forces, à s'affaiblir.

Cette guémara aborde également la notion de "calamité avec laquelle nous sommes déjà familier".
Le juif n'ayant pas perdu toutes ses forces à cause de cela.

Si c'est particulièrement le rappel de la perte du Temple (et non la notion de l'exil aux 4 coins du monde par exemple), c'est en raison de la perte d'une résidence de la présence divine parmi nous, notion qui n'était pas étrangère aux anciennes générations, contrairement à nous.
=> Pourquoi sommes-nous si loin de ressentir de tels sentiments de deuil?

Le rav Steinman donne la réponse suivante :
En réalité, le détachement que beaucoup d'entre nous ressent durant le 9 Av, provient de nos activités spirituelles et de nos aspirations durant toute l'année.
Le plus nous nous efforçons de parvenir à une proximité avec Hachem par le biais de l'étude de la Torah, de la prière, et de la pratique des mitsvot, le plus nous vivons avec une conscience de la présence divine.
Cela cause une prise de conscience que la présence divine ne réside plus parmi nous comme cela pouvait l'être au temps du Temple.
Une personne qui vit avec une telle conscience va ressentir le 9 Av, comme si elle prenait le deuil pour un proche, qui vient de mourir.

Une telle personne est véritablement en manque de la présence divine, qui était présente dans le Temple.
Elle réalise que son développement, sa croissance spirituelle dans ce monde est totalement limité par le manque du Temple, et cela lui cause la même peine que la perte d'un proche.

Même si ce niveau de prise de conscience est loin de nous, nous pouvons tous essayer de s'en servir pour alimenter un sentiment de deuil en ce jour.
Imaginons que serait notre vie avec le Temple reconstruit, avec la présence divine au plus proche de nous, nous alors ouvrant toutes les portes de la connaissance, de la joie, des bénédictions, ...

En prenant le deuil, nous montrons à papa Hachem. à quel point nous ne pouvons pas nous passer de Sa proximité, à quel point nous voulons qu'il revienne au plus proche de nous.
[Je vis confortablement dans le confort de mon train-train quotidien, mais cela ne vaut rien à mes yeux car Tu es loin de moi, cela ne vaut rien à mes yeux car sans Toi mon développement spirituel est limité, sans le Temple Ton Nom ne peut pas être pleinement glorifié et reconnu dans le monde, ...]

Le rav Steinman ajout qu'il faute que le deuil s'accompagne par une téchouva et un changement dans nos actions, particulièrement dans ce qui a conduit à la destruction du Temple (ex: lachon ara, haine gratuite).
En effet, par exemple, comment peut-on continuer à avoir de la haine gratuite envers son prochain, car notre deuil serait alors une honte.
Nous serions alors comme un meurtrier qui après avoir tué quelqu'un, prendrait le deuil de cette personne. C'est une blague!

[Il est écrit : "Chaque génération qui ne voit pas la reconstruction du Temple est considérée comme si elle avait elle-même causé sa destruction." (Yérouchalmi Yoma 1,1)
Ainsi, de nos jours, en refaisant les mêmes fautes, je détruis à nouveau le Temple. Comment alors puis-je prendre son deuil, sans m'occuper également de réparer la cause de sa destruction : mon attitude ...]

Le rav Steinman de dire également :
Comment une personne peut avoir un repentir sincère, alors qu'elle réalise les mêmes actions qui ont mené à la destruction du Temple? Combien cela semble hypocrite!

Pour chacun de nous, cela est l'épreuve de vérité, afin de voir à quel point nous sommes sincère durant ces semaines de deuil.
D'accord tu accomplis à 100% les lois de deuil du Choul'han Arou'h, mais est-ce que tu cherches sincèrement à améliorer tes actions afin qu'elles ne causent plus la destruction du Temple?

A minima, tâchons de faire de cette période un moment de l'année, vide de toute dispute, où l'on cherche à montrer à autrui à quel point on l'aime.
Avec cela, nous ferons que notre deuil sur le Temple, semblera beaucoup plus réel.

-> Le Choul'han Arou'h (Ora'h 'Haïm 1,3) statue qu'il convient pour toute personne ayant de la crainte de D. (yirat chamayim), d'être constamment peinée et troublée par la destruction du Temple.

Mais que se passe-t-il pour une personne qui n'a pas de crainte de D., ne doit-elle pas également être peinée et troublée par la perte du Temple?

Le Rabbi de Kotsk de répondre : Si une personne n'a pas de crainte de D., elle doit d'abord être peinée et troublée de sa propre destruction spirituelle avant de pouvoir s'inquiéter à propos de la destruction du Temple.

Le rav 'Haïm Kanivevsky a dit à une personne qui n'arrivait pas à avoir d'émotion à propos de la perte du Temple : "Il est probable que votre manque total d'appréciation concernant la destruction du Temple est le résultat de vos manques dans la crainte de D. Mon conseil est que vous étudier du moussar."

-> "Tout celui qui pleure pour Jérusalem méritera de partager sa joie [quand le Temple sera reconstruit]."
[guémara Taanit 30b]

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