"Yaakov sortit de Béer Shéva et alla vers 'Haran" (Vayétsé 28,10)
-> Le verbe employé pour dire que Yaakov "sortit" est : vayétsé (ויצא) qui est l'acronyme de la phrase : "vayéra Yaakov tsourat Aleph" (Yaakov voyait la forme du Aleph - וירא יעקב צורת אלף).
Le Mégalé Amoukot explique que c'est une allusion au fait que dans toutes ses tribulations, Yaakov ne vit jamais ni épreuve, ni souffrance, ni Essav, ni Lavan, ni Dina, ni Yossef, mais seulement la forme de la lettre Aleph (guématria = 1) qui évoque l'Unique : le Maître du monde (le Aloufo [אלופו] chel Olam).
Dans tout ce qui lui arriva, il sut qu’il n’existait rien d’autre que Lui, que tout était uniquement pour son plus grand bien, et de ce fait, Hachem était effectivement avec lui pour le protéger partout où il allait.
-> La lettre aléph (א) est composé d'un vav et de 2 youd, ce qui fait une valeur de 26, soit celle du Nom D. (יהוה) dans son Attribut de miséricorde.
Le roi David écrit : "Je mets constamment Hachem devant moi" (chiviti Hachem lénegdi tamid - Téhilim 16,8).
Ainsi quoiqu'il m'arrive je suis certain que cela vient d'Hachem, qui le fait dans Sa miséricorde totale.
-> Le Baal haTanya enseigne :
On observe dans cette lettre un point en haut, un point en bas et une ligne qui les relie (א) = c'est pour nous apprendre que nous devons relier le Haut avec le bas, en ayant conscience que chaque chose qui arrive ici-bas est précédé d’un décret En-Haut.
[Hachem est plein de miséricorde, tout est donc pour notre bien ultime!]
=> Comment parvenir à faire ce lien ?
Grâce à la ligne de la émouna qui doit nous rappeler à chaque instant que le moindre événement dans ce monde, fut-il le plus insignifiant, ne peut se produire sans qu’il ait été proclamé En-Haut.
-> Dans le Séfer Torah, la paracha Vayétsé a la particularité de ne comporter aucun espace entre les paragraphes.
[d'habitude les paragraphes de la Torah qui représentent un sujet en soi sont séparés les uns des autres par des espaces appelés "Pétou'ha" ou "Stouma", et ils sont signalés dans nos 'Houmachim par les lettres פ ou ס. La Paracha Vayétsé ne comprend aucune séparation de ce type]
Le Sfat Emet explique cette particularité par le fait que ces interruptions nous ont été transmises au mont Sinaï afin de nous donner le temps de réfléchir entre chaque sujet écrit dans la Torah.
Néanmoins, la paracha Vayétsé étant une succession ininterrompue d’épreuves affrontées par Yaakov, il n’était pas souhaitable de s’arrêter pour réfléchir entre chaque épreuve tout le temps où elles se succédaient. Il était plutôt préférable d’aller de l’avant armé d’une émouna simple et sans calcul.
C’est seulement après qu’elles soient toutes passées que l’homme pourra réfléchir à toutes les difficultés affrontées, et s’apercevoir alors que tout était pour son plus grand bien.
[le aléph renvoie à cette paracha qui est d'un bloc : nos bonheurs et nos malheurs viennent d'une seule et même source : notre papa Hachem!
On apprend également que lorsque la mer de notre vie est agitée, il faut savoir baisser la tête, laisser passer sans interruption la difficulté, plutôt que de se faire violence en essayant de comprendre ici dans ce monde le raisonnement d'Hachem. (il y aura le monde éternel de Vérité pour cela!)]
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-> Le Michméret El'azar nous enseigne :
Il existe une règle : tout celui qui a une confiance inébranlable que tout ce qu’Hachem accomplit est pour le bien, alors tous les décrets rigoureux le quitteront.
D’après cela, on peut expliquer ce qui arriva à Yaakov :
il se trouva dans l’adversité la plus totale jusqu’à parvenir au stade où la Torah dit à son sujet : "Il se coucha dans cet endroit", ce qui vient évoquer allusivement qu’il était comme incapable de bouger et sans espoir.
Du Ciel, il eut alors une vision : "Voici qu’une échelle était dressée sur la terre", lui signifiant que même si un homme est couché à terre cependant, "sa tête atteignait le Ciel" (il est en mesure de s‘élever).
Tout cela parce que "voici que des anges de Elokim" (Nom Divin lié à la Rigueur) "montaient et descendaient", que la rigueur domine l’homme ou bien qu’elle le quitte, cela ne dépend que de lui-même.
Il est écrit ensuite : "Et voici que Hachem se tenait au-dessus de lui et lui dit la terre sur laquelle tu es couché, Je te la donnerai à toi et à ta descendance", évoquant par cela que l’endroit même où tu pensais avoir perdu espoir (la terre sur laquelle tu es couché) est précisément ce qui te prépare à recevoir tout le bien que Je te destine.
La Torah conclut alors : "Yaakov se réveilla de son sommeil", il se réveilla de cette torpeur (due au manque d’espoir) et il dit : "De fait, Hachem (Nom Divin lié à la miséricorde) réside dans cet endroit et je ne le savais pas", signifiant ainsi que même ce qui semble être le comble du malheur pour un homme se transformera aussi en bien éternel.
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-> Le midrach (rabba, au début de Vayétsé) met en rapport le verset : "Yaakov sortit de Béer Chéva et alla (vayélé'h - וַיֵּלֶךְ) à ‘Haran" (Vayétsé 28, 10) avec celui : "Alors tu iras (télé'h - תֵּלֵךְ) sur ton chemin confiant"(Michlé 3, 23).
Le Sfat Emet explique que, bien que ce départ de Béer Chéva soit une fuite devant Essav, que Yaakov accomplisse par cela l’ordre de sa mère : "Lève-toi et fuis vers Lavan mon frère" (koum béra'h lé'ha él Lavan a'hi - Toldot 27, 43) et que la Haftara témoigne : "Yaakov prit la fuite" (vayivra'h Yaakov - Ochéa 12,13), il n’est toutefois pas écrit dans le verset de notre paracha : "Yaakov fuit de Béer Chéva" mais "Yaakov sortit de Béer Chéva".
Il n’est pas non plus écrit : "Il courut à ‘Haran", mais seulement "il alla à ‘Haran".
Cela pour nous enseigner que, même lorsqu’il fuyait la mort, Yaakov ne perdit pas son sang-froid et il alla en toute sérénité, tranquille et confiant, car il alla s’attacher à son Créateur avec une foi intègre.
Il gardait à l’esprit que cette marche vers ‘Haran n’était que la part d’effort personnel qu’il était tenu d’accomplir, mais sa pensée était constamment tournée vers le Ciel.
[Vayétsé : Yaakov voyait la forme du Aleph, que même si nous sommes en apparence entourés de problèmes, tout n'a qu'une origine première : Hachem, car rien ne peut se passer sans son accord.]
En effet, car de toute façon, rien ne pouvait lui arriver qui n’avait pas été décrété d’En-Haut et, à l’inverse, rien de ce qui avait été décrété sur lui d’En-Haut ne manquerait de s’accomplir.
Dès lors, que pouvait lui apporter de fuir dans la panique?
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-> "Et voici, Je suis avec toi ; Je te garderai partout où tu iras" (Vayétsé 28,15)
-> Le Yétev Lev explique que tant que nous sommes persuadés que Hachem est avec nous (abordant la vie avec émouna), alors nous sommes protégés, et rien de mal ne peut nous arriver.
-> Le rabbi 'Haïm de Volozhin (Néfech ha'Haïm - Chaar 3, Chap.12) écrit :
"Il existe un moyen miraculeux pour un homme de se débarrasser de tous les mauvais décrets et de les annuler, et d’empêcher également une personne de vouloir lui nuire, de telle sorte qu’elle ne puisse avoir aucune emprise sur lui ni lui faire subir son influence : qu’il fixe dans son cœur les pensées suivantes : ''Hachem est le D. véritable et il n'existe aucune autre force au monde ni dans les mondes. Tout est rempli seulement de Son Unicité la plus simple". Il doit également annuler entièrement toute force et volonté au monde pour se soumettre et attacher la pureté de sa pensée au Maître Unique Béni-Soit-Il uniquement.
Alors, Hachem lui apportera la réussite, et de fait, toutes les forces et les volontés qui pesaient sur lui s'annuleront et ne pourront pas le moins du monde agir à son encontre."
-> Vayétsé : Yaakov voyait la forme du Aleph.
En toute situation, plus nous sommes capables d'y voir Hachem, qui n'est que bontés, plus nous avons la capacité d'adoucir la Rigueur qui est sur nous : en allégeant nos souffrances, voir en les faisant disparaître.
Le Noam Elimélé'h (Vayichla'h) enseigne que le "Din" (le jugement, la punition, Rigueur) peut se transformer en compassion lorsque nous ajoutons devant toute chose le aleph.
En effet, le דין avec un א devant correspond au Nom Divin : אדני.
=> Mettre Hachem dans sa vie, c'est dissoudre la Rigueur qui nous est destinée et la transformer en Miséricorde.
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-> Sur la mézouza il y a le nom Divin Sha-daï, et c'est l’acronyme de : "Shomer Daltot Israël" (Gardien des portes d’Israël).
A chacun de nos passages, cela doit être un rappel que Hachem nous protège en permanence.
Il est écrit : "Donnez de la force à Hachem" (ténou oz lélokim - Téhilim 68,35) = ainsi plus nous consolidons notre confiance en Hachem, plus nous Lui donnons de la capacité de nous sauver, garder de tout mal!
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-> "Le matin arriva et voici que c’était Léa" (Vayétsé 29,25)
Suite à cette tromperie de Lavan, il n’est pas mentionné alors que Yaakov s’irrita (alors que la tromperie était énorme, et d'autant plus émotionnellement, au regard du très fort amour qu'il avait pour Ra'hél).
D'ailleurs lorsqu’il s’adressa à Lavan, ce fut en ces termes : "Il lui dit : pourquoi m’as-tu trompé?"
Le mot employé pour exprimer qu’il lui "dit" (vayomer - וַיֹּאמֶר) est un langage de parole douce, comme si sa question concernait une tierce personne et ne le touchait pas personnellement.
Cela ne fut possible que parce qu’il était convaincu que ce n’était pas Lavan qui se tenait devant lui qui avait interverti Ra’hel avec Léa, mais le Hachem Lui-même.
Vu que tout est pour le bien, il était donc certain qu’un bien immense allait naître de cette situation dans l’avenir.
Et c'est ce qui se passa car cette tromperie entraîna que Ra’hel fît don de sa personne en allant contre sa nature et transmit les signes à sa sœur pour lui éviter un terrible affront. C’est ensuite précisément par ce mérite qu’elle put elle-même donner 2 fils à Yaakov, comme il est écrit : "Et D. se souvint de Ra’hel ... et ouvrit sa matrice." (Rachi explique : Il se souvint qu’elle avait transmis les signes à sa sœur).
[sans cela elle n'aurait peut-être pas eu d'enfants, aucune tribu à la base du peuple juif ...]
De plus, ce mérite intercédera en faveur de sa descendance, lors de la Délivrance finale, puisque D. lui promit grâce à cela : "Tes fils reviendront dans leurs frontières" (Yirmiyahou 31,15)
Il s’avéra donc qu’il n’y avait aucune raison de s’irriter contre Lavan, car par sa tromperie, ce dernier ne faisait qu’accomplir le dessein bénéfique du Créateur pour son peuple et toute sa descendance après lui.
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[Selon le Néféch Yéhoudi, Ra'hel dit à Hachem : voici que moi, j'ai mis de côté ma volonté, j'ai eu pitié pour ma sœur (lui évitant toute honte), j'ai sacrifié ma vie et accepté de voir une autre à côté de mon mari en prenant même le risque de ne jamais l'épouser.
Hachem lui répond : c'est là un mérite qui m'oblige à accepter la situation et à revenir résider parmi les juifs malgré leurs attirances étrangères.
Ce mérite permet à toute époque d'apaiser la "jalousie" d'Hachem, et de lui demander d'être proche de nous, même si nous nous éloignons de Lui.]