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La yachrout = le chemin vers le monde futur

+++ La yachrout = le chemin vers le monde futur :

"Si je ne te l'amène pas et ne le présente pas devant toi, j'aurai fauté envers toi tous les jours" (Mikets 43,9)

-> Rachi commente que la promesse de Yéhouda à Yaakov : "J'aurai fauté envers toi tous les jours" (selon Rachi = y compris dans le monde à Venir), était une promesse de renoncer à sa part dans l'autre monde s'il ne parvenait pas à délivrer Binyamin sain et sauf.

=> Pourquoi l'expression "tous les jours" fait-elle référence au monde futur?
La réponse est que l'autre monde est la continuation naturelle de ce monde pour ceux qui suivent le chemin correct qui y mène. Ce chemin est connu sous le nom de chemin de yachrout (littéralement, le chemin droit), qui est le chemin de la Torah.
Celui qui suit ce chemin passera dans l'autre monde après sa mort, comme une progression naturelle de la vie dans ce monde. Ainsi, lorsque la Torah affirme qu'une personne méritera une longue vie, elle sous-entend qu'elle continuera à vivre dans l'autre monde après sa mort.

Cela nous permet de mieux comprendre l'affirmation de la guémara (Taanit 5b) : "Yaakov n'est pas mort ", qui ne peut être comprise littéralement, car la Torah décrit comment Yaakov a été embaumé et enterré.
Il faut plutôt comprendre que sa vie s'est poursuivie dans l'autre monde après avoir été enlevé de ce monde. Contrairement à la plupart des gens, qui ont besoin d'une transition longue et souvent douloureuse, Yaakov a poursuivi sa vie dans l'autre monde après sa mort, aussi facilement que l'on passe d'une pièce à l'autre.

Si tous les justes (tsadikim) poursuivent leur vie dans l'autre monde, qu'y a-t-il de particulier dans le cas de Yaakov?
La réponse est que Yaakov n'a même pas goûté à la mort. La plupart des gens, même les justes (tsadikim), s'éloignent un peu du chemin de la yachrout (chacun selon son niveau, peut faire de petits écarts).
Même en s'adonnant un peu plus que nécessaire aux plaisirs de ce monde, le corps est souillé jusqu'à un certain point, ce qui l'oblige à subir un processus de purification au moment de la mort.
Cependant, Yaakov n'a pas été entaché par la faute dans ce monde. C'est ce qui ressort du titre que lui a donné la Torah : yéchouroun (le droit), qui fait allusion à son yachrout parfait. [Zohar - Vayichla'h]
Puisque Yaakov ne s'est pas écarté, même légèrement, du chemin de la yachrout, son corps est resté entièrement intact et aucune partie de lui n'est morte.

Cette idée nous permet également de comprendre la prière de Bilaam : "Mon âme mourra de la mort des yécharim, et ma fin sera comme eux" (Balak 23,10).
Bilaam, malgré ses mauvaises actions, était un prophète. Il comprenait que seuls les yécharim, les personnes qui suivent le chemin droit (yachrout), continuent dans l'autre monde.
Bilaam pria pour vivre lui aussi dans l'autre monde, comme les yécharim, nos saints ancêtres. Bien entendu, cette prière était vaine pour un homme aussi méchant que lui.
[d'après Maharal - Gour Aryé - Vayé'hi 50,33 ; Tiféret Israël 11]

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-> En résumé :
La Torah décrit l'autre monde comme "ari'hout yamim" (des jours longs).
Cela s'explique par le fait que l'autre monde est une progression naturelle de ce monde pour celui qui reste sur le chemin de la yachrout.
[le nom Israël se décompose en "yachar El" : droit vers Hachem. Malgré toutes les tentations/visions de ce monde, les tendances naturelles négatives, ... un juif se droit de rester droit vers le but Véridique, vers Hachem. ]
Yaakov était l'exemple même de la yachrout, et c'est pourquoi il ne mourut pas, dans le sens où il passa naturellement de ce monde à l'autre, sans même avoir goûté à la mort.

"Yossef est descendu en Égypte et s'est préservé de l'immoralité, de même tout Israël [en Egypte], par son mérite, s'est préservé de l'immoralité.
Rabbi 'Hiya Bar Aba a enseigné : "Cela valait la peine qu'il se préserve de l'immoralité, car c'est par son mérite qu'Israël a été délivré"."
[midrach Vayikra rabba 32,5]

-> Le rav Pin'has Fridman commente :
Nous apprenons de ce midrach que Yossef traça la voie de la kédoucha (sainteté) pour toutes les générations d'Israël jusqu'à la fin des temps. Tous pourront maintenir leur kédoucha partout où ils se trouvent, même dans les situations les plus précaires, et pourront par ce mérite, être délivrés de leur exil.

"Non! Vous êtes venus voir la faiblesse du pays" (Mikets 42,12)

-> Rachi explique que pour renforcer son accusation que ses frères sont des espions, Yossef s'est appuyé sur le fait que les 10 frères sont entrés en Egypte par 10 portes différentes. En effet, des espions ne rentrent pas dans le pays tous ensemble, pour ne pas que cela paraisse suspect. Mais en réalité, ils ont suivi par là le conseil de leur père qui leur a enjoint d'entrer par 10 portes différentes pour éviter le mauvais oeil (ayin ara).

On peut remarquer que dans toutes les paroles de regrets ou de plaintes qu'ils ont émises sur leur situation dramatique, ils n'ont jamais regretté le fait d'être entrés par 10 portes différentes. Jamais ils n'ont suggéré que cela leur ait entraîné du mal. Et pourtant, l'essentiel de leur malheur venait en apparence de là. C'est à cause de cela qu'ils furent accusés d'être des espions, que Chimon fut emprisonné et que l'homme exigeait de faire venir Binyamin. Et malgré tout, pas une fois ils n'ont formulé le moindre regret d'être entré par 10 portes différentes.
Pourquoi cela?

C'est parce qu'ils savaient que de l'accomplissement d'une mitsva, il ne peut pas y arriver de mal. Or, ils n'ont fait là que respecter leur père qui leur avait donné cet instruction. Aussi, ils étaient convaincus que cela ne pourra pas leur causer du tort. Et cela, malgré le fait que d'après les apparences, tout leur malheur venait de là. Mais leur foi sur le fait que la mitsva ne peut pas provoquer de dommages était plus fort que tout. Ils émirent des regrets sur d'autres choses, mais pas sur cela.

Et effectivement, dans la réalité, ils ne se sont pas trompés. Car finalement, il s'avéra que toute cette accusation d'espionnage n'était qu'un coup monté par Yossef, qui aboutit sur les retrouvailles et Yossef les nourrit pendant la famine. Effectivement, rien de mal n'arriva.
Et même s'ils ne connaissaient pas l'aboutissement à l'avance, ils savaient néanmoins qu'ils ne perdraient pas du fait d'une Mitsva, car une mitsva ne peut aucunement causer de mal. Et même si en apparence ça peut en avoir l'air, on doit savoir qu'en réalité, il n'en ressortira que du positif.

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-> [Hachem nous dit : ] "Personne n’a fait ma volonté et en a été perdant."
[midrach Dévarim rabba 4,5 – en adam shoméa li oumafssid]

-> "Une personne ne sera jamais perdante d’avoir réalisée une mitsva"
[Kohélét 8,5 – shomer mitsva lo yéda davar ra]

"Il s’éloigna d’eux et pleura. Puis il revint vers eux, leur parla et leur retira Chimon qu’il fit incarcérer à leurs yeux" (Mikets 42,24)

-> Rachi explique, sur les mots "à leurs yeux" : il ne l’emprisonna que devant eux, mais après leur départ, il le fit sortir, lui donna à manger et à boire.

-> Quand les frères de Yossef arrivèrent en Égypte, celui-ci les reconnut immédiatement et décida de ne pas leur dévoiler son identité ; il prétendit plutôt les suspecter d’être venus espionner le pays. Il fit emprisonner l’un d’entre eux, Chimon.
Nos Sages notent que parmi toute la fratrie, Chimon et Lévi étaient les principaux instigateurs du complot contre la vie de Yossef. En effet, Rachi affirme que Chimon fut celui qui mit en place le projet du meurtre et qu’ensuite, c’est lui qui le jeta dans le puits.

Yossef emprisonna donc Chimon et libéra les autres frères. Il avait plusieurs raisons de s’en prendre particulièrement à Chimon.
[Rachi explique qu’il souhaitait séparer Chimon et Lévi, parce qu’il savait qu’ensemble, ils formaient une équipe dangereuse.
D’autres commentateurs pensent qu’il voulait que les frères comprennent que ce qui leur arrivait était une punition, mesure pour mesure, de la vente de Yossef ; il emprisonna Chimon parce qu’il était le principal responsable du complot meurtrier contre Yossef.
Le Ibn Ezra affirme que l’otage aurait logiquement dû être l’aîné, Réouven, mais Yossef l’épargna par gratitude d’avoir tenté de le protéger tandis que les autres projetaient de le tuer ; il s’en prit donc au cadet, Chimon.]
Cependant, il est évident que Yossef n’était nullement motivé par un désir de revanche.
Preuve en est, dès le départ des autres frères, Yossef libéra Chimon et le nourrit. Le midrach (Beréchit Raba 91,8) ajoute qu’il se soucia personnellement de son repas et de sa toilette.

=> Pourquoi en faire autant? N’était-il pas suffisant de le faire sortir de son cachot? Pourquoi se soucia-t-il de son confort matériel et se comporta-t-il comme son valet?

Le rav Israël Salanter (Ohr Israël) nous enseigne que lorsque l’on subit une insulte ou un préjudice et que l’offenseur s’excuse, il ne suffit pas de pardonner, il faut aller jusqu’à agir avec bienveillance envers lui, parce que pour rétablir les bons sentiments entre les 2 personnes, il faut rendre le mal par le bien.

[Bien que Chimon n’ait apparemment pas demandé pardon à Yossef, celui-ci a entendu tous les frères reconnaître leur erreur quant à leur cruauté à son égard. On peut aussi expliquer que Yossef avait un tel niveau qu’il traita Chimon de la sorte, même s’il ne s’était pas excusé.]

Le rav Israël Salanter avance 2 raisons pour une telle attitude.
1°/ Tout d’abord, il s’agit de la mitsva de : "émuler les qualités d’Hachem" (véalakheta biderakhav).
Hachem "rembourse" constamment la déloyauté du fauteur par des bienfaits ; même après la faute et avant le repentir, cet individu continue de jouir la vie et de Ses faveurs.
Nous savons qu’Hachem renouvelle constamment le monde ; à chaque instant, Il accomplit un nouveau bienfait pour Ses créatures. Ainsi, l’existence même du racha malgré son attitude incorrecte témoigne de la patience et de la bienveillance d’Hachem.
L’homme doit essayer d’émuler Hachem et de faire du bien à celui qui agit mal, et cela s’applique même si la personne en question ne s’est pas excusée.

2°/ Voici une autre raison pour réagir avec bonté envers celui qui faute : une simple pensée ou quelques mots d’excuse ne suffisent pas pour déraciner des ressentiments que l’on peut éprouver envers celui qui a mal agi.
Ceci est basé sur un principe selon lequel une action peut annuler une pensée, mais une pensée ne peut annuler une autre pensée (guémara Kidouchin 59b).
Ainsi, pour chasser totalement les sentiments négatifs envers quelqu’un, il faut l’aider concrètement. Yossef aurait légitimement pu conserver de la rancune envers Chimon ; pour s’assurer que cette aigreur était complètement éradiquée, il est allé jusqu’à se mettre à son service.

-> Le rav Yéhonathan Gefen ajoute :
Certes, il n’est pas facile d’accorder le pardon à quelqu’un qui nous a offensés, mais nous apprenons de Yossef quelle est la réaction appropriée. Il convient d’ajouter que cette attitude bénéficie également à la victime, car elle lui permet de tourner la page en considérant l’oppresseur comme tout le monde, comme quelqu’un qui mérite un bienfait.

"Yossef nomma son aîné Ménaché : Car D. m’a fait oublier (nachani) toute ma peine et toute la maison de mon père.
Au second, il donna le nom d'Éfraïm : car mon D. me rendit prospère dans la terre de ma souffrance."
(Mikets 41,51-52)

D’après le sens simple, Yossef nomma son premier-né Ménaché par gratitude envers Hachem qui lui a permis d’oublier les rudes épreuves qu’il subit chez son père.
=> Cette interprétation semble difficile à comprendre. On peut facilement entendre que Yossef ait été content d’oublier les tourments que ses frères lui firent endurer. Mais pourquoi se réjouit-il d’oublier son père éploré?

-> Le Malbim propose une autre façon de comprendre la nomination de Ménaché.
Il écrit que Yossef ne souhaitait pas oublier sa famille, bien au contraire ; il nomma son aîné Ménaché pour montrer qu’il se souciait de ne pas perdre le souvenir (nachani) de toutes les souffrances que les membres de sa famille lui firent subir.
Le 2e fils fut nommé Efraïm pour montrer qu’il était reconnaissant à l’égard d’Hachem qui l’avait rendu prospère dans le pays de ses épreuves, en mettant l’accent sur le fait que même dans son immense succès, il n’oublia pas les grandes difficultés auxquelles il fut confronté en Égypte.

Le Malbim explique, à ce sujet, que les noms qu’il donna à ses fils étaient, pour Yossef, comme des symboles. Il écrit ensuite que c’est une preuve de sa grandeur, parce qu’il s’efforça de se souvenir des épreuves qu’il dut affronter même à son heure de gloire. Il poursuit : "Ceci explique également pourquoi nous avons l’obligation de manger de la matsa avec du maror (herbes amères) le soir du séder de Pessa’h ; nous devons nous souvenir de l’exil quand nous sommes libres, car l’exil est la cause de la liberté et le mal conduit vers le bien."

Le Malbim n’explique toutefois pas exactement pourquoi le "mal" est la source du "bien" à venir. Une analyse plus profonde est nécessaire pour comprendre pourquoi, d’après lui, le fait de se souvenir du mal en période faste témoigne d’une grandeur particulière.

On peut répondre à ces interrogations grâce à l’explication du Sifté ‘Haïm sur la prière de "al hanissim" (à 'Hanoucca). Dans ce texte, nous remercions Hachem de nous avoir permis de vaincre les grecs : "Tu as livré les forts entre les mains des faibles, les nombreux entre les mains des peu-nombreux, les méchants entre les mains des justes, les impurs entre les mains des purs et les scélérats entre les mains de ceux qui se consacrent à Ta Torah."

Le Sifté ‘Haïm remarque que les 2 premiers éloges ne ressemblent pas aux 3 suivants.
Les deux premiers impliquent qu’Hachem a permis aux faibles de gagner bien qu’ils aient dû affronter de vaillants ennemis ; et aux peu nombreux de vaincre bien que les adversaires aient été multiples.
En revanche, les autres louanges supposent que les purs gagnèrent parce que les ennemis étaient impurs et que les vertueux vainquirent les Grecs parce que ces derniers étaient mauvais.

Il explique qu’en réalité, toutes les louanges sont semblables, car elles expliquent toutes pourquoi les ‘Hachmonaïm triomphèrent des Grecs. Quand nous disons qu’Hachem livra les puissants entre les mains des faibles et les nombreux entre les mains des peu-nombreux, c’est parce qu’ils étaient peu nombreux et faibles, et non en dépit de cela.

Le Sifté ‘Haïm précise ensuite que les ‘Hachmonaïm se savaient physiquement faibles et peu-nombreux ; par conséquent, ils savaient que selon les lois de la nature, ils n’avaient aucune chance de vaincre les puissants Grecs. Ils combattirent donc avec un bita’hon (confiance en D.) très fort, réalisant qu’ils ne pouvaient gagner que grâce à une aide Divine immense. Étant donné qu’ils ne se fièrent pas à leur force personnelle, Hachem les aida et leur permit d’en arriver à cette victoire miraculeuse.

Selon cette explication, nous pouvons comprendre pourquoi le Malbim affirme que les épreuves qu’un individu traverse sont la raison même du bonheur qu’il expérimentera ultérieurement.
Quand quelqu’un se trouve dans une situation difficile, voire désespérée, il lui est bien plus facile de réaliser qu’il n’est pas capable de réussir. Par conséquent, il se tourne vers Hachem en Lui demandant de le sortir de cette situation inextricable. Grâce à son bita’hon, Hachem l’exaucera certainement en lui prodiguant un immense bienfait qui améliorera grandement la situation en question. Ainsi, les "mauvais moments" que la personne passe sont la source même de futurs "bons moments".
Ce sentiment d’impuissance fut la clé du succès des ‘Hachmonaïm.

Nous pouvons également comprendre à présent pourquoi le Malbim estime que le fait de se souvenir de certaines épreuves passées pendant les moments de tranquillité est une preuve de grandeur. Quand une personne a tout ce dont elle a besoin, elle est bien plus susceptible de se sentir confiante et de penser qu’elle pourra s’en sortir toute seule. Elle risque de ne plus voir la nécessité de compter sur Hachem, mais plutôt de se sentir autonome.

C’est ce qui est écrit dans le 2e paragraphe du Chéma : la Torah promet que si nous respectons les mitsvot, nous connaîtrons la prospérité. Immédiatement après, la Torah nous met en garde contre le fait de s’éloigner d’Hachem ; ceci nous enseigne que le succès qu’Hachem nous attribue peut provoquer un relâchement.
Cette attitude peut avoir pour fâcheuse conséquence qu’Hachem agisse mesure pour mesure et ne fournisse plus à l’individu Son aide Divine
(siyata diChemaya), ce qui implique qu’il sera à la merci des lois de la nature.

Un tsadik, même quand l’abondance règne, continue de réaliser que tout ce qu’il a provient d’Hachem et que sa seule et unique source de réussite est l’Aide Divine continue.
La grandeur de Yossef fut de ne jamais oublier sa situation passée d’impuissance absolue, même quand il était presque au sommet de la pyramide. Il s’efforça de continuer de réaliser que de la même manière qu’il était, alors, entre les mains d’Hachem, il était tout aussi dépendant de Ses bienfaits à son heure de gloire.
[c'est en ce sens qu'il appela ainsi ses enfants. A chaque fois qu'il pensait à eux, il pensait également à quel point il était dépendant à 100% d'Hachem, même si extérieurement en apparence il était au sommet de la 1ere puissance de l'époque, l'Egypte. ]

En ressentant la même impuissance durant les bons moments que pendant les temps durs, Yossef mérita une aide Divine permanente.
Il est bien plus facile de sentir le besoin de se tourner vers Hachem dans la difficulté. Nous apprenons du comportement de Yossef que même en période d’opulence, nous devons nous souvenir des périodes plus difficiles de notre vie afin de garder à l’esprit que nous sommes, encore et toujours, totalement dépendants d’Hachem, dans tous les domaines de notre vie.
[grâce à cela on mérite de garder une aide Divine constante, d'avoir un maximum de biens, de bénédictions. ]
[rav Yéhonathan Gefen]

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-> Après avoir été promu vice-roi, Yossef eut deux fils. Il nomma le second Efraïm : "Car mon D. me rendit prospère dans la terre de ma souffrance" (Mikets 41,52).

-> Le rav Moché Sternbuch (Taam vaDaat) note que Yossef appela l’Égypte "terre de ma souffrance" (béérets on'yi) bien qu’il y était gouverneur. Il admit son succès et remercia pour sa prospérité, mais refusa de se sentir à l’aise dans ce pays, malgré sa gloire.

[ainsi malgré le fait que Yossef était au sommet du royaume de la 1ere puissance de l'époque, que matériellement il pouvait avoir tout ce qu'il voulait, ... malgré cela, pour lui sa situation était d'être dans la "terre de ma souffrance".
De même pour nous de nos jours, où Hachem nous accorde un exil extrêmement confortable (par rapport au passé, nous avons plus de moyens, nous profitons d'un luxe d'inventions incroyable, nous ne sommes pas persécutés, ...).
Mais à l'image de Yossef, même si matériellement on a tout ce que l'on veut à portée de main, nous ne devons pas oublier que le Temple n'est pas reconstruit, que nous sommes toujours en exil (de notre état de grande proximité avec la Présence Divine).
Cette notion que nous sommes en "terre de ma souffrance", nous permet d'éviter de se laisser influencer par l'environnement extérieur, de garder notre attachement avec les valeurs juives pures et intactes.
A l'image du cochon, la façon de vivre/penser non-juive : certes elle peut être très bonne, mais ce n'est pas ce que Hachem attend de moi!]

-> Selon rav Yéhochoua Hartman, on trouve plusieurs éléments dans le comportement de Yossef qui prouvent son attachement incroyable à Hachem. Après avoir été emprisonné durant 12 ans, il eut l’opportunité inespérée d’être libéré. S’il réussissait à apaiser Pharaon, il pouvait prendre un nouveau départ. Il savait que le roi d’Égypte ne croyait pas en D. (il se prenait lui-même pour un dieu) et que son arrogance était inégalée. Pourtant Yossef n’hésita pas à attribuer ses talents à Hachem.

-> Le rav Yéhonathan Gefen commente :
C’est une leçon remarquable quant à la façon dont nous devons agir dans un environnement étranger, voire hostile ; il s’agit d’une épreuve que toutes les générations durent affronter à travers les exils.
Certains tentent de cacher leur judaïsme, de camoufler les différences entre les non-juifs et eux. Malheureusement, l’histoire a prouvé que cette attitude menait généralement vers une vague d’assimilation. Quand on retire les barrières qui nous séparent des non-juifs, on ouvre une porte à l’affadissement du judaïsme, à la perte de notre identité.
La confiance en soi de Yossef qui affirma ses croyances est une clé (pour lui ainsi que pour les générations futures) de la réussite, elle permet d’éviter l’assimilation dans l'exil (galout) ...

Yossef montra l’exemple du juif qui garde ses valeurs et son identité. Il inculqua ainsi à son peuple la capacité de suivre sa voie et de refuser l’assimilation.
Le fait que la Paracha de Mikets jouxte la fête de ’Hanoucca n’est pas une coïncidence. Le lien est évident ; l’exil grec fut le premier qui menaça la pérennité du peuple juif en souhaitant l’assimiler. Malheureusement, un grand nombre de Juifs ne prirent pas leçon de Yossef et effacèrent volontiers les vestiges de leur judaïsme.
Mais les ’Hachmonaïm et d’autres Juifs courageux résistèrent à la tentation du mode de vie grec et risquèrent leur vie pour préserver leur identité juive.

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-> "Hachem m'a fait oublié tout mon effort et toute la maison de mon père" (Mikets 41,51)

-> Yossef appela son premier fils Menaché pour la raison rapportée dans ce verset. Mais on peut s'interroger. De quel effort parle-t-il ici? De plus pourquoi se réjouit-il tant d'avoir oublié la maison de son père?

En fait, Yossef était un homme Juste. Il a fait preuve d'une force intérieure et d'une crainte d'Hachem remarquable, pour surmonter toutes les épreuves qu'il vécut en Egypte. A sa place, un autre aurait pu en concevoir un certain orgueil.
Finalement, il s'est quand même montré remarquable. Et même si par mesure d'humilité, il préférerait ne pas se vanter de son mérite, malgré tout, il aurait pu louer l'éducation que son père lui a transmise et qui lui a donnée les forces pour surmonter ces épreuves.
Mais Yossef n'en fit rien. Il n'attribua le mérite et l'éloge qu'à Hachem. C'est Lui qui, dans Son Infinie Bonté, l'a sauvé et lui a permis de devenir un Juste (tsadik). Aussi, il déclara : "Hachem m'a fait oublié tout mon effort", pour ne pas que je ne ressente le moindre sentiment d'orgueil d'avoir tant lutté et avoir investi tant d'effort pour avoir surmonté toutes les épreuves.
Mais aussi, Il m'a fait oublié "toute la maison de mon père", pour ne pas que je ne ressente de fierté et d'orgueil, même du fait d'appartenir à une famille si illustre dont le père m'a donné une si bonne éducation. Le Seul Etre que je souhaite remercié c'est Hachem.

C'est là qu'intervient le nom qu'il donna à son deuxième fils : Efraïm. Car "Il m'a fait fructifié dans le pays de ma misère". Ce que Yossef voulait affirmé, c'est sa reconnaissance à Hachem, qui dans Sa Bonté, lui a permis d'en arriver là. Et pourquoi Hachem l'a tant gratifié de la sorte?
C'est parce qu'Il a vu que je me trouvais "dans le pays de ma misère". Il a vu ma misère et a eu pitié de moi. Et c'est pour cela qu'Il m'a fait tant grandir, Lui qui élève les misérables.

=> Yossef nous apprend là une remarquable leçon de modestie. Même si on a fait de grands efforts pour servir Hachem et pour résister au mauvais penchant, même si on pourrait avoir de quoi se vanter de l'éducation que nous a donné nos parents. Mais plus que tout, n'oublions pas de remercier Hachem qui nous a donné les forces de réussir et, dans Sa grande Miséricorde envers nous, nous a gratifié de pouvoir Le servir. Quant à son mérite personnel et celui de ceux qui nous ont aidé à grandir, même si bien sûr il y a lieu de leur témoigner toute notre reconnaissance, malgré tout, au moment où on s'apprête à remercier Hachem, il convient de tout oublier pour ne remercier que notre Créateur qui est Celui qui a permis tout cela.
[rapporté par le rav Mikaël Mouyal]

"Tout le pays d'Egypte commença à ressentir la famine, et le peuple mit à crier auprès de Pharaon pour du pain. Pharaon dit à tous les Egyptiens : "Allez à Yossef, ce qu'il vous dira, vous le ferez"." (Mikets 41,55)

-> Rachi commente : Yossef leur disait de se faire circoncire, [et c'est à cette condition qu'il leur donnerait de quoi manger].

=> Quel est l'intérêt d'un tel décret? Pourquoi imposer à des non-juifs de se circoncire?

-> Rabbi Yonatan Eibeschuetz apporte 2 réponses :
- 1°/ Dans le Yaarot Dvach, il enseigne que Yossef savait par inspiration Divine que sa famille était amenée à descendre en Egypte, et qu'au fil du temps, les juifs allaient s'installer et prendre leurs marques dans ce pays.
Ainsi, Yossef craignait que la génération suivante ne cherche à s'intégrer voire même à s'assimiler aux égyptiens, et que cela l'amène à arrêter de se circoncire pour ressembler aux égyptiens.

=> C'est pourquoi, pour éviter de telles fâcheuses conséquences, Yossef a anticipé les choses et a émis le décret que les égyptiens doivent se circoncire. De la sorte, même si dans l'avenir les juifs cherchent à ressembler aux égyptiens, au moins ils ne lâcheront pas la circoncision.
En effet puisque les égyptiens seront aussi circoncis, pour leur ressembler, les juifs ne se priveront pas de se circoncire.

De cette façon, ce décret de Yossef venait pour protéger la mitsva de la cironcision (mila) pour les juifs des générations suivantes.

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- 2°/ Dans son Tiféret Yonathan, il rapporte l'enseignement des commentateurs selon lequel la circoncision (mila) réduit le désir et les pulsions de l'homme.
Or, nos Sages disent que les égyptiens étaient embourbés dans la débauche, les mœurs étaient particulièrement dépravées/immorales en Egypte.

D'autre part, nos Sages rapportent que la débauche amène à la pauvreté : "Celui qui se laisse aller à la perversion finira par en venir à demander du pain et il n'en trouvera même pas".
[par exemple, dans le Séfer haMidot (partie sur l'argent, point n°66) de rabbi Na'hman de Breslev, il est écrit : "L'immoralité sexuelle entraîne la pauvreté".]

Ainsi, Yossef craignait que malgré ses réserves, la pauvreté et la faim se renforcent en Egypte du fait de l'immoralité de ses habitants.
Pour tempérer leurs pulsions et tenter de réduire la débauche dans ce pays, Yossef décréta que les égyptiens doivent se circoncire.
=> De cette façon, Yossef cherchait à préserver les réserves de blé, et d'éviter que la pauvreté et la famine se renforcent aussi en Egypte.

-> D'ailleurs, le Kli Yakar ajoute que c'est parce que Yossef a préservé son alliance de la circoncision (mila) et n'a pas succombé à la tentation de se débaucher avec la femme de Potifar, qu'il mérita que ce soit justement lui qui nourrisse l'Egypte et engrange de la récolte pendant les années d'abondance pour préparer les années de famine, sans que sa récolte ne pourrisse.

=> En effet, car si la débauche entraîne la pauvreté, le fait de résister à cette faute amène la bénédiction au niveau de la récolte (subsistance/parnassa).

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-> Le Alchikh haKadoch explique que la famine qui devait sévir dans le monde provenait des influences astrales. C'est ainsi que cette famine était annoncée à travers les 7 vaches maigres du rêve de Pharaon.

Le chiffre 7 évoque la marche naturelle du monde basée sur les 7 astres dont l'influence se succède pendant les 7 jours de la semaine.
Pour dépasser cette famine émanant des astres, Yossef imposa aux égyptiens de se circoncire, car la circoncision permet d'élever l'homme au-dessus des astres et des étoiles.

En effet, le prépuce fige l'individu sous le règne naturel du monde et la circoncision le libère des influences astrales. D'ailleurs, cela est une des raisons pour laquelle un juif doit se circoncire le 8e jour de sa vie, car le chiffre 8, qui est au-dessus du 7, représente justement la dimension qui dépasse la nature et les astres.

=> En imposant que les égyptiens se circoncissent, Yossef cherchait à élever l'Egypte à une dimension surnaturelle, en vue de la libérer du décret astral concernant la famine.

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-> Le Maskil léDavid rapporte le commentaire de Rachi qui dit que quand les frères ont vendu Yossef, ils ont conclu entre eux un vœu pour interdire à quiconque de révéler cette vente, et d'ailleurs Hachem Lui-même s'est associé à eux pour s'engager à garder ce secret.
C'est d'ailleurs pourquoi Hachem n'a pas révélé à Yaakov que son fils se trouve en Egypte [malgré le fait qu'il avait l'inspiration Divine!].

Puisque Yossef connaissait ce vœu, il ne pouvait pas informer sa famille et leur donner des nouvelles.
D'un autre côté, il s'imaginait bien dans quelle peine se trouvait son père pour penser avoir perdu son fils bien-aimé. Et Yossef se sentait avoir le devoir de le rassurer pour calmer son angoisse.

=> Il trouva la solution de décréter que les égyptiens se circoncisent. Yossef comptait sur le fait que très probablement, une telle chose se diffuserait dans les alentours.
Un tel décret [aussi incroyable] selon lequel tous les égyptiens doivent se circoncire devra forcément se répandre.

Ainsi, Yossef comptait sur le fait qu'en Canaan aussi, on apprenne cela et que Yaakov en entende parler. Et certainement, s'il entend qu'en Egypte, un homme a décrété que tout le monde doive se circoncire, il saura qu'une telle loi ne peut venir que d'un juif, et il se doutera alors que certainement cela vient de Yossef.
Et cela rassurera son père Yaakov, car il en conclura que Yossef est toujours vivant

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-> Yossef désirait suivre l'exemple d'Avraham, Its'hak et Yaakov, qui avaient converti des non-juifs par la manière douce et en utilisant la logique afin de les amener au judaïsme.

=> Yossef espérait amener les égyptiens par la circoncision à reconnaître le D. vrai et à se soumettre à Sa loi universelle.
[le Yéfé Toar rapporté dans le Méam Loez - Mikets 41,53-54]

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-> "Tout le pays d’Egypte était affligé par la famine, le peuple demanda à grands cris à Pharaon du pain. Pharaon répondit à tous les Égyptiens : "Allez chez Yossef ; ce qu’il vous dira, vous le ferez"." (Mikets 41,55)

Rachi explique sur les mots "Ce qu’il vous dira, vous le ferez" : "Parce que Yossef leur avait dit qu’ils devaient se circoncire".

En tant que vice-roi, Yossef gérait toute la nourriture engrangée en Égypte. En échange des bienfaits qu’il avait prodigués aux Égyptiens en subvenant à leurs besoins, Yossef leur demanda de se circoncire.
=> Les commentateurs se demandent pourquoi il fit une telle requête alors que les non-juifs n’ont pas l’obligation de faire la brit mila.

-> Le rav Yérou’ham Leibovitz (Daat Torah - Béréchit - Biourim) propose une réponse intéressante.
Il rapporte un verset de la paracha Vayigach (la paracha suivant Mikets) dans laquelle les égyptiens reconnaissent tout ce que Yossef a fait en leur faveur : "Ils dirent : "Tu nous as fait vivre"" (Vayigach 47,25).
Le midrach (Béréchit rabba Mikets 90,6) raconte qu’ils reconnurent ensuite qu’il leur avait sauvé la vie dans le Olam Hazé (ce monde-ci) et dans le Olam Haba (le monde à Venir) = cela signifie qu’il les a aidés dans le domaine spirituel et matériel.
Les commentateurs de ce midrach (Ets Yossef - Matnot Kéhouna) expliquent comment Yossef les a préservés spirituellement : il les força à pratiquer la brit mila (circoncision).
Cela leur fut d’une grande aide, bien qu’ils restèrent non-juifs. En effet, la Orla (l’excroissance) que l’on retire est source d’une grande impureté et le fait de l’enlever est bénéfique aux non-juifs également.

Le rav Yérou’ham Leibovitz explique ensuite pourquoi Yossef leur imposa la circoncision : il les avait tant aidés matériellement, en leur sauvant littéralement la vie durant la famine qu’il se sentait responsable de les aider aussi spirituellement.

En effet, la meilleure façon d’aider son prochain est de le soutenir au niveau spirituel.
C’est un concept discuté par les commentateurs concernant la mitsva d’aimer son prochain comme soi-même.

-> Le Ben Ich ’Haï affirme que malgré la place prépondérante qu’elle occupe dans la Torah, une grande partie de cette mitsva (’aimer son prochain comme soi-même) est négligée par plusieurs personnes. Selon lui, bien que beaucoup de gens aient conscience qu’elle exige une sollicitude vis-à-vis du bien-être physique du prochain, ils réalisent moins l’obligation qu’elle impose sur le plan spirituel.
Il ajoute que lorsque l’on aide son ami dans la spiritualité, on accomplit la mitsva de façon bien plus parfaite que quand on lui prodigue un bienfait dans la matérialité.

Le Ben Ich ’Haï explique (Péniné Ben Ich ’Haï - Parachat Kédochim) :
"Lorsque l’on soutient l’autre physiquement, on exprime notre préoccupation pour son corps. Mais l’essence de la personne provient du côté divin qui est en elle, de son âme, qui ne tire aucun profit de la matérialité.
Par contre, si l’on réprimande son ami et qu’on l’empêche par là de transgresser les mitsvot d’Hachem, on manifeste un souci pour son âme et l’on montre que notre amour pour son bien-être spirituel est bien plus grand que celui porté sur son aise matérielle."
=> Le Ben Ich ‘Haï nous enseigne donc que pour accomplir au mieux la mitsva d’aimer son prochain, on ne peut pas limiter sa gentillesse à la matérialité, mais il faut s’efforcer de l’aider encore plus dans la spiritualité.

-> Dans le même ordre d’idées, le Or’hot Tsadikim (Chaar Nédivout) nous précise qu’il y a 3 sortes de dons : l’apport d’argent, l’assistance physique (don de soi) et la transmission du savoir.
Il détaille ces 3 formes, puis termine le chapitre en se focalisant sur le fait d’enseigner la Torah aux autres.
Il écrit : "Il faut être particulièrement généreux en ce qui concerne les connaissances en Torah ; instruire autrui et rapprocher son cœur du Ciel. C’est le meilleur don : lui permettre l’accès au Monde Futur."

=> Rav Yérou’ham nous informe que Yossef était d’un tel niveau qu’il sentait que sa bonté envers les égyptiens était incomplète s’il ne sauvait pas aussi leurs âmes.
Cet enseignement est très pertinent dans notre quotidien.

-> Il existe plusieurs façons d’aider les autres dans ce domaine. Le Ben Ich ’Haï évoque la réprimande, mais dans la génération présente, il est très difficile de faire un reproche correctement, sans causer de tort.
On peut, en prenant moins de risques, partager sa Torah avec les autres. D’ailleurs, nos Sages affirment à diverses reprises que l’enseignement de la Torah est un objectif prioritaire ; la guémara (Roch Hachana 23b) fait savoir que celui qui apprend et qui n’enseigne pas ressemble à un myrte dans le désert.
Le Maharal (Hidouché Haggadot 23b) explique que le myrte est l’arbre le plus parfumé ; il fut créé pour que les gens profitent de son odeur agréable. Un myrte dans le désert ne réalise pas son objectif puisque personne ne jouit de lui. De même, la Torah est là pour être transmise et celui qui y renonce ne réalise pas son but sur terre.

La michna dans Pirké Avot (2,9) déclare : "Si tu as appris beaucoup de Torah, ne t’enorgueillis pas (Al Ta’hzik Tova Léastmékha), parce que c’est pour cela que tu as été créé."
D’après son sens simple, on comprend de cette michna qu’il ne faut pas se sentir fier de ses réalisations dans l’étude de la Torah parce que c’est le but de la vie.
Cependant, plusieurs commentateurs proposent une interprétation différente et comprennent les mots de la michna au sens littéral. Ils pensent que si quelqu’un a appris beaucoup de Torah, il ne doit pas garder ce bien pour lui-même, mais en faire profiter les autres et l’enseigner. Pourquoi?
Parce que son objectif sur terre est d’apprendre et d’enseigner.
[Rav Yehonathan Gefen]

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-> Yossef veillait scrupuleusement à préserver sa sainteté au point qu’il fut appelé "tsaddik yéssod olam" (Juste fondement du Monde - qui garde l’Alliance de la Mila). Cette qualité lui faisait répugner les hommes incirconcis.
Malgré cela, disent nos Sages dans le midrach, le fait d’avoir marqué les égyptiens du sceau de la Sainteté lui fut compté comme une faute. En effet, le tsaddik doit être tolérant même envers ceux qui sont le contraire de son caractère.
[Sfat Emet]

-> L’imposition de la Mila aux Egyptiens est à mettre en rapport avec le phénomène de moisissure de blé qui se produisait chez eux, mais non chez Yossef. Aussi, ce dernier attribuait-il cette différence aux bienfaits de la brit mila. Celle-ci a, en effet, le pouvoir de conférer la pérennité de vie et de biens à ses adhérents, comme le prouve l’histoire du peuple juif.
Yossef considérait donc l’accomplissement de la Brit Mila comme un antidote de la déchéance et comme une garantie de durée et de persistance (à noter que le mot ברית – Brit (alliance de la Mila) est traduit en araméen, dans le commentaire de Onkelos (Lé'ha Lé'ha 17,11), par le mot קימא – Kima qui signifie "survie"). [voir Rabbénou Bé’hayé].

"[Yossef] répliqua : "Loin de moi d'agir ainsi! L'homme aux mains duquel la coupe s'est trouvée, sera mon esclave ; quant à vous, retournez en paix auprès de votre père"." (Mikets 44,17)

-> Le midrach Tan'houma explique les paroles de Yossef à ses frères :
"Je crois savoir pourquoi votre jeune frère a dérobé la coupe. Il m'a vu pratiqué la divination avec cette coupe, et voulait l'utiliser pour retrouver son frère disparu. Il m'a tout raconté à ce sujet.

Je sais que son frère ne vous avait rien volé, qu'il ne vous avait fait aucun mal, mais pourtant, vous avez dit à votre père qu'une bête féroce l'avait mis en pièce.
A présent, faites de même avec Binyamin. Il a dérobé et vous a causé du tort. Dites à votre père que lui aussi a été tué par une bête féroce.
Je ne le mettrai pas à mort. Il me suffit que Binyamin reste ici comme mon esclave. Vous pouvez aller en paix chez votre père."

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-> Le Méam Loez (v.44,17) écrit :
Yossef ne désirait que le bien de ses frères. Il les aimait, et voulait les faire souffrir afin de racheter le terrible péché commis à son encontre. Il était préférable pour eux que leur châtiment se réalise en ce monde plutôt que dans le monde à venir.
Par amour pour eux, il fit en sorte qu'ils puissent expier leur péché.
[...]

Yossef vit que ses frères étaient visiblement liés les uns aux autres. Pourtant, il voulut s'assurer qu'ils témoignaient du même attachement pour Binyamin.
Peut-être haïssaient-ils Binyamin comme ils l'avaient lui-même détesté, du fait que Binyamin était le préféré de son père.

Yossef cacha donc la coupe dans le sac de Binyamin afin de s'assurer que ses frères l'aimaient et se souciaient de son bien-être.

-> Le Séfer haYachar explique que si en découvrant la coupe dans le sac de Binyamin, les frères continuent leur route (nous devons apporter de la nourriture à nos familles qui sont affamées!), l'abandonnant derrière, alors il est clair qu'ils n'éprouvent aucun sentiment fraternel.

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-> Le Abarvanel explique que Yossef a conduit à l'arrestation [suite à la coupe retrouvée chez Binyamin] de ses frères très tôt le matin, à une heure où la ville est encore endormie, afin de leur éviter toute souffrance inutile.

-> Rabbénou Bé'hayé explique que Yossef ne les laissera pas partir très loin [avant de les accuser du vol de la coupe], car il ne veut pas que ses frères se fatiguent inutilement.

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-> Pour le bien de ses frères, Yossef a dû aller à l'encontre de son inclinaison naturelle de leur témoigner plein de chaleur et de compassion, provenant d'intenses sentiments d'amour fraternel à leur égard.

C'est pourquoi, avant même qu'il ne s'adresse à eux [lors de leur 1ere venue], un messager Divin vient le mettre en garde :
"Yossef, tes frères t'ont jeté dans un puits, et c'est à eux que tu dois d'avoir été vendu à 4 reprises. Même s'ils ont agi de bonne foi en pensant ne faire que leur devoir, tu ne dois pas leur pardonner sans mener cette confrontation à sa conclusion logique. Il importe qu'ils comprennent exactement où ils ont fauté."
[Aggadat Béréchit 72]

-> Comme ils ont commis plusieurs fautes contre Yossef, Hachem désire les punir dans ce monde-ci afin de leur accorder leur part entière dans le monde futur.
[le paiement de nos fautes est infiniment moins cher dans ce monde que dans le monde à venir!]

-> Les frères ont cherché à faire du mal à Yossef, et il en est finalement résulté un très grand bien.
Inversement, Yossef va donner l'impression de les traiter durement, mais ce sera pour le bien de tous.
[Abarvanel]

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-> Yossef ne provoqua pas ses frères pour les tourmenter et se venger.
Il ne poursuivait qu'un seul but : s'assurer qu'ils l'aimaient. En fonction de leurs sentiments pour Binyamin, il put vérifier leurs sentiments à son égard.

Face à l'attitude de Yéhouda, il comprit que ses frères nourrissaient de bons sentiments à l'égard des fils de Ra'hél. C'est pourquoi il décida alors de révéler son identité.
[...]

De plus, Yossef ne souhaitait ni embarrasser ses frères, ni leur dévoiler brusquement son identité, car cette annonce risquait de les tuer.
[...]

Yossef commença par préparer ses frères en disant : ... Comment pouvez-vous mentir ainsi? Comment avez-vous la certitude de la mort de votre frère? Je l'ai acheté comme esclave, et je veux l'appeler tout de suite.
Yossef se mit alors à appeler : "Yosef! Yosef! Yossef, fils de Yaakov, vient immédiatement! Viens parler à tes frères!"

Ses frères regardèrent autour d'eux attendant l'apparition de Yossef. Lorsque ce dernier vit qu'ils étaient suffisamment préparés, il dit : "Que cherchez-vous? Je suis Yossef! Mon père est-il encore ne vie?"
[Méam Loez - Vayigach 45,1]

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+ "[Yossef éleva sa voix avec des pleurs] Les égyptiens l'entendirent, la maison de pharaon l'entendit" (Vayigach 45,2)

-> Yossef pleura si fort [après s'être révélé à ses frères] qu'on l'entendit à travers toute la capitale égyptienne, jusqu'au palais de Pharaon.
[Méam Loez]

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+ "Il dit à ses frères : Je suis Yossef. Mon père vit-il encore?
Mais ses frères ne purent lui répondre, car il les avait frappés de stupeur. (Vayigach 45,3)

-> La vie s'échappa du corps de ses frères, tant leur frayeur était immense. Hachem les ressuscita ensuite miraculeusement.
[Méam Loez]

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+ Yossef dit à ses frères : Approchez-vous de moi, je vous prie.
Et ils s'approchèrent. Il reprit : Je suis Yossef, votre frère, que vous avez vendu pour l'Egypte. Et maintenant, ne vous affligez pas, ne soyez pas irrités contre vous-mêmes, de m'avoir vendu pour ce pays ...Hachem m'a envoyé avant vous sauver la vie ... Non, ce n'est pas vous qui m'avez fait venir ici, c'est D., et il m'a fait devenir le père de Pharaon" (Vayigach 45,4-13)

-> Selon le Tsor haMor, lorsque ses frères s'approchèrent, Yossef leur chuchota : "Je suis Yossef, votre frère, que vous avez vendu à l'Egypte". Il leur dit cela calmement, pour que Binyamin n'entende pas. Il leur promit aussi de ne pas le révéler à leur père.

-> Le Méam Loez enseigne que Yossef a fait sortir tout le monde pour éviter à ses frères de subir la honte de sa révélation public.
Il se dit : "Mieux vaut qu'ils me tuent plutôt que je commette l'équivalent moral d'une effusion de sang en les humiliant publiquement."

Selon une autre opinion, les frères de Yossef s'apprêtaient effectivement à le tuer. L'ange Gabriel apparut soudain, et les dispersa aux 4 coins du palais.

"Ces hommes [les fils de Yaakov] s'alarmèrent, en se voyant introduits dans la maison de Yossef" (Mikets 43,18)

-> "Malheur à ceux qui ne respectent pas les commandements de la Torah.
Malheur à eux lorsque Hachem les convoque pour les juger et faire le compte de leurs actions.

Nous savons que les 10 fils de Yaakov étaient très puissants, mais lorsqu'un jeune serviteur les conduisit chez Yossef, ils furent terrifiés.
Comment doit-on se sentir alors, lorsque D. nous convoque pour le jour redoutable du jugement.
Chacun doit donc réfléchir à la manière dont il répondra de ses actions devant Hachem."

[rabbi Yossi - rapporté dans le Zohar]

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-> Le Zohar continue :
La terreur des frères reposait sur leur sentiment de culpabilité pour la vente de Yossef.
A cause de cela, la force les abandonna, car le péché brise l'individu. Sinon, ils n'auraient eu aucune crainte.

"Pharaon envoya chercher Yossef et le convoqua. On le fit sortir de la prison, on le rasa et on lui donna de nouveaux vêtements. Puis il alla au-devant de Pharaon" (Mikets 41,14)

-> Yossef sortit de sa prison le jour de Roch Hachana.

Il s'est rasé et coupé les cheveux malgré l'interdit de le faire à Roch Hachana, car si un individu ne le fait pas, il manque de respect à un roi, et il encourt donc la peine de mort.
De plus, comme la Torah n'avait pas encore été donnée, il n'était pas nécessaire de faire montre de rigueur, et Yossef pouvait donc agir ainsi.
[Méam Loez]

-> Yossef est resté en prison pendant 12 années.
Durant toute cette période, il ne s'est pas rasé la barbe ni coupé les cheveux, car il a choisi de vivre en nazir tant qu'il serait prisonnier.

Selon le Sifté Cohen, Yossef n'a pas eu besoin de se laver (d'ailleurs cela n'est pas mentionné dans notre verset!), car depuis son voyage dans la caravane des Ichmaélites, il avait gardé une bonne odeur.

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-> De même que Yossef est passé en un instant de prisonnier accusé de viol, à vice-roi de la 1ere puissance mondiale de l'époque (l'Egypte), de même tout juif a beau être considéré comme répugnant par les nations, mais en un instant le roi des Rois (Hachem) peut envoyer le machia'h, et alors la Vérité brillera au grand jour : les juifs seront élevés au titre de vices-roi du monde (juste après le roi des Rois!).

[cela implique une responsabilité de notre part. En effet, combien à notre niveau nous devons nous tenir prêt (en étant le mieux habillé possible spirituellement parlant!), car le machia'h peut véritablement venir à tout moment!]

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-> "Pharaon envoya quérir Yossef, qu’on fit sur le champ sortir de la prison" (Mikets 41,14)

-> Le Ben Ich 'Haï (Od Yossef 'Haï - Miket) enseigne :
Le mot : "vayéritsouhou" (וַיְרִיצֻהוּ) qu’on a traduit par "le faire sortir sur le champ" veut dire en fait : "ils l’ont fait courir" et peut aussi vouloir dire "ils lui ont couru après".
On peut comprendre cette dernière explication dans le sens où la descente de Yossef dans cette fosse est à l’image de la Néfilat Apaïm, ce passage de la Téfila juste après la ‘Amida et le Vidouï, ou les kabbalistes ont comme pensée de descendre au plus profond des forces du mal pour aller y chercher des étincelles de sainteté, jusqu’alors inaccessibles (Note: évidemment, ceci nécessite en soi une explication détaillée).
Donc Yossef est au fond de son cachot en train de libérer ces étincelles, quand soudainement Pharaon le fait chercher. Une partie des étincelles qu’il n’avait pas finit de libérer, voyant qu’elles n’auront pas d’autre occasion avant longtemps qu’on s’occupe d’elles, arrivent à se défaire des derniers liens qui les retiennent en bas, s’arrachent du trou et sortent avec Yossef.
C’est le sens de "ils lui ont couru après" qu’on peut donner à "Vayéritsouhou" (וַיְרִיצֻהוּ).

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-> "Pharaon envoya quérir Yossef, qu'on fit sortir précipitamment de la geôle" (Mikets 41,14)

-> Le rav d'Ostrova enseigne :
"Imaginons qu'un homme croupit dans une prison depuis déjà très longtemps, et qu'il n'a pas vu tout ce temps la lumière du soleil (qu'il n'y avait pas de téléphone pour communiquer avec quiconque), et qu'il n'a jamais eu aucune vacances... Au terme de 12 années, on le libère quelque peu et, non seulement cela, mais on lui donne également la permission de se rendre chez le roi en personne, aurait-on besoin de le faire sortir précipitamment? Il est certain qu'il se précipiterait de lui-même de toutes ses forces pour venir devant le roi, tomber à ses pieds, implorer sa miséricorde et obtenir sa grâce!
Pourtant, qu'est-il écrit au sujet de Yossef? "On le fit sortir"! Il n'y alla pas de lui-même mais on fut forcé de le hâter devant le roi!

La raison en est que Yossef avait conscience et confiance que tout provient du Ciel, et que sa libération arriverait au moment précis où cela avait été décrété par le Ciel, ni avant ni après. Dès lors, à quoi cela servait de se presser et de courir vainement! Ce fut pour cette raison que les serviteurs de Pharaon durent le presser de sortir.

Cela concerne également tous les domaines de l'existence : personne ne fait quoi que ce soit de lui-même, et tout ce qui se produit dans le monde est le fait du décret Divin en temps voulu et selon ce qui a été décidé, ni plus ni moins. Certes, il incombe à l'homme de faire un effort personnel (hichtadlout) car c'est ainsi qu'Hachem l'a fixé dans le monde cependant loin de lui doit être l'idée qu'il est en mesure d'ajouter ne fût-ce qu'un centime de plus à ce qui a été décrété pour lui, et il n'y a aucune utilité à une hichtadlout superflue ou effrénée.

"Que D. tout puissant vous fasse trouver compassion auprès de cet homme, afin qu'il vous rende votre autre frère et Binyamin." (Mikets 43,14)

-> A ce moment-là [les frères s'apprêtent à retourner en Egypte avec Binyamin. Leur père Yaakov leur donne des cadeaux à apporter au vice-roi (Yossef) ainsi qu'une] lettre dans laquelle il demande et menace [le vice-roi - Yossef] en ces termes :

"De ton serviteur Yaakov, fils de Its'hak, fils d'Avraham l'Hébreu, prince de D., ...
Autant que D. est vivant, quand mon fils m'a dit comment tu t'es conduit avec eux, je n'ai pas invoqué Hachem à ton propos, car alors tu aurais été perdu avec tes gens avant que mon fils Binyamin ne se présente devant toi. Mais je me suis dit que Chimon mon fils était chez toi, et que peut-être tu le traitais bien, c'est pourquoi je n'ai rien fait contre toi".
[Séfer haChir - p.200]

=> Nous apprenons de là que Yaakov avait la possibilité de détruire l'Egypte et de sauver Chimon et Binyamin. Pourquoi ne l'a-t-il pas fait?

La raison est que le vice-roi d'Egypte (Yossef) s'était conduit généreusement avec ses frères et leur avait donné à manger quand ils avaient faim. Il ne pouvait donc pas se montrer ingrat et lui faire du mal.
Même s'il leur avait parlé durement et mis Chimon en prison, ils n'avaient pas le droit de lui faire du mal, et c'est l'allusion faite par Yaakov dans sa lettre : "Je me suis dit que Chimon mon fils était chez toi, peut-être que tu le traitais bien, c'est pourquoi je n'ai rien fait contre toi".

Cela nous enseigne que Yaakov n'a évité de prier Hachem à son sujet qu'à cause de cela, que peut-être il traitait bien Chimon, sans parler du bien qu'il leur avait déjà fait de remplir leurs sacs et de leur fournir tout ce qu'il leur allait.

=> On apprend de là jusqu'où doit aller la gratitude : même si le vice-roi d'Egypte (Yossef) les a fait souffrir et qu'ils ne savaient pas ce qu'il voulait, ils n'ont rien fait contre lui, parce qu'ils avaient profité de lui, et ils n'avaient pas le droit de se montrer ingrats.