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"Yossef nomma son aîné Ménaché : Car D. m’a fait oublier (nachani) toute ma peine et toute la maison de mon père.
Au second, il donna le nom d'Éfraïm : car mon D. me rendit prospère dans la terre de ma souffrance."
(Mikets 41,51-52)

D’après le sens simple, Yossef nomma son premier-né Ménaché par gratitude envers Hachem qui lui a permis d’oublier les rudes épreuves qu’il subit chez son père.
=> Cette interprétation semble difficile à comprendre. On peut facilement entendre que Yossef ait été content d’oublier les tourments que ses frères lui firent endurer. Mais pourquoi se réjouit-il d’oublier son père éploré?

-> Le Malbim propose une autre façon de comprendre la nomination de Ménaché.
Il écrit que Yossef ne souhaitait pas oublier sa famille, bien au contraire ; il nomma son aîné Ménaché pour montrer qu’il se souciait de ne pas perdre le souvenir (nachani) de toutes les souffrances que les membres de sa famille lui firent subir.
Le 2e fils fut nommé Efraïm pour montrer qu’il était reconnaissant à l’égard d’Hachem qui l’avait rendu prospère dans le pays de ses épreuves, en mettant l’accent sur le fait que même dans son immense succès, il n’oublia pas les grandes difficultés auxquelles il fut confronté en Égypte.

Le Malbim explique, à ce sujet, que les noms qu’il donna à ses fils étaient, pour Yossef, comme des symboles. Il écrit ensuite que c’est une preuve de sa grandeur, parce qu’il s’efforça de se souvenir des épreuves qu’il dut affronter même à son heure de gloire. Il poursuit : "Ceci explique également pourquoi nous avons l’obligation de manger de la matsa avec du maror (herbes amères) le soir du séder de Pessa’h ; nous devons nous souvenir de l’exil quand nous sommes libres, car l’exil est la cause de la liberté et le mal conduit vers le bien."

Le Malbim n’explique toutefois pas exactement pourquoi le "mal" est la source du "bien" à venir. Une analyse plus profonde est nécessaire pour comprendre pourquoi, d’après lui, le fait de se souvenir du mal en période faste témoigne d’une grandeur particulière.

On peut répondre à ces interrogations grâce à l’explication du Sifté ‘Haïm sur la prière de "al hanissim" (à 'Hanoucca). Dans ce texte, nous remercions Hachem de nous avoir permis de vaincre les grecs : "Tu as livré les forts entre les mains des faibles, les nombreux entre les mains des peu-nombreux, les méchants entre les mains des justes, les impurs entre les mains des purs et les scélérats entre les mains de ceux qui se consacrent à Ta Torah."

Le Sifté ‘Haïm remarque que les 2 premiers éloges ne ressemblent pas aux 3 suivants.
Les deux premiers impliquent qu’Hachem a permis aux faibles de gagner bien qu’ils aient dû affronter de vaillants ennemis ; et aux peu nombreux de vaincre bien que les adversaires aient été multiples.
En revanche, les autres louanges supposent que les purs gagnèrent parce que les ennemis étaient impurs et que les vertueux vainquirent les Grecs parce que ces derniers étaient mauvais.

Il explique qu’en réalité, toutes les louanges sont semblables, car elles expliquent toutes pourquoi les ‘Hachmonaïm triomphèrent des Grecs. Quand nous disons qu’Hachem livra les puissants entre les mains des faibles et les nombreux entre les mains des peu-nombreux, c’est parce qu’ils étaient peu nombreux et faibles, et non en dépit de cela.

Le Sifté ‘Haïm précise ensuite que les ‘Hachmonaïm se savaient physiquement faibles et peu-nombreux ; par conséquent, ils savaient que selon les lois de la nature, ils n’avaient aucune chance de vaincre les puissants Grecs. Ils combattirent donc avec un bita’hon (confiance en D.) très fort, réalisant qu’ils ne pouvaient gagner que grâce à une aide Divine immense. Étant donné qu’ils ne se fièrent pas à leur force personnelle, Hachem les aida et leur permit d’en arriver à cette victoire miraculeuse.

Selon cette explication, nous pouvons comprendre pourquoi le Malbim affirme que les épreuves qu’un individu traverse sont la raison même du bonheur qu’il expérimentera ultérieurement.
Quand quelqu’un se trouve dans une situation difficile, voire désespérée, il lui est bien plus facile de réaliser qu’il n’est pas capable de réussir. Par conséquent, il se tourne vers Hachem en Lui demandant de le sortir de cette situation inextricable. Grâce à son bita’hon, Hachem l’exaucera certainement en lui prodiguant un immense bienfait qui améliorera grandement la situation en question. Ainsi, les "mauvais moments" que la personne passe sont la source même de futurs "bons moments".
Ce sentiment d’impuissance fut la clé du succès des ‘Hachmonaïm.

Nous pouvons également comprendre à présent pourquoi le Malbim estime que le fait de se souvenir de certaines épreuves passées pendant les moments de tranquillité est une preuve de grandeur. Quand une personne a tout ce dont elle a besoin, elle est bien plus susceptible de se sentir confiante et de penser qu’elle pourra s’en sortir toute seule. Elle risque de ne plus voir la nécessité de compter sur Hachem, mais plutôt de se sentir autonome.

C’est ce qui est écrit dans le 2e paragraphe du Chéma : la Torah promet que si nous respectons les mitsvot, nous connaîtrons la prospérité. Immédiatement après, la Torah nous met en garde contre le fait de s’éloigner d’Hachem ; ceci nous enseigne que le succès qu’Hachem nous attribue peut provoquer un relâchement.
Cette attitude peut avoir pour fâcheuse conséquence qu’Hachem agisse mesure pour mesure et ne fournisse plus à l’individu Son aide Divine
(siyata diChemaya), ce qui implique qu’il sera à la merci des lois de la nature.

Un tsadik, même quand l’abondance règne, continue de réaliser que tout ce qu’il a provient d’Hachem et que sa seule et unique source de réussite est l’Aide Divine continue.
La grandeur de Yossef fut de ne jamais oublier sa situation passée d’impuissance absolue, même quand il était presque au sommet de la pyramide. Il s’efforça de continuer de réaliser que de la même manière qu’il était, alors, entre les mains d’Hachem, il était tout aussi dépendant de Ses bienfaits à son heure de gloire.
[c'est en ce sens qu'il appela ainsi ses enfants. A chaque fois qu'il pensait à eux, il pensait également à quel point il était dépendant à 100% d'Hachem, même si extérieurement en apparence il était au sommet de la 1ere puissance de l'époque, l'Egypte. ]

En ressentant la même impuissance durant les bons moments que pendant les temps durs, Yossef mérita une aide Divine permanente.
Il est bien plus facile de sentir le besoin de se tourner vers Hachem dans la difficulté. Nous apprenons du comportement de Yossef que même en période d’opulence, nous devons nous souvenir des périodes plus difficiles de notre vie afin de garder à l’esprit que nous sommes, encore et toujours, totalement dépendants d’Hachem, dans tous les domaines de notre vie.
[grâce à cela on mérite de garder une aide Divine constante, d'avoir un maximum de biens, de bénédictions. ]
[rav Yéhonathan Gefen]

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-> Après avoir été promu vice-roi, Yossef eut deux fils. Il nomma le second Efraïm : "Car mon D. me rendit prospère dans la terre de ma souffrance" (Mikets 41,52).

-> Le rav Moché Sternbuch (Taam vaDaat) note que Yossef appela l’Égypte "terre de ma souffrance" (béérets on'yi) bien qu’il y était gouverneur. Il admit son succès et remercia pour sa prospérité, mais refusa de se sentir à l’aise dans ce pays, malgré sa gloire.

[ainsi malgré le fait que Yossef était au sommet du royaume de la 1ere puissance de l'époque, que matériellement il pouvait avoir tout ce qu'il voulait, ... malgré cela, pour lui sa situation était d'être dans la "terre de ma souffrance".
De même pour nous de nos jours, où Hachem nous accorde un exil extrêmement confortable (par rapport au passé, nous avons plus de moyens, nous profitons d'un luxe d'inventions incroyable, nous ne sommes pas persécutés, ...).
Mais à l'image de Yossef, même si matériellement on a tout ce que l'on veut à portée de main, nous ne devons pas oublier que le Temple n'est pas reconstruit, que nous sommes toujours en exil (de notre état de grande proximité avec la Présence Divine).
Cette notion que nous sommes en "terre de ma souffrance", nous permet d'éviter de se laisser influencer par l'environnement extérieur, de garder notre attachement avec les valeurs juives pures et intactes.
A l'image du cochon, la façon de vivre/penser non-juive : certes elle peut être très bonne, mais ce n'est pas ce que Hachem attend de moi!]

-> Selon rav Yéhochoua Hartman, on trouve plusieurs éléments dans le comportement de Yossef qui prouvent son attachement incroyable à Hachem. Après avoir été emprisonné durant 12 ans, il eut l’opportunité inespérée d’être libéré. S’il réussissait à apaiser Pharaon, il pouvait prendre un nouveau départ. Il savait que le roi d’Égypte ne croyait pas en D. (il se prenait lui-même pour un dieu) et que son arrogance était inégalée. Pourtant Yossef n’hésita pas à attribuer ses talents à Hachem.

-> Le rav Yéhonathan Gefen commente :
C’est une leçon remarquable quant à la façon dont nous devons agir dans un environnement étranger, voire hostile ; il s’agit d’une épreuve que toutes les générations durent affronter à travers les exils.
Certains tentent de cacher leur judaïsme, de camoufler les différences entre les non-juifs et eux. Malheureusement, l’histoire a prouvé que cette attitude menait généralement vers une vague d’assimilation. Quand on retire les barrières qui nous séparent des non-juifs, on ouvre une porte à l’affadissement du judaïsme, à la perte de notre identité.
La confiance en soi de Yossef qui affirma ses croyances est une clé (pour lui ainsi que pour les générations futures) de la réussite, elle permet d’éviter l’assimilation dans l'exil (galout) ...

Yossef montra l’exemple du juif qui garde ses valeurs et son identité. Il inculqua ainsi à son peuple la capacité de suivre sa voie et de refuser l’assimilation.
Le fait que la Paracha de Mikets jouxte la fête de ’Hanoucca n’est pas une coïncidence. Le lien est évident ; l’exil grec fut le premier qui menaça la pérennité du peuple juif en souhaitant l’assimiler. Malheureusement, un grand nombre de Juifs ne prirent pas leçon de Yossef et effacèrent volontiers les vestiges de leur judaïsme.
Mais les ’Hachmonaïm et d’autres Juifs courageux résistèrent à la tentation du mode de vie grec et risquèrent leur vie pour préserver leur identité juive.

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-> "Hachem m'a fait oublié tout mon effort et toute la maison de mon père" (Mikets 41,51)

-> Yossef appela son premier fils Menaché pour la raison rapportée dans ce verset. Mais on peut s'interroger. De quel effort parle-t-il ici? De plus pourquoi se réjouit-il tant d'avoir oublié la maison de son père?

En fait, Yossef était un homme Juste. Il a fait preuve d'une force intérieure et d'une crainte d'Hachem remarquable, pour surmonter toutes les épreuves qu'il vécut en Egypte. A sa place, un autre aurait pu en concevoir un certain orgueil.
Finalement, il s'est quand même montré remarquable. Et même si par mesure d'humilité, il préférerait ne pas se vanter de son mérite, malgré tout, il aurait pu louer l'éducation que son père lui a transmise et qui lui a donnée les forces pour surmonter ces épreuves.
Mais Yossef n'en fit rien. Il n'attribua le mérite et l'éloge qu'à Hachem. C'est Lui qui, dans Son Infinie Bonté, l'a sauvé et lui a permis de devenir un Juste (tsadik). Aussi, il déclara : "Hachem m'a fait oublié tout mon effort", pour ne pas que je ne ressente le moindre sentiment d'orgueil d'avoir tant lutté et avoir investi tant d'effort pour avoir surmonté toutes les épreuves.
Mais aussi, Il m'a fait oublié "toute la maison de mon père", pour ne pas que je ne ressente de fierté et d'orgueil, même du fait d'appartenir à une famille si illustre dont le père m'a donné une si bonne éducation. Le Seul Etre que je souhaite remercié c'est Hachem.

C'est là qu'intervient le nom qu'il donna à son deuxième fils : Efraïm. Car "Il m'a fait fructifié dans le pays de ma misère". Ce que Yossef voulait affirmé, c'est sa reconnaissance à Hachem, qui dans Sa Bonté, lui a permis d'en arriver là. Et pourquoi Hachem l'a tant gratifié de la sorte?
C'est parce qu'Il a vu que je me trouvais "dans le pays de ma misère". Il a vu ma misère et a eu pitié de moi. Et c'est pour cela qu'Il m'a fait tant grandir, Lui qui élève les misérables.

=> Yossef nous apprend là une remarquable leçon de modestie. Même si on a fait de grands efforts pour servir Hachem et pour résister au mauvais penchant, même si on pourrait avoir de quoi se vanter de l'éducation que nous a donné nos parents. Mais plus que tout, n'oublions pas de remercier Hachem qui nous a donné les forces de réussir et, dans Sa grande Miséricorde envers nous, nous a gratifié de pouvoir Le servir. Quant à son mérite personnel et celui de ceux qui nous ont aidé à grandir, même si bien sûr il y a lieu de leur témoigner toute notre reconnaissance, malgré tout, au moment où on s'apprête à remercier Hachem, il convient de tout oublier pour ne remercier que notre Créateur qui est Celui qui a permis tout cela.
[rapporté par le rav Mikaël Mouyal]

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