"Ainsi fit Aharon" (Béaaloté'ha 8,3)
Rachi commente : c'est l'éloge de Aharon qui n'a rien changé [à l'ordre reçu relatif à l'allumage et à l'entretien des lumières de la Ménora].
=> Pourquoi pourrions-nous penser que Aharon aurait modifié l'ordre reçu?
Le rav Shloime Halberstam répond que les flammes que Aharon allumait sur la Ménora représentent les âmes du peuple juif. En enflammant ces âmes, Aharon témoignait de son amour envers chaque juif, en les ramenant plus proche du Service de leur père au Ciel (avi'hem chébachamaïm).
A cet égard, Aharon travaillait d'une manière parfaitement égale pour chaque membre du peuple juif, ne témoignant d'aucun favoritisme ou d'un amour supplémentaire qu'à celui de ses propres enfants.
=> C'est cela toute la profondeur de l'éloge de Aharon : "il n'a rien changé".
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-> Dans la bénédiction : "sim shalom" de la Amida, il est écrit : "Une loi (Torat) de vie, l'amour de la vertu, et de la justice, la bénédiction, la miséricorde, la vie, et la paix." (torat 'haïm, véaavat 'héssed, vétsédakat, vébéra'ha, véra'hamim, vé'haïm, véshalom).
Ces 7 formulations correspondent aux 7 flammes de la Ménora qui dispensaient la lumière Divine au peuple juif et à tout l'univers.
[Kohélét Its'hak - Béaaloté'ha]
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-> Le Ahavat Shalom (rabbi Ména’hem Mendel de Kossov) commente sur ce verset :
Pourquoi Aharon mérite-t-il d'être loué pour avoir correctement accompli une chose aussi facile que d'allumer la Ménora?
Dans le passage de la Torah relatif à chaque journée de la Création (paracha Béréchit), nous lisons à la fin de chaque paragraphe : "vayéhi 'hèn" (et cela s'accomplit - וַיְהִי-כֵן).
Le seul paragraphe qui fait exception est le 1er paragraphe (1ere journée) qui décrit la création de la lumière où, au lieu de : "vayéhi 'hèn", il est dit : "vayéhi or" (et la lumière fut - וַיְהִי-אוֹר).
Nos Sages, notant cette différence, expliquent que la lumière du 1er jour de la Création a été mise de côté dans un endroit caché, parce que D. trouva que le monde ne méritait pas d'être illuminé par la brillante splendeur de ce rayonnement céleste.
A la place, c'est une lumière diminuée qui est apparue. Avec pour résultat que D. ne pouvait plus dire : "vayéhi 'hen" (et cela s'accomplit), parce que la lumière qui a émergé n'était pas celle que D. avait prévue pour le monde.
=> En illuminant la Ménora, Aharon a restitué la glorieuse lumière primordiale du monde. Il a rétabli par ce moyen le "bayéhi 'hèn", le "et cela s'accomplit" du 1er jour de la Création.
C'était ce que veut dire Rachi par : "Aharon n'a fait aucun changement" = en illuminant la Ménora, il rectifia le changement qui avait été opéré lors du 1er jour de la Création. Un acte vraiment méritoire.
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Rachi explique que la Torah veut faire l'éloge de Aharon, qui fit comme Hachem l'ordonna et ne changea rien à l'ordre Divin.
Mais en quoi cela est-il si élogieux? N'est-il pas normal de ne pas changer de l'ordre Divin?
En réalité lorsque Aharon alluma les bougies de la Ménora, il était empreint d'un enthousiasme et d'une ardeur tellement intenses, que logiquement, il aurait dû être saisi de tremblement, ce qui aurait entraîné des modifications dans l'allumage, comme le fait de renverser un peu d'huile par exemple.
Mais Aharon, malgré son enthousiasme, a réussi à prendre le dessus et à avoir la maîtrise de son émotion, sans que son corps ne soit sous l'emprise de son ardeur. Dès lors, il a pu allumer la Ménora avec maîtrise de soi, sans
aucunement modifier, même contre son gré, l'ordre Divin.
=> L'éloge de Aharon était que malgré son émotion intense, il fut aussi capable de ne rien laisser transparaître et d'allumer la Ménora sereinement.
[Kédouchat Levi]
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-> Rachi (v.8,3) dit : "Aharon fit ainsi = c’est pour nous dire la grandeur d’Aharon, qu’il n’a rien modifié."
=> Qu’est-ce qu’Aharon aurait pu modifier mais s’en est abstenu?
Le Maharil Diskin dit qu’il y avait 3 marches devant la Ménora, sur lesquelles on montait pour allumer les lampes. Tout cela quand il s’agit d’un Cohen ordinaire, mais Aharon était prophète, or Hachem ne fait reposer Sa Présence Divine que sur quelqu’un qui est riche, fort, intelligent et grand de taille.
Ainsi, Aharon avait du mal à utiliser ces marches, parce qu’il était grand, et malgré tout il n’a rien modifié et il les a utilisées comme Hachem l’avait ordonné.
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-> Autre explication : Qui ne se souvient pas du 1er jour où il a mis les téfilin? La veille au soir, l’émotion empêche déjà de s’endormir! Et qui ne sait pas ce que c’est devenu 6 mois plus tard ? Où est passé tout l’enthousiasme?
Le Sfat Emet dit que normalement on commence à faire les mitsvot avec tout son enthousiasme et toute sa sainteté, mais au bout d’un certain temps on se calme. La grandeur d’Aharon de ne rien avoir modifié est que l’enthousiasme qu’il avait la 1ere fois, c’est avec le même enthousiasme et la même sainteté qu’il a continué à allumer les lampes pendant toutes les années.
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-> "Aharon a fait ainsi" (Béaaloté'ha 8,3)
-> Rachi explique que ce passage de la Ménora suit celui des sacrifices des princes de tribus. En effet, quand Aharon constata que ni lui ni sa tribu n'a apporté d'offrande, il en a conçu beaucoup de peine. Pour le rassurer Hachem lui dit : "Je vais te donner une part encore plus grande que celle de ces chefs de tribus. Toi tu vas allumer la Menora".
Ainsi, cette mitsva vient consoler Aharon suite à la peine qu'il a ressenti. Hachem est venu l'apaiser en lui donnant une part plus grande par cette mitsva.
Le Sfat Emet fait remarquer que Aharon aurait pu en concevoir une certaine fierté personnelle. Ne vient-il pas de recevoir une attention toute particulière de la part d'Hachem qui souhaite l'honorer plus que les autres. De ce fait, en allumant la Ménora, on aurait pu s'attendre qu'il le fasse avec un élan particulier exprimant sa satisfaction personnelle.
C'est dans ce contexte que la Torah témoigne : "Aharon fit ainsi", "sans rien changer", c'est-à-dire qu'il alluma la Ménora exactement de la même façon qu'il fit toutes les autres mitsvot, sans ne concevoir la moindre satisfaction personnelle d'avoir été honoré.
Pour Aharon, la mitsva c'est avant tout accomplir la Volonté d'Hachem et Lui faire plaisir. En aucun cas, on ne doit mêler un intérêt personnel de fierté ou autre.
Et cela mérite bien de lui être reconnu comme un véritable éloge. Il a accompli cette mitsva uniquement pour le Nom d'Hachem, sans se sentir glorifié par elle et sans rien changer dans son ressenti par rapport à son habitude.
La leçon pour nous est de nous habituer à voir les mitsvot comme des moyens de servir Hachem et pas de se servir soi-même. Et pour cela, il convient constamment de vérifier la pureté de ses intentions. La grandeur d'une mitsva se mesure essentiellement par la pureté de l'intention, combien cette mitsva a été réalisée pour Hachem, et bien sûr pas pour en recevoir des éloges, de l'argent, ou tout autre intérêt.
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+ Il n'y a ni petit ni grand face à Hachem :
-> Aharon n'a fait aucun changement en réalisant la mitsva d'allumer les lumière de la Ménora.
Parfois, nous voyons un individu versant des larmes comme une source le jour de Kippour, et nous pensons : "Oh ... quel tsadik!! ..." Mais en réalité, le tsadik est celui qui pleure toute l'année lorsqu'il prie, pas uniquement le jour de Kippour, lorsqu'il craint le décret divin du fait de toutes ses fautes de l'année écoulée.
Il en est de même pour Aharon. La Torah nous apprend qu'il allumait chaque jour les lumières de la Ménora avec le même enthousiasme et la même admiration que lorsqu'il faisait le service du jour de Kippour, à l'intérieur et à l'extérieur du Saint des Saints ...
Il n'affichait pas de différence entre les tâches, on ne voyait pas de changement apparent entre une tâche facile et une tâche difficile ... Il les accomplissait toutes les 2 avec le même enthousiasme, réalisant qu'il appliquait l'ordre divin. C'est cela la grandeur de Aharon!
Un homme peut être animé de 2 mobiles : lorsqu'il accomplit de grands actes, il agit par admiration et fascination, et lorsqu'il réalise de petites choses au quotidien, il vient prouver qu'il agit avec sincérité et intégrité en réalisant la volonté de Hachem, tout en exprimant sa joie d'avoir été choisi par le Roi des rois. C'est ainsi que l'on reconnaît un grand homme.
[...]
Quelqu'un se serait tenu face à la Ménora se disant [plus ou moins consciemment] : "Voilà, je suis le Cohen Gadol, tout le monde me regarde!"
Mais une telle pensée n'a même pas effleuré Aharon. Toute son attention n'était que de réaliser la volonté d'Hachem comme Il lui a ordonné.
Cela vient souligner l'éloge d'Aharon qui n'a pas changé la moindre chose dans sa juste intention en allumant les lumières. Toute sa volonté n'était que d'appliquer l'ordre du Roi des rois, qui lui a ordonné de disposer les lampes face à la Ménora.
Ces choses nous concernent également. Dans chaque acte que nous réalisons, nous devons y penser et nous rappeler que nous réalisons la volonté d'Hachem, et rien de plus.
Lorsque nous préparons les bougies ou les mèches en l'honneur du Shabbath, c'est parce que Hachem nous l'a ordonné.
Lorsque nous offrons l'hospitalité, c'est parce que Hachem nous l'a ordonné, et ainsi de suite ...
Si nous nous habituons à agir ainsi ("comme Hachem l'avait ordonné"), l'éloge que nous mériterons sera semblable à celui d'Aharon.
[rabbi Nissim Yaguen - Nétivé Or]