+ L'importance de s'aimer soi-même = pour aimer autrui et Hachem :
-> La mitsva d'aimer notre prochain juif, implique que nous commencions "de l'intérieur vers l'extérieur" ; en d'autres termes, que nous commencions par nous-mêmes : "kamo'ha" comme [on s'aime] soi-même".
Le rav Avraham Its'hak HaCohen Kook nous dit que "véahavta léréa'ha kamo'ha" (tu aimeras ton prochain comme toi-même - Kédochim 19,18) est fondée sur l'estime de soi. Il s'agit d'une conséquence saine et naturelle de la vision d'Hachem en nous-mêmes, car ce n'est que lorsque nous sommes conscients de nous-mêmes et de notre source divine que nous sommes réellement capables d'aimer les autres.
Une image positive de soi est le trait d'une personne raffinée et confiante, et elle est essentielle à l'accomplissement d'aimer autrui.
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-> Pour le Baal Shem Tov, l'amour d'autrui est enraciné dans la ahava atsmit, un "amour [inconditionnel] de son essence" (de notre intériorité qui est divine, qui est ce que nous sommes vraiment, même si la vie nous pousse à nous identifier davantage à notre corps, à ce qu'on est extérieurement), un amour qui repose sur une profonde reconnaissance de l'unité d'Hachem, dans laquelle nous faisons tous partie de la même réalité divine.
Toutes les âmes, lorsqu'on va à leur racine, sont d'une seule essence, et même lorsqu'elles sont divisées en parties, ou en personnes individuelles (dans notre monde matériel), il existe dans chaque partie l'essence du tout. [le Ram'hal dit qu'en chaque juif, il y une petite partie de l'âme de chacun des autres juifs. Je suis dans tout juif, tous les juifs sont en moi, et Hachem est présent dans chaque juif. Il y a unité! ]
Ainsi, l'amour d'une personne pour son prochain n'est pas en fait l'amour d'une autre personne, mais l'amour de soi-même.
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-> Le rav Israël Salanter n'a pas été motivé à lancer le mouvement du moussar sur un constant de manque d'Ahavat Israël, mais plutôt en constatant qu'un juif (dans ce cas Mottel, un forgeron), qui est un ben chel Mélé'h (un enfant du Roi des rois) peut en arriver à avoir une mauvaise perception de lui-même. Ce manque de confiance, d'estime de soi, empêche une vie juive épanouie.
Le rav Israël Salanter comprenait le véritable "amour de soi" comme l'opposé de l'égocentrisme. Il découle d'un sentiment de dignité et de la grandeur de l'Homme juif (gadlout ha'adam), et qui alimente nos actions d'amour envers les autres.
"L'acceptation et l'amour des autres sont une expression de ahavat atsmo, l'amour de soi, qui est ahava atsmit, la quintessence, l'expression la plus naturelle de l'amour. Véahavta léréa'ha (tu aimeras ton prochain) commence par kamo'ha, par soi-même.
[on peut éventuellement dire qu'on développant son amour de soi (ex: travaillant sur sa valeur, en s'offrant des paroles et actes d'affection à soi-même), en réalité indirectement on fait la mitsva d'aimer autrui, et également Hachem (tout étant uni!). ]
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-> Chaque juif doit savoir qu'il a une valeur unique, qu'il n'y a personne au monde qui leur ressemble exactement, qu'il n'y en a jamais eu et qu'il n'y en aura jamais (ma mission est unique dans l'Histoire du peuple juif). Tout juif est toujours aimé par Celui qui l'a créés, d'une manière unique.
Si l'on a vraiment conscience de cela en face de nos yeux, alors on peut regarder notre prochain avec ces mêmes yeux et réaliser : "Mon prochain a aussi une valeur unique ; il n'y a jamais eu quelqu'un dans le monde entier comme mon prochain juif, et il n'y en aura jamais. Que je puisse l'aimer, l'apprécier, comme Hachem (D. de Vérité) l'aime!"
-> Notre amour pour les autres est le reflet de notre capacité à accepter l'amour d'Hachem pour nous.
Le Targoum Onkelos traduit le mot "véahavta" en araméen par "étirchemé". En hébreu, cela signifierait "et tu auras de la ra'hmanout", de la compassion, de la miséricorde, pour ton prochain juif comme tu en as pour toi-même.
-> Le rabbi Méïr d'Apta insistait pour que ses disciples consacrent un temps fixe chaque jour à un 'hechbon ha'néfech, à une évaluation introspective de leur propre comportement et de leur service de D.
L'un des disciples, qui était toujours occupé par des affaires communautaires importantes et des causes charitables, estimait qu'il était trop occupé pour prendre le temps de pratiquer le 'hechbon ha'néfech.
Il demanda au Rabbi d'être dispensé de cette avoda, expliquant qu'il n'avait tout simplement pas de temps libre.
Le rabbi d'Apta lui dit : "Quiconque n'a pas le temps d'avoir de la compassion (ra'hmanout) sur sa propre âme, est incapable d'avoir de la ra'hmanout sur autrui".
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-> La mitsva d'ahavat Israël, signifie aimer et prendre soin, être respectueux et honorer chaque juif, y compris nous-mêmes.
[d'abord, nous devons déterminer avec honnêteté si nous avons véritablement besoin de bonté et d'amour de nous-même. Ensuite, on peut l'étendre à notre "moi large" (ex: notre femme, nos enfants, nos parents), et ensuite on peut partir s'occuper des besoins des autres juifs. ]
-> Nos relations et nos interactions avec les autres, enseigne le Baal Shem Tov, sont un miroir, dans lequel nous pouvons nous voir plus clairement.
La beauté que nous voyons dans le monde est le reflet de notre perception de nous-mêmes ; les défauts que nous voyons chez les autres ne sont que le reflet de nos propres défauts intérieurs.
Nous sommes susceptibles d'être inconscients de nos propres défauts, mais nous pouvons facilement détecter les lacunes des autres. Le Baal Shem Tow nous demande de considérer ces observations comme des indications que nous avons nous-mêmes ces défauts, afin que nous puissions les utiliser dans notre téchouva.
Plus nous nous sentons bien dans notre peau, au sens le plus authentique du terme, plus nous sommes capables d'entrer en contact avec les autres et de les accepter.
Lorsque nous nous autocritiquons, nous sommes moins indulgents envers les autres. Le respect des autres est enraciné dans le respect de soi.
[lorsque chacun est à sa place, alors personne ne se marche sur les pieds, et l'on peut avoir une unité, un amour d'autrui éclatant.
On a besoin de se sentir quelqu'un de bien, d'important (mais cela ne doit pas être trop dépendant de l'extérieur, d'autrui).
Ainsi, nous devons faire un travail de s'apprécier soi-même, d'être fier des ressources dont Hachem nous a gratifiées dans la vie (je fais au mieux de mes capacités, même si c'est loin de ce qu'a autrui), d'être en paix avec nous-même (ex: nous cherchons pas à être une autre personne, à avoir d'autres biens, qualités, ... je fais et accepte avec ce que m'a donné Hachem!). A défaut de cela, autrui devient une menace qui risque de nous écraser (ex: plus intelligent, plus riche, plus de réussite), et l'on doit alors se focaliser sur des points négatifs pour relever notre égo.
Ainsi, pour pleinement me réjouir d'autrui, je dois d'abord me réjouir de moi-même! ]
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-> Une michna (Pirké Avot 4,1) recherche la source du kavod, le respect ou l'honneur. Ben Zoma demande : "Qui est honorable? (ézéou mé'habed)". Il répond : "Celui qui donne de l'honneur aux autres".
-> Le rav 'Haïm de Volozh (dans son Roua'h 'Haïm), établit un parallèle entre "mé'habed ét habriyot" (honorer autrui) et "mé'habed ét habayit (balayer la maison), puisque la guémara se réfère au fait de balayer la maison en tant que "lé'habed".
Honorer les gens, c'est balayer une couche extérieure de poussière pour révéler ce qui se trouve sous la surface.
[Selon le Baal Chem Tov, derrière la façade extérieure apparente d'un juif, il y a forcément de la beauté et de la Divinité. Nos yeux sont la fenêtre de l'âme, et ainsi notre regard se focalisant sur l'âme, est la clé pour aimer autrui, et soi-même.
D'une certaine façon, il faut avoir le recul de se dire cet aspect là n'est pas l'essence de cette personne, elle a de la boue (sale et puante), mais en vrai c'est une belle personne (un enfant d'Hachem!).
De même, on doit savoir s'honorer soi-même en balayant toutes ses idées noires (du yétser ara) qui viennent salir notre vision de soi. (fais téchouva sincèrement, et va de l'avant tout propre en faisant! Hachem a conscience de nos qualités et de nos défauts (il n'existe pas d'humain qui ne faute pas), et c'est pour cela qu'Il nous aime, justement parce qu'on fait au mieux malgré nos défauts, nos chutes. ]
-> Le Nésivot Shalom commente également cette michna. Le regard d'une personne sur une autre est comme un regard dans le miroir : si notre visage est sale, nous verrons un visage sale dans le miroir.
Il en va de même lorsque nous nous regardons les uns les autres : dans la mesure où nous sommes intérieurement purs et raffinés, nous regarderons l'autre avec générosité et verrons ses attributs positifs.
Par conséquent, la personne qui est vraiment "mé'houbad" est celle qui respecte et traite toutes les personnes avec dignité.
En aimant les autres, nous commençons à explorer qui nous sommes, et nous découvrons progressivement le côté profond de nous-mêmes et les émotions dont nous sommes capables. En fin de compte, c'est par l'amour que nous révélons notre véritable personnalité.
[si autrui est un miroir de moi, alors plus je me focalise sur le positif en autrui, plus j'en viens à voir du bien en moi-même! ]
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-> Le Baal HaTanya enseigne que l'âme juive n'est rien de moins qu'une : 'hélek Eloka mi'maal mamach", c'est littéralement une partie de D. d'en-Haut.
[ il est écrit : "Hachem est ma part" ('helki Hachem - Téhilim 119) ; "le peuple [juif] est la part d'Hachem" (ki 'helek Hachem amo - Haazinou 32,9) ; "Bien-aimé est l’être humain, qui a été créé à l’image divine" ('haviv adam chénivra bétsélem - Pirké Avot 3,14) ; en soufflant un esprit de vie (néfech 'haya - Béréchit 2,7) Hachem a mis en l'homme une partie de Lui. ]
"Shorachan ou'mékoran bé'Elokim 'Haïm" = leur racine et leur source sont dans le D. vivant.
Une personne qui reconnaît l'élévation de l'âme peut facilement accomplir la mitsva d'aimer son prochain comme soi-même à l'égard de chaque juif, qu'il soit grand ou petit en termes de stature spirituelle ...
Tous les juifs sont interconnectés et égaux (tous sublimes aux yeux d'Hachem), enfants d'un seul Père.
C'est pourquoi nous sommes appelés : "akhim mamach", littéralement "frère", mitsad shoresh nafcham bé'Hachem é'had = puisque l'âme de chaque personne a sa racine dans le D. unique, et que les individus ne sont séparés les uns des autres que dans le sens physique, matériel.
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-> Le rabbi Ména'hem Mendel de Rimanov a visité un jour la tombe du Baal Shem Tov à Mézibouzh et a raconté que le Baal Shem Tov lui était apparu en rêve, contrarié par le fait que les gens racontaient des histoires sur ses miracles et non sur son amour d'Hachem ou son amour de tout juif.
Pour le Baal Shem Tov, l'amour envers chaque juif précède même l'amour d'Hachem dans l'ordre du service divin ; en aimant les gens, on atteint l'amour d'Hachem.
Le Kéter Shem Tov, rapporte ses paroles : "L'amour son prochain (juif) est la première porte qui mène à la cour d'Hachem".