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Nasso – La paracha la plus longue

+ La paracha de cette semaine (Nasso) se lit la plupart du temps le Shabbath suivant la fête de Shavouot.
C'est la paracha la plus longue de la Torah, avec 176 versets, qui est la guématria de : "léolam" (pour toujours - לְעוֹלָם).
Afin de mettre en application notre mariage avec la Torah que nous venons tout juste de célébrer, nous commençons par lire la paracha la plus longue, signe de notre désir de passer le plus possible de temps avec elle, et ce pour toujours (léolam).

Le terme : "oumaayan" (et la source - ומעין) a une guématria de 176, ce qui vient nous rappeler juste après Shavouot que les différents aspects de la Torah constituent la source de notre vie (pas besoin d'aller voir ailleurs, tout y est!).

De plus, il est intéressant de noter que :
- le Téhilim le plus long (le 119), se compose de 8 versets pour chacune des 22 lettres de l'alphabet (8*22 = 176!).
Le Méïri commente que le chiffre 8 correspond aux 5 sens du corps humain, plus les 3 parties de l'âme.
[le chiffre 8 renvoie également à la notion d'au-delà de la naturalité (un ajouté aux 7 jours de la semaine), car notre mission dans ce monde est d’élever la matérialité en la mettant au service de l'essentiel : la spiritualité. ]

- le nombre de pages du traité le plus long de la Torah (traité Baba Batra) est de 176 (commence à la page n°2 et finit à la page n°177).

- le midrash rabba et le Zohar sur cette parasha sont les plus longs.

A l'image de cette paracha, que la réception de notre Torah, cette année, puisse (b"h) décupler notre amour et notre connaissance de D.   Amen!

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-> Le rabbi Gamliel Rabinowitz dit que la paracha Nasso (נָשֹׂא) est généralement la paracha suivant Shavouot.
Son nom est lié à : "nessia" (נשיאה) qui signifie : élévation, en référence au fait que suite au don de la Torah, nous sommes maintenant à un niveau plus élevé.

[nous devons préserver cette élévation dans le temps, en élevant au sommet de notre vie la réalisation et l'étude de la Torah.]

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-> La paracha Nasso est la plus longue de la Torah. Elle comporte 176 versets. On peut noter aussi que le Psaume 119 des Téhilim, le Psaume le plus long, comporte également 176 versets, et que le Traité de guémara Baba Batra, le traité le plus long, s’achève à la page 176.
=> Quel sens donner à ces «coïncidences» remarquables?

On peut citer :
1°/ La paracha de Nasso est la plus longue, et il en est de même de son commentaire dans le midrach et dans le Zohar, car étant lue juste après Shavouot, le flux abondant de la Torah fraîchement reçue, est fortement perceptible. [‘Hidouché haRim]

2°/ Les 3 textes de plus grande longueur (Nasso, Téhilim 119 et Baba Batra) totalisent une taille globale de 528 (176 x 3), valeur numérique du verset : "Combien sont grandes Tes œuvres" (מַה גָּדְלוּ מַעֲשֶׂיךָ - Téhilim 92,6). [rav Its’hak Ginzbourg]

3°/ Le nombre 176 apparaît, comme longueur maximale, dans toutes les dimensions de la Torah (Nasso dans le ‘Houmach, Téhilim dans le Na'h [Néviim Kétouvim] et Baba Batra dans le Talmud), car il indique que la Parole Divine, formulée par les 22 lettres de l’alphabet, fixe la réalité selon les 8 états possibles : l’inapte et le conforme (Passoul et Cacher), l’impur et le pur (Tamé et Taor), l’interdit et le permis (Issour et Eter) et, le coupable et l’innocent (‘Hayav et Zakaï). [Ben Ich ‘Haï] [176 = 22*8]

4°/ La Torah comporte 187 chapitres, au même titre que l’enceinte du Temple mesurait, d’Est en Ouest (sens de la Sainteté), 187 coudées. Le nombre 187 n’est donc par fortuit, il correspond à la valeur numérique du mot "Makom" (Lieu - מקום) [186], plus 1 qui désigne D., allusion ainsi à la Résidence Divine. [Maassé Rokéa’h – Massékhet Midot]

Par ailleurs, le Monde a 6000 ans, disent nos Sages (guémara Avoda Zara 9a) : 2000 ans de Tohou (sans connaissance du Créateur), 2000 ans de Torah (Connaissance de D.) et 2000 ans réservée à l’ère messianique.
La guémara enseigne que les 2000 ans de Torah débutèrent quand Avraham quitta son pays pour la Terre de Canaan et qu’il commença à répandre la connaissance de D. Ce point de départ de l’histoire est relaté dans le chapitre 12 de la Torah (paracha de Lé'h Lé'ha) ce qui signifie, que les onze premiers chapitres font référence à la période de Tohou tandis que les 176 chapitres suivants, font référence aux 4000 ans de Présence Divine révélée.
Curieusement, le constat est similaire pour le Beth Hamikdache. L’enceinte du Temple depuis la Azarat Israël (zone accessible à Israël) jusqu’au Saint des Saints (point culminant de la Sainteté) mesurait 176 coudées tandis que l’espace séparant le Saint des Saints au mur occidental (hors zone de Sainteté) en mesurait 11.
Ainsi, le nombre 176 est le symbole de la Révélation du Divin dans le Monde et dans l’Histoire.
[feuillet de la communauté Sarcelles - 5780]

+ "... la terre observera un repos de Shabbath pour Hachem" (Bé'houkotaï ch.26 ; v.3)
Dans la Torah, nous trouvons 3 sortes de Shabbath.
Le Baal aAkéda explique qu'ils correspondent aux 3 dimensions essentielles : néfech (l'âme, l'esprit), shana (le temps), et olam (l'espace), qui s'en trouvent sanctifiées.
- le shabbath de l'âme est le jour du Shabbath, c'est le degré le plus élevé (Chémot ...ch.31 ; v.17 : "ouvayom ashévi'i Shabbath, vayinafach" – il y a un lien en néfech et vayinafach).
Tous les travaux sont interdits et sa transgression est des plus sévères.
- le shabbath du temps est celui des fêtes (Chémot ch.34 ; v.23 : "chaloch péamim bashana").
La sainteté des fêtes est moindre que celle du Shabbath et quelques travaux y sont autorisés.
- le shabbath de l'espace est celui de l'année de jachère (cf.le verset ci-dessus).
En effet, les lois sont circonscrites à la terre d'Israël, qui est la plus sainte de toutes les terres.

"Shabbath POUR Hachem" : ainsi, l'observance du Shabbath ne se limite pas à une succession d'interdits, mais vise une élévation spirituelle et un développement intellectuel par l'étude et la sanctification.

"Et voici les noms des enfants d'Israël qui viennent (aba'im) en Egypte" (Chémot 1,1)

=> Pourquoi ce verset d'ouverture du récit amenant à la sortie d'Egypte est-il écrit au futur "abaïm" (litt. qui viendront - הַבָּאִים)?

Le 'Hidouché haRim commente :
Ce récit se poursuit également dans notre exil, les leçons et les détails étant pertinents à chaque époque.
C'est ce que veulent dire nos Sages : "à chaque génération, une personne doit se considérer comme si elle était personnellement sortie d'Egypte" (Pessa'him 10:5).
C'est parce que nous quittons toujours, génération après génération, individu après individu. La géoula est toujours en cours.

-> "Hachem parla à Moché et à Aharon en Égypte en disant : 'Ce mois sera pour vous le début des mois ; ce sera pour vous le premier des mois de l'année' ." (Bo 12,1-2)
[il s'agit des premiers versets lus à Shabbath ha'Hodech (passage de Bo 12,1-20)]

-> Rabbi Its'hak dit : la Torah aurait pu commencer par [le passage] : "ce mois sera pour vous" ('ha'hodech azé la'hem), qui est le premier commandement que reçurent les Bné Israël" (Rachi,
Béréchit 1,1).

On peut s'interroger :
=> Pourquoi la mitsva de sanctifier le mois (kidouch ha'bodech) a-t-elle été choisie, pour être la première enseignée aux Bné Israël (selon rabbi Its'hak)?
=> Pourquoi D. ordonna-t-Il cette mitsva aux Bné Israël alors qu'ils se trouvaient encore en Égypte et non à la Révélation au mont Sinaï, lorsqu'ils reçurent les autres mitsvot de la Torah?

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-> Par la mitsva de kidouch ha'hodech, le peuple juif a été dégagé de l'emprise des lois de la nature et de l'astrologie. Une fois que les Bné Israël ont reçu ce commandement, leur vie n'était plus influencée par les constellations ou autres forces de la nature. Au contraire, ces forces furent mises sous leur emprise.
Comme le dit le Yérouchalmi (Kétouvot 1,2), si un beit din décide de déclarer une année embolismique, en ajoutant un mois à l'année, sa décision peut effectivement retarder l'arrivée de changements naturels.

De même, le midrach enseigne (Yalkout Chimoni - Bo 190) :
"Hachem dit : Jusqu'à présent, les calculs des mois et des années étaient dans Mes mains, mais désormais, ils seront mis dans vos mains, comme le dit le verset: 'Ce mois sera pour vous'. Si le beit din terrestre déclare que c'est Roch Hachana, D. dit aux anges : Erigez une plateforme et nommez des défenseurs pour le jugement de Roch Hachana] ... car le beit din terrestre a décrété qu'aujourd'hui, c'est Roch Hachana! Si des témoins [pour attester l'apparition de la nouvelle lune] n'arrivent pas [ce jour-là] ... D. dit aux anges célestes : 'Enlevez la plateforme et renvoyez les défenseurs ... car le beit din terrestre a décrété que Roch Hachana sera demain'."

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-> Ce commandement (de sanctifier le mois) demande aux Bné Israël d'utiliser le mois lunaire comme base de leur calendrier, contrairement aux autres nations dont le calendrier est basé sur l'année solaire.
L'utilisation du calendrier solaire indique que les nations du monde sont sous l'emprise des forces de la nature. Le soleil ne change jamais et son existence statique symbolise les forces de la nature qui, elles aussi, sont fixes et inchangées, comme le dit le verset : "Il n'y a rien de nouveau sous le soleil" (Kohélet 1,9) ...

Contrairement au soleil, la lune change constamment et se renouvelle chaque mois.
Elle symbolise l'existence du peuple juif dégagé du déterminisme des lois de la nature, car de même que la lune grandit puis diminue, la façon dont Hachem déverse Sa bénédiction sur le peuple juif varie selon ses actes.
De plus, de même que la lumière de la lune est parfois visible, parfois cachée, la "lumière" du peuple juif est révélée au monde lorsque D. déverse sur lui Ses bienfaits, mais lorsqu'il faute, sa lumière est dissimulée.

-> Le midrach (Chémot rabba 15,26) dit :
"La lune commence à briller le premier Nissan et sa lumière s'accroit progressivement pendant 15 jours ... Du 15e au 30e jour, sa lumière diminue, et le 30e jour, elle n'est plus visible. Il en est de même [de l'histoire] des Bné Israël : il y eut 15 générations depuis Avraham jusqu'à Chlomo ...
Lorsque vint Chlomo, la 'lune' brillait à son comble, comme le dit le verset (I Divré haYamim 29,23) : 'Chlomo occupa le trône de D. en tant que roi' ... De même que D. règne d'un bout à l'autre du monde et gouverne tous les rois ... ainsi Chlomo régnait d'un bout du monde à l'autre ... Ensuite, les rois commencèrent à décliner. Le fils de Chlomo était Re'havam ...
Finalement Isidkiyahou arriva [après Yéhoyakim], et comme le dit le verset : "Isidkiyahou était aveugle la lumière de la lune disparut." (Yirmiyahou 39,7)

-> Dans le futur, lorsque le peuple juif atteindra l'apogée de la perfection spirituelle et que sa "lumière" emplira le monde, il bénéficiera d'un déversement constant et inchangé de bienfaits divins.
Comme le dit le prophète (Yéchayahou 30,26), à ce moment-là, "la lumière de la lune sera comme la lumière du soleil" et l'influence divine dont bénéficient les Bné Israël ne sera jamais cachée ou réduite.

-> Comme le dit le Midrach (Béréchit rabba 6,3) :
"Essav compte par le soleil, qui est grand, et Yaakov compte par la lune, qui est petite.
Rav Na'hman dit : c'est un symbole. Essav compte par le soleil, qui est grand, et de même que le soleil règne le jour et pas la nuit, Essav a une part dans ce monde mais pas dans le monde futur.
Yaakov compte par la lune, qui est petite, et de même que la lune règne la nuit comme le jour, Yaakov a une part dans ce monde-ci et dans le monde futur.
Rav Na'hman dit : tant que la lumière du grand [luminaire, le soleil,] existe, la lumière du petit [luminaire, la lune] ne peut pas être vue, mais lorsque la lumière du grand disparait, la lumière du petit devient visible.
De même, tant que la lumière d'Essav existe, la lumière de Yaakov n'est pas manifeste. Lorsque la lumière d'Essav disparaitra, la lumière de Yaakov sera manifeste.
Tel est le sens des versets (Yechayahou 60,1-2) : 'Lève-toi et brille, car ta lumière est venue car voici, les ténèbres couvriront la terre'."

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+ Le pouvoir de changer la nature :

-> Outre l'injonction de fixer le début de chaque mois sur la base de l'apparition de la nouvelle lune (2 témoignages au beit din), cette mitsva (de kidouch ha'hodech) comprend aussi le devoir de synchroniser le cycle lunaire et le cycle solaire. Le nombre des mois de l'année lunaire doit être calculé pour correspondre précisément au cycle de l'année solaire, ce qui demande une expertise mathématique considérable.

Il semble que cet aspect de la mitsva donne au peuple juif la force d'agir dans le cadre du monde naturel et de l'imprégner de sainteté.
L'influence de D. se déverse sur le monde physique d'après l'époque des fêtes du calendrier juif;31 aussi. en déterminant quand ces fêtes ont lieu, les Bné Israël déterminent aussi le moment où chaque forme d'influx divin atteindra le monde. Ils ont donc la capacité de façonner les effets de la nature sur le monde entier.
[en leur confiant la mitsva de kiddouch ha'hodech, Hachem a donné aux Bné Israël une force extraordinaire : cette mitsva leur permet de prendre un jour ordinaire de l'année et de le sanctifier en tant que jour de fête, de même que D. a sanctifié le Shabbat, capacité qui illustre la force immense donnée au peuple juif de sanctifier et d'élever la nature toute entière. Les jours consacrés par les Bné Israël sont ensuite fixés en tant que partie de l'année qui est, toute entière, une représentation de la nature. C'est pourquoi la bénédiction que nous récitons Yom Tov loue D. d'avoir sanctifié "Israël et les époques".]

La Torah définit ainsi le mois de Nissan : "pour vous le premier des mois de l'année" afin de montrer que la mitsva de kidouch ha'hodech non seulement demande aux Bné Israël de consacrer chaque nouveau mois, mais leur donne aussi le pouvoir de dominer le flux de l'influence divine vers le monde physique pendant toute l'année.
[ il est possible que le peuple juif possédait ce pouvoir lorsque chaque nouveau mois était consacré par le beth din sur le témoignage de témoins, alors que cette capacité d'influer sur le monde a été réduite à présent du fait que la mitsva de kidouch ha'hodech n'est plus accomplie.]

=> Ceci indique que le peuple juif n'est pas sous l'emprise des forces de la nature mais possède la capacité de les changer pour servir Hachem et pour les élever à un niveau de sainteté supérieur.
Hachem a mis les "calculs des mois et des années" dans les mains des Bné Israël, une idée déduite du verset : "ce mois sera pour vous".

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+ La domination du peuple juif sur la nature, prélude à la sortie d'Egypte :

-> La mitsva de kiddouch ha'hodech fut donnée au peuple juif avant son départ d'Egypte afin de le mettre à part de toutes les autres nations et de l'élever au point de dépasser les lois de la nature.
Par cette mitsva, comme nous l'avons vu, les Bné Israël reçurent le contrôle du calendrier annuel, qui fait allusion à l'influence divine qui domine le monde naturel.
Cette mitsva démontre aussi au monde entier que le peuple juif n'est pas limité par la nature. La mitsva de kiddouch ha'bodech l'a donc rendu digne de bénéficier des événements surnaturels de la sortie d'Egypte.

Voilà sans doute pourquoi le kiddouch ha'hodech fut le premier commandement donné aux Bné Israël. Il fallait que le peuple juif reçoive cette mitsva pour pouvoir reconnaitre son haut niveau spirituel et comprendre qu'il a reçu la maîtrise des forces de la nature et la tâche d'élever le monde entier par son service de D.

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+ La force du renouvellement :

-> Nous pouvons peut-être ajouter qu'en plus d'élever le peuple juif au-dessus du contrôle de la nature, cette mitsva lui donne aussi une force de renouveau elle-même surnaturelle.
Grâce à cette force, les Bné Israël ont été capables de se dégager des 49 niveaux d'impureté dans lesquels ils s'étaient embourbés en Égypte et de se rapprocher de D. et de Son service.
Tant que les Bné Israël étaient sujets à l'emprise des forces naturelles, il leur était impossible de s'élever à un niveau spirituel supérieur à cause de l'influence constante et inchangée de la nature. Lorsqu'ils furent élevés au-dessus des lois de la nature, ils acquirent la capacité de se renouveler, tout comme la lune se renouvelle au début de chaque mois. En conséquence, les Bné Israël furent capables d'échapper aux effets de la servitude et de s'appliquer avec un zèle sans précédent à devenir le peuple élu de D.

-> Cette force de renouvellement est évoquée dans l'explication du Sfat Emet (Parachat Bo, 5631) sur : "Ce mois sera pour vous" = le lien entre ceci et la libération d'Égypte est qu'en exil, cette [Force de] renouvellement manquait, mais qu'au moment de la délivrance, il devint évident que tout existe grâce à la force de vie [émanant] de D. qui cause un renouveau.
La force de vie divine est une source de renouvellement constant, comme nous le disons : 'II renouvelle chaque jour, constamment, [l'œuvre de la création]' = à chaque moment de la journée.
C'est seulement de l'homme qui l'oublie et se met sous l'influence de la nature que le verset dit : 'Il n'y a rien de nouveau sous le soleil'(Kohélet 1,9).
Mais l'homme qui s'attache à l'essence de la force de vie divine connait un renouveau permanent.
Tel est le sens du verset : 'Ce mois sera pour vous' = chaque juif peut susciter ce renouvellement par la foi claire que tout vient d'Hachem".

=> Pourquoi nos Sages décrétèrent-ils que la parachat ha'Hodech (passage de Bo 12,1-20) soit lue avant la fête de Pessa'h?
Lire ce passage de la Torah peut avertir le peuple juif de la force immense qu'il possède de changer la nature du monde. Alors que Pessa'h approche, apprenons de la parachat ha'Hodech l'opportunité qui nous est offerte de nous libérer de l'asservissement au monde naturel et à ses lois, et de renouveler notre désir de servir Hachem.
Si nous prenons cet engagement, nous bénéficierons sans aucun doute de l'influence prodigieuse de la fête de Pessah et de la promesse : "Je vous montrerai des prodiges comme aux jours de votre départ d'Egypte" (Mi'ha 7,15).

[rav David Hofstedter - Darach David - Moadim]

"Je suis Hachem ton D. Qui t'ai fait sortir d'Egypte" (Yitro 20,2)

-> Le mot אנכי (ano'hi - Je suis), a la même valeur numérique que כסא (kissé - le Trône), soit de 81. Car lorsque Hachem descendit sur le mont Sinaï pour donner la Torah, Il y installa également Son Trône de Gloire. Le prophète Yé'hezkel (10,14) parle de 4 anges, représentés par des formes d'animaux, portant le char céleste, où se trouve le Trône de Gloire. Ces 4 figures représentent : un lion, un aigle, un chérubin, et un homme dont nos Sages disent qu'il a la forme de Yaakov, notre ancêtre.
Ainsi, ces 4 formes se disent en hébreu : אריה נשר כרוב יעקב , qui forment justement les initiales du même mot אנכי (Je suis). Néanmoins, dans un autre passage de Yé'hezkel, il est fait état de la forme du taureau à la place du chérubin. Nos Sages nous apprennent qu'en fait au départ, cette forme représentait un taureau, mais Yé'hezkel pria et la transforma en chérubin (ange en forme d'enfant). En effet, le taureau (géniteur du veau) représente une accusation pour Israël qui a commis la faute du veau d'or. Afin que ces différents anges représentés par ces animaux, puissent plaider en faveur d'Israël, Yé'hezkel la fit remplacer par un chérubin.

Ainsi, le premier commandement affirme : "Je suis (אנכי) Hachem ton D.", faisant cas du chérubin (כרוב) à travers les initiales. Quant à la question de savoir pourquoi ce changement, alors qu'au départ il y avait plutôt la forme du taureau à la place, la réponse apparaît dans le 2e commandement : "Tu n'auras pas d'autres dieu devant Moi".
Et comme les juifs transgressèrent ce commandement en prenant l'image du taureau (à travers le veau) pour divinité, c'est pourquoi, par mesure de défense pour Israël, le taureau fut remplacé par un chérubin.
[d'après un midrach]

"Des ministres de mille (alafim - אלפים), de cent (méot - מאות), de cinquante ('hamichim - חמישים) et de dix (assarot - עשרות)" (Yitro 18,21)

-> Ces 4 catégories de juges sont qualifiées par la Torah et désignées : אלפים מאות חמישים עשרות . Or nos Sages enseignent que tant que la justice est rendue ici-bas, elle ne l'est pas en-haut. C'est à dire que rendre justice ici-bas par un système juridique honnête et loyal a la force d'adoucir la Rigueur Divine. Aussi, ce système proposé par Yitro celui d'installer ces différentes catégories de juges avait la force de calmer la rigueur Divine.
Ainsi, on pourra constater que les initiales des 4 types de Juges constituent les mêmes (dans le désordre) que les 4 catégories de rigueur mentionnées dans le verset : "Il est Miséricordieux, Il pardonnera la faute, Il ne détruira pas et abonde à calmer Sa Colère et n'éveille pas toute Sa Fureur", faisant appelle à 4 expressions de rigueur עון משחית אף חמה car elles viennent les adoucir.

De plus, quand la rigueur est adoucie dans le monde ici-bas, cela permet de révéler l'Unicité Divine, car Sa Bonté et Sa Miséricorde apparaissent. Or, le verset de l'Unicité est : "Ecoute (שמע) Israël, Hachem est notre D., Hachem est Un (אחד)". Si on prend le premier mot et le dernier mot, שמע אחד , on remarquera que les lettres centrales de ces mots מע אח constituent encore les initiales des différentes catégories de juges.
Cette réparation est aussi obtenue par les sacrifices offerts à Hachem, dont les 4 principaux מנחה עולה אשם חטאת (libation, holocauste, délictif et expiatoire) forment de nouveau les mêmes initiales.
[Zer Zahav]

"Le son du Shofar allait redoublant d’intensité; Moché parlait et D. lui répondait" (Yitro 19,19)

-> Rachi commente : "Habituellement, lorsqu’un homme sonne de la trompette, le son va s’affaiblissant avec le temps. Ici, il ‘allait se renforçant beaucoup’. Et pourquoi cela? Pour que l’oreille reste accoutumée à entendre ce qu’elle a l’habitude de comprendre".

-> Le Ohr ha'Haïm haKadoch émet l’hypothèse que Moché parlait pour exprimer la louange de D. et que D. lui répondait par le son du Shofar, pour lui, montrer qu’Il agréait ses paroles.

-> L’évènement du Mont Sinaï est rappelé dans le 'houmach Dévarim en ces termes : "Ces paroles, Hachem les adressa à toute votre assemblée sur la montagne, du milieu des feux, des nuées et de la brume, d’une voix puissante (le son du Shofar), sans y rien ajouter" (Vaét'hanan 5,18).
Le Targoum Onkelos traduit les mots "sans y rien ajouter" (vélo yassaf)" (concernant la voix du Shofar) par : "Elle ne s’arrêta pas".
Ainsi, le Keren David enseigne-t-il que notre verset : "Le son du Shofar allait redoublant d’intensité", signifie que le Son divin ne s’est pas interrompu, et au contraire, il redouble d’intensité de génération en génération.
De plus, le verset poursuit et explique comment s’opère cette intensification : "Moché parlera" = l’érudit qui s’appelle en fait Moché dira des 'hidouchim (commentaires innovants) de Torah quand arrivera leurs moments d’être divulgués, et cette divulgation constitue le son du Shofar divin du Don de la Torah, dont les paroles ont été transmises secrètement à Moché et seront dévoilées au fur et à mesure des générations.

-> Le Séfer haDrach véaIyoun explique : "Il est écrit littéralement : ‘Moché parlera et D. lui répondra par une voix.’ N’aurait-il pas dû être écrit : ‘Moché parlait et D. lui répondait’, au passé? Il en ressort que le son du Shofar qu’on entendit au Mont Sinaï proclama que, désormais, pour toutes les générations, lorsque "Moché parlera", c’est-à-dire lorsque le dirigeant de chaque génération dira quelque chose, il faut savoir que "D. lui répondra par une Voix" = la Voix de D. donnera son approbation aux paroles du Grand Maître de la génération.

-> Enfin, remarquons qu’il n’est pas dit "le Shofar", mais "la voix du Shofar", ce qui signifie, d’après l’explication du Zohar, le "message du Shofar". Or, ce message n’est autre que celui de la Liberté, étant donné que le nom "Shofar" ne réapparaît qu’une seule fois dans la Torah, et ce à propos de la proclamation de la liberté pour les esclaves et pour les terres, comme il est dit : "Tu feras circuler le retentissement du Shofar, dans le 7e mois, le 10e jour du mois : au jour des expiations, vous ferez retentir le son du Shofar à travers tout votre pays" (Béhar 25,9). L’annonce de la Délivrance finale aura lieu également sous le signe du Shofar : "En ce jour retentira le grand Shofar" (Yéchayahou 27,13).
=> Ainsi, le "message du Shofar" qui est celui de l’enseignement de la Torah est-il porteur de la véritable Liberté, comme l’enseigne nos Sages : "Il est dit: ‘Les Tables de la Loi étaient l’œuvre de D., et l’écriture était l’écriture de D. (‘Harout - חָרוּת) gravée sur les Tables’ (Ki Tissa 32,16). Ne lis pas ’Harout (gravée), mais ‘Hérout (liberté), car n’est réellement homme libre que celui qui s’adonne à l’étude de la Thora (le message du Shofar)" (Pirké Avot 6,2).

-> Le Kli Yakar (au verset 16) donne l'explication allégorique suivante. Il y a 2 sortes de sons mentionnées dans l’épisode du Mont Sinaï: le son du tonnerre et le son du Shofar, comme il est dit: "Il y eut des tonnerres ... et un son du Shofar très intense" (Yitro 19,16).
Ces 2 sons symbolisent deux catégories d’individus vieillissants qui reçurent la Thora: les érudits en Torah qui augmentent leur sagesse au fil du temps, et les ignorants qui dégénèrent progressivement.
Ainsi, à propos du son du Shofar – émis par la corne du bélier de Its’hak (modèle du tsadik) – est-il dit qu’il "allait redoublant d’intensité", à l’instar de la sagesse des anciens érudits en Torah qui grandit en permanence.
A noter que le mot Shofar (שופר) s’apparente au mot Chapérou (שפרו) [Maassékhem] (améliorez vos actions). En revanche, le son du tonnerre, issu du nuage épais, représente la grossièreté des ignorants dont la voix et l’éclat de la lumière ne sont qu’éphémères, et s’estompent avec l’âge.
[d'après feuillet de la communauté Sarcelles n°207 (5783)]

Chamor & za’hor

-> "Souviens-toi (za'hor - זכור) du jour du Shabbath pour le sanctifier" (Yitro 20,7)
-> "Observe (chamor - שמור) le jour du Shabbath pour le sanctifier" (Vaét'hanan 5,11)

=> Quel est le sens de ces 2 termes (chamor & za'hor) vis-à-vis du Shabbath?

-> Rachi (dans Yitro) explique que "Souviens-toi" (aza'hor) et "Observe" (chamor) ont été prononcés simultanément, comme il est écrit dans les Téhilim : "D. a parlé une seule fois, mais j’en ai entendu deux (paroles)" (Téhilim 62,12).
Il précise par ailleurs (dans Vaét’hanan) au nom de la Mékhilta : "Les deux mots ont été prononcés simultanément et en un seul mot, de plus ils ont été entendus en une seule audition".
Cet enseignement rappelle celui de la guémara (Chevouoth 20b) : "Il les a dits en une seule parole (chamor vézakhor bédibour é'had), qu’aucune bouche humaine ne peut prononcer et aucune oreille humaine entendre"

-> La Mékhilta déduit du double Commandement, de songer (à temps) au Shabbath (Zakhor) et de le préserver de toute transgression (Chamor)
Pour cela, il convient de lui ajouter un certain intervalle de temps de la journée qui le précède (souviens-toi [zakhor] du temps passé) et de celle qui le suit (Observe [chamor], c’est-à-dire attend le temps futur) [mossifin mé’hol él kodech].
[à ce sujet de tosséfet Shabbath : https://todahm.com/2023/01/24/faire-rentrer-shabbath-plus-tot ]

-> Rabbénou Bé’hayé explique que le rapprochement de זכור (zakhor) avec שמור (chamor) justifie l’obligation pour les femmes de sanctifier le Shabbath par le kidouch et la havdala, bien qu’il s’agisse d’une mitsva liée au temps, pour laquelle les femmes ne sont pas tenues. En effet, puisqu’elles ont l’obligation du respect des interdits (שמור), il en est de même de celle de la sanctification (זכור).

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-> Le "Chamor" et "Za'hor" sont symbolisés par l’allumage de 2 bougies de Shabbath.

-> La guémara (Shabbath 33b) raconte qu’après être sortis de la grotte où ils séjournèrent durant 13 ans, Rabbi Chimon Bar Yo’haï et son fils Rabbi Eléazar rencontrèrent des personnes occupées à des activités matérielles. C’était un vendredi après-midi et ils virent un homme qui courait en tenant deux bouquets de fleurs de myrte.
"Où allez-vous avec ces fleurs?" lui demandèrent-ils.
"Elles sont en l’honneur de Shabbath", répondit l’homme.
"Mais pourquoi en avez-vous deux bouquets?"
"L’un est pour Za'hor et l’autre pour Chamor", expliqua l’homme, faisant référence aux 2 aspects du respect de Shabbath mentionné dans les 10 Commandements.
À ce moment-là, Rabbi Chimon se tourna vers son fils et lui dit : "À présent je vois le pouvoir d’un juif et de ses mitsvot".
[Shabbath est un jour qui se situe dans le monde matériel, mais qui fait le lien avec la dimension transcendante. Le Shabbath, même la poursuite du but le plus matériel, prendre un délicieux repas ou faire une sieste, porte en elle un degré particulier de sainteté].

-> Le Zohar revient régulièrement sur les dimensions "Mâle" et "Femelle" [le "Donneur" et le "Receveur"] et du fait qu’ils ne forment ensemble qu’un tout [sur le plan du Divin].
Ainsi, "Zakhor" désigne-t-il le "Mâle" (à noter que le mot זכור [Zakhor - Souviens-toi] dérive du mot זכר [Zakhar] – Mâle), tandis que "Chamor" désigne la "Femelle" [voir Zohar I, 48b].

[Bien que la mitsva de chamor soit énoncée de façon positive, elle est classifiée comme un commandement négatif, ainsi que l'explique Ramban (Yitro 20,8) : "Car zakhor est un commandement positif, dans lequel il nous est ordonné de nous souvenir du Shabbat pour le sanctifier et de ne pas l'oublier. Chamor est un commandement négatif, car partout où la Torah emploie les mots "hichamèr pèn", ou "hichamèr al", il s'agit toujours d'un commandement négatif (guémara Erouvin 96a). ]

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-> Le Chem miChmouel (Bechala'h 5674) écrit : "Le Shabbat est un rappel de la sortie d'Egypte et doit certainement contenir certains éléments spirituels relatifs à la sortie d'Egypte. De même que la libération d'Egypte était à 2 niveaux, dans l'âme et dans l'intellect, le Shabbat doit aussi amener un certain degré de rédemption à l'âme et à l'intellect. Telle est la signification de zakhor et chamor : l'un se rapporte à l'intellect et l'autre à l'âme."

-> Rabbi Dovid Hofstedter (Darach David - Moadim) enseigne :
De même que les juifs ont connu une libération physique de l'esclavage par la sortie d'Egypte, le Shabbat aussi apporte un élément de rédemption physique.
Le Shabbat, nous avons la capacité de nous libérer, même physiquement, des chaines qui nous attachent au matérialisme pendant la semaine shabbat; nous pouvons nous libérer de l'asservissement à nos désirs physiques et aux traits de caractère qui manquent de raffinement. Tout cela est inclus dans l'affirmation : Shabbat est "un rappel de la sortie d'Egypte".

De plus, il semble que les 2 aspects de l'observance de Shabbat, zakhor et chamor ; correspondent à chacun des 2 aspects de la rédemption qu'apporte le Shabbat.
- Dans le verset «"zakhor èt yom haShabbat lekadécho" (Souviens-toi du jour du Shabbat pour le sanctifier), la Torah nous enseigne le commandement positif de se souvenir du Shabbat et de le sanctifier. Ce précepte est lié à la rédemption de l'âme : en ressentant la sainteté de Shabbat, l'âme s'élève, "se libère" de son yétser ara et devient une nouvelle création.
- A l'inverse, "chamor èt yom haShabbat lékadécho" (Garde le jour du Shabbat pour le sanctifier) désigne la mitsva de s'abstenir de tout travail interdit le Shabbat, ce qui représente la rédemption du corps.

Lorsque les Bné Israël quittèrent l'Egypte, la rédemption toucha à la fois leur corps et leur âme. En Egypte, ils s'étaient enlisés dans l'impureté de l'idolâtrie, mais la sortie d'Egypte les éleva au statut de peuple élu et saint de D.
Observer les 2 aspects du Shabbat peut amener la même rédemption et transformer l'homme en un être nouveau, doté d'une âme infiniment plus sainte et plus élevée.

-> Le Ramban (Yitro - sur les 10 commandements) écrit :
"Le terme Zakhor (le fait de se souvenir du jour du Shabbath) fait référence à l'amour pour le Shabbat (alors que Chamor [garder] fait référence à la crainte)...
Nous devons nous souvenir tous les jours du Shabbat afin que nous ne l'oubliions pas et que nous ne le remplacions pas par d'autres jours."

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-> Le Kédouchat Lévi enseigne que שמור (chamor - observe) fait référence à la mitsva du Shabbath en tant que telle, tandis que זכור (za'hor - Souviens-toi) coïncide avec le sens de la mitsva, c’est-à-dire le souvenir de la Création du Monde et celui de la Sortie d’Egypte.
Ainsi, dans le cas exceptionnel du Shabbath, évoquer le sens de la mitsva fait partie intégrante du Commandement du Shabbath. Afin d’éviter que les gens ne fassent une distinction entre le respect des interdits du Shabbath (chamor) et la sanctification et l’honneur du Saint Jour (za'hor), Hachem a prononcé ces deux mots simultanément. En effet, le pauvre n’a aucune difficulté à respecter les interdits du Shabbath, car étant sans travail, il est inactif. En revanche, il a du mal à honorer le saint Jour avec du bon vin et des plats succulents, car il est démuni de tout. De même, le riche peine à stopper ces activités le Shabbath, alors qu’il prend plaisir à l’honorer. Aussi, le riche et le pauvre sont tenus de respecter les deux principes du Shabbath avec le même dévouement. [Maguid de Douvno]

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-> A propos de la symbolique des termes "Zakhor" et "Chamor", on raconte l’histoire suivant: Un jour, un Avrékh important et honorable vint trouver le saint Rav Rabbi Méïr Abou’hatséra pour lui poser la question suivante : Il étudie avec assiduité, mais il n’a aucune mémoire, et il est extrêmement préoccupé et se demande quoi faire pour arriver à conserver son étude.
Le Tsaddik lui répondit : "Ne sais-tu pas, mon fils, que Chamor et Zakhor ont été dits en une seule parole, et qu’il est impossible de faire en eux une séparation? Garder sa bouche et garder ses yeux convenablement sont une garantie pour la mémoire ; si tu observes le Chamor (garder) convenablement, tu verras aussi certainement que le Zakhor (se souvenir) arrivera à sa suite".

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-> b'h, également : Qu'est-ce qui était inscrit sur les Tables de la Loi (lou'hot) : za'hor ou chamor? = question n°7 : https://todahm.com/2019/02/14/questions-reponses-paracha-yitro

"Ils ne pouvaient pas boire l'eau à Mara car elle était amère … [Moché] cria à Hachem et Hachem lui montra un arbre. Il le jeta dans l’eau et l’eau devint douce" (Béchala'h 15,23-25)

-> Le midrach (Chémot rabba 50,3) commente : " 'Car elle était amère' = c'est la génération qui était amère dans ses actes".
En d'autres termes, le midrach explique que l'amertume de l'eau provenait des fautes des Bné Israël. Il est donc logique de penser que l'eau fut adoucie par l'expiation de ces fautes, lorsque Moché jeta une branche d'arbre dans l'eau. L'amertume de l'eau symbolisait la faute tandis que l'arbre symbolisait l'expiation.

Cette interprétation est soutenue par un autre enseignement de nos Sages (Zohar - Parachat Béchala'h, 60a) : " 'Hachem lui montra un arbre' = il n'est d'arbre que la Torah, comme le dit le verset (Michlé 3,18) : 'C'est un arbre de vie pour ceux qui s'y attachent... Rabbi Abba dit : Il n'est d'arbre que Hachem comme il est dit (Choftim 20,19) : 'Car adam [l'homme] est un arbre du champ'. "'
Ceci indique que "l'adoucissement" de "l'amertume" causée par les fautes des Bné Israël était soit un effet de la Torah qui expie la faute (voir Mena'hot 110a et Sifri, Haazinou 306), soit effectué par D. Lui-même, qui purifie le peuple juif de toutes ses fautes (Yoma 85b).

Dans cet esprit, le Zohar dit ailleurs (Raya Méhémna, Behaalotekha p. 153a) : " 'D. lui montra un arbre... et l'eau devint douce. Nous apprenons de là que si un homme s'adonne à l'étude de la Torah, qui est un 'arbre, D. lui pardonne ses fautes, desquelles la Torah dit (Chémot 1,14) : 'ils leur rendirent la vie amère', et elles deviennent douces".

[compilation de divré Torah du rav David Hofstedter (Darach David)]

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-> Nos Sages (Kohélèt Rabba 6,6) disent : "Cela peut être comparé à un homme du peuple ayant épousé une princesse. Même s'il lui offrait tout ce qu'il existe au monde, cela n'aurait eu aucune valeur à ses yeux, car elle est la fille d'un roi. De même, même si l'on donne tous les délices de ce monde à l'âme, ils ne veulent rien dire pour elle car elle vient des royaumes supérieurs".
Le monde physique est "amer" pour l'âme, qui émane d'un royaume spirituel. Les éléments spirituels du monde lui sont "doux".

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-> Sur ces versets (Béchala'h 15,23-25), le midrach (Mékhilta - Bechala'h - paracha d'Vayissa 1) commente : "Rabbi Elazar Hamodaï dit : c'était un olivier, car il n'y a pas d'arbre plus amer que l'olivier ... Rabbi Chimon bar Yo'haï dit : Il lui montra une parole de Torah.
Le verset ne dit pas "vayaréhou Hachem ets" (D. lui 'montra' un arbre), mais "vayoréhow" [lui enseigna]."
Selon le Kli Yakar, ceci montre que l'étude de la Torah est "amère" au début et sape les forces de l'homme (guémara Sanhédrin 26b), ainsi que l'enseignent nos Sages (midrach Dévarim Rabba 7,3) : "Comme l'huile est amère au début et douce à la fin, ainsi en est-il des paroles de Torah : l'homme peine au début mais, à la fin, elles lui sont agréables".
Puisque telle est la nature de la Torah, D. a mis les Bné Israël à l'épreuve avant de la leur donner, pour voir s'ils auraient foi qu'une chose amère pouvait s'adoucir par miracle.

-> Nous pouvons peut-être ajouter que, selon l'opinion de Rabbi Chimon bar Yo'haï que
D. montra à Moché "une parole de Torah".
L'épreuve a été soumise en utilisant la Torah elle-même : le peuple juif a été testé pour voir s'il supporterait l'amertume qui marque le début de l'étude.
C'est peut-être aussi la raison pour laquelle le peuple juif a reçu dix mitsvot à Mara, comme le dit la guémara (Sanhédrin 56b) : "Les Bné Israël reçurent 10 mitsvot à Mara : les 7 que les descendants de Noa'h avaient acceptées, plus la loi civile, le Shabbat et l'honneur dû aux parents".
Elles avaient pour but de déterminer si le peuple juif accepterait les difficultés en recevant ce premier groupe de mitsvot.

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+ Les mitsvot données à Mara :

-> Le don de la Torah au mont Sinaï fut précédé par 3 jours de préparation pendant lesquels les Bné Israël ne furent pas autorisés à s'approcher de la montagne. Auparavant, à Mara, le peuple juif a reçu plusieurs mitsvot sans aucune préparation préalable. Ils protestèrent même contre Moché à ce moment-là, comme le dit la Torah : "Le peuple se plaignit à Moché" (v.15,24).
Malgré leur manque de préparation et leurs récriminations, D. leur promit à Mara qu'ils ne connaitraient aucune maladie : "Je ne t'infligerai aucune des maladies dont J'ai frappé l'Egypte. Je suis D. qui te guérit" (Béchala'h 15,26). Cette promesse demande une explication. Les Bné Israël venaient de défier Moché.
=> Pourquoi reçurent-ils de D. une promesse si magnanime? Leurs actes ne méritaient-ils pas une punition au lieu d'une récompense?

D'après notre discussion, on peut l'expliquer ainsi : les griefs des Bné Israël n'étant pas sans fondement, ils ne furent pas considérés comme fautifs. Leurs réclamations étaient une réaction naturelle au terrible sentiment d'amertume qui accompagne le premier pas dans l'étude de la Torah. Comme nous l'avons vu, la Torah est comparée à une olive, le fruit le plus amer qui soit. Les juifs n'avaient pas encore gouté la douceur de l'étude de la Torah et "le peuple se plaignit à Moché", non seulement le érev rav, mais aussi le peuple juif.

Moché reçut l'ordre de jeter un olivier dans l'eau amère pour renforcer la foi des Bné Israël et les préparer à la mission qui les attendait. Ils allaient constater l'adoucissement miraculeux de l'eau et, grâce à cela, s'imprégner de la conviction que D. est capable d'adoucir toute amertume. Leur foi leur valut alors la promesse divine de ne jamais souffrir des maladies infligées aux Egyptiens.

L'étude de la Torah est amère et difficile au début, c'est vrai, mais si l'homme persévère, D. éclairera sa voie et il goûtera la douceur de la Torah. Comme le dit le prophète : "Le peuple qui marche dans les ténèbres verra une grande lumière ; une lumière brillera sur ceux qui ont vécu sur la terre de l'ombre de la mort" (Yéchayahou 9,1).
Cette douceur est le "fruit" de la période initiale de difficulté; ce sont l'amertume et la peine accompagnant le début de l'étude de la Torah qui donnent naissance au plaisir ressenti par la suite.

Dans le même sens, l'expérience prodigieuse du don de la Torah, une moisson spirituelle de révélations sublimes et de lumière spirituelle, était l'aboutissement d'un processus ayant débuté à Mara.
La, le peuple juif a reçu un premier groupe de 10 mitsvot ; l'expérience amère de Mara a, comme la pousse initiale du fruit de l'arbre, entamé le processus qui les conduisit au Don de la Torah.
[Darach David]

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+ La douceur ne vient qu'après la difficulté :

-> L'amertume que les Bné Israël connurent à Mara laissait entendre qu'ils ne recevraient la Torah qu'après une période de difficulté et d'effort.
Comme le dit Panim Yafot (Béchala'h 15,23) :
"Ils arrivèrent à Mara et ne purent pas boire l'eau à Mara car elle était amère'. Ce [verset] peut être compris selon l'enseignement de Rabbénou Hakadoch à son fils (Kétouvot 103b) : "Jette la mara [la crainte ou l'amertume] sur les élèves", comme l'enseignent nos Sages (Béra'hot 63b) sur le verset : Lorsqu'un homme meurt dans une tente' ('Houkat 19,14) : la Torah ne se maintient que chez un homme qui 'se tue' pour elle [qui se prive des plaisirs physiques pour se consacrer à l'étude de la Torah]'.
Nos Sages disent également (idem 5a) que la Torah ne s'acquiert que par les souffrances ... ce qui est le sens de l'enseignement de la guémara (Meguila 6b) : '(Si un homme te dit qu'il a] peiné et a trouvé [c'est-à-dire qu'il a atteint la sagesse de la Torah], tu peux le croire ...
'Jette la mara (amertume) sur les élèves' = signifie qu'il est impossible d'atteindre la douceur de la Torah sans efforts, qui sont amers au début et doux à la fin.

[La guémara (Meguila 6b) dit sur place : "Rabbi Yits'hak dit : si un homme te dit : T'ai fait des efforts mais je n'ai pas trouvé, ne le crois pas. [S'il te dit :] Je n'ai pas fait d'efforts et j'ai trouvé, ne le crois pas. [S'il dit :] 'J'ai fait des efforts et j'ai trouvé', crois-le".
Même mémoriser son étude qui, comme dit la guémara, nécessite l'aide divine, doit aussi être précédé par des efforts, comme le dit le Beit Halévi (Béchala'h 19,5) : "Retenir son étude vient de l'aide divine, mais cela demande aussi des efforts ... car sans efforts, on n'y parviendra pas".
Le Beit Halévi déclare qu'un homme qui déclare avoir retenu son étude sans avoir fait d'efforts est inclus dans la catégorie de personnes qui affirment "ne pas avoir fait d'efforts et avoir trouvé", affirmation que la guémara déclare fausse sans aucun doute.
Le Beit Halévi ajoute que la même chose s'applique à la partie mystique de la Torah : "C'est seulement en peinant sur la partie révélée de la Torah que l'homme méritera de se voir révéler ses secrets ". ]

Lorsqu'ils se rendirent à Mara ... et s'approchèrent pour la première fois de la Torah, ils la trouvèrent amère et furent incapables de la recevoir : 'Ils ne pouvaient pas boire l'eau à Mara [l'eau symbolise la Torah - Baba Kama 17a] ... mais par intermédiaire de Moché... D. apparut pour les bénir et les gratifier de l'influence spirituelle qui allait leur permettre de finir par goûter la douceur de la Torah. Tel est le sens du verset : D. lui montra un arbre...'

C'est particulièrement vrai de l'étude de la Torah Orale, qui s'acquiert seulement par des efforts très soutenus. La Torah Orale n'est étudiée que par ceux qui aiment D., comme le dit le midrach (Tan'houma, Noah 3) : 'A propos de la Torah Orale, il est dit (Iyov 11,9) : "Sa mesure est plus longue que la terre et elle est plus large que la mer" et (Iyov 23.13) : "On ne la trouvera pas sur la terre des vivants" ... car on ne trouvera pas la Torah Orale chez celui qui recherche les plaisirs, le désir, l'honneur et la célébrité dans ce monde, mais seulement chez celui qui 'se tue pour elle, comme il est écrit ('Houkat 19.14) : "Voici la Torah - un homme qui meurt dans une tente" et telle est la voie de la Torah : mange ton pain trempé dans le sel, bois de l'eau en petite quantité, dors par terre et mène une vie de souffrance tout en peinant dans la Torah ... car il est difficile d'étudier et cela cause de grandes souffrances... car il existe de nombreux détails dans les mitsvot, mineurs et majeurs.
Elle est aussi pénible que la mort et aussi dure que la tombe, et elle n'est étudiée que par celui qui aime D. de tout son cœur, de toute son âme et de tous ses moyens."

-> Nos Sages (midrach T'an'houma - Noah 3) enseignent : "Quiconque aime la richesse et les plaisirs ne peut pas étudier la Torah Orale, car elle cause une grande souffrance et prive de sommeil ..."
Le rav Tsadok haCohen de Lublin (Pri Tsaddik -Kedouchat Shabat, maamar 7) explique qu'à ceux qui peinent pour comprendre la Torah Orale, la lumière cachée des 7 Jours de la Création est révélée déjà dans ce monde.

=> Le renouveau du peuple juif en tant que nation dépend aussi de l'effort qu'il investit dans l'étude de la Torah. Moché dit aux Bné Israël : "Ce jour-ci, vous êtes devenus un peuple". Dans son
introduction à la Massékhèt Guittin, le Tiférèt Yaakov explique : "Il vit leur désir de se vouer à l'étude de la Torah et d'y peiner, car tel est le principal désir de D. à leur égard."

"Le premier-né d’un âne, tu le rachèteras par un agneau, sinon tu lui briseras la nuque et le premier-né de l’homme, si c’est un de tes fils, tu le rachèteras" (Bo 13,13)

=> Pourquoi l’âne est-il le seul animal impur pour lequel il faut racheter son premier-né?

-> C’est la question posée par la guémara (Békorot 5b) : "Rabbi Hanina a dit : J’ai demandé à Rabbi Elièzer dans la grande salle d’étude : En quoi les ânes premiers-nés sont-ils différents des chevaux et des chameaux premiers-nés (qui ne sont pas racheté)?
Rabbi Elièzer m’a dit : C’est un décret de la Torah. Et de plus, les ânes ont aidé les juifs au moment de leur sortie d’Egypte, car il n’y avait pas un membre d’Israël qui n’ait eu avec lui 90 ânes nubiens, considérés comme de qualité supérieure, chargés de l’argent et l’or des Égyptiens".

-> On peut rapporter quelques commentaires :
1°/ Rachi commente (en s’inspirant des propos de la guémara) : "Et non celle de tout autre animal impur. Il s’agit ici d’un décret de la Torah, les premiers-nés des Egyptiens étant comparés à des ânes (comme il est dit : ‘Leur chair est comme la chair des ânes’ - Ezéchiel 23,20).
[Autre explication] Parce que les ânes ont aidé les Bné Israël lors de la Sortie d’Egypte, car il n’y a pas eu un seul juif qui n’ait pris avec lui plusieurs ânes chargés de l’or et l’argent des Egyptiens."

2°/ Les ânes représentent les biens matériels [à noter que le mot : ‘Hamor (âne - חמור) s’apparente au mot ‘Homer (matière - חומר)]. En les échangeant par des agneaux, qui, comme le Korbane Pessa’h, sont consacrés à Hachem, nous apprenons que nous devons utiliser nos possessions matérielles au Service divin. [rav Shimchon Raphaël Hirsch]

3°/ L’âne représente le yétser ara. En effet, étant un animal impur, il ne peut être utilisé pour le Service divin. Son nom, "’Hamor" souligne sa grossièreté, source des mauvaises pulsions.
L’agneau, par contre, représente le yétser tov, qui lui peut être utilisé dans le Service d'Hachem. Sa graisse est offerte sur l’Autel et sa chair est mangée par les Cohanim. Sa laine est utilisée pour la fabrication des tsitsits et ses cornes sont utilisées pour la fabrication de Chofars. Ses intestins servent à la fabrication des cordes de la harpe et sa peau à la fabrication des tambourins, afin de se réjouir dans l’accomplissement des mitsvot.
Le rachat du premier né de l’âne représente en quelque sorte la réparation (tikoun) du yétser ara. Il est racheté par l’agneau (le yétser tov) qui représente l’action de la téchouva et de la réparation des mauvaises pensées, paroles et actions causées par le yétser ara.
Le Rachat est effectué par le Cohen, qui représente l’Attribut de ‘Hessed, la Bonté et l’Amour. Il peut réparer le Mal grâce à son amour du prochain et sa capacité de le rapprocher de son Créateur [‘Hassidout]. Première ouverture [de matrice] de l’âne.

4°/ Selon le Sforno (verset 14), l’âne symbolise la Sortie d’Égypte car les égyptiens ont tellement pressé les Bné Israël de s’en aller immédiatement, que ceux-ci n’ont pas eu le temps de se procurer suffisamment de chariots pour transporter leurs biens. Ils ont donc dû charger tous leurs bagages sur des ânes qui, en temps normal, n’auraient jamais pu porter des fardeaux aussi lourds. Ils n’y sont parvenus que grâce à un des nombreux miracles de la Sortie d’Egypte ; c’est pourquoi les ânes méritent un traitement privilégié.