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Roch Hachana = un jour de joie

+ Roch Hachana = un jour de joie :

-> L'émotion première associée à Roch Hachana est généralement la peur, la grande crainte du jugement.
Le prophète Amos (3,8) demande : "Aryé (un lion) rugit ; qui n'aura pas peur?". Nos Sages révèlent que l'acronyme "aryé" (אריה) représentent : Elloul, Roch Hachana, Yom Kippour, Hochana Rabba.
Le Gaon de Vilna explique que lorsque l'on a peur de quelque chose, même "un cœur de pierre" se transforme en "un cœur de simple chair" et devient plus ouvert au repentir.
[ainsi durant cette période il est nécessaire de développer en nous un état de crainte (ex: en s'imaginant devant le tribunal au Ciel jugé sur tout sans concession, ou bien en imaginant qu'on pourrait avoir une année catastrophique à venir [D. préserve] car tout est décidé à ce moment, et qui peut prétendre être totalement méritant). Plus on travaille cela, plus notre cœur devient vivant, de chair. ]

-> Le Aboudraham écrit que la raison pour laquelle de nombreuses prières de Roch Hachana commencent par le mot "ouv'hèn" (ainsi) est afin d'évoquer les paroles de la reine Esther lorsqu'elle était sur le point d'approcher le roi sans y être invitée. La Méguila (4,16) cite Esther disant : "ouv'hèn avo él amélé'h (ainsi j'irai vers le roi), et si je dois périr, je périrai!".
Le Aboudraham explique que nos Sages de la Grande Assemblée (Anché Knesset HaGuédola) voulaient que nos émotions et nos sentiments reflètent ceux d'Esther : la peur et l'inquiétude que tout puisse être perdu, et "si je dois périr, je périrai".
[ainsi de même qu'Ether est rentré voir le roi sachant qu'il était probable qu'il ne levait pas son sceptre la condamnant à mort, de même à Roch Hachana nous sommes dans le palais royal face à Hachem, et nous devons avoir une grande crainte que tout ne se passe bien pour nous, et qu'on risque plein de "morts" dans l'année à venir (ex: plein de choses magnifiques qu'on n'aura peut être pas, car on aura pas abordé avec sérieux Roch Hachana). ]

A travers les âges, nos plus grands guédolim, des personnes au caractère et aux actions irréprochables, tremblaient à l'approche de Roch Hachana et s'évanouissaient souvent en récitant des mots tels que "hayom harat olam, ayom yaamod bamichpat kol yétsrouré olam" (... aujourd’hui, toutes les créatures du monde se tiennent en jugement), qui font référence à la formidable appréhension de ce jour.

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-> [A Roch Hachana,] tout tourne autour de la peur du jugement (din), sachant que nous sommes jugés.
Ce n'est que lorsque nous craignons le Roi que nous avons un lien avec Lui.
Une fois que nous le craignons et que nous sommes proches de lui, nous méritons d'être jugés favorablement.
[...]
Nous devons regarder notre Roi, réaliser qu'Il est là et qu'Il nous juge ... Nous devons savoir qu'un jugement est en cours et qu'il y a un juge juste en face de nous!
[...]
Le verset dit : "Hachem Malkénou, Hou Mochiénou" (Hachem est notre Roi, Il est Celui qui nous sauve).
Le Sforno explique que plus nous faisons d'Hachem notre Roi, plus nous sommes connectés à Lui, et plus nous sommes méritant d'un bon jugement.
Si nous devenons proches du Roi, le roi nous aidera. Il n'y a pas de limite à toutes les façons dont Il peut nous sauver et nous aider. Mais la chose la plus importante que nous devons faire est de faire d'Hachem notre Roi et d'être proche de Lui.
[rav Nathan Wachtfogel - Léket Réchimot ]

[plus nous avons de crainte conscient d'être face à face au Roi des rois, imaginant la gravité du jugement et ses conséquences potentiellement dramatiques sur notre vie, alors nous faisons de D. notre roi, nous créons un lien, et nous pouvons espérer sortir gagnant du jugement.
Plus nous vivons ce moment de jugement sans pitié, plus nous pouvons espérer de bien vivre l'année à venir, b'h. ]

-> La avoda de Roch Hachana, c'est d'une part la crainte du jugement, et d'autre part le bita'hon en Hachem.
[...]

A la fin de Roch Hachana, après avoir prié debout pendant deux jours d'affilée, le rav Wachtfogel était rempli d'une telle force et d'une telle joie que tous ceux qui le voyaient étaient surpris. Comment quelqu'un pouvait-il être aussi plein de vie après avoir consacré tant d'efforts à la prière?
Le rav lui-même a expliqué : La crainte d'Hachem ajoute des jours [à la vie]" (yirat Hachem tossif yamim - Michlé 10,27). Chaque fois que la peur, crainte provient de la yirat Hachem, elle donne à la personne plus de vie et de joie, et non moins.
Chaque fois qu'une personne éprouve des sentiments de yirar Hachem, cela devrait lui donner davantage de vie et de joie ; cela ne devrait pas drainer son énergie et la faire se sentir déprimée, triste.
[rav Nathan Wachtfogel - Léket Réchimot ]

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+ Etre joyeux à Roch Hachana :

Pourtant, Roch Hachana n'est principalement pas relié à la crainte.
Le Shaagat Aryé (102) conclut, se basant sur de nombreux Richonim, qu'il existe une mitsva d'être joyeux à Roch Hachana.
C'est également la décision halakhique de la Michnah Béroura (597:1).
Le 'Hatam Sofer (commentaire du Shoulchan Aroukh 597) offre une preuve en se basant sur le langage de la Michna (Roch Hachana 29b), qui se réfère au "Yom Tov de Roch Hachana" (Yom Tov renvoie à la fête avec de la joie).
En fait, dans ses Drachot (2:356), le 'Hatam Sofer va jusqu'à dire que par le mérite d'avoir une joie appropriée en ce jour-là, nous mériterons un bon verdict le jour du jugement.

-> Dans notre génération en particulier, la peur seule est parfois la recette pour déclencher l'anxiété et les sentiments déprimants qui sont l'antithèse de la majesté et de la grandeur de Roch Hachana, le jour où nous sommes censés couronner Hachem de bon gré et avec joie.
Comme l'a enseigné Né'hémia, la avoda de Roch Hachana consiste à se délecter de la sainteté du jour et à se réjouir ensemble de ses aspects positifs.
[Ezra et Né'hémia nous ont disent : "[à Roch Hachana] mangez des mets succulents, buvez des boissons douces ... ne soyez pas tristes, car la joie en Hachem est votre force" (Né'hémia 8:10). ]
Cela ne signifie pas que nous devrions totalement supprimer le pouvoir des aspects des Yamim Noraim (jours redoutables) tels que la peur et la crainte. Mais plutôt, en même temps nous ne devons pas perdre de vue l'aspect Yom Tov de Roch Hachana.

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+ La contradiction inhérente à l'homme :

-> Le rav Its'hak Hutner (Pa'had Its'hak - Roch Hachana - maamar 7), explique qu'il y a deux aspects distincts dans la création d'Adam.
D'une part, nos Sages (guémara Erouvin 13b) concluent : "Il aurait été préférable pour l'homme de ne pas avoir été créé plutôt que d'avoir été créé".
D'autre part, à la fin de la Création, la Torah déclare : "Hachem vit tout ce qu'Il avait fait, et voici que c'était très bon (tov méod)". Le mot méod fait spécifiquement référence à la création d'Adam (אדם), dont le nom comporte les mêmes lettres que méod (מאד) (Yalkout Béréchit 16).

Le rav Hutner explique que la raison de cette dichotomie est que :
"l'essence de la sainteté de Roch Hachana est la sainteté de la création d'Adam ... Par conséquent, ce jour-là, les deux aspects apparemment contradictoires d'Adam brillent de tous leurs feux.
L'une négative est qu'il aurait été préférable que l'homme n'ait pas été créé du tout ; et l'autre est la lumière incandescente du tov méod."

Comme le conclut le rav Hutner, lorsque Né'hémia déclare que les gens ne doivent pas pleurer à Roch Hachana ("ne soyez pas tristes" - véal téatsévou), ce n'est pas parce qu'il n'y a pas de raison de s'attrister. Certes, il y en a certainement, mais la grandeur de l'homme, son potentiel illimité et le pouvoir de la téchouva l'emportent sur le besoin de pleurer (dans un sens de désespérer, de déprimer en se morfondant sur toutes les fautes qu'on a faites, le peu de mitsvot qu'on a réalisé par rapport à ce qu'on aurait pu).

Nous devons équilibrer les deux forces de Roch Hachana, la crainte effrayante de devoir faire face à nos fautes et au jugement divin implacable, tout en célébrant la "kédouchat briat ha'Adam", la sainteté qui est entrée dans le monde lors de la création du "'hassid gadol" (Erouvin 18b), [l'énormité spirituelle] qu'était Adam avant d'avoir fauté.
[ainsi Roch Hachana, c'est par moments utiliser la peur, la honte, face à ce qui ne va pas en nous, et à d'autres être rempli de joie et de fierté d'avoir un papa Hachem le Roi des rois (le boss des boss), qui par confiance et amour nous a gratifié de potentialités de sainteté et de spiritualité phénoménales (à l'idée de la création d'Adam). Chacun doit utiliser ces deux sentiments pour que son intériorité soit la plus vivante en ce jour. ]

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+ Accepter la dualité :

-> Nous aussi, nous devons tenir entre nos mains ces deux aspects opposés de notre existence le jour de notre création, à Roch Hachana.
Le séfer Ha'Hinoukh (mitsva 311) enseigne que Roch Hachana est un grand cadeau parce que :
"l'une des bontés d'Hachem envers Ses créations est qu'Il évalue nos actions chaque année afin que nos fautes ne s'accumulent pas de manière irrémédiable ...
Ce jour représente donc le maintien et le salut du monde. Par conséquent, il est approprié qu'il s'agisse d'un Yom Tov ... Cependant, comme il s'agit d'un jour de jugement, il convient également de l'aborder avec crainte et inquiétude, plus que les autres fêtes de l'année."
Une fois de plus, nous constatons la dualité de ce jour complexe.

-> Le rav Tsadok HaCohen de Lublin (Likouté Maamarim 13) considère que la double approche de Roch Hachana se reflète dans les sons du shofar. Il cite l'idée de la guémara (Roch Hachana 33b) selon laquelle d'une part le son téroua reflète nos cœurs brisés lorsque nous considérons nos fautes et tentons de faire une téchouva complète.
Mais d'autre part, la tékia est un son de joie et de triomphe (voir Bamidbar 10:10).

[la séquence des sons du Shofar est : tékia (un song long ininterrompu), téroua (une série de 9 sons saccadés), tékia.
Eventuellement, cela nous apprend que le cœur de notre Roch Hachana est dans la joie (téroua = sorte de son de carnaval, fierté du couronnement du Roi), mais pour pleinement exploiter cette joie en accord avec la gravité du jour, on doit y mettre un cadre de part et d'autre : de la crainte (tékia = comme un cri terrible de regret face à nos fautes, de peur que toute notre vie se décide en ces jours au Ciel). ]

-> Le rav Elimélé'h Biderman (Béer 'Haïm - p.51) souligne que celui qui sonne du shofar doit recevoir une montée à la Torah à Roch Hachana afin que son souffle soit émis dans la joie de la récitation des mots de la Torah (Choul'han Aroukh 584:2 avec le Lévouch).
En effet, souffler dans le shofar est une source profonde de joie, comme le montre la déclaration énigmatique de nos Sages (midrach Vayikra rabbah 29) selon laquelle "nous savons comment apaiser notre Créateur avec le shofar".
Le rav David Cohen (Birkat Yaavetz 1:17) explique que lorsque nous soufflons dans le shofar, nous imitons la création par Hachem de notre géniteur Adam, lorsqu'Il a soufflé le souffle de vie dans ses narines. Comme un couple qui se dispute et qui se réconcilie après avoir visité un endroit qui ravive les souvenirs de leur ancien amour, nous "apaisons" Hachem en Lui "rappelant" le moment où Il a créé Adam, lorsqu'Il était si satisfait de Sa création (tov méod).

-> Ainsi, Roch Hachana renvoie au jour où nous avons été créés, lorsque, même pour une courte période, Hachem était fier de la sainteté de la création d'Adam, nous aspirons au moins à revenir à ce jour merveilleux.
C'est là la véritable joie de Roch Hachana : savoir que nous avons la possibilité de retrouver notre gloire passée, par la téchouva, accompagnée de la joie de savoir qu'Hachem est à l'écoute de nos prières et de nos supplications (qu'Il aime chaque juif quoiqu'on ait pu faire).

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