"Pour celui qui n'aura pas prémédité et dont D. a guidé la main, Je te réserverai un endroit où il s'enfuir" (Michpatim 21,13)
-> Lorsqu'une personne subit une mésaventure, un dommage ou une perte, il devra être convaincu qu'Hachem avait une bonne raison d'agir ainsi à son égard et que tout est le fruit de la Providence Divine.
De cette façon, on peut être certain que Hachem nous aidera à sortir des ténèbres.
C'est ce qu'exprime le verset en allusion :
- "Celui qui n'aura pas prémédité (vaassèr lo tsada (צָדָה))" [jeu de de mot avec le terme צד qui signifie à la fois : "préméditer", et également : "chasser, chercher une proie"] = il ne recherchera pas une proie, un coupable duquel faire dépendre son épreuve, mais il sera au contraire convaincu que "C'est D. qui a guidé ma main".
- Sil agit ainsi, Hachem dira en retour : "S'il fait dépendre la chose de Moi, alors Moi aussi, "Je te réserverai un endroit où il s'enfuira" = Je le mettrai à l'abri de tout ce qui lui cause du tort et tout rentrera dans l'ordre."
=> La Torah enseigne qu'une fois que nos malheurs se sont produits, nous ne devons pas rechercher des responsables, mais plutôt se tourner vers Hachem, qui est l'auteur de tout ce qui se déroule.
En acceptant que rien ne peut se produire sans un décret de sa part, que tout est pour le plus grand bien, alors nous permettons à Hachem de nous sortir de cette situation, de nous couvrir de Son infinie bonté.
[rav Elimélé'h Biderman]
<--->
-> Le 'Hozé de lublin écrit :
"Il faut se garder de la colère, garder à l'esprit que tout provient du Créateur comme la guémara ('Houlin 7b) le rapporte : "Un homme ne se cogne pas le doigt si cela n'a été décrété sur lui En-Haut".
Et cela demeure vrai même si le préjudice a été causé par un être qui possède le libre arbitre."
[on peut avoir tendance à penser que tout provient d'un décret d'Hachem, mais cependant lorsqu'une personne nous dérange nous en venons néanmoins à penser : "Il a un libre-arbitre, et il a choisi de me faire du mal. Si ce n'était à cause de lui, rien de mal ne me serait arrivé!"
Lorsque nous tombons, que c'est de notre faute, nous affirmons que c'est la volonté de D.
Mais qu'en est-il lorsque quelqu'un nous frappe, nous dérange, est-ce que c'est de la même manière à 100% d'Hachem? ]
-> Le 'Hafets 'Haïm enseigne que même s'il semble à l'homme que c'est un tel qui l'a frappé, il doit savoir, qu'en vérité, le coup ne provient pas du tout d’une main humaine. Car l’homme ne possède aucun pouvoir de causer un quelconque dommage si cela n'a pas été décrété auparavant En-Haut. C’est donc bien Hachem qui l'a frappé.
Il fallait donc pour cela que la Torah donne explicitement l'autorisation de guérir.
C'est pourquoi la Torah a besoin d'apprendre d'un verset que malgré tout il est permis au médecin de le soigner.
[cf. la guémara (Baba Kama 85a) : "la permission a été donnée aux médecins de guérir" (se basant sur : "soigner elle la soignera" - Michpatim 21,18-19).
Rachi commente : "On ne s'opposera pas en disant : "C'est D. qui lui a infligé (ce mal) et lui (le médecin) se permet de guérir!"]
-> Le Ohr ha'Haïm haKadoch (Michpatim 22,6) écrit : "Il n'y a pas une heure ou même un seul instant où Hachem ne fait pas quelque chose pour une personne, à la fois pour son corps et pour ses besoins."
[d'une certaine façon de même que sans Hachem pendant une seule seconde nous n'existons plus, de même plus largement rien ne peut exister, se passer dans notre vie, sans qu'Hahem ne le permette.]
<--->
-> "Personne ne peut rien prendre de la portion réservée à un autre, fût-ce l’épaisseur d’un cheveu" (guémara Yoma 38b)
-> "Tous les gains d’une personne sont prédéterminés d’un Roch Hachana à l’autre" (guémara Beitsa 16a)
Le Amoud haAvoda écrit également :
La plupart des gens pense que ce qu’ils ont acquis grâce à leur travail et qu’ils possèdent à présent leur appartient. Dès lors, lorsqu’ils perdent de l’argent, ils se lamentent et s’en plaignent.
En réalité, il est très possible que, même si cet argent se trouve en leur possession, il ne fasse pas partie de ce qui leur a été octroyé par le Ciel.
C’est pourquoi, le moment venu, ils le perdent.
Si tout le monde en était convaincu, les lois relatives aux préjudices deviendraient inutiles puisque personne ne revendiquerait une créance, sachant qu’il est impossible d’augmenter ou de diminuer ce qui lui a été fixé.
Seulement, la Torah ne s’exprime (à travers toutes les lois relatives aux préjudices financiers) que contre le yétser Hara qui aveugle les yeux de la raison et poussent l’homme à considérer avec son regard humain qu’un tel lui a causé une perte.
<----------------------------->
"Si un homme prémédite contre son prochain pour le tuer avec ruse depuis Mon Mizbéa'h (autel de sacrifice) tu le prendras pour le mettre à mort" (Michpatim 21,14)
=> Pourquoi ce verset évoque particulièrement le fait de le prendre du Mizbéa'h? Que vient faire le Mizbéa'h avec le fait de condamner à mort un tueur avec préméditation?
-> Rachi explique que ce verset vient signifier que même si le criminel est un Cohen qui s'apprête à servir dans le Temple, on le fera cesser son service pour l'exécuter.
Cette explication se base sur la guemara qui dit que même si c'est le seul Cohen qui peut apporter le sacrifice quotidien (sacrifice de Tamid), et que si on le fait cesser ce service, on n'apportera pas ce sacrifice ce jour-là, malgré tout, il faudra le prendre depuis le Mizbéa'h et l'empêcher d'apporter ce sacrifice pour lui appliquer la peine capitale.
L'explication que l'on peut apporter à cela est que le service du Temple permet de se rapprocher d'Hachem. Or, cet homme qui a tué s'est ainsi radicalement séparé et éloigné du Créateur. On l'arrachera donc du service pour lui appliquer sa punition.
-> Le 'Hida cite les Sages Achkénazes qui expliquent qu'un tueur volontaire pourrait argumenter devant le tribunal que l'homme qu'il a tué était peut-être de toutes les façons destiné à mourir du fait d'une maladie interne.
Or, la règle est que celui qui tue une personne qui est doté d'une maladie interne le vouant à la mort dans les 12 mois, même si ce crime est extrêmement grave, mais on ne peut pas le condamner à mort.
Ainsi, un homme qui tue son prochain "avec ruse" en rusant par le fait d'émettre l'hypothèse que sa victime était dotée d'une telle maladie, pour se dispenser de la condamnation à la peine capitale, à cela, la Torah dit qu'on le prendra de l'autel pour l'exécuter. En effet, une bête qui a une maladie mortelle que l'on sacrifie, cette offrande n'est pas valable.
Pourtant, la Torah enjoint d'apporter des sacrifices, même si rien ne nous assure que la bête n'a pas une telle maladie.
Cela prouve que la Torah préconise de suivre la majorité, or la majorité des bêtes sont viables. On apprend donc de l'autel et des sacrifices qu'on y offre que l'on doit suivre la majorité. Et ce même argument nous permettra aussi de décréter que l'homme qui a été tué appartenait aussi certainement à la majorité des gens, qui sont également viables. De ce fait on apprendra de là que ce tueur a certainement tué une personne viable et on pourra ainsi le condamner.
"De Mon Mizbéa'h tu le prendras (ou "tu l'apprendras") pour le mettre à mort".
-> Le Kerem Tsvi rapporte une guémara qui dit qu'un homme qui est né sous l'influence astrale de Mars, aura des tendances à verser le sang. Il risquera donc d'être un criminel, D. Préserve. Malgré tout, il aura les moyens de dépasser cette fatalité en sublimant cette tendance. Il pourra ainsi devenir abatteur rituel.
Ainsi, si un homme tue son prochain avec ruse, en arguant qu'il est né sous Mars et est donc contraint de verser le sang et n'est donc pas responsable de ce crime.
A cet argument, on répondra qu'il avait néanmoins le choix. Il aurait pu verser le sang dans le cadre d'une mitsva. Il aurait pu devenir abatteur rituel et abattre des animaux sur l'autel dans le cadre des sacrifices (à l'époque du Temple).
"De Mon Mizbéa'h tu le prendras pour le mettre à mort", en argumentant qu'il aurait pu abattre des animaux pour le Mizbéa'h. De cette façon, il avait le moyen d'échapper à son destin de criminel. Il est donc entièrement responsable et condamnable pour son crime.
-> Le Apiryon rapporte l'enseignement de nos Sages sur la juxtaposition du dernier passage de Yitro et le premier verset de Michpatim. La paracha de Yitro se termine par l'ordre de ne pas mettre des marches pour monter sur le Mizbéa'h (l'autel), mais d'y mettre une rampe. En effet, les marches contraindraient le Cohen à procéder à de plus grands pas pour monter sur le Mizbéa'h. Alors qu'avec une rampe, les pas pourront être plus petits (et ne feront pas apparaître la peau du Cohen).
Et juste après, commence la paracha de Michpatim qui parle de la justice. La juxtaposition de ces 2 sujets vient enseigner que le juge aussi ne doit pas réaliser de "grands pas" dans la justice. Il ne devra pas aller trop vite et se dépêcher à rendre le verdict. Mais il prendra son temps pour analyser l'affaire avec patience, de sorte à ne pas se tromper dans son verdict.
Notre verset s'inscrit dans le prolongement de cette explication. Même si à première vue se présente à toi une affaire de meurtre où il semble évident que l'accusé a tué avec préméditation, malgré tout ne te dépêche pas de le condamner trop hâtivement. Apprends du Mizbéa'h qui devait avoir une rampe et non des marches pour pouvoir faire des petits pas et applique cela à la justice. Ainsi, sois patient avant de le condamner, et seulement après avoir pris tout le temps nécessaire selon le message du Mizbéa'h, seulement après, "tu le prendras pour le mettre à mort".