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"Plus ils les persécutèrent, plus ils se multiplièrent et plus ils se renforcèrent" (Chémot 1,12)

-> Rachi explique : dans tout ce qu'ils s'ingénièrent à les persécuter, Hachem s'ingénia en retour à les faire proliférer et se renforcer.

-> Le Chem miChmouël commente :
Cela signifie que dès qu'ils décidèrent de les persécuter, cela leur fut compté comme s'ils avaient déjà exécuté leurs mauvaises intentions.
Car chez un idolâtre, Hachem compte la mauvaise résolution comme un fait accompli (guémara Yérouchalmi Péa 1,1).
C'est pour cela qu'immédiatement après avoir pris leurs cruels décrets, Hachem transforma le cours naturel des choses et créa des Bné Israël avec un corps nouveau qui leur permettait d'engendrer 6 enfants à chaque grossesse, ce qui n'avait jamais eu lieu jusqu'alors, et "plus ils les persécutèrent, plus ils se multiplièrent".

Le Chem miChmouël conclut :
"Chacun pourra faire un raisonnement a fortiori pour lui-même : si déjà à cause des mauvaises pensées des égyptiens, Hachem modifia le corps des juifs, à plus forte raison lorsqu'un juif prend sur lui une bonne résolution qui l'incite à mieux étudier et à servir Hachem, il est certain qu'Hachem le transformera sur le champ en un autre homme tant dans le domaine spirituel que matériel."

"La fille de Pharaon embrassait et enlaçait Moché. Elle l'aimait comme si c'était son propre enfant ...
Moché était si beau que tout celui qui le voyait ne pouvait pas le quitter des yeux.
Pharaon embrassait et enlaçait Moché."
[midrach Chémot rabba 1,26]

=> Ceci montre à quel point Hachem gère tout dans le monde.
Pharaon pensait faire le maximum pour noyer le sauveur des juifs dans le Nil, mais au final il l'embrassait et l'enlaçait.
Hachem, tu es Unique!

"J'ai vu la souffrance de Mon peuple qui se trouve en Egypte" (Chémot 3,7)

Dans tous les exils, les juifs ont été dispersés dans différents pays. C'est seulement lors de l'exil d'Egypte que tout le peuple était réuni dans un seul endroit : à Gochen.
=> Pourquoi une telle différence?

Tous les autres exils sont venus après le don de la Torah. Et même si les juifs furent alors dispersés, malgré tout, la Torah les a réunis et rassemblés dans leurs dispersions.
Par contre, l'exil d'Egypte eut lieu avant le don de la Torah. Et s'ils étaient alors dispersés dans plusieurs endroits, ils n'auraient pas pu se relever et auraient alors disparu.
[Avné Nézer - rabbi Avraham de Sokatchov]

"Maintenant, tu vas voir ce que Je vais faire à Pharaon" (Chémot 6,1)

Jusqu’à présent, quand il était seulement question de la douleur et des malheurs des juifs en Egypte, il y avait matière à accusation et on pouvait dire que les juifs n’étaient pas dignes de la délivrance.
Mais maintenant, quand Pharaon a manifesté une insolence tellement énorme envers Hachem, en déclarant : "Je ne connais pas Hachem et je ne renverrai pas les bnei Israël", la chose touche déjà à l’honneur du Ciel et à la douleur de la Présence Divine.
Alors il n’y a plus lieu d’accuser et la délivrance doit venir.

Le Maguid de Koznitz dit :
Quand un juif prie au moment du malheur, qu’il demande essentiellement pour la douleur de la Présence Divine et non pour sa propre douleur, car tant que la chose ne le touche que lui-même, cela laisse place aux accusations, mais quand cela touche à la Présence Divine [notre papa Hachem], qui souffre du malheur de chaque juif, tous les accusateurs doivent fermer leur bouche.

Chémot & le lachon ara

+ Chémot & le lachon ara :

-> "Moché prit peur et se dit : "En vérité, la chose est connue!"
(Chémot 2,14)
Jusqu'à ce moment Moché ne comprenait pas pourquoi les juifs méritaient de telles souffrances.
En se rendant compte qu'il y avait des délateurs, du lachon ara, parmi le peuple juif, alors "la chose est connue".

En effet, Moché avait conscience de la gravité du lachon ara, au point que lorsque Hachem lui demanda par la suite de libérer le peuple, Moché a été très surpris : "En quoi Israël a-t-il mérité que Tu accomplisses pour lui un miracle et que je les fasse sortir de l’Egypte ?" (Rachi - Chémot 3,11)
En effet, Moché ne comprenait pas comment avec une telle faute, les juifs pouvaient mériter d'être sauvés.

-> Le Sfat Emet (5641) explique que cela nous montre la sévérité du lachon ara et de la haine gratuite.
Il écrit : "Cela nous enseigne que nous perdons tous nos mérites à cause de la faute du lachon ara".

-> Le Kli Yakar (Chémot 3,2) écrit que le buisson ardent représente la haine gratuite (sinat 'hinam).
Le buisson (sné - סנה) vient du mot : haine (sin'a - שנאה).
Le feu brûlant dans le buisson représente nos difficultés dans l'exil, dont la cause est la haine gratuite (sinat 'hinam) et le lachon ara.

Le Kli Yakar écrit : "C'est la raison principale pour laquelle les juifs sont en exil, à cause de la haine et de la jalousie qu'il y a entre eux, plus qu'il n'en existe parmi les autres nations ...
C'est pourquoi le feu d'Hachem [de la punition et de la colère] brûle ".

Le verset se termine par "le buisson ne se consumait pas".
Le Kli Yakar écrit : "Cela implique que malgré toutes les difficultés et les conflits, la haine gratuite continue à chaque génération. Elle ne se consume jamais."

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-> La culture égyptienne encourageait le lachon ara.
Le Zéra Kodéch enseigne : "L'idolâtrie d'Egypte est appelée (Béchala'h 14,2) : "pi a'hirot" (פִּי הַחִירֹת) [littéralement : la bouche libérée], car les égyptiens parlaient ce qu'ils voulaient, sans restriction, comme s'ils étaient libres de dire ce qu'ils désiraient.

Il est écrit :
- "[lorsque] Nos lèvres sont nôtres, [alors] qui peut régner sur nous" (chéfaténou itanou, mi adon lanou - Téhilim 12,5)
[en ce sens, Moché ne comprenait pas comment le peuple juif pouvait être à ce point sous le règne des égyptiens, jusqu'à comprendre qu'il y avait du lachon ara parmi les juifs ...]
- "ils reviennent et campent devant pi ha'hirot" (vayéchévou vayé'hanou lifné pi a'hirot - v.14,2) : "yéchévou" signifie que les juifs doivent faire téchouva et être vigilants sur leurs paroles."

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Le mot : Péssa’h (פסח), se divise en 2 mots : "pé sa’h" (la bouche parle – פה סח).
Le mot : sa’h (סח) a pour valeur numérique 68, tout comme le mot : 'haïm (la vie – חיים). Ainsi, Péssa’h = pé sa’h = la bouche de la vie!

A l’inverse, le chef, représentant de l'Egypte est Pharaon (פרעה) = pé ra (la bouche mauvaise – פה רע).

["pé sa’h" = Le Kédouchat Lévi (Drouchim léPessa'h) dit que le message de Pessa'h est que bien qu'Hachem a déjà créé tous les mondes par le passé, Il "parle" en permanence à Sa création.
(la vie et la mort sont au pouvoir de la bouche(parole), et nous devons prendre exemple sur Hachem qui donne la vie à chaque instant!)]

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-> Le Pri Mégadim (fin Siman 685) enseigne que durant la période des Shovavim (généralement de Chémot à Michpatim) nous allons du début jusqu'à la fin de notre périple en Egypte.
Bien que nous avons été sauvé d'Egypte, une partie de l'impureté d'Egypte reste en nous.
C'est pourquoi une façon de s'en purifier et d'être particulièrement vigilants sur notre lachon ara, pendant cette période.

Il écrit que les chovavim commencent avec la paracha Chémot et les mot : "véélé chémot bné Israël abaïm" :
- le mot : "véélé" (וְאֵלֶּה) est l'acronyme de : avak lachon ara (poussière de lachon ara - אבק לשון הרע), en allusion au fait que nous devons faire attention à même une minuscule quantité de lachon ara.
- les mots "chémot bné Israël abaïm" (les noms des enfants d'Israël qui sont venus - שְׁמוֹת בְּנֵי יִשְׂרָאֵל הַבָּאִים) a pour acronyme : שביה (captivité - chiv'ya). [comme l'écrit le Baal haTourim]
La raison est que nous nous libérons de la captivité et de l'influence mauvaise de l'Egypte lorsque nous sommes vigilants avec notre parole.

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-> Le Magen Avraham (début de Lé'h Lé'ha) écrit que les maladies viennent dans le monde à cause du lachon ara qui contamine l'air et détruit la nature.

-> Le rav Elimélé'h Biderman explique le verset de Béaaloté'ha (9,20) :
- "al pi" = en fonction de la bouche
- "Hachem ya'hanou" = Hachem va résider avec vous.
- "vé'al pi" = et en fonction de la bouche
- "Hachem yissa'ou" = Hachem va partir.
=> La Présence Divine réside en nous parallèlement à l'utilisation de notre langage.

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-> Se retenir d'une conversation interdite ou inutile est équivalent à jeûner 84 jours.
[Rabbi Ouri de Strelisk (le Saraf)]

Le rabbi Aharon de Belz ajoutait que c'est même davantage que 84 jours de jeûne.

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-> http://todahm.com/2021/01/21/30332

-> http://todahm.com/2020/03/23/12851-2

"Et voici les noms des enfants d'Israël qui viennent (aba'im) en Egypte avec Yaakov, chacun était venu (baou) avec sa maisonnée" (Chémot 1,1)

=> Pourquoi la Torah change-t-elle le temps du verbe venir dans ce verset?
On effet, on a "qui sont en train de venir" (aba'im = du présent) et "était venu" (baou = au passé).

-> Le 'Hatam Sofer (Torat Moché) explique que lorsque les juifs étudient la Torah, même lorsqu'ils sont en dehors d'Israël, c'est comme s'ils vivaient en terre d'Israël.
Lorsqu'ils s'arrêtent d'étudier la Torah, ils tombent dans la galout (exil) de la terre où ils vivent.

Ainsi au début, lorsque le peuple juif est arrivé en Egypte, ils étaient occupés à étudier la Torah, et ainsi ils ont transporté la terre/l'atmosphère sainte d'Israël en Egypte. Ils avaient une yéchiva en Egypte, et c'était comme s'ils vivaient en terre d'Israël.
C'est pourquoi, il est écrit : "ich oubéto baou" (chacun était venu avec sa maisonnée) = ils sont venus avec les maisons qu'ils avaient en Israël.

Ensuite il est écrit : "Yossef mourut, ainsi que tous ses frères, ainsi que toute cette génération ... ils remplirent la terre" (Chémot 1,6-7). Le midrach (Yalkout Chimoni Chémot 1) explique que les Bné Israël remplissaient les cirques and théâtres.
Ils ont cessé d'étudier la Torah et profitaient de la culture égyptienne. C'est pourquoi il est alors écrit : "aba'im mitsrayéma" (vinrent en Egypte) = le temps est au présent (et non au passé), car c'est comme s'ils n'arrivaient que maintenant en Egypte [la galout].

[avant bien que physiquement en Egypte, ils ne vivaient pas en Egypte et étaient comme en terre d'Israël. Ce qui ne fut plus le cas à partir du moment où ils cessèrent l'étude de la Torah
Ceci explique l'emploi du présent (aba'im) et du passé (ba'ou) dans le verset. ]

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-> "Le pays en fut empli" (Chémot 1,7)

Le midrach explique que les juifs se sont mêlés aux égyptiens dans leurs théâtres et leurs cirques.

"Pharaon donna un ordre ... Vous ne continuerez pas à donner la paille au peuple pour fabriquer les briques ... qu'ils aillent eux-mêmes et ramassent leur paille. Quant au quota des briques qu'ils fabriquaient ... vous [le] leur imposerez, ne le réduisez pas ..." (Chémot 5,6-7)

=> Si Pharaon voulait rendre plus difficile la vie des juifs, pourquoi ne leur a-t-il pas simplement demandé de produire davantage de briques? Pourquoi voulait-il le même quota?

Le rabbi de Skver explique que le plan de Pharaon était de contraindre les juifs à traverser l'Egypte pour trouver de la paille.
Il voulait qu'ils quittent les 4 coudées de leur environnement personnel pour s'habituer, pour s'imprégner de la culture égyptienne.
Il voulait leur abîmer les yeux, car ensuite les égyptiens auraient le dessus.

-> Lorsqu'un juif regarde ce qu'il ne doit pas observer, alors la sainteté d'Israël qui est en lui le quitte.
[le Beit Aharon - sur Yéchayahou 27,6]

-> Le rav Elimélé'h Biderman rapporte l'explication de nos Sages sur le verset (Yéchayahou 59,18) :
- "ché'i chaviv éné'ha" = lève tes yeux [de visions interdites] ;
- "our'i koulam nikbétsou baou la'h" = [et alors] tu verras les nombreux anges [que cette bonne action a créé], se rassemblant autour de toi [et te protégeant.]

-> Dans le kidouch nous disons : "acher kidéchanou bémitsvotav vératsa banou" (qui nous a fait saints avec Ses mitsvot et qui nous désire).
Normalement, nous devrions dire l'inverse : "Il nous désire, et ainsi Il nous a fait saints avec ses mitsvot".
Le rabbi Moché Mordé'haï de Lelov explique que Hachem nous désire car nous faisons le maximum pour être saints.
[D'une certaine façon, chacun de nos efforts pour être kadoch, renforce le désire d'Hachem pour nous!]

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-> "Vous ne continuerez pas (lo tossifoun - לֹא תֹאסִפוּן) à donner la paille"
Le rabbi David de Lélov explique que : לא תאספון signifie : "vous ne vous rassemblerez pas" (lééssof - rassembler - לאסוף).
Le peuple juif avait l'habitude de se rassembler pour échanger ensemble des paroles de émouna.
Pharaon craignait ces rassemblements, et c'est pourquoi il a décrété qu'il n'était plus possible de se rassembler (allez chacun aux 4 coins de l'Egypte chercher de la paille, plutôt que de rester ensemble [dans la émouna] fabriquer des briques!).

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-> Le rabbi Its'hak de Vork dit que Pharaon voulait détruire la tranquillité d'esprit des juifs.
En effet, avec le temps les juifs maîtrisaient parfaitement la fabrication des briques [c'était éprouvant physiquement, mais ils s'y étaient fait mentalement].
Ainsi les contraindre à faire davantage de briques les auraient encore plus fatigués, mais cela n'aurait pas vraiment affecté leur tranquillité d'esprit.
Par contre, ils n'avaient aucune expérience dans le fait de chercher et rassembler de la paille. Ils ne savaient pas où aller, ou même par quoi commencer.
De telles problématiques détruisent la sérénité d'une personne, ce qui était l'objectif de Pharaon.

-> La guémara (Béra’hot 61a) compare le yétser ara (mauvais penchant) à une mouche.
Pourquoi cela?
Le rav Elimélé'h Biderman explique que la mouche ne fait rien d'autre que de déranger la tranquillité d'esprit des gens, puisqu'elles bourdonnent à proximité de l'oreille et qu'elles volent autour du visage sans pouvoir mordre ou nuire.
C'est le but essentiel du yétser ara : détruire notre sérénité.
[par exemple, nous ne sommes plus nous même, et le yétser ara prend alors les commandes!]

Une autre similarité est que les 2 sont attirées par les saletés.
Les mouches sont attirées par les plaies ouvertes infectées.
Le yétser ara agit de même puisqu'il va en permanence attirer l'attention d'une personne sur ses défauts et ses fautes, afin de lui causer du désespoir.
Nos Sages disent : "Le yétser ara ne veut pas nous faire fauter, ce qu'il veut c'est mettre en nous de l'abattement qui suit la faute", et alors il peut nous mettre à terre en nous faisant se concentrer sur nos fautes et autres bassesses, saletés internes.
[le moins nous avons de valeur de nous, le moins nous agissons avec grandeur spirituelle, le moins nous sommes dérangés à fauter, ...]

[b'h, d'autres explications sur yétser ara & mouches, dans le divré Torah : http://todahm.com/2019/02/14/le-yetser-ara ]

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-> "Pharaon ajouta : "Vraiment, cette population est nombreuse à présent dans le pays et vous leur feriez interrompre leurs corvées?"" (Chémot 5,5)

-> Le Ben Ich 'Haï commente :
Pour comprendre ce verset, il faut aller chercher la raison dans Iyov (5,7) : "Car l’homme est né pour peiner" (כִּי-אָדָם, לְעָמָל יוּלָּד).
Mais il y a une différence entre Israel et les nations. Alors que les nations doivent "peiner" pour construire au niveau matériel, Israel lui doit "peiner" pour construire au niveau spirituel, comme la guémara (Béra'hot 64a) explique le verset : "Tous tes enfants seront les disciples d’Hachem, et grande, sera la paix de tes enfants" (וְכָל-בָּנַיִךְ, לִמּוּדֵי יְהוָה ; וְרַב, שְׁלוֹם בָּנָיִךְ). Et la guémara de dire : "ne lis pas tes enfants (בוניך), mais tes bâtisseurs" pour nous montrer que notre travail de construction se passe au niveau de l’étude de la Torah.
Comme on le voit aussi dans le verset : "La voix, c’est la voix de Yaakov, mais les mains, ce sont les mains d’Essav" (הַקֹּל קוֹל יַעֲקֹב, וְהַיָּדַיִם, יְדֵי עֵשָׂו).

Et c’est ce que Pharaon dit à Moché : Israel n’a pas encore reçu la Torah, ils ne sont pas encore assignés à cette tâche de construction spirituelle, ils sont un Am Haarets, un peuple de la terre, matériel, et toi Moché tu voudrais les enlever de leur travail matériel?

La réponse de Pharaon à la première demande de Moché de libérer le peuple aura été d’annuler le repos du Shabbat, que Moché avait obtenu pour eux avant sa fuite d’Egypte. Car c’est justement le Shabbat que s’accentue cette particularité d’Israel, comme le dit la guémara (Yéroushalmi Shabbat 15:3) : "Les Shabbatot n’ont été donnés à Israel que pour y étudier la Torah".
Et c’est justement lors de ce Sabbat que s’accompli Israel quand il est débarrassé des contraintes de la vie matérielle pour 24 heures de spiritualité. Et quand Israel est appelé bâtisseur, c’est au Olam Haba qu’il est fait allusion, la construction spirituelle d’Israel ne se verra pleinement que dans le monde futur.
C’est pour cela que les Mékoubalim disent que la portée de l’étude est 1000 fois supérieure le Shabbat.

3 hommes étaient conseillers de Pharaon, roi d'Egypte : Bil'am, Iyov et Yitro.
Bil'am qui a donné lui-même le conseil (de jeter dans le Nil tout nouveau-né mâle) fut tué ; Iyov, qui s'est tu, fut frappé par des souffrances et Yitro qui prit la fuite (pour marquer sa désapprobation) fut récompensé à travers ses descendants qui siégèrent au Sanhédrin ("lichkat hagazit").
[guémara Sota 11a]

-> Selon le midrach (Chémot rabba 27,6), c'est Amalek qui l'a remplacé par la suite dans le conseil du roi d'Egypte Pharaon, afin de maintenir le nombre impair de 3 conseillers.

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-> Les 3 notables qui composaient le conseil royal d'Egypte représentaient les 3 modes de répression envisagés par Pharaon. Il voulut exterminer le peuple d'Israël, qu'il craignait, par un de ces 3 moyens :
- par la magie et la sorcellerie dans lesquelles Bil'am excellait ;
- par la connaissance des lois de la nature qui fait la force de Iyov ;
- par l'astrologie dans laquelle le grand "prêtre" Yitro excellait.
Mais tous ces projets échouèrent, car le Maître de l'Univers modifia les lois naturelles en faveur d'Israël et fit naître Moché qui par le pouvoir qu'Il lui a conféré, défia les magiciens de Pharaon, amena les plaies (makot) qui s'opposaient aux lois de la nature, et démentit les présages lus par les astrologues de Pharaon.
[Yafé Toar - dans midrach Chémot rabba 1,9]

-> "On imposa au peuple des chefs de corvée pour l'accabler de labeurs" (Chémot 1,11)
Les initiales des 4 derniers mots : "pour l'accabler de labeurs" ( מִסִּים, לְמַעַן עַנֹּתוֹ בְּסִבְלֹתָם) forment le nom de Bil'am : בלעם.
C'est une allusion au fait que c'est Bil'am qui donna ces conseils funestes à Pharaon.
[Gaon de Vilna]

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=> A quel âge est mort Bil'am?

-> "Ils tuèrent les rois de Midian ... et Bil'am fils de Béor par l'épée" (Bamidbar 31,8)
Puisque Bil'am a conseillé Pharaon de faire faire périr les nouveau-nés mâles en les jetant dans le Nil, c'est que Moché, qui sera sauvé des eaux du Nil, n'était pas encore né.
Or, le verset ci-dessus rapporte que Bil'am a été tué par Pin'has à la 40e année de la sortie d'Egypte, au cours de la guerre menée contre Midian.
Du fait que Moché avait presque 120 ans lorsque Bil'am fut tué, et que ce dernier avait certainement plus de 20 ans lorsqu'il participa en temps que conseiller de Pharaon (avec Yitro et Iyov), c'est que Bil'am est donc mort à un âge supérieur à 140 ans.

Or, dans la guémara (Sanhédrin 106b), on questionna Rabbi 'Hanina : "Quel âge avait Bil'am lorsqu'il mourut?" ; il répondit que la durée de vie de Bil'am n'est pas mentionnée dans la Torah, mais peut être déduite à partir du verset :"Les hommes sanguinaires et perfides n'atteindront pas la moitié de leurs jours" (Téhilim 55,24).
Ainsi, Bil'am qui était sanguinaire pour vouloir tuer tous les premiers-nés et également perfide lorsqu'il conseilla aux filles de Midian de débaucher les Bné Israël entraînant 24 000 morts, est donc mort à l'âge de 33 ou 34 ans, soit moins que la moitié de la vie "normale" d'un homme qui est au minimum de 70 ans.

=> Comment lever une telle contradiction?

-> Selon le Séfer haYachar, Bil'am qui a conseillé Pharaon d'éliminer par l'eau les garçons juifs dès leur naissance n'était pas le prophète Bil'am qui cherchait à maudire Israël en compagnie de Balak et qui a entraîné les filles de Midian à séduire Israël.
Le prophète Bil'am, tué à l'âge de 33 ans par l'épée de Pin'has était le petit-fils du Bil'am qui siégeait avec Iyov et Yitro.

-> Selon le Séfer haDorot, Bil'am tué par l'épée de Pin'has à l'âge de 13 ans, et qui boitait, était l'a réincarnation du Bil'am qui faisait partie du conseil de Pharaon.

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=> Pourquoi Iyov a-t-il été frappé par tant de souffrances pour son silence devant la proposition de Bil'am?

-> Selon Rabbi 'Hama, fils de Rabbi 'Hanina, dans la guémara (Sota 11a), lorsque Pharaon avait proposé : "Ingénions-nous contre Lui", son intention était de dire à ses 3 conseillers : "Soyons prudents à l'égard du Protecteur d'Israël dans la façon d'éliminer les Bné Israël" ; si nous les condamnons à périr par le feu, Hachem se vengera par le feu, d'après le verset : "Oui, Hachem fera justice de toute chair par le feu et par l'épée" (Yéchayahou 66,16).
Et si nous les condamnons à périr par l'épée, Il se vengera par l'épée, d'après le même verset.
Condamnons-les donc à périr par l'eau, car leur Protecteur a juré de ne plus amener de déluge dans le monde.

=> Du fait que Iyov, par son silence, ne s'est pas opposé à la destruction du peuple d'Israël par le feu, ses biens ont été détruits par le feu, mesure pour mesure, selon le verset : "Un feu de D. est tombé du Ciel, embrassant le bétail et les esclaves (de Iyov)" (Iov 1,16).
De plus, Iyov fut frappé d'ulcères sur tout son corps, selon ce verset : "Le Satan frappa Iyov de boutons ulcéreux purulents" (Iyov 2,7), mesure pour mesure, car les ulcères sont un dérivé du feu.
[Maharcha]

-> Lorsque Iyov a fauté par son silence approbateur, qui ne dit mot consent, Hachem l'a accablé de souffrances qu'il devait accepter en silence, sans se rebeller, afin de réparer son silence dans la réunion des conseillers de Pharaon, à l'image du silence réparateur d'Aharon après la mort de ses fils Nadav et Avihou.
[Lichmoa béLimoudim]

-> Le rabbi ‘Haïm Chmoulévitch (Si’hot Moussar - si’ha 7) enseigne :
Les terribles souffrances de Iyov semblent être une sanction plus sévère que la mort quasi-instantanée de Bil'am par l'épée.
Pourquoi Hachem répond-t-il par des souffrances "disproportionnées" au silence de Iyov devant le cruel projet de Pharaon et Bil'am, silence justifiable par le fait que toute opposition n'aurait pas été entendue par Pharaon et Bil'am, alors que la sanction de Bil'am semble moins sévère pour une faute pourtant plus grave?

Nous pouvons répondre que les souffrances infligées à Iyov ne sont pas une sanction, mais avaient pour but de l'éclairer sur son erreur.
En effet, le message de Hachem à Iyov est le suivant : "Si tu avais sincèrement ressenti et partagé la souffrance qui attendait le peuple d'Israël par ces décrets ignobles, tu n'aurais pas pu demeurer silencieux, de même que pour les souffrances intenses qui t'atteignent personnellement, tout en sachant que cette réaction ne peut pas te sauver! Tu aurais donc dû réagir à la souffrance de l'Assemblée d'Israël et protester devant Pharaon, même si tu étais persuadé que ta réaction n'empêcherait pas le projet d'être adopté."

-> Le rabbi ‘Haïm Chmoulévitch (Si’hot Moussar - si’ha 29) écrit également :
Nous pouvons faire confiance à la Justice Divine : dans son essence, la sanction de mort prononcée contre Bil'am est plus grave que les grandes souffrances infligées à Iyov, car Bil'am a perdu le capital-vie qui est le plus grand capital de toute personne dans ce monde, en accord avec ces paroles du roi David : "Hachem m'avait durement éprouvé, mais il ne m'a pas livré à la mort" (Téhilim 118,18).
Ainsi, malgré ses difficiles épreuves, Iyov est demeuré en vie et a continué à recevoir le plus beau cadeau de la Création : la vie, et sa prise de conscience du bonheur de demeurer vivant devrait prendre le dessus sur ses malheurs, selon le verset : "De quoi un homme en vie se plaindrait-il?" (Eikha 3,39).
En réalité, la sanction de Bil'am est la plus sévère et la plus amère, malgré les apparences, car la vie lui a été retirée.

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-> Le commentateur Anaf Yossef est d'avis que Iyov était d'accord avec le projet cruel de Pharaon et Bil'am contre Israël, mais il a préféré dans un premier temps garder le silence avant que Yitro ne se prononce, avec cette intention malveillante :
- si au cours du conseil Yitro agréait le projet de faire périr par l'eau les premiers-nés, alors Iyov s'abstiendrait de cautionner ce décret.
En effet, s'il le soutenait aussi, ce projet funeste serait annulé, car toute condamnation à mort prise par tous les membres du jury, à l'unanimité, acquitte le prévenu (voir guémara Sanhédrin 17a).
- Et si Yitro désapprouvait le projet de Bil'am (c'était le cas ici, puisqu'il a quitté le conseil), alors Iyov appuierait alors ce projet, afin que la majorité l'emporte.
=> Par ce silence mal intentionné, Iyov méritait ces souffrances.

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=> Comment Yitro a-t-il été récompensé, mesure pour mesure, pour avoir quitté courageusement la salle de conseil?

-> En prenant courageusement la fuite, par désapprobation du décret envisagé, Yitro a renoncé à sa position prestigieuse.
Pour avoir abandonné la cour royale de Pharaon et son titre de conseiller du roi, ses descendants siégeront dans la Cour d'Hachem, c'est-à-dire dans le Grand Sanhédrin, où ils conseilleront les Bné Israël.
[Torat haKineot]

-> "Tous Tes sages sont dans Ta main, et eux s'étaient couchés à Tes pieds" (Dévarim 33,3)
Selon Rav Yossef (guémara Baba Batra 8a), ce verset fait allusion aux disciples des sages (talmidé 'hakhamim) qui "meurtrissent" leurs pieds en se déplaçant de ville en ville et de pays en pays pour étudier la Torah.
De même, Yitro qui a "meurtri" ses pieds pour fuir à Midian, un lieu très éloigné du palais de Pharaon, afin de s'opposer au décret projeté par Pharaon, ses descendants auront le mérite, mesure pour mesure, de "meurtrir" leurs pieds pour aller étudier la Torah jusqu'à devenir des sages éminents du Grand Sanhédrin.
[Iyoun Yaakov]

"Mais plus ils (les égyptiens) l'accablèrent (de labeurs), plus sa population [juive] se multipliera et plus elle augmentera" (Chémot 1,12)

La Torah aurait dû écrire : "Plus sa population se multipliait et plus elle augmentait".
Rech Lakich explique ainsi (l'utilisation du futur) : L'esprit Saint (roua'h hakodech) annonce ici que la population des Bné Israël se multipliera et s'accroîtra (dans le futur) ...

"Les égyptiens firent travailler les Bné Israël avec dureté (béparékh)" (Chémot 1,13).
Selon rabbi El'azar, ils les asservirent avec des paroles douces (bépé rakh), mais selon rabbi Chmouël bar Na'hmani, ils les asservirent avec cruauté (béparékh).

"Ils leur rendirent la vie amère par de rudes travaux sur l'argile et la brique et par tous les ouvrages des champs" (Chémot 1,14) : selon Rava, ils les firent commencer par des travaux sur l'argile et la brique, puis ils leur donnèrent à effectuer tous les travaux des champs.
Le verset (1,14) poursuit : "Toutes ces corvées, ils les imposèrent avec cruauté (béparékh) : selon rabbi Chmouël bar Na'hmani, au nom de rabbi Yo'hanan, ils donnaient le travail réservé a des hommes à des femmes et inversement.
[guémara Sota 11a-b]

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-> Hachem avait promis à Avraham cette bénédiction permanente : "Je ferai de toi une grande nation, Je te bénirai et Je grandirai ton nom" (Béréchit 12,2).
En effet, en descendant en Egypte, tous les 70 membres de la famille de Yaakov étaient importants ('hachouvim) et respectés par les égyptiens et leur roi. Mais lorsqu'ils furent asservis durement, ils perdirent leur importance et la considération aux yeux des égyptiens.
Hachem décida alors de les grandir en nombre, afin de respecter la promesse faite à Avraham.
['Hidouché haRim]

-> Pourquoi au début du verset Chémot (1,12) cité, est-il écrit : "plus ils l'accableront" au futur, alors que le passé : "plus ils l'accablèrent" conviendrait mieux?
C'est pour nous enseigner que chaque fois que nos ennemis nous opprimeront, qu'Hachem nous en préserve, la conséquence sera toujours positive : nous en sortirons renforcés et plus riches au sens propre et au sens figuré.
[Ora'h 'Haïm]

-> Les égyptiens nous ont asservis par des corvées pénibles, afin de nous affaiblir physiquement. Mais ils ignoraient que la Providence Divine bénissait Son peuple proportionnellement à son affaiblissement physique.
En effet, toute diminution de nos forces physiques entraîne un surplus de sainteté qui s'attache à notre âme, et cela devient une source de bénédiction : c'est pourquoi l'esprit Saint (roua'h hakodech) a publié : "ainsi il s'accroîtra".
Cette destinée surnaturelle a toujours caractérisé les misères et la grandeur d'Israël par rapport aux autres nations.
[Maharal - Guévourot Hachem - 12]

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=> Comment concilier les 2 avis sur la servitude : bépé rakh (paroles douces) et béparékh (avec cruauté)?

-> Selon le midrach Yalkout Chimoni, après que Pharaon ait dit : "Allons, ingénions-nous contre lui", il réunit l'Assemblée d'Israël et leur demanda : "Faites-moi une faveur : aidez-moi à confectionner des briques de construction".
Lorsqu'ils virent Pharaon se mettre lui-même à l'œuvre, les Bné Israël s'empressèrent de l'aider et ils fabriquèrent le maximum de briques, car ils étaient robustes.
Le soir, Pharaon préposa des chefs de corvée pour compter le nombre de briques confectionnées par chacun des Bné Israël. Pharaon imposa alors à chacun, à partir de ce jour, de confectionner le même nombre de briques quotidiennement.
Ainsi, Pharaon a commencé par des paroles douces (bépé rakh) pour un travail consenti et a terminé par une servitude dure (béparékh).
[Maharcha]

[Rabbi Chimon bar Yo'haï a expliqué à son fils rabbi El'azar que la dureté des travaux imposés aux Bné Israël, dans une terre étrangère, par un peuple cruel qui les méprisaient, a eu pour conséquence un repli du peuple d'Israël sur lui-même, qui a formé un bloc resté fidèle à son alliance avec Hachem.
C'est par cette cohésion que ce peuple a survécu, grâce à ces épreuves difficiles en Egypte qui le soudaient.]

-> Selon le midrach Aggada, les égyptiens ont proposé avec bépé rakh (paroles douces) aux Bné Israël de confectionner des briques et de les rétribuer à raison d'une pièce d'or pour chaque brique;
Avec beaucoup de zèle, ils ont donc fabriqué les uns 100 briques, les autres 200 briques en une journée.
Aussitôt, les égyptiens ont décrété une obligation de fournir dorénavant chacun le même quota de briques, gratuitement, passant ainsi à une servitude cruelle (béparékh).

-> L'utilisation de béparékh (v.13), est pour nous enseigner que même les paroles douces, dans un but d'atteindre une servitude cruelle, sont considérées comme des paroles dure (béparé'h).
[Maharal]

-> Le principe de at bach, consiste à associer à la première lettre de l'alphabet : aléph la dernière tav, et à la seconde lettre bét l'avant dernière chin, ...
Ainsi, par ce principe, aux lettres : פרך (parékh), on associe les lettres respectives qui forment le mot : וגל de guématria 39, qui représente les 39 travaux imposés avec dureté.
C'est pourquoi, lorsque les Bné Israël furent libérés de cette servitude, dès la sortie d'Egypte, ils reçurent l'ordre de ne pas effectuer ces 39 travaux durant chaque Shabbath.
[Tossefot - guémara Pessa'him 117b]

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-> "Les égyptiens firent travailler les Bné Israël avec dureté" (Chémot 1,13)

Le rav Elimélé'h Biderman rapporte nos commentateurs qui enseignent :
En d'autres termes, plus les juifs se démenèrent afin de faire des briques, plus ils furent ensuite forcés d'en produire pendant leur asservissement sans recevoir le moindre supplément de salaire.

On apprend d'ici l'ampleur de la récompense réservée à ceux qui placent leur confiance en D. et le châtiment de ceux qui se conduisent à l'inverse.
Car celui qui eut confiance que de toute façon sa subsistance était fixée dans le Ciel et qui par conséquent ne se fatigua pas outre-mesure, fut récompensé pendant toutes les années de l'exil.
Car alors on ne lui imposa pas de s'efforcer plus que le strict nécessaire dans la fabrication des briques et il ne dut fournir que la même quantité qu'il avait fournie le premier jour.

Le rav Biderman cite l'exemple d'Amram, le père de Moché.
Lorsque Pharaon a offert un pièce d'argent pour chaque brique, il n'en a pas été surexcité à l'idée d'en devenir ultrariche.
Il s'est rappelé que la parnassa vient d'Hachem, et ainsi il n'a fait qu'une seule pierre.
Ayant un pièce d'argent, cela était suffisant pour sa hichtadlout du jour, et il a passé le restant de la journée à servir Hachem.
Lorsqu'ensuite Pharaon les a obligés à répéter leur production du 1er jour, tout ce qu'Amram avait besoin de produire était une seule brique.
Ainsi, tout au long de l'esclavage, il a pu bénéficier de cette vision : ne faire que la hichtadlout minimale nécessaire.

[nous avons également ces 2 chemins aujourd'hui : est-ce que nous allons nous investir outre mesure dans notre travail, se disant au mieux c'est bon j'étudierai plus tard, ou bien préférons-nous ne pas s'y consacrer plus que nécessaire afin de pouvoir davantage être disponible pour faire la Volonté d'Hachem?
D'une certaine façon cela revient à se demander : est-ce que je préfère davantage investir dans mon monde actuel (acquérir un maximum de biens, avoir un maximum de "briques" sur son compte bancaire!) qui est éphémère, ou bien je souhaite investir autant que possible dans mon monde à venir qui est éternel? Est-ce que mon boss qui dirige ma vie : c'est Pharaon (représentant de la matérialité) ou bien c'est Hachem?]

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+ Au final, le boss c'est toujours Hachem :

-> A l'origine, l'Egypte (Mitsrayim) était le fils de 'Ham qui était lui-même le fils de Noa'h, comme il est écrit : "Et les fils de 'Ham : Kouch, Mitsrayim, Poute et Canaan" (Noa'h 10,7).
Ainsi, nous voyons que la terre d'Egypte fut appelée au nom de Noa'h, comme il est écrit : "Il avait accompli de grandes choses en Egypte, et des prodiges dans le pays de 'Ham (niflaot béérets 'Ham)" (Téhilim 106, 21-22).

Quant au peuple d'Israël, il descend d'Avraham, d'Its'hak et de Yaakov.
Eux-mêmes font partie de la descendance de Chem, fils de Noa'h.
Or, les enfants de 'Ham furent maudits par Noa'h après le déluge, comme il est écrit : "Noa'h se réveilla ... il dit : maudit soit Canaan ; l'esclave des esclaves il sera pour ses frères. Béni soit Hachem le D. de Chem et que Canaan soit leur esclave" (Noa'h 9,25-26).

Le Békhor Chor explique qu'en réalité la malédiction de Noa'h eut une emprise sur toute la descendance de 'Ham (Kouch, Mitsrayim, Poute, Canaan, ...).
Canaan fut maudit plus que les autres. Car il a été dit à son sujet : "Maudit soit Canaan ; l'esclave des esclaves il sera pour ses frères".

Nous comprenons à présent pourquoi Pharaon eut si peur d'Israël ("Agissons avec sagesse contre lui" (ava nit'hakéma lo - Chémot 1,10). En effet, ce peuple descendait directement des enfants de Chem, alors que l'Egypte (Mitsrayim) était un peuple qui descendait de 'Ham, dont les membres étaient maudits et voués à être les esclaves de Chem.
Pharaon pensa que le moment était arrivé pour le peuple juif, descendant de Chem, de dominer les égyptiens et de les asservir comme l'avait mentionné Noa'h dans sa malédiction : "l'esclave des esclaves il sera pour ses frères".

Suite à cela, les égyptiens réagirent, comme il est écrit : "Les égyptiens asservirent les Bné Israël avec dureté. Ils leur rendirent la vie amère" (Chémot 1,13-14).
Pharaon pensait réussir à prendre le dessus sur la malédiction de Noa'h par ses forces d'impureté. Il voulait inverser la tendance pour que les descendants de Chem deviennent dès lors les esclaves des descendants de 'Ham.
En réalité, les égyptiens, qui étaient réellement esclaves, nettoyèrent et purifièrent les Bné Israël qui avaient pour mission de servir Hachem.
Et si Pharaon avait pris connaissance de cela, il n'aurait jamais asservi le peuple d'Israël au travail de la paille et de la brique, mais il leur aurait accordé tout ce qu'il y avait de mieux en Egypte. Et en faisant cela, il les aurait alors enfoncés dans l'impureté de l'Egypte jusqu'à ce qu'ils ne veuillent plus ou ne puissent plus en sortir.

=> Ainsi sont les voies du Créateur (Hachem) qui organise le monde et accomplit le verset : "Celui qui réside dans les cieux en rit, Hachem se raille d'eux" (Téhilim 2,4).
Alors que Pharaon pensait être le maître et les Bné Israël ses esclaves, il était le réel esclave de la Providence Divine qui l'a utilisé pour asservir les enfants d'Israël. Tout cela dans le but de les nettoyer de leurs défauts, puis de faire venir les âmes épurées à Sa rencontre et à la rencontre de la Torah.

[d'après le rav Pin'has Friedman (Shvilei Pin'has)]

"Un homme de la famille de Lévi (Amram) alla et épousa une fille de Lévi" (Chémot 2,1).

Où alla-t-il?
Il alla selon le conseil de sa fille (Myriam), d'après rav Yéhouda ben Zévina.
En effet, Amram était l'homme le plus important (gadol hador) de sa génération ; dès que Pharaon le racha décréta que tout garçon qui naîtrait serait jeté dans le fleuve, Amram se dit : "Nos efforts (pour engendrer) sont vains (inutiles)".
Il divorça alors de sa femme ; tout le peuple suivi son exemple et divorça.
Sa fille (Myriam) lui dit alors : "Père, ta décision est plus cruelle que celle de Pharaon : ce dernier n'a décrété que la mort des garçons, tandis que toi, tu as décrété celle des garçons et des filles! De plus Pharaon n'a décrété (la mort des garçons) que dans ce monde-ci tandis que toi, tu as décrété dans ce monde-ci et dans le monde à venir. Enfin, il y a un doute si le décret du racha Pharaon se réalise ou non, tandis que pour toi, qui es "tsadik", il est certain que tes décrets se réaliseront selon le verset : "Ce que tu décrètes se réalisera pour toi" (Iyov 22,28).

Amram repris alors sa femme et tout le peuple en fit de même.
Le texte dit : "Il épousa" ; il fallait écrire : "Il reprit son épouse".
Rabbi Yéhouda bar Zévina répond : C'est pour t'apprendre qu'il organisa une cérémonie nuptiale (avec le même faste qu'un 1er mariage) ; il la conduisit sous un dais nuptial (luxueux), Aharon et Myriam dansèrent devant eux et des Anges récitaient : "Une mère heureuse au milieu de ses enfants" (Téhilim 113,9).
Le texte dit : "une fille de Lévi (Chémot 2,1) : Yo'hévét pouvait-elle être appelée "une fille", alors qu'elle avait 130 ans?
Selon rav Yéhouda bar Zévina, c'est pour t'enseigner qu'elle retrouva les signes d'une première jeunesse.
[guémara Sota 12a]

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-> Le Zohar rapporte que l'ange Gavriel a dansé à leur mariage.

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-> D'après Tossefot (guémara Baba Batra 60b), il semble que parmi tous ceux qui avaient imité l'attitude d'Amram, en se séparant de leurs épouses, n'étaient autorisés à le faire que ceux qui comme Amram avaient déjà accompli la mitsva de pirya vériv'ya, en ayant engendré au moins un garçon et une fille (il avait déjà : Aharaon et Myriam).

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-> Le 'Hatam Sofer (rapporté par son élève : Téchouvot Maharam Shick - Ora'h 'Haïm 70) enseigne :
Hachem a conclu avec nos ancêtres une alliance par laquelle Il préserverait leur postérité et lui donnerait la terre d'Israël en héritage.
Dès lors que les juifs décrétaient sur eux-mêmes de ne plus procréer, une génération finirait, sans qu'une nouvelle ne lui succède. Le danger surgirait alors que la postérité de notre père Avraham s'éteigne.
Dès lors, Hachem aurait été contraint de délivrer Israël immédiatement et de ramener les enfants à leurs frontières. Cependant, la chose n'est vraie que si la communauté entière se conforme au décret.

La guémara (Baba Batra 60b) dit : "Du jour où le Temple a été détruit ... et du jour où a suffi le royaume qui promulgue de sévères décrets à notre encontre ... nous aurions dû légitimement décréter que personne ne se marie ou n'engendre. Ainsi la semence de notre père Avraham se serait-elle éteinte d'elle-même.
Cependant, on laissa les juifs [se marier et procréer du fait qu'ils n'auraient de toute façon pas pu s'en abstenir], il était préférable qu'ils commettent cette transgression de façon involontaire que de façon intentionnelle [si l'interdiction leur avait été signifiée]".
Si la semence d'Avraham se serait éteinte, alors Hachem aurait été obligé de nous délivrer immédiatement [avant qu'elle ne disparaisse]. Cependant, parce que les réchaïm et les simples d'esprit ne nous auraient pas entendus alors la semence d'Israël aurait été préservée par eux, tandis que les tsadikim auraient disparu.

Telle est l'intention d'Amram. Il divorça de sa femme pour que chacun en fasse autant avec la sienne. Ainsi, la semence de notre père Avraham aurait été appelée à disparaître et la libération se serait immédiatement ensuivie.
Cependant, seuls les tsadikim divorcèrent de leurs femmes tandis que les masses gardèrent les leurs.
Ainsi, Myriam s'est-elle lamentée : "Ton décret est plus sévère que celui de Pharaon".
Dans la mesure où seuls les tsadikim (justes) agissent comme tu le demandes, leur semence seule périra, tandis que les réchaïm (mauvais) se multiplieront.
Ainsi, le mal est double.

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-> A propos du verset de Bamidbar (Béaaloté'ha 11,26) qui relate la prophétie de Eldad et Médad dans le camp d'Israël, le Targoum Yonathan dit que Eldad et Médad étaient les enfants de Yo'hévét, donc les demi-frères de Moché, car après qu'Amram ait divorcé de Yo'hévét, cette dernière épousa Elitsafane fils d'Ouziel, et petit-fils de Kéhat, donc neveu de d'Amram.
Yo'hévét et Elitsafane ont donné naissance à Eldad et Médad.

=> Comment alors Amran a-t-il pu réépouser Yo'hévét, alors qu'il est interdit à tout homme de réépouser sa divorcée si elle se remarie avec un autre homme?

-> "En récompense de ce qu'Avraham a écouté Ma voix et gardé Mon observance" (Béréchit 26,5)
Selon le Ramban, nos Patriarches n'ont observé les Commandements de la Torah qu'en terre d'Israël, et non pas à l'extérieur, car la Torah n'avait pas encore été promulguée ...
Ainsi Amram s'est permis de réépouser Yo'hévét, bien qu'elle se soit remariée avec Elitsafane après son divorce, car ils vivaient en Egypte ; mais s'ils avaient vécu en terre d'Israël, il ne l'aurait pas réépousée.
De même, Yaakov a épousé 2 sœurs (interdit de la Torah) car il était chez Lavan, en dehors d'Israël et avant le don de la Torah.
[Chout méBéer]

-> Le Maharal (Gour Arié - Vayichla'h) enseigne :
Il y a lieu de distinguer, avant le don de la Torah, entre les commandements positifs (mitsvot assé) que nos Patriarches respectaient et les commandements négatifs (mitsvot lo taassé) que nos Patriarches n'observaient pas encore.
C'est pourquoi, Yaakov n'a pas tenu compte de l'interdit d'épouser 2 sœurs et Amram n'a tenu compte de l'interdit d'épouser sa tante ni de l'interdit de réépouser sa femme divorcée et déjà remariée.

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=> Quelle était l'intention de Myriam avec son argument à son père : Pharaon n'a décrété (la mort des garçons) que dans ce monde-ci tandis que toi, tu as décrété dans ce monde-ci et dans le monde à venir ?

-> Amram pensait que si les garçons étaient jetés dans le fleuve, les filles demeurées en vie ne trouveraient plus à se marier.
Myriam dit alors à son père qu'il se trompait, car un homme juif peut épouser plusieurs femmes, et même si les filles d'Israël devaient épouser des égyptiens, les enfants seraient juifs.
Ainsi, le peuple d'Israël pourra se maintenir dans le monde.
[Ets Yossef]

-> La durée de servitude, prévue pour 400 années, aurait pu être écourtée si la population des Bné Israël s'était fortement accrue en Egypte, car les corvées prévues auraient été effectuées par plus de personnes.
Lorsque Pharaon décréta l'élimination des garçons nouveau-nés, la durée de servitude serait revenue à 400 années.
Myriam vient dire alors à son père : en répudiant vos épouses pour ne plus avoir d'enfants, il n'y aura plus de servitude et la durée se prolongera donc au-delà des 400 années.
[Divré Chaoul]

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=> Quelle était l'intention de Myriam avec son argument relatif au monde à venir?

-> Certes avec le décret de Pharaon, les garçons mourront dans ce monde après leur naissance, mais ils vivront dans le monde futur.
Par contre, avec la décision d'Amram les enfants ne naissent pas dans ce monde, et ils ne pourront donc pas entrer dans le monde à venir.
[Rachi]

-> Pour le Iyoun Yaakov, le message adressé par Myriam à son père ne concernait pas les enfants, contrairement à l'opinion de Rachi, mais concernait les parents.
En effet, les parents qui n'auront pas de fils dans ce monde-ci, à cause du décret de Pharaon, ne perdront pas leur monde à venir du fait qu'ils n'ont pas négligé la mitsva de procréation
Cependant, la décision d'Amram, qui a encouragé les autres parents à divorcer, donc à ne plus procréer, va faire perdre à tous ces parents leur monde à venir, à l'exemple de 'Hizkiyahou à qui le prophète Yéchayahou avait dit : Tu vas mourir dans ce monde-ci et tu ne vivras pas dans ce monde à venir pour t'être empêché d'accomplir le commandement de pirya vériv'ya.

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Selon la guémara (Moéd Katan 8b), lorsqu'un homme se remarie avec son ancienne femme dont il avait divorcé, la cérémonie nuptiale devrait être sobre, sans excès de joie.
=> Pourquoi Amram a-t-il réépousé Yo'hévét avec tant de faste et une grande joie?

-> Le faste de ce mariage avait un double but : publier cette nouvelle union et aussi encourager tous les juifs qui s'étaient séparés de leur femme à reprendre eux aussi leurs épouses.
[Tossefot Yécharim - guémara Baba Batra 120a]

-> Yo'hévét était déjà enceinte de 3 mois lors de ce remariage ; cependant Amram et Yo'hévét l'ont célébré avec une joie excessive afin que Moché, le sauveur d'Israël selon la prophétie de Myriam à laquelle croyaient ses parents, ne naisse pas d'une maman divorcée.
Cette grande joie anticipait sur la futur sortie des Bné Israël par Moché.
[Maharcha]

-> Ce mariage fastueux, alors que Yo'hévét était déjà enceinte de 3 mois de son fils Moché, semble en contradiction avec le fait qu'Elitsafane s'était marié avec Yo'hévét après le divorce d'Amram, et avait eu 2 enfants Eldad et Médad.
En fait, selon le commentateur Adéret Eliyahou, après que Yo'hévét quitta Elitsafane, elle se remaria avec Amram avec une cérémonie très discrète, afin que les égyptiens ne le sachent pas et ne les surveillent pas sur une éventuelle naissance.
Mais Amram a constaté que tous les autres n'avaient pas repris leur repris leurs épouses, car ils ignoraient le remariage discret d'Amram avec Yo'hévét.
C'est pourquoi, après avoir conçu Moché, après leur remariage, Amram et Yo'hévét firent une nouvelle cérémonie, 3 mois après leur remariage, mais cette fois avec faste et publicité, afin que chacun des Bné Israël reprenne sa divorcée.

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=> "Elle (Yo'hévét) retrouva les signes d'une première jeunesse".
Quels signes et pourquoi?

-> Avant son remariage avec Amram, Yo'hévét retrouva les signes d'une nouvelle jeunesse, c'est-à-dire le tribut périodique des femmes, ainsi qu'un beau visage et la disparition de ses rides.
[Rachi]

-> Pourquoi a-t-elle bénéficié de ces miracles, alors qu'elle était déjà enceinte depuis 3 mois?
Le Iyoun Yaakov explique :
- C'est parce que sans ces signes de jeunesse, les gens auraient pu penser que Amram réépouse Yo'hévét à un moment où en raison de son âge avancé, il ne peut plus enfanter et il n'a donc plus à craindre que ses enfants soient jetés dans le fleuve dès leur naissance ; les gens qui pouvaient encore engendrer n'auraient donc pas repris leur épouses.
C'est pourquoi Yo'hévét a rajeuni miraculeusement afin que tous les gens imitent l'attitude d'Amram et réépousent leurs femmes.

- De plus, ce rajeunissement a eu lieu afin que les égyptiens le voient et commencent leur compte de 9 mois depuis ce remariage avec une femme "rajeunie" apte à enfanter, afin que Amram et Yo'hévét puissent cacher Moché, conçu déjà depuis 3 mois, dans leur maison durant 3 mois, avant que les égyptiens viennent le prendre pour le jeter dans le Nil.

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+ Apprendre à accepter un reproche :

-> Rabbi Nissim Yaguen (Nétivé Or) enseigne :
Je me suis toujours demandé, par quel mérite Amram et Yo'hévet ont eu le mérite de mettre au monde un fils comme notre maître Moché?

Pour comprendre, il faut aller au fond de la pensée d'Amram. Il était le grand sage de la génération, le chef du tribunal rabbinique. Il ne s'agissait pas d'un homme jeune, mais d'un individu de 130 ans.
Il avait étudié toute sa vie la Torah, et tous l'appréciaient énormément. Il avait une fille de 3 ans, elle était intelligente, mais très jeune.

Amram vit que chaque garçon qui naissait était jeté dans le Nil, devenant ainsi de la nourriture pour les poissons.
D'autres en comblaient les trous des pierres manquantes dans les constructions de Ramsès.
Il s'est demandé : "Dans ce cas, pourquoi mettre des enfants au monde?"
Amram s'est levé et a divorcé de son épouse, il a servi d'exemple à tout le peuple juif.
Chacun devait faire comme lui afin d'éviter les assassinats d'enfants ...

Amram le tsadik [de la génération] n'a pas fait ce que de nombreux autres auraient fait, il ne l'a pas grondée : "Retourne à la maternelle jouer!"
Il ne lui a pas dit de ne pas se mêler des affaires des grands. Il ne lui a pas non plus demandé si elle avait déjà étudié la Torah ... Amram ne s'est pas du tout mis en colère.
Il lui a seulement demandé : "Pourquoi dis-tu cela?"
Myriam lui a répondu avec bon sens : "Du fait du décret de Pharaon, il n'y aura pas de garçons, mais il y aura des filles. Mais à cause de ton décret, il n'y aura ni filles ni garçons".

Amram a été convaincu sur le champ, sans penser à son honneur personnel, il demanda à sa fille de se dépêcher de rentrer à la maison, pour demander à sa mère de se remarier. Eh oui, elle les réconcilia!
Myriam voulait et a fait la paix entre eux, elle remit ensemble son père et sa mère, et elle dansait devant eux. Après une année, un fils leur est né, notre maître Moché.

=> Par quel mérite ont-ils mérité une telle lumière?
Par le mérite du courage de Amram, par la grandeur d'avoir accepté la vérité d'une petite fille, est né [Moché] le réceptacle de la vérité, de la Torah de vérité.
On constate la force d'accepter un reproche.

Souvent, nous sommes récalcitrants aux reproches, on ne veut pas les accepter. La nature de l'homme fait qu'il n'aime pas qu'on lui dise quoi faire, même si on a raison. Un homme n'est pas prêt à entendre une remarque de sa fille ou de son fils.
Celui qui est prévoyant comprend que cela ne fait pas de différence de qui provient la remarque. Il faut prendre en compte l'essence de ce qui a été dit.