Pâtisserie spirituelle depuis 5771 - b'h
 

Ani lédodi, védodi li

+ Ani lédodi, védodi li :

-> Nos Sages (Aboudraham - Téfilot Roch Hachana) nous enseignent que le mot par Elloul renvoie à "ani lédodi védodi li" (Chir haChirim 6,3), qui signifie "Je suis à mon Bien-aimé et mon Bien-aimé est à moi", décrivant notre relation avec Hachem.
Cependant, le rabbin Ephraïm Wachsman s'interroge : Ne semble-t-il pas y avoir un mot manquant ici Que suis-je pour mon bien-aimé? Ne devrait-on pas dire : "Je me consacre à mon Bien-aimé"? "Je suis dévoué à mon Bien-aimé", ou "Je suis le serviteur de mon Bien-aimé", ou "J'aime mon Bien-aimé"?

Le rav explique que "ani lédodi" signifie : Tout ce que je suis, mon existence entière, est pour mon Bien-aimé. Il ne peut y avoir de mot entre 'ani' (je), et 'dodi' (à mon Bien-aimé), car cela impliquerait que j'ai ma propre existence et que je donne quelque chose de moi à Hachem.
Je suis tout entier à Hachem : mes talents, mes capacités, tout.

C'est ainsi que nous sommes censés vivre notre vie, en utilisant toutes nos forces au service d'Hachem. Comment y parvenir?
Le verset continue : "védodi li" (mon Bien-Aimé est à moi), ce qui signifie qu'Hachem, avec tout ce qu'Il est, englobant les milliards de galaxies et les mondes supérieurs (et nous ne connaissons qu'une infime partie de Sa grandeur!), tout de Lui est "li", à moi, sans aucune séparation.
Hachem fait tout pour nous ; même ce que nous Lui donnons, le "ani lédodi" est aussi "dodi li".
Cela nous est rendu en retour. Tous nos accomplissements spirituels et notre service pour Lui nous profitent. Hachem veut seulement que nous soyons ensemble avec Lui pour toute l'éternité.

<--->

-> Le mois d'Elloul est illustré par le verset : "ani lédodi, védodi li" (Je suis à mon Bien-aimé et mon Bien-aimé est à moi).
Ce verset illustre le grand amour entre nous et Hachem : Il est notre Bien-aimé et Il nous aime au-delà de toute imagination.
Et si nous sommes "lédodi" = si nous revenons à Lui et disons : "Nous voulons être proches de Toi, Hachem, nous voulons Te servir du mieux que nous pouvons", alors "dodi li" = Hachem nous élèvera et nous rapprochera de Lui.
Si nous voulons que notre vie tourne autour de Toi (que le 'ani' soit directement lié au 'dodi'), alors si nous avons cette volonté de : "Hachem, je veux être près de Toi. Je T'aime ...", alors nous recevrons l'aide Divine dont nous avons besoin et nous en ferons l'expérience de "dodi li" Hachem nous élèvera pour être tout proche, à côté de Lui.
[rav David Ashear ]

Le repentir et la croyance en une recréation permanente du monde

+++ Le repentir et la croyance en une recréation permanente du monde :

"Restaure nous à Toi, Hachem, pour que nous soyons restaurés. Renouvelle nos jours comme autrefois" (achivénou Hachem élé'ha vénachouva, 'hadech yaménou kékédem - Eikha 5,21)

-> Nous devons comprendre la signification de l'expression "autrefois" (kékédem).
Cela sera clarifié par ce que dit le midrach (Béréchit rabba 21,6) sur le verset : "Maintenant, Israël, qu'est-ce que Hachem, ton D., te demande, si ce n'est de Le craindre" (Ekev 10,12).
Le midrach dit : "le terme 'maintenant' (véata) désigne toujours le repentir (téchouva)."

La signification de ce midrach est la suivante :
Chaque juif doit croire avec une foi inébranlable qu'il reçoit, à chaque instant, la vitalité de D.
Comme nos Sages (midrach Béréchit rabba 14,91) l'ont expliqué à propos du verset "Que chaque âme loue Dieu" (Téhilim 150,6) : "À chaque respiration, une personne doit louer D.".

Il incombe à une personne de louer Hachem à chaque respiration parce qu'à chaque instant, l'énergie vitale d'une personne cherche à s'éloigner d'elle, mais Hachem renouvelle la vitalité à chaque instant.
C'est pour cette raison que le repentir (téchouva) est efficace. Lorsqu'une personne se repent, elle croit qu'elle est une nouvelle création, qu'elle vient de recevoir une nouvelle vitalité de la part de D. [voir Miché Torah - Téchouva 2,4]
C'est pourquoi Hachem, dans son abondante compassion, ne fait pas mention des anciennes fautes d'une personne.
Cependant, si, à D. ne plaise, une personne ne croit pas en ce concept de renouvellement continu, qu'à chaque instant elle est comme une nouvelle création, le repentir n'est d'aucune utilité.

Telle est donc l'interprétation du midrach qui dit : "Le terme 'maintenant' dénote toujours le repentir".
Puisqu'une personne croit qu'elle est actuellement un être tout nouveau, le repentir est efficace.

Telle est donc la signification profonde du verset "Restaure-nous à Toi, Hachem, pour que nous soyons restaurés".
Comment pouvons-nous nous assurer que notre repentir sera accepté?
Le verset explique : "Renouvelle nos jours comme autrefois" ('hadech yaménou kékédem). En d'autres termes, nous déclarons à Hachem que nous reconnaissons qu'Il nous renouvelle chaque jour, que nous sommes des êtres nouvellement nés ('hadech = 'hadach = nouveau).

Sur cette base, nous pouvons expliquer le passage de la guémara (Sanhédrin 98a) : "Rabbi Yéhochoua ben Lévi a demandé au machia'h : "Quand le maître [c'est-à-dire le machia'h] viendra-t-il? Le machia'h répondit : 'Aujourd'hui!'
Eliyahu HaNavi explique que cela signifie : "Aujourd'hui, si vous écoutez Sa voix [c'est-à-dire celle de D.]".
[Cela signifie : ] Lorsque le peuple juif atteindra ce niveau spirituel, percevant qu'il devient chaque jour un être nouveau, alors le machia'h viendra.

[rabbi Lévi Its'hak de Berditchev - Kédouchat Lévi - Eikha 5,21 ]

<--->

=> En reconnaissant qu'Hachem nous procure constamment une vitalité renouvelée, il est possible pour un pénitent (baal téchouva) d'affirmer avec confiance : "Je ne suis pas la même personne que celle qui a fauté ; je suis une personne toute nouvelle" (voir Rambam - Michné Torah - Téchouva 2,4)

Lorsqu'une personne pleure la destruction du Temple, ses larmes ont [toujours] un véritable impact au Ciel.
[rabbi Lévi Its'hak de Berditchev - Kédouchat Lévi - Eikha 1,2 ]

"Et elle pleurera son père et sa mère pendant un mois de jours" (Ki Tétsé 21,13).

Ce "mois" se réfère au mois d'Elloul.
Le verset ne dit rien sur les fautes, car ce n'est pas pour cela que nous pleurons. Au contraire, nous pleurons parce que Hachem nous manque et que nous voulons être proches de Lui ; nous pleurons parce que nous aspirons à la sainteté et à la Chékhina.
C'est ainsi que nous nous préparons au Yom haDin, en pleurant parce que nous voulons être proches d'Hachem, et non pas en pleurant parce que nous sommes tristes.
[rabbi Nathan Watchfogel]

Notre émouna reconstruira le Temple

+++ Notre émouna reconstruira le Temple :

"Jérusalem ne fut détruite que parce que les gens de foi disparurent d’elle" [guémara Shabbath 119b]

=> Ainsi le manque de foi fut la raison qui provoqua la destruction du Temple et de Jérusalem.
Dès lors, on en déduit que le renforcement de notre foi (émouna) permet de hâter la reconstruction du Temple dans toute sa splendeur et d'amener la guéoula, comme nos Sages (midrach Tan'houma Béchala'h 10) l’enseignent : "Et les exilés ne seront amenés à être délivrés à l’avenir que comme récompense de la foi".

<--->

-> La guémara (Yoma 9b) enseigne : "Le premier Temple, pourquoi fut-il détruit? A cause des 3 choses qui y régnaient : l’idolâtrie, la débauche et le meurtre … Ils étaient fauteurs, mais ils plaçaient leur confiance en Hachem.
Mais le deuxième Temple, où ils étudiaient la Torah, pratiquaient les mitsvot et la bienfaisance, pourquoi fut-il détruit? Parce qu’il y régnait la haine gratuite."
[il est enseigné également au même endroit : "les premiers, leur faute était dévoilée, dès lors, la fin (de leur exil) leur fut dévoilée ; les derniers dont la faute n’était pas dévoilée, la fin (de l’exil) ne leur fut pas dévoilée"].

-> Selon la guémara (Yérouchalmi Yoma 1,3) : "Nous avons trouvé que le Temple ne fut détruit une première fois que parce qu’ils étaient idolâtres, qu’ils se débauchaient et commettaient le meurtre ; mais dans le deuxième, nous savons qu’ils étudiaient avec effort la Torah, et qu’ils veillaient à accomplir les mitsvot et à prélever la dîme, et qu’ils possédaient toutes les bonnes habitudes.
Cependant, ils aimaient l’argent et se vouaient les uns aux autres une haine gratuite. Or, la haine gratuite est aussi grave que l’idolâtrie, la débauche et le meurtre."

Le Gaon de Vilna explique que la racine de la haine gratuite réside dans un manque d’émouna.

-> Le rav Elimélé'h Biderman explique :
qui hait son prochain gratuitement? En général, il le hait parce qu’il lui a causé un préjudice ou l’a humilié, volé ou pour beaucoup d’autres raisons possibles. Pourquoi, dès lors, cette haine est-elle considérée comme "gratuite" puisqu’elle a une cause qui a entraîné que son cœur soit rempli de haine?

On est forcé de dire que s’il avait eu la émouna que ce n’est pas son prochain qui lui a causé du tort, mais Hachem (dans les moindres détails), un homme n’étant pas en mesure de provoquer la moindre perte à son prochain même d’un demi centime ou la moindre peine/douleur si cela n’a pas été décrété dans le Ciel auparavant, sa haine aurait disparu sur le champ.
Il en résulte que s’il en éprouve, c’est le signe indéniable qu’il a perdu de sa émouna, et donc que sa haine est gratuite puisqu’en vérité, ce n’est pas son prochain qui est coupable.

C’est pourquoi, à l’époque du 1er Temple, ils étaient certes très fauteurs et leurs actes étaient très mauvais, puisqu’ils transgressaient des interdits pour lesquels un homme est tenu de donner sa vie plutôt que de les enfreindre, néanmoins, leur cœur était très bon. Ils plaçaient leur confiance en Hachem, et la valeur de cette confiance surpasse tout. Aussi, la fin de leur exil leur fut dévoilée.
En revanche, à l’époque du 2e temple, leur faute n’était pas dévoilée, car extérieurement, ils étaient justes, bons, pieux et érudits en Torah. Cependant, dans leur cœur (dissimulé du regard d’autrui), régnait entre eux la haine gratuite qui provenait d’un manque de émouna. Pour cette raison, la fin de leur exil ne leur fut pas dévoilée, car l’absence de émouna est pire que tout, et entraîne jalousie et haine. Cette attitude fut si grave que la fin de leur exil ne leur fut pas dévoilée.

Le meilleur moyen pour un homme de s’éloigner de la haine gratuite est donc de se renforcer dans la émouna que tout ce qui lui arrive est le fruit d’un décret Divin et que son prochain n’est qu’un émissaire qui accomplit sa mission ; pourquoi dès lors, s’en prendre à lui puisque c’est Hachem qui l’a envoyé?

Et c’est selon ce principe que certains tsadikim (rapporté par exemple au nom du Yisma’h Moché) expliquent la guémara (Béra'hot 33a) : "Rabbi Eliézer dit : ‘Tout homme qui possède de l’intelligence est digne que le Temple soit reconstruit de ses jours’." [kol adam chéyech bo déa ké'ilou nivra haMikdach béyamav]
A priori, quel rapport existe-t-il entre l’intelligence et la reconstruction du Temple? Quelle grandeur et quelle qualité si importante en rapport avec ce sujet possède celui qui est doté d’intelligence?
C’est qu’en fait, puisque le Temple fut détruit à cause de la haine gratuite, et que l’amour gratuit est la clé de sa reconstruction, celui qui possède l’intelligence sait discerner la racine des choses.
Il sait que si l’on a bafoué son honneur, c’est parce que cela a été décrété dans le Ciel. Il n’en viendra donc pas à la haine gratuite. Dès lors, c’est comme si le Temple était reconstruit de son temps.

Les Ouchpizin

+ Les Ouchpizin :

-> Le rav Yé'hezkel Sarna, cite le Rambam (Hilkhot Téchouva 7,6) décrit l'incroyable transformation spirituelle de quelqu'un qui fait téchouva : "Hier, cette personne était détestée par Hachem, considérée comme répugnante, répudiée et abominable. Mais aujourd'hui, elle est devenue aimée, chérie, adoré et amie (d'Hachem)".
Il fait également référence à l'interprétation du Gaon de Vilna (sur Chir haChirim) du verset du Hallel : "Il relève le nécessiteux de la poussière, des tas d'ordures. Il relève le démuni, pour le faire asseoir avec les nobles, avec les nobles de Son peuple." (mékimi méafar dal méaspot yarim évyon ... - Téhilim 113,7-8)
"Il relève le nécessiteux de la poussière" = cela signifie les nécessiteux dans les mitsvot. "
"des tas d'ordures" = cela se réfère aux baalé téchouva.
"les faire asseoir avec les nobles, avec les nobles de Son peuple" = cela signifie qu'après le pardon de Yom Kippour, ils résideront avec les saints Avot à Souccot, une référence directe aux Ouchpizin.

-> Le Sfas Emer (Souccot 5652), cite lui aussi ce verset de Téhilim, mais en y ajoutant une touche 'hassidique'. Citant son grand-père, le 'Hidouché haRim, le Sfat Emet explique : "Hachem aide les Bné Israël à élever leurs aspirations les plus profondes au-dessus des tas d'ordures et des vanités du monde. Grâce à leur téchouva, les Bné Israël sont capables de redécouvrir leur désir profond pour Hachem, et ils redeviennent ainsi Ses bien-aimés, qui s'assoient maintenant à la table avec les nobles de Son peuple".

Lorsque l'on regarde à travers le prisme brillant de ces idées, nous pouvons facilement comprendre pourquoi les Ouchpizin viennent spécifiquement à Souccot.
En outre, comme le note le rav Hutner, les Ouchpizin sont ceux qui ont aidé à obtenir le pardon pour le grand péché du Veau d'or. Chacun d'entre eux a donc une part dans notre mé'hila, séli'ha et kappara, et nous voulons partager notre joie avec eux en ce moment.
Notre état spirituel élevé est également leur satisfaction, et ils viennent, comme les fiers grands-parents (ancêtres) qu'ils sont.

<--->

-> Le Divré 'Haïm (Souccot) explique que chacun des Ouchpizin, au cours de leur vie dans ce monde, a illustré l'idéal de "servir Hachem dans tous les aspects de la vie, lorsqu'ils travaillaient dans les champs, étaient bergers pour leurs troupeaux, et dans tout ce qu'ils faisaient".
Il poursuit en concluant qu' "après avoir expié nos fautes à Roch Hachana et à Yom Kippour, nous pouvons nous connecter à Hachem dans tout ce que nous faisons, y compris lorsque nous mangeons, buvons et dormons".

-> Selon le rabbi d'Alexander (Yisma'h Israël - Succos n° 21), nous pouvons réaliser des gains spirituels considérables en étant en présence des Ouchpizin.
Étant donné que chacun des Ouchpizin représente une midda différente, un trait de caractère dont nous avons besoin pour servir correctement notre Créateur, la semaine de Souccot que nous passons en leur présence nous offre une occasion unique d'absorber par leur influence leurs merveilleuses caractéristiques de hessed, guévoura, tiféret, nétsa'h, yessod, hod et mal'hout. [même si on ne le voit pas, mais une étincelle de ces illustres personnages est présente dans la soucca de tout juif, et cette étincelle très élevée nous impact positivement. ]
Ce sont les éléments constitutifs du peuple juif en général et de chacun d'entre nous en tant qu'individu.

Le Yisma'h Israël conclut que même si notre Yom Kippour n'a pas été parfait, les "sept bergers peuvent nous aider à rectifier ce qui nous a échappé toute l'année".

Les Ouchpizin sont donc nos amis (conformément à ce qu'indique le Rambam dans le Hilkhot Téchouva), qui viennent nous aider à achever le processus que nous avons entamé en Elloul. Cependant, ils nous aident non pas par le jeûne, la confession ou les pleurs, mais par la joie de savoir que nous ne sommes jamais seuls dans notre quête. Même si nous ne les voyons pas, nous croyons qu'ils sont là (selon le rabbi de Kotzk, il est plus grand d'être persuadé qu'ils sont que de les voir réellement), et nous ressentons leur amour et leur chaleur, qui font écho à ceux de notre Créateur lui-même.

=> Nos saints invités invisibles nous apprennent à nous connecter à Hachem de toutes les manières possibles, et nous transmettons leurs dons spirituels pendant le reste de l'année.

Roch Hachana est un jour de grande lumière, comme le disent nos Sages : "'Vayéhi ohr" (et il y eut de la lumière - Béréchit 1,3) = il s'agit de Roch Hachana" (Tikouné Zohar 36).
Pendant 2 jours, nous ne pensons pas du tout à nous-mêmes, ni aux bonnes choses que nous avons faites, ni aux mauvaises non plus.
Nous entrons dans la pièce la plus privée du Roi pour le rencontrer et nous prélasser dans la lumière.
Après cela, nous pourrons voir si notre vie est sur la bonne voie ou non. Tant que nous sommes occupés à penser à nous-mêmes, nous sommes assis dans l'obscurité ; nous ne voyons rien.
Mais maintenant que nous avons la lumière, il est possible de faire un 'hechbon haneféch ; nous pouvons examiner nos vies et nous fixer un nouveau chemin.
[...]

Après avoir passé 2 jours entiers dans le palais du roi et commencé à penser et à agir différemment, nous ressentons le plaisir d'être proches d'Hachem.
La avoda de cette période (des 10 jours de téchouva) est de prendre la lumière de Roch Hachana et de l'amener dans les jours ordinaires de l'année.
En faisant cela, nous pouvons conserver la lumière de Roch Hachana. Si nous ne le faisons pas, nous pouvons le perdre, que D. nous en préserve.
[rabbi Nathan Watchfogel]

<--->

-> Pendant les 10 jours de téchouva, nous appelons Hachem "haMélé'h HaMichpat". Ce n'est pas simple!
Pendant ces 10 jours, la lumière de la téchouva se révèle dans le monde, et la téchouva consiste réellement à devenir une nouvelle création. À Roch Hachana, nous arrêtons ce que nous faisons, le monde entier s'arrête, et tout prend un nouveau départ. Nous devons examiner toutes les choses que nous faisons et nous demander si elles sont bonnes ou non. S'ils sont bons, nous devons les poursuivre. Si ce n'est pas le cas, nous devrions nous en éloigner.
[rabbi Nathan Watchfogel]

+ "De Tsion sortira la Torah" (ki miTsion tétsé Torah - Yéchayahou 2,3)

-> Selon les Tossafot (guémara Taanit 16a), cela signifie que la Torah émanait du Temple. Avec la disparition du Temple, il est beaucoup plus difficile de comprendre et de se souvenir de la Torah que nous étudions.

<--->

-> De même, depuis la destruction du Temple, la concentration pendant nos prières et le maintien de la conscience que nous communiquons directement avec le Maître de l'Univers sont devenus beaucoup plus difficiles.
Nos Sages (guémara Béra'hot 32b) disent que depuis la destruction du Temples, les portes de la prière sont fermées.
[toute prière a forcément un impact, mais en comparaison de l'époque où il y avait le Temple, c'est comme si les portes du Ciel sont fermées à nos prières. (ex: on peut aider à les rouvrir par des larmes, une prière en minyan, ... ). Cela témoigne de la perte du Temple! ]

Don de la Torah aux nations – Quelques enseignements du Rabbi de Berditchev

+++ Don de la Torah aux nations - Quelques enseignements du Rabbi de Berditchev :

+ Hachem a d'abord proposé la Torah aux nations et aux anges pour nous permettre de recevoir les étincelles de sainteté issues de leur désir pour la Torah :

-> Le midrach (Pirké déRabbi Eliézer 41) rapporte que Hachem se tourna vers chaque nation et chaque peuple pour leur demander s'ils acceptaient la Torah. Essav demanda : "Qu'y a-t-il d'écrit?" Hachem répondit : "Ne commettez pas de meurtre." Essav n'en voulut pas. Il se tourna vers Yichmaël, qui demanda : "Qu'y a-t-il d'écrit?" et D. a répondu, "Ne commets pas d'adultère." Et Yichmaël le refusa aussi.
Pourquoi Hachem leur a-t-il offert la Torah? Si une autre nation avait accepté de l'accepter, Hachem la leur aurait-il alors donnée?

La réponse, cependant, est que D. nous a en réalité fait une énorme bonté en offrant la Torah aux autres nations, car D. prévoyait que nous serions exilés parmi elles. Ainsi, il pourrait arriver, à D. ne plaise, qu'un juif ait des relations avec un non-juif, discute avec lui de sujets mondains, et que le non-juif, ... et qu'il puisse éloigner le juif du service d'Hachem.
En effet, la condition de l'exil oblige le juif à parler avec cette personne "impure", et c'est une dégradation pour la sainteté (c'est-à-dire le juif) que d'avoir des rapports avec l'impureté (c'est-à-dire ce non-juif). [en comparaison de l'énorme sainteté de l'âme d'un juif, celle d'un non-juif est comme impure. ]
C'est pourquoi Hachem a offert la Torah à toutes les nations.

Le Zohar (3:192a) explique : Si Essav a refusé d'accepter la Torah, c'est uniquement à cause de l'interdiction du meurtre. En réalité, Essav nourrissait le désir de devenir un serviteur d'Hachem.
De même, Yichmaël a rejeté la Torah en raison de l'injonction de ne pas commettre d'adultère. Cependant, Yichmael était prêt à accepter le reste de la Torah afin de servir Hachem.

On sait que tous les événements entourant le don de la Torah ont laissé une impression durable.
L'impact durable sur les autres nations est qu'elles conservent un vestige de leur désir originel pour la Torah. Par conséquent, chaque fois qu'un juif parle avec un non-juif, le juif tire de lui ce désir latent pour la Torah.
C'est le sens sous-jacent de ce qui est dit dans les écrits du Arizal (Pri Ets 'Haïm - chaar 'Hag haMatsot 1) que les juifs ont été exilés parmi les nations afin d'extirper les étincelles saintes qui sont tombées dans les forces de l'impureté. Ainsi, chaque fois qu'un juif parle à un non-juif, il fait appel à la sainteté des étincelles tombées dans le non-juif.
Naturellement, le peuple juif est saint par lui-même, sans la contribution de la sainteté extraite des non-juifs. Néanmoins, tout ce qui est en plus est apprécié, à l'instar d'une personne riche qui, malgré ses richesses, apprécie toujours une pièce d'or supplémentaire.

De même, lorsque la Torah a été donnée au peuple juif, tout désir de Torah dans le monde a été absorbé par les juifs, ne laissant qu'un minuscule reste aux non-juifs.
Le peuple juif a été imprégné du désir de chaque nation, ce qui a renforcé son propre désir de recevoir la Torah.
Telle était l'intention d'Hachem en offrant la Torah à toutes les nations. Les dernières étincelles saintes, c'est-à-dire le reste de ce désir de Torah que l'on trouve chez les non-juifs, ont été mélangées aux forces de l'impureté ; pendant l'exil, le peuple juif doit extirper et élever ces étincelles saintes.

Cela explique aussi pourquoi, lorsque les anges ont demandé que la Torah leur soit donnée, D. leur a répondu : "Avez-vous des pères ou des mères?" (guémara Shabbath 89a).
[ Hachem dit aux anges : "Comment pouvez-vous respecter le commandement d'honorer vos parents alors que vous n'en avez pas? Il en va de même pour le reste de la Torah, qui n'a rien à voir avec les anges. ]

Par Sa réponse, Hachem attisait le désir des anges de recevoir la Torah, ne l'éteignant pas. Et Hachem a fait cela pour que leur désir accru soit absorbé par le peuple juif. C'est pourquoi, comme le disent nos Sages (Pessikta 'Hadata 12), lorsque D. a proclamé le premier des 10 Commandements, les créatures célestes qui entouraient le Trône de Gloire d'Hachem ont été saisies d'effroi. En effet, la vénération/respect et l'amour de D. ressentis par les êtres des mondes supérieurs et inférieurs ont été infusés dans le peuple juif lors du don de la Torah ...

[par exemple] Hachem a demandé à la nation d'Essav d'accepter la Torah, afin de canaliser leur désir de Torah vers le peuple juif, de sorte qu'elle "brille" sur eux.
Le désir d'Essav [pour la Torah] est venu augmenter le désir du peuple juif [pour la Torah].
De même, Hachem a insufflé dans le peuple juif le désir de Torah ressenti par les anges ...

Ainsi, toute l'aspiration et le désir de la Torah éprouvés par les êtres célestes et terrestres ont été transplantés dans le peuple juif en préparation de sa soumission au joug du Ciel ...

Lorsqu'il sert D., le peuple juif est donc motivé à la fois par une crainte extrinsèque de D., provenant d'autres nations, et par sa propre crainte intrinsèque.
La crainte extrinsèque est relativement superficielle et résulte de la prise de conscience que, puisque Hachem gouverne le monde, il est avantageux de le servir et d'obéir à ses ordres. Pour obtenir des récompenses, la personne fait donc tout ce que D. veut.
En revanche, la crainte intrinsèque d'Hachem, innée au peuple juif, nous pousse à servir D., à exécuter Ses ordres, simplement pour Lui donner du plaisir, sans penser à la récompense ou à la punition.

Ce transfert des nations vers le peuple juif est également évoqué dans le verset : "Vous serez pour Moi un trésor d'entre tous les peuples" (Yitro 19,5). Cela signifie que Hachem nous dit que notre amour pour Lui viendra aussi des nations, comme nous l'avons expliqué précédemment.
Le verset poursuit en disant : "car la terre entière est à Moi" (ki li kol aarets), ce qui signifie qu'un tel amour, cependant, naît de motifs matérialistes (terrestres) : de considérations de récompense et de punition.

Cela explique pourquoi le verset suivant (Yitro 19,6) se poursuit ainsi : "Et vous (véatem) serez pour Moi un royaume de Cohanim", en répétant et en soulignant le pronom (véatem). La Torah laisse entendre que notre propre désir inné pour D. sera du même type que celui caractérisé par l'expression suivante du verset, "un royaume de Cohanim". Car parmi les couronnes de la Torah, de la Kéhouna et de la monarchie (Pirké Avot 4,13), seule la couronne de la Kéhouna est héritée.
Ainsi, le verset nous dit que notre amour pour Hachem sera intrinsèque à notre être même, et sera donc hérité, tout comme la Kéhouna est héritée.
En d'autres termes, nos ancêtres nous ont légué leur désir ardent de servir Hachem, et cet amour perdurera pour toutes les générations.

Le verset se termine ainsi : "Et vous serez pour moi ... une nation sainte", ce qui indique que nous aspirerons à servir Hachem non pas pour être récompensés, mais pour lui faire plaisir.

[rabbi Lévi Its'hak de Berditchev - Kédouchat Lévi - Shavouot ]

<------------->

+ Hachem a proposé d'abord la Torah aux nations, afin qu'elles donnent des cadeaux précieux au peuple juif :

-> Le Zohar (3:192b) explique que Hachem a approché les nations d'Essav et de Yichmaël, les invitant à accepter la Torah. Les deux nations ont refusé, suggérant que D. donne plutôt la Torah au peuple juif.
En retour, Essav a reconnu que Yaakov était le véritable premier-né de Its'hak et a offert un cadeau au peuple juif pour qu'il accepte la Torah.
De même, Yichmaël a admis que seul Its'hak était l'héritier légitime d'Avraham, et non lui Yichmaël, et il a également offert un cadeau au peuple juif.

Le fait que les nations aient été satisfaites de l'acceptation de la Torah par le peuple juif ressort également d'un récit talmudique (Zéva'him 116a) : lorsque Bilam et les nations ont appris que le peuple juif acceptait la Torah, et que Hachem ne leur demanderait plus de le faire, Bilam a déclaré : " Que D. accorde la force à son peuple" (Téhilim 19,11), et les nations ont répondu : " D. bénira Son peuple par la paix ".

Mais quels étaient ces cadeaux que les nations offraient au peuple juif pour l'encourager à accepter la Torah?
Il s'agissait des âmes saintes retenues en captivité par les nations jusqu'à leur retour au bercail juif par la conversion. Ce sont les cadeaux des nations au peuple juif.
Parmi ces âmes libérées, la plus importante était l'âme élevée de Ruth, l'aïeule de machia'h. Cette âme a été donnée au peuple juif pour qu'il accepte la Torah. C'est pour cette raison que nous lisons la Méguila Ruth le jour de Shavouot, en faisant allusion à la libération de l'âme de Ruth de la captivité parmi les nations grâce au don de la Torah.

[rabbi Lévi Its'hak de Berditchev - Kédouchat Lévi - Shavouot ]

<----------->

+ Lien entre proposition de la Torah aux nations et le fait que le peuple juif dormait le matin du don de la Torah :

-> Dans les Pirké déRabbi Eliezer (chap.41), il est expliqué que le matin du don de la Torah, le peuple juif était endormi et que D. a dû le réveiller.
Le Magen Avraham (Magen Avraham - Ora'h 'Haïm 494) cite cette source pour expliquer la raison pour laquelle nous restons debout toute la nuit de Shavouot pour étudier.

La question se pose toutefois de savoir pourquoi le peuple juif dormait.
La réponse est qu'avant de donner la Torah au peuple juif, Hachem a rendu visite aux différentes nations, leur demandant si elles étaient disposées à recevoir la Torah. Elles ont tous refusé, disant à Hachem : "Laisse-nous", comme l'expliquent les Pirké déRabbi Eliezer.

Cependant, le peuple juif, conscient que D. approchait les différentes nations avec cette offre, a supposé que le don de la Torah serait retardé pour cette raison. Ils pensaient que les nations délibéreraient pendant un certain temps pour accepter ou non la Torah.
Mais les autres nations ne voulaient pas entendre de la bouche d'Hachem ce qui était écrit dans la Torah. Il n'y a donc pas eu de retard.
De son côté, le peuple juif pensait que l'affaire serait remise à plus tard, et c'est pourquoi il ne s'est pas réveillé.
[rabbi Lévi Its'hak de Berditchev - Kédouchat Lévi - Shavouot ]

=> Le peuple juif n'imaginait pas que les nations du monde rejetteraient d'emblée l'offre de D. de recevoir la Torah. C'est pourquoi il ne s'est pas réveillé tôt le matin du don de la Torah.

<------------>

+ Mauvais œil & don de la Torah aux nations :

-> Les premières Tables de la Loi (Lou'hot) ont été brisées à cause du mauvais œil (ayin ara). [midrach Béréchit rabba 12,4 ; midrach Tan'houma Ki Tissa 31]
Ce mauvais œil émanait des nations du monde, lorsque Hachem leur demanda si elles souhaitaient ou non recevoir la Torah. En réponse, les nations ont jeté un mauvais œil sur ces premiers Lou'hot.
Les Lou'hot ultérieures (les 2e), cependant, que personne n'a vues, aucune autre nation ne les a vus, ces Lou'hot ont perduré.
Dans l'avenir, Hachem rendra les premières Lou'hot au peuple juif.
[rabbi Lévi Its'hak de Berditchev - Kédouchat Lévi - Shavouot ]

=> Ainsi, bien que les premières Tables de la Loi aient été brisées (suite au mauvais oeil), elles nous seront restituées dans l'avenir messianique.

Prendre le deuil de la destruction du Temple tout au long de l’année

+ Prendre le deuil de la destruction du Temple tout au long de l'année :

-> Un juif était en train de faire le birkat hamazone, et alors qu'il prononçait les mots "boné béra'hamav Yérouchalayim" (qui construit Jérusalem avec miséricorde), il fut tellement submergé par de la souffrance et des sentiments de perte liés à la destruction du Temple qu'il prit un couteau sur la table et se poignarda lui-même. À la suite de ce terrible incident, nos Sages (Choul'han Aroukh 180,5) ont institué une halakha selon laquelle tous les couteaux doivent être retirés de la table ou recouverts avant le birkat hamazone.

La question est évidente. Quelles sont les chances qu'une telle tragédie se reproduise? Probablement zéro. Dans ce cas, pourquoi nos Sages ont-ils institué cette halakha (applicable à tous les juifs dans l'histoire)?
Une explication est : Il est vrai que cela ne se reproduira pas. Mais nos Sages voulait démontrer par cela à quel point un juif peut ressentir la douleur de la destruction du Temple. Cette halakha nous dit : Regardez comment ce juif a vécu avec Jérusalem dans son cœur, et comment il a souffert si fort de sa perte, qu'il s'est tué de douleur.
[en fait c'est lui qui est dans un état normal, et nous qui sommes anormaux, comme ayant des sentiments anesthésiés face à la réalité si douloureuse de la perte du Temple. ]

La guémara (Baba Batra 60b) dit qu'après la destruction du Temple, certaines personnes ont déclaré qu'elles ne mangeraient plus jamais de viande et ne boiraient plus jamais de vin. En effet, qui peut manger de la viande, si la viande a été utilisée pour les korbanot? Qui peut boire du vin, si le vin a été utilisé pour les nessa'him (libations)?
Imaginons! Aujourd'hui, lorsque nous voyons un morceau de viande, nous voyons un goût alléchant de ce monde. Mais lorsqu'ils ont vu de la viande, ils ont vu la destruction du Temple. Quand ils ont vu le vin, ils ont vu également la destruction.
[certes nos Sages n'ont pas décrété une loi interdisant la viande et le vin, mais cela nous illustre à quel point nos ancêtres pouvaient vivre cette perte du Temple. ]

<--->

+ Qu'en est-il de moi? :

-> Nous devrions nous demander : "Et moi? Est-ce que j'accomplis la halakha qui apparaît dans le premier siman du Choul'han Aroukh, qui stipule qu'une personne doit être métsar (souffrir) et doég (s'inquiéter) à propos de la destruction du Temple?"
Nous avons l'obligation de pleurer le Temple. Cette obligation s'applique en fait tout au long de l'année (et pour tout juif).
Bien sûr, l'obligation est plus forte pendant les 3 semaines, et encore plus pendant les 9 jours d'Av, mais elle s'applique également tout au long de l'année.
Réussissons-nous à accomplir cette obligation pour ressentir la perte de Jérusalem et du Temple?
Je suis le premier à plaider coupable. Moi aussi, je trouve cela difficile. Comment peut-on ressentir la perte de quelque chose que l'on n'a jamais vécu et que l'on ne peut même pas imaginer? Le Temple est si éloigné de nos cœurs et de nos esprits!

J'aimerais suggérer une idée pratique, et je l'espère, réalisable, qui pourrait nous aider à remplir notre obligation.
La guémara (Sanhédrin 104b) raconte l'histoire très émouvante d'une femme qui avait perdu un enfant et qui pleurait jour et nuit. Rabban Gamliel, qui vivait à proximité, l'entendit pleurer et se mit lui aussi à pleurer. Cependant, il pleura à cause de la destruction du Temple. Il pleura et pleura jusqu'à ce qu'il s'arrache littéralement les cils.
Pourquoi Rabban Gamliel pleura-t-il si intensément? Et qu'est-ce qui, en entendant cette femme pleurer sa perte, a poussé Rabban Gamliel à pleurer sur la destruction du Temple?

Je crois que Rabban Gamliel était peiné par une question très troublante : Pourquoi un juif souffre-t-il? Pourquoi un juif pleure-t-il? Pourquoi y a-t-il des souffrances du fait d'être juif? Pourquoi entendons-nous parler de tragédies Pourquoi entendons-nous parler de jeunes enfants qui luttent pour leur vie et succombent à la maladie? ...

Le midrach dit que lorsque machia'h viendra, la prière sera très différente. Il n'y aura plus dans la Amida la bénédiction de Réfaénou, où l'on prie pour une réfoua (rétablissement en bonne santé), et il n'y aura plus de bénédiction pour la parnassa (subsistance).
La prière consistera des louanges (téhila), et en des remerciements (odaa).
Alors nos bouches seront pleines de bonheur, nos langues de chants. C'est ainsi que le monde est censé être. Alors pourquoi un juif pleure-t-il? Pourquoi tant de gens ont-ils des problèmes de santé et d'éducation avec les enfants? Pourquoi y a-t-il tant de raisons de pleurer?

La réponse à toutes ces questions très douloureuses tient en un mot : la destruction du Temple.
Chaque tragédie est une autre expression, une autre manifestation de la destruction du Temple.
La guémara (Sotah 49a) dit que depuis le jour où le Temple a été détruit, la malédiction de chaque jour est pire que celle de la veille. Chaque jour est plus difficile, plus douloureux que le jour précédent.
Chaque jour, nous voyons de nouvelles expressions de la destruction du Temple.
Rabban Gamliel a compris que le décès de l'enfant et les pleurs de la mère ne sont pas la façon dont la vie est censée se dérouler. Il a pleuré parce qu'il a reconnu une autre lamentation sur laquelle pleurer. [dont la source première réside dans la perte du Temple]

<--->

+ Un puits sans fond :

-> La guémara ('Haguiga 5b) en décrivant la destruction du Temple, dit que nous avons été jetés du plus haut des toits dans la fosse la plus profonde.
Même si nous avons pas pleinement conscience, c'est ce que la destruction du Temple nous a fait.

Pourquoi avons-nous une telle douleur? "Qu'est-ce qu'Hachem nous a fait?" (ma zot assa Elokim lanou - Mikets 42,28). Il existe une réponse en un mot à cette question : la destruction du Temple.
Chaque souffrance est une autre manifestation de la malédiction de chaque jour qui devient pire que la précédente. C'est notre chute de plus en plus profonde dans un gouffre apparemment sans fond ...
Chaque année, nous devons crier faire les lamentations (Eikha, kinot) pour de nombreuses autres raisons (vu tous les nouveaux malheurs collectifs et individuels qui sont arrivés durant l'année écoulée).

-> Le rav Shimon Raphael Hirsch fait remarquer que le mot "אבל" (avel - le deuil) a les mêmes lettres que le mot "אבל" (aval - mais).
Je pense qu'il veut dire la chose suivante : Imaginez qu'une personne qui a perdu un enfant, que D. préserve, soit assise à la shivah et que quelqu'un lui dise : "Pourquoi pleures-tu? Tu as tant d'autres enfants merveilleux". Le père endeuillé le regarderait étrangement et dirait : "Bien sûr, j'ai des fils et des filles merveilleux, mais j'ai perdu cet enfant."
Le deuil (avel), consiste à ressentir l' "aval" (mais il manque). Lorsqu'une personne ressent l' "aval", cela éclipse toutes les bonnes choses qu'elle a dans sa vie.
Oui, nous sommes en sécurité et nous nous sentons à l'aise en France ou en Amérique, mais le "aval", le "mais", est si grand et si douloureux.
Regardez ce que nous manquons, regardez combien de Juifs souffrent. Regardez toutes les larmes, toutes les souffrances, et regardez le gouffre qui ne cesse de s'approfondir.
[le 9 Av est un jour où l'on sort la tête de la terre, qu'on réalise que tant de juifs souffrent, sont loin d'Hachem, ... et nous devons prendre le deuil pour cela, pour la grandeur et l'amour d'Hachem. ]

Si nous ne pouvons pas visualiser et pleurer sur le eikha du prophète Yirmiyahou d'il y a deux mille ans, nous pouvons pleurer sur notre destruction du Temple personnelle, sur notre "aval", sur tout ce qui nous manque, sur tout ce qui affecte le peuple juif dans ce terrible moment de perte du Temple.
La guémara nous enseigne peut-être que nous pouvons tirer une leçon de l'action de Rabban Gamliel, à savoir qu'une façon acceptable de pleurer le Beis Hamikdash est d'incorporer nos propres expériences tragiques individuelles dans le deuil du Temple.

<--->

+ Notre destruction spirituelle :

-> Bien entendu, ce ne sont pas seulement les tragédies physiques que nous pleurons, mais aussi les tragédies spirituelles. Grâce à D., on pourrait se satisfaire en affirmant que la Torah s'épanouit comme rarement dans l'histoire juive, que les cours sont nombreux, que les yéchivot/lieux d'étude se développent, ...
Mais nous savons aussi qu'il y a un autre côté douloureux à l'histoire. Le "aval", le "mais".

La vie n'est pas censée être ainsi. La vie est censée être une longue expression de : 'holat aava ani (je suis malade d'amour pour Toi - Chir haChirim 5,8). Une personne devrait être pleine d'amour pour Hachem. Pourquoi les gens se posent-ils des questions sur la émouna? Pourquoi avons-nous toutes ces situations difficiles dans l'éducation des enfants? La liste des questions n'en finit pas de s'allonger.
La réponse à toutes ces questions tient en un mot : la destruction du Temple.
Ce qui nous manque dans la spiritualité est aussi l'expression d'un gouffre qui ne cesse de s'approfondir. Cela fait également partie de l'énorme "aval" (mais, manquement) de nos vies.
Chaque fois que nous voyons un enfant qui ne veut pas étudier, nous devrions nous écrier : "Eikhah"? Comment cela peut-il arriver ?" Ce n'est pas censé être comme ça.

<--->

+ Un lieu de transformation :

-> Nos Sages décrivent ce qui se passait dans le Temple.
La révélation de la Chékhina y était si apparente.
La Michna (Pirké Avot 5,4) énumère 10 miracles qui ont eu lieu dans le Temple, dont certains quotidiennement. Imaginez un lieu qui défie la nature, qui représente une manifestation évidente d'Hache.

"Ki mi Tsion tétsé Torah (de Tsion sort la Torah - Yéchayahou 2,3).
Les Tossafot (Baba Batra 21a) disent que lorsque les gens arrivaient à Jérusalem et voyaient la avoda, ils en ressortaient très inspirés, transformés.
Lorsqu'ils ont vu le kvod haChékhina qui imprégnait tout le Temple, cela les transformait.
La guémara (Méguilla 14a) dit que la quantité de prophètes (néviim) que le peupel juif avait était deux fois plus importante que la quantité de personnes qui avaient quitté l'Egypte. Tel est l'effet de la vie au sein du Temple.
Le Temple était une centrale électrique, un générateur de crainte d'Hachem (yirat chamayim).
Lorsqu'une personne arrivait à Jérusalem, elle était prise d'un tel remords pour les fautes qu'elle avait pu commettre qu'elle faisait immédiatement téchouva (midrach rabba - Chémot 36).
Le Temple était une ambassade de la présence d'Hachem qui inspirait et transformait tant de personnes.

La splendeur du Temple suffit à faire fondre les cœurs les plus froids.
Le midrach (Béréchit 65,22) décrit un incident qui s'est produit avec un terrible racha, un juif nommé Yossef Méchi'ha. Lorsque les Romains conquirent le Temple, ils eurent peur d'y pénétrer. Yossef Méchi'ha se porta volontaire pour faire ce que même les Romains n'osaient pas faire. Il entra dans le Temple et en ressortit en portant la ménora.
Les Romains furent choqués par cette inconvenance. Ils lui dirent qu'il pouvait prendre n'importe quoi d'autre, mais pas la ménora. Mais il refusa d'y retourner. Ils menacèrent de le tuer, mais il resta inflexible : il ne retournerait pas dans le Temple. Ils lui infligèrent donc une mort des plus douloureuses, et il mourut al Kiddouch Hachem.
Alors qu'il mourait, il s'écria : "Malheur à moi, car j'ai irrité mon maître". Il avait fauté une fois dans le Temple, mais il ne recommencerait pas.

L'histoire est déroutante. Alors qu'il était un terrible racha, il a soudainement changé d'avis (malgré la possibilité de retourner rapidement pour y prendre des objets incroyables en or massifs, qui le mettrait à l'abri jusqu'à la fin de sa fin). Quelle est la cause de cette transformation soudaine?
Ce fut un bref moment dans le Temple, explique le rav Poniovitch. C'était tout ce qu'il fallait pour le changer. Il était entré dans cette ambassade de la sainteté et de pureté, et il était devenu une personne différente.
Pensons-y : un moment dans le Temple (même sans intention, même dans un but d'y voler un élément central comme la Ménora), cela a suffi à transformer une personne aussi racha (en quelqu'un étant prêt à mourir d'un sublime kidouch Hachem [sanctification d'Hachem], au point qu'on en parle même de nos jours! ).

<---->

+ Un simple juif à l'époque du Temple :

-> Pouvons-nous imaginer à quoi ressemblait un juifs vivant à l'époque du Temple, la émouna qu'il avait et l'enthousiasme pour la Torah et les mitsvot avec lequel il vivait?

Le Gaon de Vilna a dit un jour : "Je peux imaginer comment était un des Richonim, mais je ne peux pas imaginer comment était un juif simple à l'époque du Temple".
Imaginons. [le Gaon de Vilna pouvait imaginer le niveau de : Nissim Gaon, le Rif, Rachi, les Tossafistes, Rabbénou Bé'hayé, Ibn Ezra, le Rambam, le Ramban, ... ] Mais celui d'un juif simple à l'époque du Temple, cela dépassait l'entendement du Gaon de Vilna.
Voilà ce que c'était le simple fait de vivre à l'époque du Temple, et de palper que : "Hachem est notre D., il n'y a rien d'autre que Lui" (ki Hachem ou Elokim, én od milévado - Vaét'hanan 4,35).
[ si nous avions le Temple, en un instant nous atteindrions un niveau beaucoup plus élevé que le Rambam, ... ]

<--->

-> Le rav Wolbe a raconté que le rav Yé'hezkel Levinstein lui a un jour demandé combien de juifs avaient péri pendant l'Holocauste (Shoa).
Le rav Wolbe répondit : "Les gens disent 6 millions". Le rav Levinstein a répondu : "C'est ce que les gens disent, mais je dis que tout le peuple juif a péri dans l'Holocauste. Beaucoup ont survécu, mais s'agit-il du peuple juif? L'Holocauste a touché l'ensemble des juifs".

Lorsque j'ai entendu cela, j'ai commencé à réfléchir. Combien de juifs ont péri lors de la destruction du Temple?
Tous les juifs. Tout le peuple juif a été affecté par le la destruction du Temple ; nous avons tous été victimes de la perte du Temple.
Les problèmes physiques (ex: les problèmes de santé, les problèmes de parnassa) et les problèmes spirituels (ex: les problèmes d'éducation des enfants, le manque de désir d'étudier ou de prier) font tous partie de la destruction du Temple.
C'est peut-être la solution. Si nous ne pouvons pas nous endeuiller, attrister, sur la destruction du Temple qui a eu lieu il y a 2 000 ans, pleurons alors notre destruction personnelle, notre insuffisance en matière de Torah et de mitsvot (cette différence entre ce que j'ai fait et ce que j'aurai pu faire selon la volonté de D. ).
Pleurons sur le fait qu'au lieu de vivre en paix avec un lien profond/intense avec Hachem, nous vivons notre vie en nous sentant si éloignés de Lui.

[rav Zev Smith]