Aux délices de la Torah

Pâtisserie spirituelle depuis 5771 - b'h
 

Le 'Hatam Sofer (Responsa partie Yoré Déa, 234) est d'avis que même si toute l’élite intellectuelle et spirituelle du peuple juif devait se retrouver en Exil et qu’il ne restait en terre d'Israël que de simples bergers ou paysans, ce seraient eux uniquement qui pourraient instituer les débuts de mois, et par cela la date des fêtes.
Même les plus grandes sommités rabbiniques en dehors d’Israël ne peuvent pas définir quel jour tombera le jeûne de Kippour ou la fête de Pessa’h.
S’il ne reste pas de juifs en terre d'Israël, toutes les fêtes s’annuleront, et par cela toute la Torah, et ensuite le peuple juif s’effacera.

L’étude de la Torah expie les fautes comme les sacrifices

+ L'étude de la Torah expie les fautes comme les sacrifices :

"Ordonne Aharon et ses fils pour qu'ils disent : voici la Torah de l'holocauste" (Tsav 6,2)

=> Il est nécessaire de comprendre pourquoi dans ce verset est employée l'expression "pour qu'ils disent" (lémor - לֵאמֹר). En général, celle-ci est utilisée dans la Torah pour signifier de transmettre ce qui a été dit aux autres. Or, ici, à qui d'autre Aharon et ses fils (qui représentaient alors les seuls Cohanim) pouvaient-ils s'adresser étant donné que tout le reste des Bné Israël était impropre au Service des sacrifices?

-> Le rabbi Bounim de Pshis'ha répond à cette question d'après ce que nous enseignent nos Sages (guémara Ména'hot 110) : "Tout celui qui étudie la Torah n'a besoin ni d'holocauste (ola) ni de sacrifice expiatoire ('hatat), ni d'offrande de pain (min'ha), ni de sacrifice coupable (acham)".
Hachem ordonna que les Cohanim s'adressent en vérité aux Bné Israël et qu'ils leur enseignent que s'ils étudient la Torah, ils n'auront pas besoin des sacrifices.

D'après cela, on peut apporter un nouvel éclairage sur le commentaire de Rachi à propos de ce verset : "On n'emploie le langage "ordonner" (tsav) que pour exhorter à l'empressement, plus particulièrement lorsqu'il s'agit d'une perte financière".
En effet, en transmettant un tel enseignement aux Bné Israël, il y avait lieu de craindre un manque à gagner pour les Cohanim puisque les Bné Israël n'apporteraient plus de sacrifices.
C'est pourquoi il était nécessaire d’utiliser cette expression en les encourageant à l'empressement.

"Le peuple sortit ramasser (la manne)" (Béaaloté'ha 11,8)

-> Un jour, le 'Hafets 'Haïm demanda à un disciple : "Nos Sages enseignent que la manne pouvait avoir tous les goûts. Quand un homme pensait à un certain goût, on pouvait ressentir ce goût dans la manne. Mais si un homme ne pensait à rien de particulier, dans ce cas la manne prenait quel goût?"
Le 'Hafets 'Haïm n'attendit pas la réponse et poursuivit de lui-même : "Si on ne pensait à aucun goût, alors la manne n'avait aucun goût. Et sais-tu pourquoi? Parce que la manne était une nourriture spirituelle, qui descendait du ciel. Et dans le spirituel, on ne peut ressentir du goût que si on met de la pensée. Ainsi, celui qui étudie la Torah, prie ou encore fait des mitsvot sans concentration et sans penser à ce qu'il fait, il n'en ressentira aucun "goût". Mais plus il mettra de la pensée et de la ferveur, et plus il en sentira le goût".

Parfois des gens accomplissent toutes les mitsvot sans ressentir de goût. Ils peuvent même avoir l'impression que la Torah est une contrainte et non un plaisir. La raison est qu'ils ne mettent pas de pensée dans ce qu'ils font.
Mais quand on sert Hachem avec conscience, alors on en ressentira une joie et un plaisir intense.

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-> Le midrach (Chir Hachirim (966 Yalkout Chimoni) enseigne : "la manne était bonne pour le Klal Israël, ils en recevaient largement et ils pouvaient y trouver 546 goûts différents, valeur numérique du mot matoq (doux). Comme cela est écrit dans le Chir Hachirim : "oupir'yo matok lé'hiki" (son fruit était doux à mon palais)".

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-> Le Chav Chematata (dans son introduction) explique que la manne avait comme particularité de pousser un homme vers la Torah et les mitsvot comme l'écrit le Beit Yossef (dans son Séfer Maguid Mecharim).
Le Midrach Yalkout Réouvéni (Béchalla'h) rapporte que l'ange qui distribuait la manne était l'ange chargé de l'étude la Torah, ce qui confirme que la manne poussait ceux qui la consommaient vers l'étude de la Torah.
Inversement, la manne privait des taavot (désirs) vers la matière et vers ce monde-ci car un désir pour la Torah ne peut pas se maintenir chez une personne qui éprouve un désir pour la matière ; et l'apparition d'un désir pour l'un implique forcément la disparition d'un désir pour l'autre.
Il en ressort que ceux qui mangeaient tout le temps la manne et ne consommaient pas d'autres aliments (viandes ou autres aliments qu'ils possédaient [dont ceux achetés à des marchands non-juifs]) voyaient se développer en eux une forte volonté vers l'étude et un dégoût de la matière, vu que la manne les privait de taava (désir).

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-> "Le peuple alla déambuler, ils récoltèrent (la manne), la moulurent dans la meule ou la pilèrent au pilon et la cuisirent au four ... et son goût était comme celui des beignets à l’huile" (Béaaloté'ha 11,8)

-> Le Zohar (2, 62b-63a) commente en disant "Maï Chatou? Chétouta Havou Nasbé Lagavmayou Béguine Dé Lo Havou Bné Mnéémouta" = ce qui signifie que parmi les Bné Israël se trouvaient des gens de cette génération qui choisirent d’aller dans la voie de la stupidité. Et en quoi consistait-elle?
En cela qu’ils "la moulurent, la pilèrent et la cuisirent".
Cela, affirme le Zohar, fut provoqué par leur manque de émouna. En d’autres termes, si leur foi avait été suffisamment solide, ils auraient été convaincus que leur nourriture allait parvenir jusqu’à leur bouche, prête à être consommée sans qu’ils aient à se fatiguer autant à la moudre et à la piler.

-> Par ailleurs, le même Zohar enseigne que la manne répandait un parfum de paradis parce qu’en tombant du ciel, elle traversait le Gan Eden.
De même, certains parmi les Bné Israël en ressentaient tous les goûts les plus exquis du monde.
Cependant, le méritaient que ceux qui ne faisaient pas d’efforts outre mesure pour la consommer. Par contre, ceux qui la moulaient à la meule n’en sentaient que le goût mentionné dans le verset "comme celui des beignets au miel", et pas plus.

=> Il en ressort qu’à cause de son inquiétude due à son manque de émouna, l’homme, loin de gagner quoi que ce soit, finit même par s’occasionner une perte.

"Le peuple murmura des mauvaises paroles" (Béahaloté'ha 11,1)

-> Rachi explique que quand le peuple quitta le mont Sinaï pour se diriger vers la terre sainte, Hachem leur fit parcourir en un jour un chemin de trois jours, ce qui les épuisa. C'est de cela que le peuple s'est plaint.

=> Pourquoi Hachem a-t-Il eu besoin de les fatiguer de la sorte ?

-> Nos Sages disent que la terre sainte s'acquiert par des épreuves. L'homme doit surmonter des difficultés pour
la mériter. Cela est la raison profonde pour laquelle le peuple d'Israël a dû passer 40 ans à tourner dans le
désert avant d'entrer en terre sainte.
Le 'Hidouché haRim ajoute qu'au départ, Hachem souhaita leur simplifier cette difficulté en leur octroyant une épreuve plus légère. C'est pourquoi, Il les fit parcourir en un seul jour une distance de 3 jours. Cette fatigue allait servir à constituer cette fameuse épreuve. Le projet était qu'ensuite, ils puissent y entrer immédiatement.
Mais le peuple, fatigué par la route, commença à murmurer contre Hachem et se plaindre de cette épreuve. Par cela, ils trébuchèrent. L'épreuve n'a pas été surmontée.
Dès lors, ils ne pouvaient plus entrer immédiatement en terre sainte, car ils n'ont pas surmonté l'épreuve nécessaire pour la mériter. Il s'en suit la faute des explorateurs et le séjour de 40 ans dans le désert.

A présent, ils devaient traverser des difficultés plus dures et longues. C'est ainsi qu'Hachem procède. Quand Il compte envoyer une épreuve ou une souffrance à l'homme du fait d'une faute commise par exemple, Il opte d'abord pour une épreuve relativement légère. Mais si l'homme se plaint et ne la surmonte pas, alors il devient nécessaire de passer à une épreuve plus lourde.
Cette idée doit nous accompagner pour nous aider à nous réjouir des petites épreuves, en sachant que celles-ci viennent peut-être nous sauver de plus lourdes, et que dans Sa grande Bonté, Hachem commence d'abord par envoyer une épreuve plus légère. Ne nous plaignons pas et remercions Hachem pour celle-ci, car Il cherche à nous épargner des épreuves plus difficiles qu'on se sera soi-même envoyé pour ne pas avoir surmonté la plus simple, alors que c'était en fait une Bonté d'Hachem.
[rapporté par le rav Mikaël Mouyal]

Hachem entend la prière de chacun

+ Hachem entend la prière de chacun :

"N'agrée pas leur offrande" (Kora'h 17,15)

-> Le rav Elimélé'h Biderman enseigne :
Les commentateurs (cf. le Rambam) expliquent que l'offrande dont il s'agit ici concerne la prière.
Moché supplia ainsi Hachem de ne pas exaucer celle de Kora'h et de son assemblée qui désiraient que ce dernier serve en tant que Cohen Gadol.

En réfléchissant un tant soit peu, on ne pourra s'empêcher d'être surpris. Kora'h veut contester la prêtrise et ébranler la confiance des Bné Israël dans leur Maître Moché, sème la destruction au sein du peuple, la dissension avec Moché et Aharon sanctifiés tous deux par Hachem.
Et après tout cela, Moché craint encore qu'Hachem entende sa prière et lui accorde la prêtrise alors qu'elle avait déjà été octroyée à Aharon.
=> On ne peut que se rendre à l'évidence de la force immense de la prière et constater qu'elle ne dépend nullement de la situation où se trouve un homme.
Serait-il le pire des fauteurs, cette force que représente la prière demeure considérable, au point que Moché dut lui-même supplier Hachem : "N'agrée pas leur offrande", "ne prête pas l'oreille à leur requête".

Fille d’Haman – Impact d’une mitsva involontaire

"Haman se hâta de rentrer chez lui en état de deuil, la tête couverte" (Esther 6,12)

-> La guémara (Méguila 15a) commente :
"Comme [Haman] conduisait [Morde'haï à cheval] dans la rue où il habitait, la fille d'Haman, qui se tenait sur le toit, l'aperçut. Elle pensa que l'homme sur le cheval était son père et que l'homme qui marchait devant lui était Morde'haï. Elle prit un pot de chambre et le vida sur la tête de son père.
Il leva les yeux vers elle et elle comprit que c'était son père. Elle sauta du toit, se suicidant.
Le verset dit donc ... "Haman se hâta de rentrer dans sa maison, en deuil, la tête couverte" = "en deuil" de sa fille, et "la tête couverte" = parce que sa fille avait répandu de l'ordure sur lui."

Quant à la fille d'Haman, qui leva les yeux et vit que c'était son père, elle tomba du toit sur le sol et mourut, comme il est écrit : "Haman rentra précipitamment dans sa maison, en état de deuil, la tête couverte."
Or, il y a un point particulier dans ce passage de la guémara. Si la fille d'Haman se tenait sur le toit, pourquoi la guémara dit-il qu'elle a "leva les yeux"? Il aurait fallu dire "elle baissa les yeux et vit que c'était son père".
[ en effet, notre texte de la guémara affirme qu'Haman a levé les yeux [pour voir qui avait jeté de la saleté sur lui], et non sa fille. Dans le midrach Léka'h Tov sur ce verset, le récit dit : "Elle leva la tête et réalisa que c'était son père ..." ]

L'explication est la suivante :
Lorsque la fille d'Haman a jeté des ordures sur son père, elle avait l'intention fauteuse de s'en prendre à Mordé'haï. Cependant, elle découvrit bientôt qu'elle avait en fait jeté la saleté sur Haman et qu'elle avait involontairement accompli une action vertueuse. (voir Tossefot Kidouchin 32b)
[en humillant son père Haman, elle réalisa une mitsva ]
Lorsqu'une personne réalise une action et qu'elle n'est pas sûre qu'elle soit méritoire, elle doit vérifier si sa conscience s'est élevée spirituellement grâce à cette action.
Si c'est le cas, alors elle peut être assurée que son action était louable.

Comme la fille d'Haman avait accompli une mitsva en humiliant son père en lui jetant des ordures, cette mitsva a fait que ses yeux, métaphore de sa conscience, ont été "élevés", car après avoir accompli une mitsva, la conscience spirituelle d'une personne s'élève.

C'est donc ce que la guémara veut dire lorsqu'elle affirme qu'elle a levé les yeux, est tombée du toit et est morte.
Cela signifie, que par sa bonne action, elle s'est détachée de la Sitra A'hara (force d'impureté/mal), le conduit par lequel sa force vitale est arrivée, et qu'elle a ainsi précipité sa propre mort.
Sinon, c'est parce qu'elle regrettait d'avoir accompli cette mitsva qu'elle est morte.

[rabbi Lévi Its'hak de Berditchev - Kédouchat Lévi - Pourim n°8 ]

Qu’est-ce qui a été donné au don de la Torah?

Le Shabbath, au 6e jour du mois de Sivan de l’an 2448 depuis la Création, tout le peuple d’Israël, ainsi que les âmes de toutes les générations futures, se rassemblèrent au pied du Mont Sinaï pour recevoir la Torah.
Cependant, la Torah que nous avons reçu au Sinaï était déjà en notre possession depuis de nombreuses générations. Nos ancêtres avaient étudié et accompli toute la Torah avant qu’elle soit donnée (guémara Yoma 28b).
=> Ainsi, aucun principe nouveau ne fut-il dévoilé au Sinaï. Qu’est-ce donc qui nous fut donné lors du "Don de notre Torah"?

-> Le midrach (Chémot Rabba 12,4) explique la signification de cet événement par la parabole suivante : "Un jour, un roi décréta que le peuple de Rome avait l’interdiction de descendre en Syrie et le peuple de Syrie avait l’interdiction de monter à Rome. De la même façon, lorsque D. créa le Monde, Il décréta que ‘Les cieux appartiennent à D. et la terre a été donnée à l’homme’ (Téhilim 115,16). Mais quand Il voulut donner la Torah à Israël, Il abrogea Son premier décret et déclara : Les règnes inférieurs peuvent monter vers les règnes supérieurs et les règnes supérieurs peuvent descendre dans les règnes inférieurs.
Et Moi-même [Hachem] Je commencerai, comme il est écrit : ‘Et D. descendit sur le Mont Sinaï’ (Chémot 19,20) et puis, ‘Et à Moché, Il dit: monte vers D-ieu’ (Yitro 24,19)".

Durant les 26 premières générations de l’histoire, il existait une un décret divin qui séparait la réalité en 2 mondes hermétiques : le Spirituel et le Matériel.
Le Spirituel ne pouvait pas être réellement introduit ici-bas, sa réalité même s’opposant à toute concrétisation, et le Matériel ne pouvait être rendu transcendant et divin, sa nature le maintenant confiné dans la limitation des règnes inférieurs. Dès lors, la Torah, qui est la Sagesse divine, ne pouvait avoir aucun effet réel sur le Monde matériel. Elle ne concernait que l’âme de l’homme et la réalité spirituelle des Cieux. Bien que ses concepts pussent être, et furent effectivement, appliqués à la vie physique, celle-ci ne pouvait pas être élevée.
Au Sinaï, D. révoqua le décret qui séparait la matière et l’esprit en deux domaines distincts. Hachem descendit sur le Mont Sinaï, et apporta la spiritualité des Cieux à la Terre. Il convoqua Moché au sommet de la montagne, donnant à l’être humain la capacité d’élever son être physique et le Monde matériel à un degré d’existence supérieur. La Torah pouvait désormais sanctifier la vie matérielle.
Après l’épisode du Sinaï, quand un homme matériel prend une pièce d’argent matérielle, gagnée par son labeur et ses talents matériels, et la donne à la tsédaka, ou quand il cuit de la farine et de l’eau et en fait une matsa et la consomme la première nuit de Pessa’h, ou quand il donne à un morceau de cuir une forme et des mesures spécifiques, y insère des parchemins sur lesquels sont écrits certains versets et les lie à sa tête et à son bras en tant que téfilin, l’objet limité et matériel avec lequel il a accompli la mitsva est transformé et sort sanctifié.
Ainsi, ce n’est qu’après le Sinaï qu’une mitsva put concrétiser le spirituel et sanctifier le matériel.
[d'après le Collel - feuillet de la communauté Sarcelles 5779]

"Seulement dans la joie et la sérénité d’esprit, car grâce à la joie, l’esprit est purifié. Or, l’essentiel de la téchouva s’accomplit à l’aide d’un esprit pur."
[le Beit Aharon - 131b]

Le rav Elimélé'h Biderman explique :
"La joie possède l’effet immense d’adoucir la rigueur des décrets.
Certains en ont vu l’allusion dans le verset :"zamérou Elokénou zamérou" (entonnez un air pour D., entonnez un air - Téhilim 47,7).
Car grâce au chant et à la musique, il est possible de couper et de déraciner la Midat Hadine (la mesure de rigueur) suggérée par le nom Elokim (en hébreu, ‘entonner un air’, se dit לזמר qui signifie également ‘couper’)."
[le terme "zamérou" peut signifier à la fois un air et à la fois "couper". Grâce à la joie (suscitée et symbolisée par les airs, les chants), il est possible de couper la mesure de rigueur (évoquée) par le nom Elokim.]

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-> Nous récitons de nombreuses prières à notre Roi, notre Père au Ciel, mais les anges interceptent nos prières et ne les laissent pas monter jusqu'au Ciel.
C'est pour cela que nous chantons des mélodies (airs traditionnels), car alors les anges ne voit pas d'importance dans nos paroles, et ils les laissent monter jusqu'au Ciel.
Ils ne savent pas que caché dans ces airs se trouvent nos requêtes pour l'année à venir.
Hachem comprend notre message dissimulé, et nous accorde toutes nos demandes.
[rav Elimélé'h Biderman - au sujet de Yom Kippour]

-> Dans les Ta'hanounim (supplications) du lundi et du jeudi, nous disons : "apotéa'h yad bitéchouva lékabél poch'im vé'hola'im niv'ala nafchénou mérov itsvonénou" (Il [Hachem] ouvre Sa main au repentir pour recevoir les pêcheurs et les fauteurs, notre âme est stupéfaite de tant de tristesse).

Le rabbi Moché de Kobrin explique qu'on s'interroge tous : comment pouvons-nous être tristes alors que Hachem a Sa main si grandement ouverte pour accepter tout fauteur, quoiqu'il ait pu faire?
[comment ne sommes-nous pas davantage fou de joie, de reconnaissance envers Hachem, pour cette si belle opportunité d'expier nos fautes, même les plus graves!]

"Et lorsque vous offrirez une offrande de reconnaissance à Hachem vous l’offrirez afin qu’elle vous soit agréée. Le même jour, elle sera consommée, n’en laissez pas jusqu’au matin, Je suis Hachem" (Emor 22,29-30)

-> Le ‘Hatam Sofer commente ainsi ces versets :
On sait que le but de la émouna est que l’homme prenne conscience que tout ce qui lui arrive est un bienfait divin. Et bien qu’il puisse parfois ne pas le percevoir avec ses sens, il doit savoir que c’est vrai.
De la sorte, il n’attendra pas que sa délivrance se dévoile au grand jour, mais il remerciera Hachem pour tous Ses bienfaits et pour toutes les merveilles qu’Il accomplit dans tous les évènements de son existence, même s’il ne comprend pas pour l’heure le bien qu’ils constituent.
Il veillera à ne pas ressembler au cas rapporté dans la guémara (Nida 31a) de cet homme qui, alors qu’il s’apprêtait à embarquer sur un bateau, s’enfonça une épine dans le pied, si bien qu’il en rata le départ. Resté sur le quai, il se mit à se plaindre. Toutefois, lorsqu’il entendit ensuite que ce bateau avait fait naufrage, il se ravisa et se mit à louer Hachem.

Car le but de la émouna est de ne pas se plaindre même quand règne l’obscurité, mais au contraire de louer Hachem précisément à ce moment en sachant que tout ce qu’Il fait est pour notre bien.
C’est à ce sujet qu’il est écrit : "Et lorsque vous offrirez une offrande de reconnaissance à Hachem, vous l’offrirez afin qu’elle vous soit agréée" = il est, en effet, certain que lorsque la délivrance surviendra, vous offrirez une offrande de reconnaissance et qu’elle vous sera agréée pleinement et avec une joie entière. Cependant, cela n’est pas suffisant pour une personne qui se prétend avoir confiance en D., car celle-ci devra accomplir la suite du verset : "le même jour elle sera consommée", à savoir que, pour le meilleur ou pour le pire, "elle sera consommée", ce qui signifie qu’elle devra être convaincue que c’est un profit pour elle (dans plusieurs endroits de la guémara ‘consommer’ est synonyme de ‘profiter’), et sur le champ, il offrira une offrande de reconnaissance de plein gré.
Le verset précise bien à ce sujet "n’en laissez pas jusqu’au matin", ce qui suggère de ne pas attendre le moment où règnera la lumière et se dévoilera au grand jour le bien dissimulé dans ce qui lui est arrivé, comme cet homme qui s’était enfoncé une épine dans le pied, et qui n’en fut reconnaissant à Hachem qu’après avoir compris que cela l’avait sauvé du naufrage.
Le verset termine en disant "Je suis Hachem" = à savoir, ‘sachez que Je suis le Maître de la miséricorde et qu’il ne sortira rien de mal de tout ce que J’accomplis sur Terre. C’est pour cela qu’il convient que vous Me remerciez pour tout ce qui vous arrive avant même d’en être délivrés!’

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-> b'h, voir également : Avoir confiance en Hachem, c'est Le remercier de la délivrance avant d'être délivré : https://todahm.com/2021/04/25/31400

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-> On trouve une illustration de cela dans la paracha A'haré Mot à porpos des 2 boucs que l'on amenait au Temple pour le service de Yom Kippour.
Au moment où l’on sacrifiait le bouc destiné à Hachem, le 2e bouc était encore vivant (A'haré Mot 16,8), et il n’était ‘envoyé’ à Azazel qu’après l’achèvement de tout le service des Kétorète (les encens) dans le Saint des Saints, de l’aspersion du sang du taureau et du bouc.
Dès lors, il pouvait lui sembler que son sort était bien meilleur que celui de son compagnon qui avait été sacrifié, tandis que lui était demeuré en vie, la preuve est qu’on le faisait même sortir du Temple vivant!
Mais en réalité, que s’avérait-il finalement?
Son compagnon qu’il considérait comme si malchanceux avait mérité d’être sacrifié en l’honneur d’Hachem et son sang d’être introduit dans le Saint des Saints. Alors que lui, était envoyé à Azazel (il était alors jeté dans un précipice et tous ses membres se brisaient avant qu’il finisse par s’écraser au sol).

Cela constitue une parabole de ce qui se déroule dans le monde : tout ce qui semble mauvais à une personne ne l’est pas forcément et tout ce qui lui semble bien ne se révèle pas l’être réellement.
[rav Chimchon Raphaël Hirsch]

-> Le rav Elimélé'h Biderman ajoute à cela :
Celui qui parvient à remercier Hachem alors qu’il se trouve encore dans l’épreuve méritera grâce à cela d’en être délivré.
[...]
Le chemin le plus court pour parvenir à remercier Hachem au temps de l’épreuve consiste à se renforcer dans la conviction que tout est dirigé par le Ciel. Un homme ne peut rien gagner ni perdre si cela n’a pas été décrété En-Haut auparavant. Et même ce qui lui apparaît comme une perte d’argent ou un préjudice physique ou moral n’est en fait que bonté et bénédiction. Dès lors, il est inutile d’attendre
que la lumière arrive, car il peut déjà la percevoir de l’endroit obscur où il se trouve. Et, au contraire, dans l’obscurité, la lumière est perçue bien plus forte.

Nos Sages rapportent (Yérouchalmi Chevi'it 9,1) qu’au terme des 13 ans que Rabbi Chimon Bar Yo’haï et son fils Rabbi Elazar demeurèrent dans leur grotte (par crainte du roi qui cherchait à les tuer), Rabbi Chimon se tint à l’entrée de la grotte et vit soudain un chasseur occupé à chasser des oiseaux. Comme il est fréquent, une partie des oiseaux se firent capturer tandis que d’autres parvinrent à s’échapper et à s’enfuir.
Rabbi Chimon entendit alors que, lorsqu’arrivait le tour d’un oiseau d’être chassé, une voix céleste proclamait ce qu’allait être son sort : si la voix disait ‘libre’, le chasseur ne parvenait pas à le capturer mais si elle disait ‘pris’, il y arrivait. Rabbi Chimon s’écria alors : "Si une Providence particulière s’exerce sur une petit oiseau avec une telle précision et qu’il n’est pris que si le Ciel le désire et l’a ordonné, à plus forte raison s’exerce-t-elle sur nous.
Dès lors, nous pouvons sortir de cette grotte de refuge, car s’il n’a pas été décrété que nous devons être tués, le roi n’y parviendra pas. A quoi cela sert-il d’y rester cachés?"
Forts de cette réflexion, Rabbi Chimon et son fils sortirent de la grotte pour aller apporter la lumière au monde entier.

De cette histoire, nous apprenons ce que sont la émouna et la confiance en Hachem et le fait que personne ne peut lever la main sur quiconque sans décret Divin préalable.
De plus, on peut également voir ici en approfondissant quelque peu notre réflexion que la réussite dans le travail ou dans quelque entreprise que ce soit ne devra jamais être imputée aux capacités de l’homme. D’un autre côté, celui qui subit une perte ne devra pas la mettre sur le compte de son incapacité. Ce chasseur, occupé à sa tâche, n’entendit pas la voix céleste que Rabbi Chimon entendait, et il est très plausible qu’à chaque fois qu’il parvenait à capturer un oiseau, il s’en arrogeait le mérite, en pensant que grâce à sa promptitude, il avait réussi à devancer l’oiseau et à le prendre dans son filet. Et lorsque celui-ci au contraire lui échappait, il devait certainement s’imaginer que cela était dû à sa maladresse et que, s’il s’était tenu ailleurs, il l’aurait probablement capturé.
En bref, dans son ignorance, il était persuadé que tout dépendait de sa force et de son ingéniosité à chasser les oiseaux, pour le meilleur ou pour le pire. Mais en réalité, il n’en n’était rien, car seule la décision du Ciel déterminait quel oiseau serait pris et lequel lui échapperait, et même s’il s’était tenu à ses côtés mille autres chasseurs aussi expérimentés que lui, ils n’auraient pas réussi à prendre le moindre petit oiseau que la voix céleste destinait à la liberté.
[…] Car même si l’effort personnel de l’homme en vue de subvenir à sa subsistance est permis et même conseillé, celui-ci doit cependant demeurer limité et mesuré.

"Il m'est apparu comme une plaie dans la maison" (Métsora 14,35)

=> Le rav 'Haïm Vittal demande pourquoi le verset utilise l’expression "comme une plaie" (kénéga - כְּנֶגַע) et non pas seulement "une plaie".

Il répond en expliquant que si homme voit apparaître une plaie de lèpre sur les murs de sa maison, il doit savoir qu’elle n'est pas la véritable plaie mais seulement "comme la plaie", car la plaie elle-même est la terrible faute de la médisance qui reste gravée dans les tréfonds de son âme.
En effet, cette âme est abimée par les propos dénigrants qui ont été proférés, au point qu'elle en demeure profondément entachée.

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-> Le Or Ha'haïm écrit à propos de notre paracha : "Rien n'éloigne plus l'homme de son Créateur que la médisance".

-> Nos Sages (Tossefta Péa 1,20) enseignent qu'il existe 3 fautes dont le châtiment parvient dans ce monde à celui qui les transgresse, mais qui l'empêchent cependant d'avoir droit au monde futur : il s’agit de l'idolâtrie, du meurtre et de la débauche. Et, malgré tout, la médisance est équivalente aux 3 réunies.